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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20120814

Dossier : T-631-11

Référence : 2012 CF 995

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 14 août 2012

En présence de monsieur le juge de Montigny

 

 

ENTRE :

 

ABED HADAYDOUN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté par Abed Hadaydoun (le demandeur) en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, c C‑29 (la Loi), d’une décision datée du 1er mars 2011 d’Alain Ayache, juge de la citoyenneté de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC). Dans la décision, le juge de la citoyenneté a rejeté la demande de citoyenneté du demandeur.

 

[2]               Pour les motifs exposés ci‑après, j’en suis venu à la conclusion que le présent appel doit être rejeté et que la décision du juge de la citoyenneté doit être maintenue.

 

FAITS

[3]               Le demandeur, qui est né le 26 mars 1954, est un ressortissant de la Jordanie. Il a obtenu la résidence permanente au Canada le 9 mars 2000 et est déménagé au Canada à cette date. Comme son employeur refusait de mettre fin à son contrat de travail, il a dû retourner en Jordanie afin de former un remplaçant. En juillet 2002, le demandeur a terminé son travail avec l’entreprise saoudienne (Al-Wafa Printing Press Co.) et s’est installé à Montréal avec sa famille.

 

[4]               En septembre 2004, le demandeur a négocié un nouveau contrat de travail avec l’imprimerie à titre de consultant. L’entente prévoyait que le demandeur assiste à des réunions en Jordanie pour fournir de l’orientation, mais que l’entreprise couvrait tous les frais de déplacement. Lors de son entrevue avec un agent de la citoyenneté, le 7 avril 2010, le demandeur a affirmé qu’il voyageait pour ce poste tous les trois à quatre mois et que chaque déplacement durait environ cinq jours.

 

[5]               Le 14 octobre 2008, le demandeur a présenté sa demande de citoyenneté à CIC et indiqué qu’il avait passé plus que le nombre nécessaire de jours au Canada au cours des quatre (4) années précédentes. Le demandeur a fait valoir qu’il avait passé 240 jours à l’extérieur du Canada et 1 220 jours au Canada pendant la période prévue, ce qui dépassait le nombre minimal de jours établi à 1 095.

 

[6]               Le demandeur a été convoqué à des rendez‑vous et des entrevues avec des responsables de CIC le 7 avril, le 26 octobre et le 15 novembre 2010. Le dossier certifié du tribunal ne permet pas d’établir ce qui s’est passé avant et pendant la rencontre du 15 novembre, étant donné qu’aucune note n’est incluse. Le demandeur affirme qu’un agent de la citoyenneté a établi un rapport fondé sur l’article 44 et que, par conséquent, une mesure d’interdiction de séjour a été prononcée contre lui lors de la rencontre.

 

[7]               Selon la mesure d’interdiction de séjour, l’agent (qui n’a pas été désigné nommément) était convaincu que le demandeur était visé par l’article 41 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], [traduction] « [...] car, selon la prépondérance des probabilités, il y a des motifs de croire que le demandeur est un résident permanent qui est interdit de territoire pour ne pas s’être conformé à l’obligation de résidence prévue à l’article 28 de la [LIPR] ».

 

[8]               Le 16 novembre 2010, le demandeur a interjeté appel auprès de la Commission d’appel de l’immigration contre la décision de prendre la mesure d’interdiction de séjour.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[9]               Le demandeur a comparu devant le juge de la citoyenneté le 24 février 2011, et une brève décision a été rendue le 1er mars 2011. Le juge a estimé que le demandeur était visé par une mesure de renvoi, ce qui entraînait la perte de son statut de résident permanent. Par conséquent, le juge a conclu que la demande de citoyenneté du demandeur devait être rejetée, étant donné que celui-ci ne satisfaisait pas aux alinéas 5(1)c) et 5(1)f) de la Loi.

 

[10]           Le juge de la citoyenneté a également examiné la question de savoir si une recommandation favorable était justifiée en vertu du paragraphe 5(4) de la Loi, qui vise à remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse. Le juge a estimé que le demandeur n’avait fourni aucun élément justificatif concret et conclu que le cas ne justifiait pas une recommandation favorable. Le juge a également indiqué dans la décision que le demandeur pouvait faire en tout temps une nouvelle demande de citoyenneté.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[11]           Le juge de la citoyenneté a rejeté la demande du demandeur au motif que celui‑ci ne se conformait pas aux alinéas 5(1)c) et 5(1)f) de la Loi. Par conséquent, il convient d’examiner deux questions distinctes en l’espèce :

1)   Le juge de la citoyenneté a‑t‑il commis une erreur en concluant que le demandeur avait perdu son statut de résident permanent?

2)   Le juge de la citoyenneté a‑t‑il commis une erreur en concluant que le demandeur était sous le coup d’une mesure de renvoi?

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[12]           Les dispositions pertinentes de la Loi sur la citoyenneté prévoient :

2.(2) Pour l’application de la présente loi :

 

[...]

 

c) une mesure de renvoi reste en vigueur jusqu’à, selon le cas :

 

 

(i) son annulation après épuisement des voies de recours devant la section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, la Cour d’appel fédérale et la Cour suprême du Canada,

 

 

 

 

(ii) son exécution.

2.(2) For the purposes of this Act,

 

...

 

(c) a person against whom a removal order has been made remains under that order

 

(i) unless all rights of review by or appeal to the Immigration Appeal Division of the Immigration and Refugee Board, the Federal Court of Appeal and the Supreme Court of Canada have been exhausted with respect to the order and the final result of those reviews or appeals is that the order has no force or effect, or

 

(ii) until the order has been executed.

 

Attribution de la citoyenneté

 

5.(1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

 

a) en fait la demande;

 

 

b) est âgée d’au moins dix-huit ans;

 

c) est un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

 

 

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

 

 

 

 

 

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

 

 

 

 

 

d) a une connaissance suffisante de l’une des langues officielles du Canada;

 

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

 

f) n’est pas sous le coup d’une mesure de renvoi et n’est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l’article 20.

 

 

Grant of citizenship

 

5.(1) The Minister shall grant citizenship to any person who

 

 

(a) makes application for citizenship;

 

(b) is eighteen years of age or over;

 

(c) is a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his or her application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

 

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

 

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

 

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

 

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and

 

(f) is not under a removal order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.

 

 

Cas particuliers

 

5.(4) Afin de remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse ou de récompenser des services exceptionnels rendus au Canada, le gouverneur en conseil a le pouvoir discrétionnaire, malgré les autres dispositions de la présente loi, d’ordonner au ministre d’attribuer la citoyenneté à toute personne qu’il désigne; le ministre

 

procède alors sans délai à l’attribution.

Special cases

 

5.(4) In order to alleviate cases of special and unusual hardship or to reward services of an exceptional value to Canada, and notwithstanding any other provision of this Act, the Governor in Council may, in his discretion, direct the Minister to grant citizenship to any person and, where such a direction is made, the Minister shall forthwith grant citizenship to the person named in the direction.

 

Examen par un juge de la citoyenneté

 

14.(1) Dans les soixante jours de sa saisine, le juge de la citoyenneté statue sur la conformité — avec les dispositions applicables en l’espèce de la présente loi et de ses règlements — des demandes déposées en vue de :

 

a) l’attribution de la citoyenneté, au titre des paragraphes 5(1) ou (5);

 

b) [Abrogé, 2008, ch. 14, art. 10]

 

c) la répudiation de la citoyenneté, au titre du paragraphe 9(1);

 

d) la réintégration dans la citoyenneté, au titre du paragraphe 11(1).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Interruption de la procédure

 

(1.1) Le juge de la citoyenneté ne peut toutefois statuer sur la demande émanant d’un résident permanent qui fait l’objet d’une enquête dans le cadre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés tant qu’il n’a pas été décidé en dernier ressort si une mesure de renvoi devrait être prise contre lui.

Consideration by citizenship judge

 

14.(1) An application for

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) a grant of citizenship under subsection 5(1) or (5),

 

 

(b) [Repealed, 2008, c. 14, s. 10]

 

(c) a renunciation of citizenship under subsection 9(1), or

 

 

(d) a resumption of citizenship under subsection 11(1)

 

shall be considered by a citizenship judge who shall, within sixty days of the day the application was referred to the judge, determine whether or not the person who made the application meets the requirements of this Act and the regulations with respect to the application.

 

Interruption of proceedings

 

(1.1) Where an applicant is a permanent resident who is the subject of an admissibility hearing under the Immigration and Refugee Protection Act, the citizenship judge may not make a determination under subsection (1) until there has been a final determination whether, for the purposes of that Act, a removal order shall be made against that applicant.

 

[13]           S’appliquent également les dispositions suivantes de la LIPR :

Obligation de résidence

 

28.(1) L’obligation de résidence est applicable à chaque période quinquennale.

 

 

Application

 

(2) Les dispositions suivantes régissent l’obligation de résidence :

 

a) le résident permanent se conforme à l’obligation dès lors que, pour au moins 730 jours pendant une période quinquennale, selon le cas :

 

 

(i) il est effectivement présent au Canada,

 

(ii) il accompagne, hors du Canada, un citoyen canadien qui est son époux ou conjoint de fait ou, dans le cas d’un enfant, l’un de ses parents,

 

(iii) il travaille, hors du Canada, à temps plein pour une entreprise canadienne ou pour

 

l’administration publique fédérale ou provinciale,

 

(iv) il accompagne, hors du Canada, un résident permanent qui est son époux ou conjoint de fait ou, dans le cas d’un enfant, l’un de ses parents, et qui travaille à temps plein pour une entreprise canadienne ou pour l’administration publique fédérale ou provinciale,

 

 

(v) il se conforme au mode d’exécution prévu par règlement;

 

b) il suffit au résident permanent de prouver, lors du contrôle, qu’il se conformera à l’obligation pour la période quinquennale suivant l’acquisition de son statut, s’il est résident permanent depuis moins de cinq ans, et, dans le cas contraire, qu’il s’y est conformé pour la période quinquennale précédant le contrôle;

 

 

 

 

 

 

 

 

c) le constat par l’agent que des circonstances d’ordre humanitaire relatives au résident permanent — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — justifient le maintien du statut rend inopposable l’inobservation de l’obligation précédant le contrôle.

Residency obligation

 

28.(1) A permanent resident must comply with a residency obligation with respect to every five-year period.

 

Application

 

(2) The following provisions govern the residency obligation under subsection (1):

 

(a) a permanent resident complies with the residency obligation with respect to a five-year period if, on each of a total of at least 730 days in that five-year period, they are

 

(i) physically present in Canada,

 

(ii) outside Canada accompanying a Canadian citizen who is their spouse or common-law partner or, in the case of a child, their parent,

 

(iii) outside Canada employed on a full-time basis by a Canadian business or in the

 

federal public administration or the public service of a province,

 

(iv) outside Canada accompanying a permanent resident who is their spouse or common-law partner or, in the case of a child, their parent and who is employed on a full-time basis by a Canadian business or in the federal public administration or the public service of a province, or

 

(v) referred to in regulations providing for other means of compliance;

 

(b) it is sufficient for a permanent resident to demonstrate at examination

 

(i) if they have been a permanent resident for less than five years, that they will be able to meet the residency obligation in respect of the five-year period immediately after they became a permanent resident;

 

(ii) if they have been a permanent resident for five years or more, that they have met the residency obligation in respect of the five-year period immediately before the examination; and

 

(c) a determination by an officer that humanitarian and compassionate considerations relating to a permanent resident, taking into account the best interests of a child directly affected by the determination, justify the retention of permanent resident status overcomes any breach of the residency obligation prior to the determination.

 

Manquement à la loi

 

41. S’agissant de l’étranger, emportent interdiction de territoire pour manquement à la présente loi tout fait — acte ou omission — commis directement ou indirectement en contravention avec la présente loi et, s’agissant du résident permanent, le manquement à l’obligation de résidence et aux conditions imposées.

Non-compliance with Act

 

41. A person is inadmissible for failing to comply with this Act

 

(a) in the case of a foreign national, through an act or omission which contravenes, directly or indirectly, a provision of this Act; and

 

(b) in the case of a permanent resident, through failing to comply with subsection 27(2) or section 28.

 

Rapport d’interdiction de territoire

 

44.(1) S’il estime que le résident permanent ou l’étranger qui se trouve au Canada est interdit de territoire, l’agent peut établir un rapport circonstancié, qu’il transmet au ministre.

 

 

Suivi

 

(2) S’il estime le rapport bien fondé, le ministre peut déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête, sauf s’il s’agit d’un résident permanent interdit de territoire pour le seul motif qu’il n’a pas respecté l’obligation de résidence ou, dans les circonstances visées par les règlements, d’un étranger; il peut alors prendre une mesure de renvoi.

 

 

 

 

Conditions

 

(3) L’agent ou la Section de l’immigration peut imposer les conditions qu’il estime nécessaires, notamment la remise d’une garantie d’exécution, au résident permanent ou à l’étranger qui fait l’objet d’un rapport ou d’une enquête ou, étant au Canada, d’une mesure de renvoi.

Preparation of report

 

 

44.(1) An officer who is of the opinion that a permanent resident or a foreign national who is in Canada is inadmissible may prepare a report setting out the relevant facts, which report shall be transmitted to the Minister.

 

Referral or removal order

 

(2) If the Minister is of the opinion that the report is well-founded, the Minister may refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing, except in the case of a permanent resident who is inadmissible solely on the grounds that they have failed to comply with the residency obligation under section 28 and except, in the circumstances prescribed by the regulations, in the case of a foreign national. In those cases, the Minister may make a removal order.

 

Conditions

 

(3) An officer or the Immigration Division may impose any conditions, including the payment of a deposit or the posting of a guarantee for compliance with the conditions, that the officer or the Division considers necessary on a permanent resident or a foreign national who is the subject of a report, an admissibility hearing or, being in Canada, a removal order.

 

Résident permanent

 

46.(1) Emportent perte du statut de résident permanent les faits suivants :

 

a) l’obtention de la citoyenneté canadienne;

 

b) la confirmation en dernier ressort du constat, hors du Canada, de manquement à l’obligation de résidence;

 

 

c) la prise d’effet de la mesure de renvoi;

 

 

 

d) l’annulation en dernier ressort de la décision ayant accueilli la demande d’asile ou celle d’accorder la demande de protection.

 

 

 

 

Effet de la perte de la citoyenneté

 

(2) Devient résident permanent quiconque perd la citoyenneté au titre de l’alinéa 10(1)a) de la Loi sur la citoyenneté, sauf s’il est visé au paragraphe 10(2) de cette loi.

Permanent resident

 

46.(1) A person loses permanent resident status

 

 

(a) when they become a Canadian citizen;

 

(b) on a final determination of a decision made outside of Canada that they have failed to comply with the residency obligation under section 28;

 

(c) when a removal order made against them comes into force; or

 

 

(d) on a final determination under section 109 to vacate a decision to allow their claim for refugee protection or a final determination under subsection 114(3) to vacate a decision to allow their application for protection.

 

Permanent resident

 

 

(2) A person who ceases to be a citizen under paragraph 10(1)(a) of the Citizenship Act, other than in the circumstances set out in subsection 10(2) of that Act, becomes a permanent resident.

 

Prise d’effet

 

49.(1) La mesure de renvoi non susceptible d’appel prend effet immédiatement; celle susceptible d’appel prend effet à l’expiration du délai d’appel, s’il n’est pas formé, ou quand est rendue la décision qui a pour résultat le maintien définitif de la mesure.

 

 

 

 

 

 

 

 

Cas du demandeur d’asile

 

(2) Toutefois, celle visant le

demandeur d’asile est conditionnelle et prend effet :

 

 

 

 

a) sur constat d’irrecevabilité au seul titre de l’alinéa 101(1)e);

 

 

b) sept jours après le constat, dans les autres cas d’irrecevabilité prévus au paragraphe 101(1);

 

c) quinze jours après la notification du rejet de sa demande par la Section de la protection des réfugiés ou, en cas d’appel, par la Section d’appel des réfugiés;

 

d) quinze jours après la notification de la décision prononçant le désistement ou le retrait de sa demande;

 

e) quinze jours après le classement de l’affaire au titre de l’avis visé aux alinéas 104(1)c) ou d).

In force

 

49.(1) A removal order comes into force on the latest of the following dates:

 

(a) the day the removal order is made, if there is no right to appeal;

 

(b) the day the appeal period expires, if there is a right to appeal and no appeal is made; and

 

(c) the day of the final determination of the appeal, if an appeal is made.

 

In force — claimants

 

(2) Despite subsection (1), a removal order made with respect to a refugee protection claimant is conditional and comes into force on the latest of the following dates:

 

(a) the day the claim is determined to be ineligible only under paragraph 101(1)(e);

 

(b) in a case other than that set out in paragraph (a), seven days after the claim is determined to be ineligible;

 

(c) 15 days after notification that the claim is rejected by the Refugee Protection Division, if no appeal is made, or by the Refugee Appeal Division, if an appeal is made;

 

(d) 15 days after notification that the claim is declared withdrawn or abandoned; and

 

 

(e) 15 days after proceedings are terminated as a result of notice under paragraph 104(1)(c) or (d).

 

Droit d’appel : mesure de renvoi

 

 

63.(2) Le titulaire d’un visa de résident permanent peut interjeter appel de la mesure de renvoi prise au contrôle ou à l’enquête.

Right to appeal — visa and removal order

 

 

63.(2) A foreign national who holds a permanent resident visa may appeal to the Immigration Appeal Division against a decision at an examination or admissibility hearing to make a removal order against them.

 

NORME DE CONTRÔLE

[14]           L’appel en l’espèce se rapporte essentiellement à la décision prise par un juge de la citoyenneté au titre de l’article 5 de la Loi. La Cour fédérale a produit une jurisprudence abondante sur ce genre de décisions, dont la majorité se rapporte à des interprétations de l’obligation de résidence. Dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Tackla, 2009 CF 1120, aux paragraphes 16 à 39, le juge Mainville a mené une analyse très détaillée de cette jurisprudence et de la norme de contrôle à appliquer dans ces types d’appels, et a conclu au paragraphe 39 :

Dans ce contexte, je suis d’avis que la norme de contrôle de la décision raisonnable doit s’appliquer avec flexibilité et s’adapter au contexte particulier en cause. La cour doit ainsi faire preuve de déférence, mais d’une déférence restreinte, lorsqu’elle est saisie d’un appel de la décision d’un juge de la citoyenneté en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté concernant la détermination du respect de l’obligation de résidence. Les questions de compétence, d’équité procédurale et de justice naturelle que posent de tels appels demeurent néanmoins soumises à la norme de la décision correcte, selon les principes exposés dans Dunsmuir. Il s’agit là d’une approche qui concorde à la fois avec la volonté expresse du législateur d’assujettir ces décisions à un droit d’appel et avec les enseignements de la Cour suprême du Canada concernant le devoir de réserve des tribunaux judiciaires siégeant en appel des décisions des tribunaux administratifs.

 

 

[15]           Étant donné que les deux questions à trancher en l’espèce concernent essentiellement la bonne interprétation à donner à certaines dispositions de la Loi sur la citoyenneté et de la LIPR et la façon dont elles s’appliquent aux faits qui ont été présentés au juge de la citoyenneté, la norme de contrôle à appliquer semblerait être celle de la décision raisonnable. Je reconnais toutefois que dans Obi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 573 [Obi], la Cour a conclu que l’interprétation correcte du paragraphe 14(1.1) de la Loi sur la citoyenneté concerne la compétence ou les pouvoirs du juge de la citoyenneté d’examiner la demande de citoyenneté, et appelle donc l’application de la norme de la décision correcte. Bien que j’estime que le cas en l’espèce est différent d’Obi et n’a pas à voir avec l’application du paragraphe 14(1.1), il existe une autre raison, plus impérieuse, de ne pas appliquer la norme de la décision correcte.

 

[16]           Dans Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 RCS 654, le juge Rothstein, au nom de la majorité, a réexaminé la notion de « questions touchant véritablement à la compétence » et reconnu que cette catégorie avait semé la confusion. Il a explicitement restreint son application à des circonstances exceptionnelles (aux paragraphes 33 à 39). Le juge Rothstein a invité les cours de contrôle à adopter une approche étroite à l’égard de la catégorie des questions touchant véritablement à la compétence, particulièrement lorsqu’un tribunal interprète sa loi constitutive.

 

[17]           Il est allé jusqu’à entrevoir la possibilité que la Cour suprême abandonne dans une prochaine affaire la catégorie des « questions touchant véritablement à la compétence » appelant la norme de la décision correcte (au paragraphe 34). Bien que cette catégorie existe toujours, il faut présumer que la norme de la décision raisonnable s’appliquera et que la partie qui veut invoquer cette catégorie devra « établir les raisons pour lesquelles le contrôle visant l’interprétation de sa loi constitutive par le tribunal administratif ne devrait pas s’effectuer au regard de la norme déférente de la décision raisonnable » (au paragraphe 39).

 

[18]           Compte tenu de cette dernière affirmation de la Cour suprême du Canada, j’examinerai la décision du juge de la citoyenneté en fonction de la norme de la décision raisonnable.

 

1) Le juge de la citoyenneté a‑t‑il commis une erreur en concluant que le demandeur avait perdu son statut de résident permanent?

[19]           Le juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que le demandeur avait perdu son statut de résident permanent et ne pouvait donc obtenir la citoyenneté conformément à l’alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté. Le demandeur pas plus que le défendeur n’ont abordé expressément la question dans leurs observations, mais il est clair après une lecture attentive de l’alinéa 46(1)c) et du paragraphe 49(1) de la LIPR que le demandeur n’avait pas encore perdu son statut de résident permanent.

 

[20]           Le seul alinéa qui s’applique au demandeur au paragraphe 46(1) est l’alinéa c), selon lequel « la prise d’effet de la mesure de renvoi » emporte la perte du statut de résident permanent. Suivant le paragraphe 49(1), la mesure de renvoi ne prend effet que lorsqu’est rendue la décision qui a pour résultat le maintien définitif de la mesure. Étant donné que l’appel interjeté par le demandeur n’avait pas encore été tranché au moment où le juge de la citoyenneté a rendu sa décision, le demandeur avait toujours son statut de résident permanent et ne pouvait se voir refuser la citoyenneté au motif qu’il avait perdu ce statut.

2) Le juge de la citoyenneté a‑t‑il commis une erreur en concluant que le demandeur était sous le coup d’une mesure de renvoi?

[21]           L’avocat du demandeur a prétendu qu’au moment de l’audience devant le juge de la citoyenneté, il n’y avait pas de mesure de renvoi valide, et que la conclusion du juge de la citoyenneté voulant qu’il y en ait une, est erronée. Selon l’avocat, il est sursis à la mesure de renvoi tant que toutes les possibilités de révision et d’appel n’ont pas été épuisées et qu’il n’y a pas eu de décision finale. Je ne peux pas souscrire à cet argument.

 

[22]           L’interprétation avancée par l’avocat du demandeur est contredite de façon non équivoque par l’alinéa 2(2)c) de la Loi sur la citoyenneté.

 

[23]           Par conséquent, compte tenu de cette disposition, le demandeur restait « sous le coup d’une mesure de renvoi » (libellé de l’alinéa 5(1)f) de la Loi) jusqu’à ce qu’une décision finale prononçant l’annulation de cette mesure soit rendue. Dès l’instant où une mesure de renvoi est prononcée et durant la période au cours de laquelle la mesure de renvoi fait l’objet d’un contrôle judiciaire ou d’un appel, l’intéressé ne peut obtenir la citoyenneté suivant l’alinéa 5(1)f) de la Loi.

 

[24]           Qui plus est, le juge de la citoyenneté n’avait pas le pouvoir de reporter l’audience jusqu’à l’aboutissement du processus d’appel de la mesure de renvoi. La procédure et la chronologie sont énoncées au paragraphe 14(1) de la Loi, lequel prévoit que le juge de la citoyenneté doit rendre une décision quant aux demandes déposées en vue de l’obtention de la citoyenneté « [d]ans les soixante jours de sa saisine ». Il n’y a pas de possibilité de report ou d’ajournement ou de prorogation du délai de traitement d’une demande de citoyenneté une fois que le juge en a été saisi.

 

[25]           L’avocat du demandeur a tenté de faire valoir que la situation du demandeur est exactement la même que celle de M. Obi et que son cas, par conséquent, devrait être tranché de la même manière. Je souscris à l’opinion de l’avocate du défendeur selon laquelle les deux cas sont très différents et ne sauraient être comparés.

 

[26]           Dans Obi, une mesure de renvoi avait été prise contre le demandeur en raison de son interdiction de territoire, parce qu’il n’avait pas déclaré une déclaration de culpabilité prononcée antérieurement aux États‑Unis. Il a fait appel de la mesure devant la Section d’appel de l’immigration (la SAI), qui a sursis à la mesure de renvoi pour une période de quatre ans, période à l’issue de laquelle elle devait réexaminer le sursis. Avant l’expiration du sursis, la demande du demandeur a été examinée par un juge de la citoyenneté, qui lui a refusé la citoyenneté en application des alinéas 5(1)c) et 5(1)f) de la Loi. Se fondant sur le paragraphe 14(1.1) de la Loi, la Cour a fait droit à l’appel.

 

[27]           Suivant l’article 44 de la LIPR, l’agent qui estime qu’un résident permanent est interdit de territoire établit un rapport qu’il transmet au ministre. S’il estime le rapport bien fondé, le ministre peut déférer l’affaire à la SAI pour enquête. Toutefois, lorsqu’un résident permanent est interdit de territoire pour le seul motif qu’il n’a pas respecté l’obligation de résidence prévue à l’article 28 de la LIPR, une mesure de renvoi est prononcée sans qu’une enquête soit nécessaire.

 

[28]           C’est précisément ce qui est arrivé dans le cas en l’espèce. Le demandeur n’était pas en attente d’une enquête et n’avait pas droit à une enquête. Par conséquent, l’exception prévue au paragraphe 14(1.1) de la Loi sur la citoyenneté ne s’appliquait pas à la mesure de renvoi prononcée contre le demandeur étant donné que celui-ci ne faisait pas l’objet d’une enquête. En fait, la mesure de renvoi prononcée contre le demandeur était une « mesure d’interdiction de séjour », au titre de l’alinéa 229(1)k) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227.

 

[29]           Par conséquent, j’estime que le présent appel doit être rejeté. En dépit du fait que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en refusant la citoyenneté sur la foi de l’alinéa 5(1)c), il devait rejeter la demande dans les 60 jours de la date à laquelle il en avait été saisi, conformément à l’alinéa 5(1)f) et au paragraphe 14(1) de la Loi sur la citoyenneté.

 

[30]           Bien que ce résultat puisse sembler sévère, il est loisible au demandeur de présenter une nouvelle demande s’il est fait droit à l’appel qu’il a interjeté contre la mesure de renvoi.


JUGEMENT

 

La Cour statuE que l’appel est rejeté, sans frais.

 

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Line Niquet


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-631-11

 

INTITULÉ :                                      ABED HADAYDOUN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 6 mars 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            Le juge de Montigny

 

DATE DES MOTIFS ET

DU JUGEMENT :                            Le 14 août 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Harry Blank

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Catherine Brisebois

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Harry Blank

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

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