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Date: 20120921

Dossier : IMM-9676-12

Référence : 2012 CF 1105

Ottawa (Ontario), le 21 septembre 2012

En présence de monsieur le juge Shore

 

ENTRE :

 

GENALD SAINTILUS

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

ET

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Cette décision est en réponse à une requête en sursis d’une mesure de renvoi prévu pour lundi, le 24 septembre 2012.

 

[2]               La requête est incidente à la demande d’autorisation et demande de contrôle judiciaire soumis par le demandeur à l’encontre d’une décision refusant d’accorder un sursis au demandeur.

[3]               En plus d’un refus d’asile politique aux États-Unis, l’historique du dossier démontre un refus d’une demande d’asile politique (au Canada) par la Section de la protection des réfugiés [SPR] suite à l’exclusion du demandeur à cause de son appartenance aux Forces Armées d’Haïti [FADH] et à cause de son manque de crédibilité en essayant de changer son récit avec une preuve qui a été jugée non-acceptable dans le passé.

 

[4]               Les instances antérieures n’ont accordé aucune valeur probante aux documents présentés par le demandeur pour nier sa participation aux FADH.

 

[5]               Les informations à l’égard des violations des droits de la personne ont été confirmées formellement par plusieurs organisations internationales reconnues, telles que la Commission des Droits de l’Homme des Nations-Unies, Amnesty International et Human Rights Watch. Chacune de ces organisations confirme qu’entre 1991 et 1994, la période où l’armée a pris le pouvoir en Haïti, l’armée, ou les FADH, était catégorisée comme organisation ayant des fins brutales et limitées, qui a commis des violations systématiques brutales contre la population haïtienne. Ces violations brutales ont inclus des exécutions sommaires, des disparitions forcées, l’élimination des cadavres, l’extorsion et même pillage, l’incendie et la torture, incluant le viol des femmes.

 

[6]               La décision en Ramirez c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 2 CF 306, [1992] ACF no 109 (QL/Lexis) (CA) (au para 16), spécifie les éléments menant à une présomption de complicité :

[...] lorsqu'une organisation vise principalement des fins limitées et brutales, [...], il paraît évident que la simple appartenance à une telle organisation puisse impliquer nécessairement la participation personnelle et consciente à des actes de persécution.

 

[7]               Cette présomption de complicité est vérifiable en considérant certains facteurs clés pour les fins d’analyse selon le témoignage et la preuve de l’individu concerné :

a)      Le demandeur a volontairement décidé de se joindre aux FADH pendant la période catégorisée comme brutale envers la population haïtienne;

b)      Les FADH ont été définis comme une organisation ayant des fins brutales et limités;

c)      Le rang du demandeur soulève le fait qu’il était caporal;

d)     La connaissance des atrocités n’aurait pas pu être ignorée par le demandeur qui aurait fait partie des FADH;

e)      La preuve révèle que le demandeur n’a pas quitté, mais a plutôt, resté à l’intérieur des FADH pendant la période la plus problématique;

f)       Entre 1990 et 1994, le demandeur a été membre des FADH pendant le temps que les FADH ont été considérés comme entité ayant des fins brutales et limitées.

 

[8]               Comme spécifié dans la décision antérieure, daté du 20 juin 2012, de l’agent de l’Examen des risques avant renvoi [ERAR] :

Article 112(3) LIPR

 

Par ailleurs, puisque le demandeur est visé par l’article 1Fa) de la Convention, il est également visé par l’article 112(3)c) LIPR. Selon l’article 113d) de la LIPR, lorsque le demandeur est visé au paragraphe 112(3), la demande ERAR ne peut être évalué que sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 de la LIPR.

 

Je note qu’en date du 2 mars 2012, un rapport 44 est rédigé et que le demandeur est interdit de territoire en vertu de L35(1)a) qui se lit comme suit :

 

« Article 35(1) Atteinte aux droits humains ou internationaux-Emportent interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux les faits suivants :

 

a)                  Commettre, hors du Canada, une des infractions visées aux articles 4 à 7 de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

 

[...] »

 

[...]

 

La SPR a jugé que le demandeur était exclu en vertu de l’article 1Fa) de la Convention, par conséquent, les allégations de risque du demandeur n’ont pas été entendues. Ainsi, l’article 113a) de la LIPR ne peut prendre application et toute la preuve soumise au dossier sera prise en considération dans la présente évaluation de l’article 97 LIPR.

 

Au soutien de sa demande ERAR, le requérant a soumis les documents suivants :

 

-document adressé au Tribunal de Première instance des Gonaïves et daté du 11 octobre 2011

-document de la Police Nationale d’Haïti intitulé « Déclaration de plainte de la dame Génald Saintilus, née Ludovia Joseph » et daté du 18 décembre 2011

-document de la Police Nationale d’Haïti « plainte » et daté du 9 février 2012

-deux certificats médicaux de la Clinique du Bon Berger et datés du 20 novembre 2011

 

Je note que dans les soumissions écrites du demandeur, son représentant a invoqué des considérations d’ordre humanitaires (établissement, liens, etc.) et fait références à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées advenant un retour dans son pays d’origine. Ces considérations humanitaires ne sont pas pertinentes et ne peuvent être évaluées dans le cadre d’une demande ERAR. Par ailleurs, le critère des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées n’est pas celui appliqué dans l’évaluation d’une demande ERAR.

 

(Dossier de réponse du défendeur aux pp 17-18.)

 

[9]               Avec une « nouvelle preuve » à l’appui et avec une volonté de réouvrir le dossier devant la SPR à cause d’un manquement allégué à un principe de justice naturelle, le demandeur n’a, néanmoins, pas renversé les présomptions concernant sa complicité au sein des FADH; donc, le dossier démontre que le demandeur a été jugé et que la SPR a trouvé qu’elle a eu des raisons sérieuses de penser que le demandeur a été complice de crimes contre l’humanité.

[10]           La Cour d’appel fédérale a d’ailleurs spécifié dans la décision Wackowski c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 280, réfère à l’extrait de la décision Serrahina c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 477, avec laquelle la Cour d’appel est en accord :

[12]      La Commission peut rouvrir l'audience relative à une demande d'asile si l'audience relative au désistement s'est déroulée de manière incompatible avec les principes de justice naturelle : Serrahina [...]; voir aussi le paragraphe 55(4) des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228.

 

[11]           Comme spécifié par la partie défenderesse concernant la nouvelle preuve, la Cour est en accord que :

42.       De plus, le demandeur a déposé sa demande ERAR le 31 janvier 2012. Il avait la chance, à ce moment et au furet à mesure que le temps d’écoulait, de déposer sa « preuve nouvelle » au soutien de son ERAR. En effet, la preuve versée au dossier démontre qu’avant octobre 2011, il y avait uniquement un Ministère de l’Intérieur et des collectivités territoriales. Ce n’est que le 18 octobre 2011 que le Ministre de l’Intérieur, des collectivités territoriales et de la Défense a vu le jour (28 Voir pièce « A » à l’affidavit de Dominique Toillon).

 

43.       Le demandeur n’a pas démontré, depuis son arrivée au Canada, et depuis au moins le 18 octobre 2011, qu’il lui était impossible d’obtenir ce document et qu’il avait tenté de contacter une personne quelconque du gouvernement haïtien (par exemple, un fonctionnaire/greffier quelconque du Ministère de l’Intérieur, des Collectivités territoriales et de la Défense afin d’avoir cet élément de preuve.

 

(Dossier de réponse du défendeur, Prétentions écrites du défendeur.)

 

[12]           En conséquence, également, suite à un manque de crédibilité du demandeur et aux facteurs énumérés qui demeurent toujours, le test tripartite conjonctif de la décision Toth c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 86 NR 302 (CAF) n’a pas été rencontré pour aucun des trois critères reconnus. (En plus, si, selon les documents allégués qui émanent « officiellement » d’Haïti, le demandeur n’a pas fait partie des FADH, il ne serait pas en danger à cause d’une participation au FADH qui n’aurait jamais eu lieu.)

 

[13]           Donc, pour toutes ces raisons, la Cour rejette la requête en sursis d’une mesure de renvoi du demandeur.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE le rejet de la requête en sursis d’une mesure de renvoi du demandeur.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-9676-12

 

INTITULÉ :                                      GENALD SAINTILUS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION ET LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

REQUÊTE CONSIDÉRÉE PAR TÉLÉCONFÉRENCE LE 21 SEPTEMBRE 2012 ENTRE OTTAWA, ONTARIO ET MONTRÉAL, QUÉBEC

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                     le 21 septembre 2012

 

 

 

PRÉTENTIONS ORALES ET ÉCRITES PAR :

 

Luc R. Desmarais

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Lynne Lazaroff

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Luc R. Desmarais

Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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