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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20120530


Dossier : T-1304-10

Référence : 2012 CF 666

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 mai 2012

En présence de monsieur le juge Near

 

 

ENTRE :

 

BBM CANADA

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

RESEARCH IN MOTION LIMITED

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La demanderesse, BBM Canada, conteste l’emploi de la marque de commerce « BBM » par Research in Motion Limited (RIM) dans la promotion de son service BlackBerry Messenger. Il est allégué que les activités de RIM créent de la confusion et, en conséquence, donnent lieu à une commercialisation trompeuse, à la contrefaçon des marques de commerce déposées de BBM Canada et à une diminution de la valeur de l’achalandage attaché à ces marques, ce qui est contraire à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi).

 

[2]               En qualité de défenderesse, RIM prétend que BBM Canada n’a pas prouvé ces allégations et qu’elle tente de revendiquer un monopole de marques de commerce concernant l’acronyme « BBM » au‑delà de la gamme limitée des services qu’elle offre dans le domaine de la mesure de l’écoute. BBM Canada et RIM ne sont pas des sociétés concurrentes et les services qu’elles offrent ne se chevauchent pas.

 

[3]               Ayant examiné les prétentions des parties, je rejette la demande pour les motifs qui suivent.

 

I.          Les faits à l’origine du litige

 

A.        BBM Canada et ses marques de commerce déposées

 

[4]               Lorsqu’elle a été créée en 1944, BBM Canada était une coopérative de radiodiffuseurs, d’annonceurs et d’agences de publicité appelée Bureau of Broadcast Measurement. La coopérative a ensuite été constituée en société sous le nom de Sondages BBM, puis a changé son nom pour BBM Canada en 2002.

 

[5]               BBM Canada, qui est une société sans but lucratif dont les membres ayant le droit de vote proviennent des industries de la radiodiffusion et de la publicité, fournit des données impartiales sur l’écoute de la télévision et de la radio et des analyses de ces données. Les données sont utilisées par les radiodiffuseurs et annonceurs canadiens, ainsi que par Statistique Canada, les sociétés de gestion des droits d’auteur et le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (le CRTC).

 

[6]               Les données sur l’écoute sont recueillies auprès de membres du public qui sont recrutés pour utiliser un audimètre électronique portable ou un cahier de BBM Canada dans lequel ils notent à la main les émissions qu’ils regardent ou écoutent à la télévision et à la radio. Pour éviter que les données soient biaisées, les radiodiffuseurs et les annonceurs membres de BBM Canada doivent se conformer à certains règlements et règles. Ils doivent notamment s’engager à ne pas mentionner le nom de BBM en ondes afin de rappeler aux personnes concernées de noter une expérience télévisuelle ou radiophonique particulière. Une fois recueillies par BBM Canada, les données sont transmises aux membres par moyen électronique.

 

[7]               Depuis sa création, BBM Canada a utilisé différents logos contenant les lettres « BBM ». Depuis 1975, elle utilise la marque figurative BBM.

 

[8]               Neuf marques de commerce déposées sont actuellement employées en liaison avec les services de collecte et de diffusion des données de BBM Canada. Il s’agit des marques suivantes :

·         BBM (LMC701839 enregistrée le 27 novembre 2007);

·         BBM NEW MEDIA (LMC489438 enregistrée le 5 février 1998);

·         BBM ANALYTICS (LMC691169 enregistrée le 29 juin 2007);

·         BBM Électronique (LMC776652 enregistrée le 9 septembre 2010);

·         BBM Electronic (LMC776651 enregistrée le 9 septembre 2010);

·         BBM DESSIN (LMC478442 enregistrée le 14 juillet 1997);

·         BBM CANADA DESSIN (LMC615499 enregistrée le 22 juillet 2004);

·         BBM & DESSIN (LMC669799 enregistrée le 14 août 2006);

·         SONDAGES BBM & DESSIN (LMC658753 enregistrée le 10 février 2006).

 

[9]               La plupart de ces marques sont liées à des services relatifs à la « [m]esure impartiale de la diffusion, de la couverture et de l’auditoire de tous les types de supports publicitaires » et à des « services d’étude de marché ». La marque BBM NEW MEDIA est employée en liaison avec les services suivants : « Mener des recherches en gestion et des études de marché », et la marque BBM ANALYTICS fait référence aux « [v]entes et distribution de logiciels de mesure d’audience, études des marché et des médias et enquêtes d’opinions ».

 

[10]           BBM Canada est également propriétaire du nom de domaine Internet « bbm.ca » pour son site Web et son adresse électronique.

 

B.        La promotion de BlackBerry Messenger par RIM

 

[11]           RIM conçoit, fabrique et commercialise des solutions sans fil pour le marché des communications mobiles mondial. La société est bien connue pour l’appareil sans fil portatif BlackBerry et pour les logiciels, accessoires et services connexes. 

 

[12]           Depuis le 14 juillet 2005, RIM offre l’usage exclusif du service de messagerie instantanée BlackBerry Messenger aux utilisateurs d’appareils de marque BlackBerry. Ce service permet aux utilisateurs d’envoyer et de recevoir des messages textes et de partager des photos, des vidéos et de la musique.

 

[13]           Selon le directeur principal, Marques et Communications commerciales, Robert Glen, RIM a appris, grâce à des études de marché, que bon nombre de ses clients désignaient le service BlackBerry Messenger par l’acronyme « BBM ». RIM a elle‑même commencé à utiliser l’acronyme dans sa publicité au Canada vers juin 2010.

 

[14]           Une série d’annonces imprimées, appelée « Bloor/Yonge Station Domination », ont été placées dans le métro de Toronto. Du 12 juillet 2010 au 10 avril 2011, RIM a annoncé le « BBM » à la télévision partout au Canada.

 

[15]           Il y a eu aussi, dans le cadre de cette campagne de publicité intensive, un concours en ligne intitulé « How Do You BBM? TM », qui s’est déroulé de juin au 13 juillet. Un concours promotionnel – « Tell your BBM TM story and WIN! » – a aussi été organisé en collaboration avec Future Shop.

 

[16]           RIM a lancé « BBM Music », un service d’abonnement permettant aux utilisateurs de BlackBerry Messenger de stocker, d’écouter et de partager de la musique. Les applications de tiers disponibles sur BlackBerry App World peuvent être incorporées à BlackBerry Messenger, y compris ScoreMobile, qui permet aux utilisateurs de partager des jeux, de parler avec des amis et de regarder des séquences d’événements sportifs.

 

[17]           Avant le 1er septembre 2010, RIM a commencé à offrir un service de baladodiffusion pour le BlackBerry, qui donne accès à des émissions de radio et de télévision de divers fournisseurs de contenu comme CTV, CBC, TVO et Corus.

 

[18]           BBM Canada insiste sur le fait que, par suite de la campagne de publicité concernant BlackBerry Messenger ou « BBM » et les services connexes, elle a été prise à tort pour BlackBerry. Les employés chargés de recruter des membres du public à qui remettre des cahiers d’écoute se sont fait demander s’ils représentaient BlackBerry. BBM Analytics Inc. a reçu au moins une demande de soutien pour le service de messagerie instantanée de RIM. Lorsque des employés ont dit à une serveuse d’un restaurant situé près de leurs bureaux qu’ils travaillaient pour BBM, elle leur a montré son BlackBerry. Des animateurs de radio ont aussi commencé à employer le terme « BBM » en ondes pour décrire les communications utilisant le service de messagerie instantanée de RIM.

 

C.        La demande d’enregistrement de la marque de commerce « BBM » déposée par RIM

 

[19]           RIM a déposé une demande dans le but de faire enregistrer la marque de commerce « BBM » dès le 15 octobre 2009. Cette marque devait notamment être employée en liaison avec les services suivants :

[traduction] (1) Services de publicité; services de magasin de détail en ligne; fourniture de renseignements commerciaux; services de marketing; (2) Services facilitant les paiements en ligne; (3) Services de réparation et d’installation; (4) Télécommunications; fourniture d’accès à Internet; fourniture d’accès à des bases de données électroniques, fourniture d’accès à des services de navigation GPS (système mondial de localisation); fourniture de services de connectivité et accès à des réseaux de communications électroniques pour la transmission ou la réception de contenu audio, vidéo ou multimédia; fourniture de services de connectivité et accès à des réseaux de communications électroniques pour la transmission ou la réception de logiciels et d’applications informatiques; services de diffusion Web; service de courriel; livraison de messages par transmission électronique; services de transmission de messages de données sans fil, en particulier services permettant à un utilisateur d’envoyer et de recevoir des messages par un réseau de données sans fil; services de recherche de personne unidirectionnels et bidirectionnels; transmission et réception de services de communication vocale; transmission électronique de logiciels et d’applications informatiques par Internet et autres réseaux de communications informatiques et électroniques et dispositifs sans fil; radiodiffusion; radiodiffusion ou transmission d’émissions radiophoniques; radiodiffusion ou transmission de contenu audio et vidéo numérique en flux et téléchargeable via un ordinateur et d’autres réseaux de communications; consultation en matière de télécommunications, nommément fourniture de renseignements à des tiers pour les aider à développer et à intégrer la connectivité sans fil unidirectionnelle ou bidirectionnelle à des données, y compris des données commerciales et personnelles et des communications vocales […]

 

[20]           Soulevant une objection préliminaire, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (l’OPIC) a avisé RIM le 24 février 2010 que la marque ne semblait pas être enregistrable car la demande [traduction] « est considérée comme créant de la confusion avec les marques de commerce déposées portant les nos LMC615449, LMC658753, LMC701839, LMC669799, LMC691169 ». Comme il a été mentionné précédemment, ces marques sont enregistrées au nom de BBM Canada.

 

[21]           Rappelant, dans une lettre datée du 22 juin 2010 que, selon l’OPIC, la marque de commerce semblait créer de la confusion, BBM Canada a demandé que RIM cesse d’employer la marque de commerce « BBM ». RIM ayant refusé de le faire, BBM Canada a déposé la présente demande auprès de la Cour.

 

II.        Les questions en litige

 

[22]           La Cour doit examiner les questions suivantes :

 

a)         L’emploi de « BBM » par RIM est-il susceptible de créer de la confusion avec les marques de commerce déposées de la demanderesse?

 

b)         RIM a-t-elle fait passer ses services pour des services de la demanderesse?

 

c)         Les activités de RIM sont-elles susceptibles de diminuer la valeur de l’achalandage attaché à la marque de commerce de la demanderesse?

 

d)         Si la réponse à l’une des questions a) à c) est affirmative, la demanderesse a‑t‑elle droit à des dommages‑intérêts compensatoires et punitifs ou à une réparation additionnelle?

 

III.       Analyse

 

A.        La confusion

 

[23]           Décrivant l’importance de la notion de confusion dans le droit des marques de commerce dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, [2011] 2 RCS 387, le juge Rothstein a écrit récemment :

[1]        Au Canada, les marques de commerce sont un outil très utile aux consommateurs et aux entreprises. Ainsi, toute entreprise appose une marque sur les marchandises ou les services qu’elle vend afin d’en indiquer la provenance, ce qui permet aux consommateurs d’en connaître l’origine. Les marques de commerce font donc en quelque sorte « office de raccourci qui dirige les consommateurs vers leur objectif », comme l’a dit le juge Binnie dans Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, [2006] 1 R.C.S. 772, par. 21. Dans les cas où les marques de commerce de différentes entreprises sont similaires, le consommateur peut ne pas savoir quelle société offre les marchandises ou les services qui l’intéressent. La confusion entre les marques de commerce nuit à l’objectif qui consiste à fournir aux consommateurs une indication fiable de l’origine des marchandises ou des services. […]

 

[24]           Selon le paragraphe 6(2) de la Loi, il y a confusion « lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ». Aux termes du paragraphe 20(1), il y a contrefaçon lorsqu’« une personne non admise à l’employer selon la présente loi […] vend, distribue ou annonce des marchandises ou services en liaison avec une marque de commerce […] créant de la confusion ».

 

[25]           La demanderesse affirme qu’il est susceptible d’y avoir de la confusion entre ses marques de commerce déposées et l’emploi, par RIM, de « BBM » dans le cadre de la promotion de BlackBerry Messenger, car les services connexes se chevauchent dans la publicité et le marketing, en particulier lorsque RIM fournit des services comme la baladodiffusion d’organismes de radiodiffusion liés à BBM Canada. L’impression d’un certain alignement entre RIM et BBM Canada découlant de la marque de commerce « BBM » pourrait avoir une incidence sur le rôle que joue la demanderesse à titre d’entité impartiale de collecte de données. Comme le montrent clairement les cas de confusion réelle, BBM peut avoir de la difficulté à recruter des personnes pour remplir ses cahiers d’écoute. L’utilisation des lettres « BBM » à la radio ou à la télévision pour désigner RIM pourrait aussi faire en sorte que les données concernant l’écoute soient biaisées.

 

[26]           RIM soutient que la demanderesse n’a pas droit à la protection concernant l’emploi de l’acronyme « BBM » au‑delà de la gamme limitée de services qu’elle offre dans le domaine de la mesure impartiale de l’écoute – des services qui ne sont pas fournis en association avec RIM ou son service BlackBerry Messenger. La demanderesse fait état de la confusion qui surviendra dans le cadre du recrutement de personnes pour remplir ses cahiers d’écoute et de la possibilité de données biaisées, mais cela n’a aucune importance pour ses clients de longue date des industries de la publicité et de la radiodiffusion, dont la grande majorité jouent un rôle actif en tant que membres de sa structure de gouvernance. Il est peu probable que la confusion et la contrefaçon correspondante aient une incidence sur ces clients qui connaissent bien les services de la demanderesse.

 

[27]           Dans le cadre de l’examen de ces arguments, je vais traiter (i) du critère servant à apprécier la confusion, (ii) des consommateurs de la population de référence et (iii) des facteurs pertinents au regard de la confusion.

 

(i)         Le critère d’appréciation de la confusion

 

[28]           Dans Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, [2006] 1 RCS 824, le juge Binnie a confirmé au paragraphe 20 que le critère servant à apprécier la confusion ne consistait pas à examiner les marques attentivement ou à les comparer en les mettant côte à côte, mais plutôt à déterminer la « première impression laiss[ée] dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé ».

 

[29]           Le juge Zinn a cependant laissé entendre, dans Énergie atomique du Canada Limitée c Areva NP Canada Ltd, 2009 CF 980, [2009] ACF no 1188, au paragraphe 24, que ce critère pourrait ne pas s’appliquer dans tous les cas. Selon lui, lorsqu’il est « difficile d’imaginer des clients plus avisés et un processus d’acquisition plus prudent », il pourrait ne pas exister de « consommateur pressé » d’acheter des produits et des services nucléaires.

 

[30]           Il incombe à la demanderesse d’établir la probabilité de confusion par opposition à une simple possibilité de confusion (voir, par exemple, Remo Imports Ltd c Jaguar Cars Ltd, 2007 CAF 258, [2007] ACF no 999, au paragraphe 38). Il faut aussi examiner les facteurs prévus au paragraphe 6(5) de la Loi :

(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

 

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

 

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

 

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

 

d) la nature du commerce;

 

 

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

 

 

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

 

 

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

 

 

 

(c) the nature of the wares, services or business;

 

 

(d) the nature of the trade; and

 

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

 

 

[31]           Avant de traiter de chacun de ces facteurs au regard des marques de commerce déposées de la demanderesse et de l’emploi de « BBM » par RIM en liaison avec BlackBerry Messenger, les parties ont soulevé une question concernant les consommateurs de la population de référence qui doit d’abord être tranchée.

 

(ii)        Les consommateurs de la population de référence

 

[32]           La thèse de la demanderesse repose en grande partie sur la probabilité que l’emploi de « BBM » par RIM crée de la confusion chez les membres du public qu’elle recrute pour utiliser un audimètre électronique portable ou noter à la main les émissions de radio et de télévision qu’ils écoutent ou regardent dans un cahier qu’elle leur remet. Le risque connexe de données biaisées que peut faire naître chez ces personnes la mention de « BBM » en ondes en violation des règlements et règles de BBM Canada doit aussi être examiné.

 

[33]           Comme la défenderesse le souligne, ces membres du public ne sont pas les consommateurs de la population de référence aux fins de l’analyse relative à la confusion. En effet, ils ne sont pas des consommateurs, mais des personnes recrutées en échange d’une somme d’argent et dont le rôle ressemble à celui d’un entrepreneur.

 

[34]           La confusion créée par des marques de commerce en concurrence doit être déterminée du point de vue des personnes qui sont susceptibles de faire un achat (voir, par exemple, Baylor University c Compagnie de la Baie d’Hudson (2000), 8 CPR (4th) 64, [2000] ACF no 984, au paragraphe 27 (CA)). L’analyse ne s’étend pas à tous les membres du grand public, mais plutôt à la « personne moyenne » susceptible de consommer les marchandises ou services en question (voir, par exemple, Cheung Kong (Holdings) Ltd c Living Realty Inc (1999), [2000] 2 CF 501, [1999] ACF no 1966, au paragraphe 64; McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1994), 55 CPR (3d) 463, [1994] ACF no 638, conf. par (1996), 68 CPR (3d) 168, [1996] ACF no 774 (CA)).

 

[35]           Les consommateurs des services de fourniture et d’analyse de données de la demanderesse sont un groupe défini d’annonceurs, d’agences de publicité et d’organismes de radiodiffusion. La plupart sont des membres de longue date de BBM Canada. S’il faut conclure à une probabilité de confusion, c’est par rapport à ce groupe et non aux membres du public susceptibles d’être recrutés pour participer à la collecte de données.

 

[36]           Compte tenu de la définition d’« emploi » à l’article 4 de la Loi, les marques de commerce de BBM Canada ne sont pas employées formellement dans les communications avec les personnes que l’entreprise recrute pour recueillir des données. Or, une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services seulement « si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services ». La demanderesse n’exécute pas et n’annonce pas des services destinés à la population en général ou aux personnes qu’elle est susceptible de recruter. Elle fait appel à ces personnes pour recueillir des données qui lui permettent ensuite d’exécuter ces services. Les consommateurs de la population de référence proviennent des industries de la radiodiffusion et de la publicité, de Statistique Canada et du CRTC à qui le service de collecte de données de BBM Canada est fourni et à l’intention de qui il est annoncé.

 

[37]           Ayant cette considération à l’esprit, je vais maintenant examiner les facteurs pertinents de l’analyse relative à la confusion.

 

(iii)       Les facteurs pertinents

 

[38]           Selon le juge Rothstein dans Masterpiece, ci‑dessus, au paragraphe 49, l’étude de la ressemblance doit constituer le point de départ de l’examen des facteurs prévus au paragraphe 6(5). Si les marques ne se ressemblent pas, il est peu probable qu’une conclusion solide concernant les autres facteurs mène à une probabilité de confusion.

 

[39]           En l’espèce, les mots‑symboles « BBM » sont identiques et les autres facteurs de l’analyse relative à la confusion doivent être examinés. La demanderesse a laissé entendre que RIM emploie également « BBM » dans une forme semblable à ses marques de commerce LMC615499 et LMC669799, mais elle n’a fait référence à aucun des dessins particuliers de RIM à des fins de comparaison et d’analyse distincte. Par conséquent, je conviens avec la défenderesse que le principal facteur est la probabilité de confusion avec le mot‑symbole BBM.

 

[40]           Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce contenant les lettres « BBM » et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues sont favorables à RIM. Il ne s’agit pas d’un mot inventé ou d’une marque de commerce célèbre comme la demanderesse le laisse entendre, mais de l’utilisation d’un acronyme. Selon GSW Ltée c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154, [1975] ACF no 406, les marques de commerce formées uniquement d’initiales ouvrent droit seulement à une protection limitée. La Cour a dit dans cette affaire :

[32]      En bref, lorsqu’un commerçant s’approprie des lettres de l’alphabet comme dessin-marque sans autre signe distinctif et tente d’empêcher d’autres commerçants de faire de même, la protection à donner à ce commerçant doit être plus réduite que dans le cas d’une marque de commerce unique et des différences relativement minimes suffisent à éviter la confusion. On s’attend normalement, dans ces circonstances, à ce que le public manifeste beaucoup plus de discernement (voir les observations de Lord Simon au sujet des noms commerciaux dans l’affaire Office Cleaning Services c. Westminster Window and General Cleaners Limited).

 

[41]           La marque de commerce de la demanderesse contenant l’acronyme « BBM » a peut‑être acquis un certain caractère distinctif dans le domaine particulier des services de mesure de l’écoute au sein des industries de la radiodiffusion et de la publicité, mais la demanderesse n’a pas droit à un monopole plus étendu.

 

[42]           La mesure dans laquelle les marques de commerce déposées de BBM Canada sont devenues connues est limitée car celle‑ci n’annonce pas dans le public et ses règles et règlements interdisent que ces marques soient mentionnées dans les médias électroniques. En outre, d’autres associations sont désignées par les lettres « BBM » au Canada – il y a notamment la marque de commerce BBM BATTLE OF THE BEAT MAKERS qui a été enregistrée malgré l’opposition da la demanderesse.

 

[43]           Je reconnais que BBM Canada emploie sa marque de commerce depuis beaucoup longtemps que RIM. Le mot‑symbole a été enregistré en 2007, mais la demanderesse affirme qu’il est employé d’une façon ou d’une autre depuis 1994. Quant à RIM, elle a commencé à employer les lettres « BBM » en liaison avec son service BlackBerry Messenger en juin 2010 seulement.

 

[44]           Le genre de marchandises et de services fournis par BBM Canada et RIM est très différent. BBM Canada offre principalement des services de mesure impartiale de l’écoute et des études de marché poussées. Il s’agit de services très limités destinés à un groupe particulier de consommateurs des domaines de la publicité et des médias électroniques.

 

[45]           RIM ne recueille pas de données et n’effectue pas d’études de marché en concurrence avec la demanderesse. Ses produits et services sont destinés à divers groupes de consommateurs dans la population en général. La société fabrique des téléphones intelligents et des applications connexes, comme BlackBerry Messenger. Selon RIM, la publicité de BBM était toujours accompagnée de son propre nom et faisait référence aux appareils BlackBerry.

 

[46]           La demanderesse soutient que RIM cherche à employer « BBM » en liaison avec la radiodiffusion et le marketing et que cela créera un certain chevauchement, en raison en particulier du service de baladodiffusion que la défenderesse offre maintenant. Je ne vois pas comment il peut y avoir un chevauchement important alors que les services de la demanderesse sont limités à la mesure de l’écoute et aux études de marché et qu’elle ne se livre pas elle‑même à ces activités.

 

[47]           Dans le même ordre d’idées, la nature du commerce de la demanderesse – la collecte et l’analyse de données – est complexe et bien définie. La demanderesse a une relation étroite avec ses clients qui sont également ses membres et qui ont souvent un rôle à jouer dans sa gouvernance. La défenderesse laisse entendre qu’il s’agit d’un autre cas où, comme le juge Zinn l’a dit dans Énergie atomique du Canada Limitée, ci‑dessus, le critère relatif au « consommateur pressé » ne devrait pas s’appliquer étant donné que les services n’ont jamais été destinés à être achetés de cette façon.

 

[48]           La nature du commerce de la demanderesse est donc très importante parce qu’elle est différente de la nature du commerce de RIM, cette société exerçant ses activités sur le marché des téléphones intelligents destinés à divers groupes de consommateurs. La demanderesse soutient qu’elle sera appelée à fournir une mesure impartiale de la couverture et de l’auditoire des médias diffusés par RIM sur les appareils BlackBerry dans le cadre de son service de baladodiffusion ou des applications connexes. Cela ne signifie pas cependant qu’un radiodiffuseur qui achète des données concernant l’écoute exclusivement à BBM Canada en tant que membre de cette entreprise s’adresserait nécessairement à RIM en croyant que cette société fournit aussi ces services.

 

[49]           Le paragraphe 6(5) m’oblige aussi à tenir compte des circonstances de l’espèce. Quoique BBM Canada fasse état de projets éventuels visant à permettre à des personnes d’utiliser leur téléphone intelligent pour recueillir et transmettre des données sur l’écoute, rien n’indique comment ou quand cela se produira. On ne sait pas non plus si cette méthode de collecte de données créera de la confusion avec l’emploi de « BBM » par RIM en liaison avec son service de messagerie instantanée.

 

[50]           Je dois notamment tenir compte, au regard des circonstances de l’espèce, de la preuve de confusion réelle produite par la demanderesse (voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au paragraphe 55). BBM Canada a fait référence à un courriel demandant du soutien pour des applications de BlackBerry Messenger et à une serveuse de restaurant qui a montré son appareil BlackBerry, mais elle n’a pas donné suffisamment de détails. Par exemple, on ignore si ces personnes auront des rapports avec BBM Canada dans l’avenir. Aucun service de mesure de l’écoute n’était offert à l’époque. En conséquence, je ne suis pas disposé à accorder un poids important à la preuve de confusion réelle qui a été produite.

 

[51]           Par ailleurs, la demanderesse exprime des doutes quant à la nécessité de donner des explications concernant le recrutement des personnes qui seront chargées de remplir les cahiers d’écoute et le risque de données biaisées. Bien que je ne souhaite pas minimiser les préoccupations de la demanderesse à cet égard compte tenu de la nature de son commerce, ces personnes ne constituent pas le groupe de consommateurs à qui l’analyse relative à la confusion s’applique.

 

[52]           Le droit des marques de commerce ne protège pas les personnes susceptibles d’être recrutées ou l’impartialité des données sur l’écoute recueillies par la demanderesse. Comme la Cour suprême l’a laissé entendre dans Masterpiece, ci‑dessus, le droit des marques de commerce permet aux « consommateurs [de] connaître l’origine » des marchandises ou des services. La confusion constitue un problème lorsque « le consommateur peut ne pas savoir quelle société offre les marchandises ou les services qui l’intéressent ».

 

[53]           Contrairement aux prétentions de la demanderesse, l’état actuel de la demande d’enregistrement de RIM concernant la marque de commerce « BBM » n’est pas déterminant. Une objection préliminaire a été soulevée et RIM a eu la possibilité de revoir sa liste de marchandises et de services. Je signale que même l’enregistrement proposé semble différent de celui de BBM Canada. Ce qui me préoccupe le plus cependant, c’est l’emploi réel de « BBM » par RIM en liaison avec son service BlackBerry Messenger et s’il y a probabilité de confusion avec le mot‑symbole déposé de la demanderesse.

 

[54]           Ayant tenu compte des facteurs pertinents prévus au paragraphe 6(5) et des circonstances de l’espèce, je conclus qu’il n’est pas probable qu’il y ait confusion et, en conséquence, qu’il n’y a pas eu contrefaçon résultant de l’emploi d’une marque créant de la confusion par suite de la publicité de BlackBerry Messenger faite par RIM au moyen de la marque de commerce « BBM ».

 

[55]           La marque de commerce « BBM » de la demanderesse a un caractère distinctif et a seulement droit à une protection limitée dans un secteur particulier des services de mesure de l’écoute. Les services que la demanderesse fournit en liaison avec sa marque de commerce, à savoir des études de marché poussées, ne chevauchent pas le service BlackBerry Messenger de RIM et ne sont pas en concurrence directe avec ce service et cette entreprise. La nature du commerce de la demanderesse – lequel s’adresse à un groupe défini au sein des industries de la publicité et de la radiodiffusion – est différente de la nature du commerce de RIM, cette société faisant des affaires sur le marché des téléphones intelligents destinés à un groupe beaucoup plus grand de consommateurs. Le droit des marques de commerce n’est pas utile à la demanderesse pour revendiquer une protection plus large que les services particuliers qu’elle fournit et le marché auquel ils sont destinés.

 

B.        La commercialisation trompeuse

 

[56]           L’alinéa 7b) de la Loi interdit la commercialisation trompeuse :

7. Nul ne peut :

 

[…]

 

b) appeler l’attention du public sur ses marchandises, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada, lorsqu’il a commencé à y appeler ainsi l’attention, entre ses marchandises, ses services ou son entreprise et ceux d’un autre;

 

7. No person shall

 

[…]

 

(b) direct public attention to his wares, services or business in such a way as to cause or be likely to cause confusion in Canada, at the time he commenced so to direct attention to them, between his wares, services or business and the wares, services or business of another;

 

[57]           La demanderesse prétend que RIM inonde le marché de publicités dans lesquelles la marque de commerce « BBM » est employée, ce qui ébranlera le lien entre elle et le public qui a été créé grâce à ses marques de commerce déposées. Selon elle, RIM fera inévitablement en sorte que sa marque de commerce ne distinguera plus ses activités.

 

[58]           Il faut cependant, pour établir la commercialisation trompeuse, une preuve réelle de l’existence d’un achalandage, de la déception ou de la représentation trompeuse de la défenderesse causant de la confusion et des dommages actuels ou possibles (voir, par exemple, Kirkbi AG c Gestions Ritvik Inc, 2005 CSC 65, [2005] 3 RCS 302, au paragraphe 66). La demanderesse n’a pas produit cette preuve.

 

[59]           L’achalandage dénote l’association positive qui attire les consommateurs vers les marchandises ou services du propriétaire de la marque plutôt que vers ceux de ses concurrents (Veuve Clicquot, ci‑dessus, aux paragraphes 50 et 52). Il concerne uniquement les services particuliers qui y sont associés. Pour ce qui est de la marque de commerce déposée de BBM Canada, l’achalandage se trouve dans les industries de la publicité et de la radiodiffusion et non dans la population en général.

 

[60]           En ce qui concerne la représentation trompeuse, ma conclusion ci‑dessus selon laquelle il n’existe aucune probabilité de confusion est déterminante (voir Drolet c Stiflung Gralsbotschaft, 2009 CF 17, [2009] ACF no 38, au paragraphe 212). La preuve ne démontre pas que l’emploi de « BBM » amènerait les agences de publicité ou les organismes de radiodiffusion à penser qu’il existe un lien entre la demanderesse et RIM.

 

[61]           La demanderesse n’a pas démontré que RIM a trompé les consommateurs intentionnellement ou par négligence en leur faisant croire que son entreprise provenait de la demanderesse, et que celle‑ci avait de ce fait subi des dommages (Kirkbi AG, ci‑dessus, au paragraphe 27). La preuve ne démontre pas que la demanderesse a eu un manque à gagner ou a perdu de l’achalandage parmi ses membres des industries de la publicité et de la radiodiffusion à cause des activités de RIM. Le fait que les employés de BBM Canada doivent expliquer leur rôle à des personnes qui recueilleront éventuellement des données ne permet pas de conclure que des dommages ont été causés. Par exemple, aucune preuve ne démontre explicitement que moins de personnes sont disposées à accepter de remplir les cahiers d’écoute.

 

[62]           Quant à la question de la contrefaçon fondée sur l’emploi d’une marque créant de la confusion, les allégations de la demanderesse concernant la commercialisation trompeuse doivent être rejetées.

 

C.        La dépréciation de l’achalandage

 

[63]           La demanderesse soutient en outre que les activités de RIM ont entraîné la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à ses marques de commerce et que RIM a ainsi contrevenu à l’article 22 de la Loi. Cette allégation repose sur des prétentions semblables à celles relatives à la commercialisation trompeuse selon lesquelles l’emploi de « BBM » par RIM sur une grande échelle permet à cette société de s’approprier la marque de commerce de BBM Canada et l’achalandage qui y est attaché.

 

[64]           Même s’il a rejeté une prétention reposant sur le même fondement dans Veuve Clicquot, ci‑dessus, le juge Binnie a décrit, au paragraphe 46, les quatre éléments de l’article 22 qu’un demandeur doit démontrer : (i) sa marque de commerce déposée a été employée par le défendeur en liaison avec des marchandises ou des services; (ii) elle est suffisamment connue pour que l’achalandage qui y est attaché soit appréciable; (iii) elle a été employée d’une manière susceptible d’avoir une incidence sur cet achalandage; (iv) cette incidence sera probablement la diminution de la valeur de l’achalandage.

 

[65]           Il doit y avoir un « lien, connexion ou association dans l’esprit du consommateur » (Veuve Clicquot, ci‑dessus, au paragraphe 49). La demanderesse n’a pas fait la preuve d’un achalandage dans la population en général qui ferait en sorte qu’une personne établirait un lien ou une connexion avec BBM Canada lorsque RIM annonce son service de messagerie instantanée en employant la marque de commerce « BBM ». Le caractère distinctif de la marque de la demanderesse dans le domaine des services de mesure impartiale ou d’études de marché n’est pas réduit sur le marché où elle fait des affaires dans les industries de la publicité et de la radiodiffusion. Elle est la seule à fournir ces services à ses membres.

 

[66]           Pour ces motifs, je ne suis pas disposé à accorder aux marques de commerce déposées de BBM Canada une protection qui excède la gamme envisagée de ses services en faisant droit à une prétention fondée sur la dépréciation de l’achalandage.

 

[67]           Compte tenu des conclusions ci‑dessus qui sont favorables à la défenderesse, il n’est pas nécessaire d’examiner la possibilité d’accorder des dommages‑intérêts ou une autre réparation (question (d)).

 

IV.       Conclusion

 

[68]           Il n’y a aucune confusion ni aucune contrefaçon réputée, commercialisation trompeuse ou dépréciation de l’achalandage associée à la marque de commerce de la demanderesse qui serait causée par l’emploi de « BBM » par RIM dans le but de promouvoir son service BlackBerry Messenger. La demanderesse a seulement droit à la protection de sa marque de commerce conférée par la Loi pour ce qui est de la fourniture de services de mesure de l’écoute.

 

[69]           En conséquence, la présente demande est rejetée, les dépens étant adjugés à la défenderesse RIM.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée, les dépens étant adjugés à la défenderesse RIM.

 

 

« D. G. Near »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1304-10

 

INTITULÉ :                                      BBM CANADA c

                                                            RESEARCH IN MOTION LIMITED

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 11 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE NEAR

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 30 mai 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter E. J. Wells

 

                            POUR LA DEMANDERESSE

Trent Horne

Dominique Hussey

 

                            POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Peter E. J. Wells

McMillan LLP

Toronto (Ontario)

 

                            POUR LA DEMANDERESSE

Trent Horne et Dominique T. Hussey

Bennett Jones LLP

Toronto (Ontario)

 

                            POUR LA DÉFENDERESSE

 

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