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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 Date : 20120525


Dossier : T-1944-10

Référence : 2012 CF 644

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 25 mai 2012

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

 

GRAHAM WORSFOLD, STONERIDGE MANAGMEENT SERVICES INC.,

LYN WORSFOLD, JONATHAN COLES, EN TANT QUE FIDUCIAIRES DE GR AND LS WORSFOLD LIFE INTEREST SETTLEMENT TRUST

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

 

  MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Cette demande consolidée de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, ch F-7, vise à faire annuler les décisions d’examen de second palier d’un directeur adjoint de l’exécution du ministère du Revenu national (l’agent), rendues entre le 22 octobre 2010 et le 17 novembre 2010, par lesquelles l’agent refusait de renoncer aux pénalités et intérêts dus par les demandeurs en conséquence de la production tardive de leurs déclarations de revenu. L’agent a refusé d’exercer le pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985 (5e suppl), ch 1, et de réduire ainsi les pénalités et intérêts, parce que, selon lui, les divulgations faites par les demandeurs n’étaient pas volontaires, ayant été provoquées par une mesure d’exécution prise à l’encontre d’une société liée.

 

[2]               Les demandeurs voudraient que les décisions soient annulées et renvoyées pour nouvel examen, accompagnées des directives que la Cour jugera indiquées.

 

Introduction au programme des divulgations volontaires

 

Disposition d’allégement pour les contribuables

 

[3]               Les contribuables qui produisent tardivement leurs déclarations de revenu encourent généralement des pénalités et intérêts sur ce qu’ils doivent. Cependant, le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la LIR) donne au ministre du Revenu national le pouvoir discrétionnaire de renoncer à tout ou partie des pénalités ou intérêts par ailleurs payables en vertu de la LIR, ou de les annuler en tout ou en partie. Cette disposition d’allégement a été adoptée en 1991, parmi ce que l’on appelait les « dispositions d’équité » (voir l’arrêt Bozzer c Canada (Ministre du Revenu national), 2011 CAF 186, [2011] ACF n° 842, au paragraphe 22). L’objet de cette disposition a été expliqué par le juge Paul Rouleau dans la décision Kaiser c Canada (Ministre du Revenu national), 93 FTR 66, [1995] ACF n° 349 (au paragraphe 8) :

L’objet de cette disposition législative est de permettre à Revenu Canada, Impôt, de gérer plus équitablement le régime fiscal, en faisant la place au bon sens dans le traitement des contribuables qui, en raison de leur infortune ou de circonstances échappant à leur volonté, sont incapables de respecter des délais ou de se conformer aux règles propres au régime fiscal [...]

 

 

 

[4]               L’octroi d’un allégement aux termes de la disposition est une mesure discrétionnaire. Il ne s’agit pas d’un droit (voir l’arrêt Lanno c Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CAF 153, [2005] ACF n° 714, au paragraphe 6).

 

Programme des divulgations volontaires

 

[5]               L’exercice du pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu fait partie intégrante du programme des divulgations volontaires (le PDV) de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC). Le PDV permet aux contribuables de faire des divulgations pour corriger des renseignements inexacts ou incomplets, ou pour divulguer des renseignements qui ne l’avaient pas déjà été. Ce programme vise à encourager la conformité volontaire. Ainsi, lorsqu’une divulgation valide a été faite, le ministre peut exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 220(3.1) et renoncer aux pénalités et intérêts applicables, ou les annuler.

 

Politiques applicables de l’ARC

 

[6]               L’ARC a publié des documents de politique pour aider le ministre et ses représentants à exercer le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu. À la date des divulgations faites par les demandeurs en 2005, les documents suivants qui portent sur l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire et sur le PDV étaient en vigueur :

            1.         la Circulaire d’information IC00-1R de l’ARC, en vigueur du 30 septembre 2002 au 21 octobre 2007 (la circulaire IC00-1R);

            2.         les Lignes directrices sur l’application du PDV (les Lignes directrices).

 

[7]               Les Lignes directrices sont un document interne de l’ARC destiné à aider les agents du PDV à faire leur travail.

 

Conditions d’une divulgation valide selon le PDV

 

[8]               La circulaire IC00-1R énonce quatre conditions pour qu’une divulgation soit jugée valide (au paragraphe 6). La divulgation doit :

            1.         être volontaire – c’est-à-dire que le contribuable doit prendre l’initiative de faire la divulgation volontaire, et non « parce qu’il était au courant d’une vérification, d’une enquête ou d’une autre mesure d’exécution de l’[ARC] ou d’autres autorités ou administrations avec lesquelles l’[ARC] a conclu des ententes d’échange d’informations »;

            2.         être complète – c’est-à-dire qu’elle doit présenter « un compte rendu complet et exact de tous les renseignements auparavant inexacts, incomplets ou manquants »;

            3.         comprendre une pénalité – c’est-à-dire que, si aucune pénalité ne s’applique aux renseignements divulgués, le contribuable n’a pas besoin d’un redressement au moyen du PDV;

            4.         répondre à des conditions de temps – c’est-à-dire qu’elle doit contenir des renseignements :

                        a.         dont la production est en retard d’au moins un an, ou

                        b.         qui ne doivent pas être communiqués simplement pour se soustraire aux pénalités pour production tardive ou aux pénalités relatives aux acomptes provisionnels.

 

Détermination du caractère volontaire d’une divulgation

 

[9]               Pour savoir si une divulgation est volontaire, l’agent du PDV peut s’en rapporter à la section 8.3 des Lignes directrices. Le paragraphe 8.3.1 renferme notamment ce qui suit :

[traduction]

 

On considère une divulgation comme volontaire lorsqu’un contribuable a commencé le processus par lui-même afin de s’assurer que ses dossiers d’impôt sont complets. Une divulgation doit répondre à cette définition de « volontaire » pour être considérée comme valide. Les conseils de recherche qui suivent ne sont données qu’à titre indicatif. [...]

 

 

 

[10]           La date à retenir pour dire si une divulgation est volontaire est la « date d’entrée en vigueur de la divulgation ». C’est « la date à laquelle le contribuable s’identifie, ou la date à laquelle le contribuable ou son représentant signe le formulaire d’acceptation du client, selon la première des deux » (voir la décision Brown c Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CF 1639, [2005] ACF n° 2087, au paragraphe 16; décision confirmée : 2007 CAF 26, [2007] ACF n° 141).

 

Questions relatives aux mesures d’exécution

 

[11]           Lorsqu’un agent du PDV découvre que des mesures d’exécution ont commencé, la section 8.3.5 des Lignes directrices lui recommande se poser les questions suivantes (les questions relatives aux mesures d’exécution) :

            1.         A-t-on communiqué directement avec le [contribuable] ou le [contribuable] est-il susceptible d’avoir eu connaissance des mesures d’exécution?

            2.         Est-il probable que la mesure d’exécution aurait permis à l’ARC de découvrir les renseignements divulgués?

 

[12]           Pour répondre à ces questions, les Lignes directrices disent explicitement qu’il faut laisser au contribuable le bénéfice du doute (section 8.3.5).

 

Contexte

 

[13]           Graham Worsfold, le demandeur principal, est ingénieur informaticien. En 2001, il a quitté le Royaume-Uni pour s’installer au Canada avec un permis de travail temporaire. Après avoir fait renouveler ce permis au moins une fois, lui et sa famille ont obtenu en janvier 2005 le statut de résidents permanents.

 

[14]           Les demandeurs additionnels dans cette affaire sont : Lyn Worsfold – l’épouse du demandeur principal; Stoneridge Management Services Inc. (Stoneridge Management) – une société constituée le 16 décembre 2003 dans les îles Vierges britanniques, qui fournit des services de conseil en administration portant sur le développement international de l’informatique. Le demandeur principal est l’unique administrateur et actionnaire, et il est employé de la société depuis 2004; enfin le GR and LS Worsfold Life Interest Settlement Trust (le Worsfold Trust) – une fiducie familiale personnelle située au Royaume-Uni et établie en 1997 par le demandeur principal. Les fiduciaires sont le demandeur principal, son épouse et Jonathan Coles (un avocat établi au Royaume‑Uni).

 

[15]           Au 3 octobre 2005, les demandeurs n’avaient pas produit de déclarations de revenu au Canada.

 

[16]           La demande concerne aussi Stoneridge Inc. (Stoneridge). Stoneridge est une société de promotion immobilière qui a été constituée le 1er août 2002. Le demandeur principal ne tire pas de revenu d’emploi de Stoneridge. Cependant, au 3 octobre 2005, il était administrateur de Stoneridge, il détenait toutes les actions privilégiées de Stoneridge ainsi qu’un tiers des actions ordinaires de GLD Holdings Inc., laquelle détient toutes les actions ordinaires de Stoneridge. Larry Burton et David Turk détenaient en parts égales le reste des actions ordinaires de GLD Holdings Inc.

 

Chronologie des faits

 

[17]           Le 6 septembre 2005, le demandeur principal a rempli un formulaire d’amnistie fiscale sur le site Web de DioGuardi and Company LLP (DioGuardi). Il devait pour cela fournir des renseignements personnels et financiers sur son revenu mondial et sur son statut d’immigration. En remplissant ce formulaire, il demandait aussi une évaluation ainsi qu’un avis juridique sur son admissibilité au programme de divulgation volontaire (amnistie fiscale) et sur la nécessité de le faire.

 

[18]           Le 21 septembre 2005, DioGuardi a envoyé au demandeur principal un courriel dans lequel le cabinet disait croire qu’il devait produire des déclarations de revenu et qu’il était admissible au PDV. Le demandeur principal était invité à communiquer avec les bureaux de DioGuardi.

 

[19]           Le 23 septembre 2005, le demandeur principal a téléphoné au cabinet DioGuardi. Pendant cette conversation, il est devenu évident qu’une rencontre en bonne et due forme s’imposait. Comme le demandeur principal se trouvait à l’extérieur du pays durant la semaine du 25 au 29 septembre, la réunion fut fixée au mercredi 5 octobre 2005.

 

[20]           Le lundi 3 octobre 2005, à 7 h 30, Joanne Adey, vérificatrice de l’ARC pour le bureau des services fiscaux de l’est et du centre de l’Ontario (Peterborough) (la vérificatrice), a téléphoné à Larry Burton, le secrétaire de Stoneridge et la personne‑ressource pour cette société, afin de l’informer que l’ARC prévoyait de vérifier les déclarations de revenu de Stoneridge pour 2003 et 2004. La vérification avait pour objet d’examiner des opérations immobilières, de faire un examen général et d’analyser les déclarations T2 afférentes (déclaration de revenus des sociétés). La vérification de Stoneridge avait été confiée à la vérificatrice la semaine précédente. Avant de réussir à parler à Larry Burton, la vérificatrice avait laissé deux messages vocaux à l’attention de celui-ci, en précisant son nom et ses coordonnées. Elle avait également parlé à l’épouse de M. Burton, à qui elle avait aussi donné son nom et ses coordonnées.

 

[21]           Durant la conversation téléphonique du 3 octobre 2005, Larry Burton a informé la vérificatrice que c’était les deux autres actionnaires, à savoir le demandeur principal et David Turk, qui dirigeaient Stoneridge. Larry Burton et le demandeur principal travaillent dans le même immeuble. Plus tard le même matin, à 10 h 7, le demandeur principal a fait un bref appel téléphonique à DioGuardi. Il dit que cet appel visait à confirmer la rencontre du 5 octobre. Le défendeur affirme pour sa part que cet appel visait à organiser une rencontre avec DioGuardi après que le demandeur principal eut été informé par Larry Burton de la vérification imminente de Stoneridge.

 

[22]           Le 5 octobre 2005, le demandeur principal a rencontré Paul DioGuardi dans les bureaux d’Ottawa de DioGuardi. Paul DioGuardi a expliqué que, durant cette rencontre, ils avaient discuté des incidences fiscales du statut d’immigration du demandeur principal et de ses sources de revenus. Cette discussion a mené Paul DioGuardi à conclure qu’une divulgation volontaire était nécessaire pour l’année d’imposition 2001 et les années suivantes. La vérification de Stoneridge n’aurait pas été évoquée durant cette rencontre, et le demandeur principal soutient que, à cette date-là, il n’avait encore pas connaissance de la vérification projetée.

 

[23]           En après‑midi, à 15 h 25, la vérificatrice a envoyé par télécopieur la lettre initiale de vérification à Brad Huggins, le comptable de Stoneridge, le priant de mettre à disposition certains livres et registres pour qu’elle les examine au début de la vérification, prévue le 27 octobre 2005. La fin de cette lettre renfermait ce qui suit :

[traduction]

 

Sachez que, au fur et à mesure de la vérification, nous pourrions demander des documents additionnels se rapportant aux sociétés liées ainsi qu’à tous les actionnaires de telles sociétés.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[24]           Plus tard ce même jour, à 16 h 25, Paul DioGuardi a envoyé à l’ARC une télécopie qui amorçait une divulgation volontaire anonyme pour les années d’imposition 2001 à 2004. Cette divulgation précisait qu’elle était faite au nom d’un contribuable de sexe masculin, né en 1956 et résident du Canada depuis 2001. Elle portait sur un revenu non déclaré et des gains en capital non déclarés pour les années d’imposition 2001 à 2004, et peut-être aussi sur la TPS.

 

[25]           Le 17 novembre 2005, Brad Huggins a dit à la vérificatrice que le demandeur principal [TRADUCTION] « était visé par une enquête d’Ottawa sur des questions internationales ». Cette enquête correspondait à une lettre du bureau de l’ARC à London, qui voulait en savoir davantage sur une demande de certificat de décharge se rapportant à des actions de DigiPos dont s’était départi le demandeur principal. Comme aucun renseignement n’avait été présenté, la demande de certificat avait été rejetée.

 

[26]           Le 30 novembre 2005, DioGuardi a informé l’ARC que le demandeur principal était la personne pour qui la divulgation anonyme du 5 octobre 2005 avait été faite. DioGuardi a aussi remis à l’ARC un rapport de son cabinet de comptables qui donnait le détail de recherches additionnelles et de déclarations devant être produites pour l’épouse du demandeur principal, pour des fiducies étrangères et pour diverses sociétés susceptibles d’être réputées résidentes du Canada compte tenu du statut de résidence du demandeur principal.

 

[27]           Le 31 août 2006, après plusieurs reports de délai, les déclarations de revenu et les déclarations de renseignements sur les biens étrangers du demandeur principal, accompagnées de déclarations de revenu des autres demandeurs, ont été produites auprès de l’ARC.

 

[28]           Le 19 septembre 2006, les dossiers des demandeurs ont été soumis à l’examen de la vérificatrice pour qu’elle détermine si les renseignements fournis étaient exacts et s'ils répondaient au critère d’exhaustivité du PDV.

 

[29]           Dans une note datée du 26 avril 2007, la vérificatrice a recommandé à Mark Loftus, agent du PDV à Ottawa, d’apporter des rajustements au revenu du demandeur principal pour les années d’imposition 2002 et 2003. Elle a aussi conclu que le demandeur principal s’était approprié une somme de 315 451 $ de Stoneridge en 2004. Les rajustements proposés par la vérificatrice étaient fondés sur des documents qui lui avaient été fournis pendant la vérification qu’elle avait menée à l’égard de Stoneridge.

 

Les décisions d’examen de premier palier

 

[30]           Dans des lettres datées du 25 septembre 2007, les demandeurs ont été informés que toutes leurs demandes au titre du PDV avaient été refusées (les décisions d’examen de premier palier). Leurs divulgations posaient les problèmes suivants :

            Le demandeur principal :

                        Divulgation non volontaire – l’ARC avait, avant la date de la divulgation volontaire, amorcé des mesures d’exécution contre un contribuable ayant des liens avec lui;

                        Divulgation incomplète – d’importants revenus imposables n’avaient pas été dûment inclus dans les déclarations T1;

                        Délai – la divulgation contenait des renseignements dont la production n’était pas en retard d’au moins un an.

 

            L’épouse du demandeur principal :

                        Divulgation non volontaire – l’ARC avait, avant la date de la divulgation volontaire, amorcé des mesures d’exécution à l’encontre d’un contribuable ayant des liens avec elle;

                        Absence de pénalité – la divulgation comprenait une année qui ne comportait pas de pénalité.

 

            Stoneridge Management :

                        Divulgation non volontaire – l’ARC avait, avant la date de la divulgation volontaire, amorcé des mesures d’exécution à l’encontre d’un contribuable ayant des liens avec elle;

                        Absence de pénalité – la divulgation ne comportait pas de pénalité pour certaines années;

                        Délai – la divulgation contenait des renseignements dont la production n’était pas en retard d’au moins un an.

 

            Worsfold Trust :

                        Divulgation non volontaire – l’ARC avait, avant la date de la divulgation volontaire, amorcé des mesures d’exécution à l’encontre d’un contribuable ayant des liens avec elle;

                        Absence de pénalité – la divulgation ne comportait pas de pénalité pour certaines années.

 

 

[31]           Entre le 25 et le 28 avril 2008, tous les demandeurs ont séparément déposé des demandes dans lesquelles ils sollicitaient des examens de second palier. Celle du demandeur principal était accompagnée d’un reçu daté du 6 septembre 2005 émis par DioGuardi, qui attestait un paiement de 45 $ correspondant à des honoraires d’évaluation et d’avis juridique.

 

Observations supplémentaires

 

[32]           Dans des lettres datées du 5 octobre 2009, du 30 juillet 2010 et du 9 septembre 2010, l’avocat des demandeurs a présenté des observations supplémentaires à l’appui de leurs divulgations volontaires.

 

[33]           La première lettre (5 octobre 2009) donnait les éclaircissements suivants sur de prétendues inexactitudes :

            1.         la divulgation n’avait pas été faite en réaction à la vérification;

            2.         le demandeur principal avait tout à fait l’intention de faire la divulgation;

            3.         la divulgation était essentiellement complète;

            4.         la vérification ne constituait pas à proprement parler une mesure d’exécution permettant de conclure que la divulgation n’avait pas été volontaire.

 

[34]           Dans la lettre du 30 juillet 2010, l’avocat des demandeurs examinait les dispositions des Lignes directrices et les appliquait aux circonstances de la présente affaire. Le caractère volontaire de la divulgation, l’exhaustivité de la divulgation et l’exercice du pouvoir discrétionnaire y étaient examinés. Les pièces suivantes étaient jointes à cette lettre :

            1.         un courriel daté du 21 septembre 2005, envoyé semble-t-il par Philippe DioGuardi au demandeur principal, où l’on peut lire que [traduction] « notre avis sur votre situation fiscale actuelle » est que « vous êtes admissible à une amnistie fiscale »;

            2.         une lettre du 29 septembre 2008 adressée au demandeur principal par Dean McIntosh, enquêteur de la Section de l’exécution de l’ARC. La lettre propose un rajustement de 132 606 $ pour la déclaration générale de revenu et de prestations T1 de 2004 du demandeur principal. Elle précise aussi que des pénalités seront appliquées à ce rajustement et énonce le fondement sur lequel l’ARC proposait que des accusations soient déposées contre le demandeur principal en vertu de l’article 239 de la Loi de l’impôt sur le revenu;

            3.         l’avis de nouvelle cotisation envoyé par l’ARC et daté du 12 novembre 2008.

 

[35]           Enfin, les documents suivants étaient joints à la lettre datée du 9 septembre 2010 :

            1.         une lettre de Brad Huggins, le comptable de Stoneridge, envoyée à Dean McIntosh (en date du 5 août 2008), avec pièces jointes :

                        a.         un questionnaire de l’ARC indiquant que Brad Huggins avait probablement eu une conversation téléphonique avec Larry Burton le 3 octobre 2005 à propos de la vérification et qu’il aurait eu une conversation avec le demandeur principal le 3 ou le 4 octobre 2005;

                        b.         une feuille de temps de Brad Huggins (pour les 4 et 5 octobre 2005) indiquant que Brad Huggins avait eu une conversation téléphonique avec Dave Turk le 4 octobre 2005 : [TRADUCTION] « Deux heures, prép. vérification, appel Dave T. »;

            2.         des relevés de Bell sur les communications personnelles du demandeur principal montrant qu’il avait téléphoné le 23 septembre 2005 et le 3 octobre 2005 au cabinet DioGuardi Tax Law;

            3.         des renseignements en vue d’obtenir une ordonnance de production, à savoir :

                        a.         des renvois au journal du demandeur principal, dans lequel une entrée marquée « Brad » (du cabinet de comptables de Stoneridge) précède une entrée pour DioGuardi (ce qui donnerait à entendre que le demandeur principal avait communiqué avec le comptable de Stoneridge avant de communiquer avec DioGuardi).

                        b.         une déclaration selon laquelle Paul DioGuardi avait produit un affidavit où il affirmait avoir rencontré le demandeur principal à 13 h 30 le 5 octobre 2005, et que le demandeur principal avait alors signé une entente. Aucun détail quant au moment où la date de cette réunion avait été fixée ou si elle avait été organisée par Internet ou par téléphone.

 

Les décisions de l’agent

 

[36]           À la suite de demandes d’examen de second palier présentées par les demandeurs, leurs dossiers ont été transférés à un autre bureau de l’ARC, à St. Catharines. L’agent chargé de ces examens a déclaré que la circulaire IC00-1R avait été appliquée et que les Lignes directrices avaient été prises en compte. L’agent a aussi déclaré que, par souci d’objectivité et d’impartialité, cet examen avait été dissocié de l’examen de premier palier.

 

[37]           Des décisions séparées ont été prises pour chaque demandeur. Chaque décision se composait d’une lettre et d’un rapport contenant une explication plus détaillée des motifs sous‑jacents. Chaque décision comprenait : un résumé de la séquence des événements antérieurs à la divulgation du demandeur principal et à la vérification visant Stoneridge; une description des participations détenues dans Stoneridge et dans ses sociétés apparentées (GLD Holdings Inc., Burton Custom Homes Inc. et Lighthouse Developments Inc.), en plus d’une reconnaissance du fait que toutes ces sociétés étaient mentionnées dans la lettre initiale de vérification; enfin, une observation selon laquelle le demandeur principal détenait des actions de Stoneridge et d’une ou plusieurs des sociétés liées.

 

[38]           Les détails suivants figuraient dans chacune des décisions.

 

Le demandeur principal (Graham Worsfold)

 

[39]           Dans une lettre datée du 22 octobre 2010, l’agent a rejeté la demande d’examen de second palier présentée par le demandeur principal pour ses déclarations personnelles de revenu T1. L’agent faisait observer que la date d’entrée en vigueur de la divulgation était le 5 octobre 2005, date à laquelle l’ARC avait déjà commencé une mesure d’exécution contre Stoneridge, une société avec laquelle il avait des liens. Se fondant sur la chronologie des faits, l’agent a conclu qu’il était raisonnable de penser que, une fois informés de l’intention de l’ARC de procéder à la vérification de Stoneridge, Larry Burton et Brad Huggins avaient immédiatement communiqué avec tous les administrateurs ou actionnaires de la société. L’agent a donc conclu que le demandeur principal avait fait sa divulgation après avoir eu connaissance d’une mesure d’exécution à l’encontre de Stoneridge.

 

[40]           Dans un rapport daté du 9 novembre 2010, l’agent a écrit que les communications du demandeur principal avec DioGuardi en septembre 2005 avaient eu lieu avant l’envoi de l’avis de vérification et avant la divulgation ultérieure. Si l’on ajoutait à cela que le demandeur principal n’avait pas produit de déclarations de revenu et n’avait déclaré aucun revenu à l’ARC depuis son arrivée au Canada, il était raisonnable de penser que l’ARC aurait découvert le revenu divulgué par le demandeur principal. Puisque la divulgation était jugée non volontaire, l’agent n’a pas considéré les trois conditions restantes mentionnées dans la circulaire IC00-1R.

 

[41]           Dans une lettre datée du 10 novembre 2010, l’agent a également rejeté la demande d’examen de second palier présentée par le demandeur principal pour ses déclarations de renseignements sur les biens étrangers. Ce rejet était fondé sur les mêmes motifs que pour ses déclarations personnelles de revenu T1.

 

Lyn Worsfold

 

[42]           Dans une lettre de décision datée du 17 novembre 2010, l’agent a observé que Lyn Worsfold et le demandeur principal sont les disposants et les fiduciaires du Worsfold Trust. Il a ajouté que l’examen de second palier avait permis de constater que le droit de propriété d’un bien qui avait été analysé dans la vérification de Stoneridge avait été enregistré au nom de Lyn Worsfold. La vérification n’avait pas commencé à l’encontre de Lyn Worsfold, mais l’agent a conclu qu’il était raisonnable de croire que les renseignements divulgués par Lyn Worsfold auraient été découverts durant la vérification. Sur ce fondement, il a estimé que la divulgation faite par la Lyn Worsfold n’était pas volontaire, et il a rejeté sa demande d’examen de second palier.

 

[43]           Dans un rapport daté du 12 novembre 2010, l’agent précisait à nouveau que Lyn Worsfold et son mari (le demandeur principal) étaient les disposants, les fiduciaires et les principaux bénéficiaires du Worsfold Trust. Il a écrit que, vu la chronologie des faits, il était raisonnable de penser que le demandeur principal avait informé son épouse que la vérification était en cours. Il a aussi reconnu que la date d’entrée en vigueur de la divulgation initiale était le 5 octobre 2005, même si la demande visant à y inclure la déclaration personnelle de revenu T1 de 2001 de Lyn Worsfold et de son bilan de vérification du revenu étranger (T1135) pour la période de 2001 à 2005 n’avait été présentée que le 31 août 2006. Après examen des documents versés au dossier, l’agent a trouvé légitime de conclure que l’ARC aurait découvert, lors de la vérification de Stoneridge, les renseignements divulgués par l’épouse du demandeur principal.

 

Stoneridge Management

 

[44]           Dans une lettre datée du 10 novembre 2010, l’agent a conclu que la divulgation faite par Stoneridge Management n’était pas volontaire parce qu’elle avait été provoquée par celle du demandeur principal. Il a estimé qu’il était raisonnable de penser que, grâce à la vérification visant Stoneridge, l’ARC aurait découvert le revenu divulgué par le demandeur principal, y compris les gains tirés de Stoneridge Management déclaré dans le feuillet T4. Il a aussi estimé qu’il était raisonnable de penser que les feuillets T4 supplémentaires et sommaires non produits, ainsi que les déclarations T2 et les déclarations T1135 de renseignements sur le revenu étranger concernant Stoneridge Management auraient été examinés pendant le processus de vérification. Puisque Stoneridge Management n’avait pas fait une déclaration volontaire, l’agent n’a pas examiné les trois autres facteurs, et la demande d’examen de second palier faite par Stoneridge Management a été rejetée.

 

[45]           Dans un rapport daté du 9 novembre 2010, l’agent a observé que le demandeur principal, l’unique actionnaire de Stoneridge Management, avait reçu un feuillet T4 de Stoneridge Management pour 2004 et pour les années suivantes. Les années 2003 et 2004 avaient été désignées à l’origine pour un examen dans la vérification de Stoneridge. L’agent a reconnu que la date d’entrée en vigueur de la divulgation initiale faite par Stoneridge Management était le mois d’août 2006, lorsque ses déclarations avaient été produites la première fois. Cependant, par souci d’uniformité, l’agent du PDV (pour l’examen de premier palier) avait accepté la date du 5 octobre 2005 comme date d’entrée en vigueur de la divulgation. Vu les circonstances, l’agent chargé de l’examen de second palier a estimé qu’il était raisonnable de penser que, pendant la vérification de Stoneridge, l’ARC aurait découvert le revenu divulgué par le demandeur principal, un actionnaire d’une ou plusieurs des sociétés liées. Cette découverte aurait permis de découvrir que Stoneridge Management n’avait pas produit de déclarations.

 

Worsfold Trust

 

[46]           Dans une lettre datée du 17 novembre 2010, l’agent a conclu que la divulgation faite par le Worsfold Trust n’était pas volontaire, et il a donc rejeté la demande d’examen de second palier de celui‑ci.

 

[47]           Dans un rapport daté du 10 novembre 2010, l’agent a reconnu que le demandeur principal et son épouse étaient les disposants, les fiduciaires et les principaux bénéficiaires du Worsfold Trust. Il a observé que, même si la date d’entrée en vigueur de la divulgation était le 5 octobre 2005, la demande d’inclusion de renseignements sur la fiducie dans la divulgation n’avait été reçue que le 30 août 2006. Néanmoins, que la date d’entrée en vigueur de la divulgation fût en réalité le 5 octobre 2005 ou le 30 août 2006, l’agent a conclu que la vérificatrice avait communiqué directement avec Stoneridge avant ces deux dates.

 

[48]           L’agent a souligné que le demandeur principal, son épouse et le Worsfold Trust n’avaient pas produit de déclarations de revenu depuis leur arrivée au Canada en 2001. Il a relevé que la divulgation anonyme du demandeur principal avait été faite le jour où le comptable de Stoneridge avait reçu la lettre de vérification concernant Stoneridge, une société liée au demandeur principal. Après examen des documents versés dans le dossier, l’agent a donc trouvé légitime de conclure que, pendant la vérification de Stoneridge, l’ARC aurait découvert et le revenu non déclaré du Worsfold Trust et l’absence de déclarations produites par le Worsfold Trust. Estimant que la divulgation faite par le Worsfold Trust n’était pas volontaire, il n’a pas tenu compte des trois conditions restantes et a rejeté la demande d’examen de second palier.

 

Pénalités

 

[49]           Sur le fondement des décisions susmentionnées, les pénalités pour production tardive suivantes ont été imposées à tous les demandeurs :

            Demandeur principal :

                            Déclarations de revenu T1                                                   175 000 $

                            Déclarations de renseignements sur les biens étrangers         47 500 $

              Lyn Worsfold :                                                                                    12 500 $

              Stoneridge Management :                                                                      8 000 $

              Worsfold Trust :                                                                                  14 000 $

 

La pénalité totale pour production tardive pour l’ensemble des demandeurs s’élevait à 257 000 $.

 

[50]           Réagissant à ces décisions, les demandeurs ont déposé cinq avis de demande séparés. Par ordonnance de la Cour datée du 11 février 2011, ces demandes ont été fusionnées pour constituer la présente demande.

 

Questions en litige

 

[51]           Selon les demandeurs, les questions en litige sont les suivantes :

            1.         Le défendeur a-t-il commis une erreur de droit dans sa manière d’interpréter le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, ainsi que la circulaire IC00-1R et les Lignes directrices concernant le caractère volontaire des divulgations?

            2.         Les décisions du défendeur étaient-elles fondées sur des conclusions de fait raisonnables, reposant logiquement sur les documents qui lui avaient été soumis?

            3.         Le défendeur a-t-il respecté les principes de justice naturelle et d’équité procédurale dans ses décisions?

            4.         Le défendeur a-t-il agi de mauvaise foi dans le processus décisionnel?

 

[52]           Je reformulerais ainsi les questions soulevées :

            1.         Quelle norme de contrôle faut-il appliquer?

            2.         L’agent a-t-il commis une erreur en affirmant que les divulgations faites par les demandeurs avaient été provoquées par la vérification de Stoneridge?

            3.         L’agent a-t-il fondé ses décisions sur des conclusions de fait tirées d’une manière abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments versés au dossier?

            4.         L’agent a-t-il violé les principes de justice naturelle ou l’équité procédurale?

 

Observations écrites des demandeurs

 

Norme de contrôle

 

[53]           Selon les demandeurs, la norme de contrôle qu’il faut appliquer aux décisions faisant intervenir l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu est celle de la décision raisonnable. Pareillement, la norme de la décision raisonnable devrait s’appliquer aux conclusions de fait tirées sur lesquelles reposent ces décisions. Les questions d’équité procédurale doivent être contrôlées d’après la norme de la décision correcte.

 

Relation entre la mesure d’exécution et les demandeurs

 

[54]           Les demandeurs invoquent la sous-section 6a) de la circulaire IC00-1R, qui renferme notamment ce qui suit :

Une divulgation pourrait ne pas être admissible à titre de divulgation volontaire en vertu de la politique susmentionnée si l’on constate que le client a fait la divulgation parce qu’il était au courant d’une vérification, d’une enquête ou d’une autre mesure d’exécution de l’[ARC] ou d’autres autorités ou administrations pour lesquelles des ententes d’échange d’information avec l’[ARC] existent.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[55]           Selon les demandeurs, la Cour a jugé, dans la décision L’Heureux c Canada (Procureur général), 2006 CF 1180, [2006] ACF n° 1479, que les termes « vérification, enquête ou autre mesure d’exécution », dans le passage ci-dessus, ne devraient pas se limiter aux activités amorcées contre l’auteur de la divulgation (paragraphe 24). Ils affirment que, en l’espèce, aucune mesure d’exécution n’avait été prise à leur encontre. La mesure d’exécution en cause se rapportait plutôt à la vérification de Stoneridge, une tierce partie.

 

[56]           Les demandeurs invoquent la politique de l’ARC relative aux mesures d’exécution prise à l’encontre de parties tierces, une politique exposée dans la section 8.3.3 des Lignes directrices :

[traduction]

 

Dans certains cas, il peut aussi être approprié de décider s’il y a eu des mesures d’exécution touchant des secteurs de programmes connexes, des associés du contribuable ou des sociétés liées au contribuable. Dans tous les cas, il faut faire preuve de discernement pour décider si ces mesures devraient invalider une divulgation selon le lien de proximité entre les mesures et la divulgation.

 

[57]           Pour ce qui est des questions relatives à la mesure d’exécution et décrites dans la section 8.3.5 des Lignes directrices, les demandeurs affirment que, d’après ces questions, ce ne sont pas toutes les mesures d’exécution qui invalident une divulgation. Par ailleurs, le fait de ne pas tenir compte expressément de la deuxième des deux questions dans les motifs d’une décision prise au titre du PDV constitue une erreur susceptible de contrôle (voir la décision Poon c Canada, 2009 CF 432, [2009] ACF n° 1713, au paragraphe 26). Cette deuxième question traite de l’existence d’un lien entre la mesure d’exécution et les renseignements qui sont divulgués; il ne s’agit pas d’un lien entre telle partie et telle autre. Selon les demandeurs, leur position est étayée à la fois par la décision L’Heureux, précitée, et la décision Amour International Mines d’Or Ltée c Canada (Procureur général), 2010 CF 1070, [2010] ACF n° 1325.

 

[58]           Les demandeurs soutiennent que, dans ses décisions, l’agent a commis une erreur en se penchant uniquement sur la question de savoir s’ils avaient des liens avec Stoneridge, plutôt que sur celle de savoir si les renseignements divulgués avaient un lien avec l’objet de la vérification de Stoneridge. Ils soulignent l’admission de l’agent selon laquelle, bien que les déclarations du demandeur principal n’aient pas été examinées afin de déterminer la source du revenu, l’agent savait qu’aucun des demandeurs n’avait déclaré de revenu tiré de Stoneridge. En outre, l’agent n’avait pas examiné les déclarations T2 de Stoneridge pour savoir s’il existait un lien entre les renseignements figurant sur les déclarations de revenu de Stoneridge et les renseignements divulgués par chacun des demandeurs.

 

[59]           Les demandeurs affirment que, en limitant son examen aux relations entre les entités concernées, et en s’abstenant de considérer ce qui avait été divulgué et vérifié, l’agent a totalement écarté les questions relatives à la mesure d’exécution. Ce faisant, l’agent a commis une erreur de droit. Ses décisions devraient donc être annulées et renvoyées pour réexamen.

 

Conclusions de fait

 

[60]           Les demandeurs affirment aussi que la conclusion de l’agent selon laquelle les divulgations n’étaient pas volontaires était fondée sur deux conclusions de fait déraisonnables qui n’étaient pas étayées par les éléments au dossier, à savoir que :

            1.         le demandeur principal avait connaissance de la vérification de Stoneridge, ce qui a déclenché les divulgations de l’ensemble des demandeurs;

            2.         chacun des demandeurs était lié à Stoneridge, et la vérification de Stoneridge aurait permis de découvrir les renseignements divulgués par chacun des demandeurs.

 

[61]           Pour ce qui est de la première conclusion de fait, les demandeurs soutiennent que les décisions laissent entendre qu’ils avaient tous été informés de la vérification par Larry Burton ou par Brad Huggins avant la divulgation du 5 octobre 2005, et que c’est cet avertissement qui les avait incités à faire leurs divulgations. Cependant, d’après eux, le fait de soupçonner une telle connaissance antérieure ne peut à lui seul constituer le fondement d’une décision raisonnable. La décision doit être fondée sur une appréciation complète et objective des faits.

 

[62]           Les demandeurs disent avoir la preuve objective d’une autre raison expliquant le moment choisi par eux pour faire leurs divulgations. Cette raison a été décrite par le demandeur principal et par Paul DioGuardi dans les détails qu’ils ont fournis sur les faits antérieurs au dépôt de la divulgation formelle du demandeur principal. Des documents (reçus, courriels et relevés téléphoniques) ont été produits au soutien de ces allégations. Il faut tenir compte de ces éléments de preuve pour décider si les divulgations ont été faites après que les demandeurs avaient été avertis d’une vérification imminente. En outre, en préférant une version des faits à l’autre sans expliquer cette préférence, l’agent a commis une erreur.

 

[63]           Les demandeurs affirment aussi que le témoignage de l’agent en contre-interrogatoire révèle qu’il n’a pas tenu compte des pièces de correspondance et des mesures antérieures à la date à laquelle la vérificatrice avait tenté la première fois de communiquer avec Larry Burton. Or, ces éléments étaient pertinents, car ils appuyaient l’autre explication possible du moment choisi par les demandeurs pour faire leurs divulgations. S’ils ces éléments de preuve avaient été pris en compte, il n’y aurait pas eu lieu de soupçonner que le demandeur principal avait fait une divulgation uniquement parce qu’il avait connaissance de la vérification. Les demandeurs disent que ce refus de prendre en compte des éléments de preuve pertinents constitue une violation de l’équité procédurale et rend les décisions de l’agent déraisonnables.

 

[64]           Les demandeurs soulignent que l’agent n’a communiqué avec aucune des parties pour jauger leur crédibilité. Il a plutôt rendu ses décisions sur le seul fondement d’un exercice sur papier, et ses décisions ne commandent donc guère la retenue judiciaire. L’agent n’expliquait pas la raison d’être de ses soupçons et il n’a pas posé d’autres questions aux parties. Ses décisions ne sont donc pas étayées, et les demandeurs sont privés du droit d’être informés de ses doutes et de la possibilité de les dissiper.

 

[65]           Par ailleurs, les demandeurs affirment que la conclusion de l’agent selon laquelle le demandeur principal dirigeait activement Stoneridge était fondée sur une mauvaise interprétation des faits et n’était pas appuyée par la preuve. Ils invoquent à l’appui les éléments suivants : la signature de Larry Burton sur les déclarations de revenu de Stoneridge, le rôle constant exercé par Larry Burton dans les vérifications et la position de Larry Burton en tant que représentant de Stoneridge. Les demandeurs soulèvent aussi les faits suivants en ce qui concerne le demandeur principal : ses absences constantes du Canada en raison de ses voyages d’affaires à l’étranger, son emploi externe et le revenu appréciable qu’il tire de son travail de développement informatique, le fait qu’il ne tire aucun revenu de Stoneridge, sa déclaration à la vérificatrice selon laquelle Larry Burton et David Turk étaient responsables de la gestion quotidienne de Stoneridge parce qu’il était trop absorbé par ses autres sociétés et sa déclaration à la vérificatrice selon laquelle la seule fois où il était intervenu concernait une perte de droit de passage qui touchait deux des biens-fonds achetés par Stoneridge.

 

[66]           Pareillement, l’agent s’est livré à des conjectures en affirmant, sans aucune preuve, que le représentant officiel d’une société informerait immédiatement tous les administrateurs et actionnaires d’une vérification imminente.

 

[67]           Les demandeurs font aussi état de l’analyse restreinte que fait dans ses décisions l’agent à propos de la manière dont les demandeurs (autres que le demandeur principal) auraient été mis au fait de la vérification de Stoneridge.

 

[68]           Pour ces raisons, les demandeurs affirment qu’on ne leur a pas laissé le bénéfice du doute, comme cela est requis par la section 8.3.5 des Lignes directrices pour l’appréciation du caractère volontaire ou non d’une divulgation. L’agent n’a pas établi que la preuve permettait de conclure à un lien de causalité entre la notification d’une vérification imminente à une tierce partie et les divulgations faites par les demandeurs. Selon les demandeurs, les décisions de l’agent sont donc déraisonnables.

 

[69]           Pour ce qui est de la deuxième conclusion de fait, les demandeurs disent que l’agent a commis une erreur lorsqu’il a analysé les participations dans Stoneridge pour déterminer s’ils étaient liés à Stoneridge au sens de l’article 251 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Or, aucun des demandeurs ne pouvait être réputé lié à Stoneridge, car le demandeur principal n’avait dans la société qu’une participation indirecte représentant un tiers du capital, sans droit de contrôle, et qu’aucun des autres demandeurs ne détenait des actions de la société. Enfin, des observations avaient aussi été fournies à l’agent au cours de l’examen de second palier, lesquelles expliquaient l’absence de relation entre les demandeurs et Stoneridge. Il semble que l’agent n’en ait pas tenu compte.

 

[70]           Les demandeurs affirment aussi que la décision visant le demandeur principal ne précisait pas que, d’après l’agent, la vérification de Stoneridge aurait permis de découvrir les revenus que le demandeur principal a divulgués. Ainsi, l’agent ne s’est pas penché sur la deuxième des questions relatives aux mesures d’exécution. Au vu de la décision Poon, précitée, sa décision devrait donc être annulée.

 

[71]           Les demandeurs critiquent aussi l’approche adoptée par l’agent pour la vérification de Stoneridge, une approche fondée sur des conjectures qui entraîne un effet domino. Selon l’affidavit de l’agent, la vérification de Stoneridge aurait permis de découvrir que les demandeurs n’avaient pas produit de déclarations de revenu. Cependant, les demandeurs affirment que cette approche ne tient aucun compte des politiques de l’ARC, qui s’intéressent explicitement à la relation entre les renseignements visés par la vérification et les renseignements qui sont divulgués. Les demandeurs soutiennent aussi que la conclusion de l’agent selon laquelle davantage de renseignements auraient été découverts n’était qu’une supposition non étayée par la preuve. En fait, la portée restreinte de la vérification de Stoneridge n’aurait pas permis de découvrir les renseignements fournis par les demandeurs dans leurs divulgations volontaires.

 

[72]           Finalement, les demandeurs soutiennent que la phrase qui apparaît dans la lettre du 5 octobre 2005 : [TRADUCTION] « au fur et à mesure de la vérification, nous pourrions demander des documents additionnels se rapportant aux sociétés liées ainsi qu’à tous les actionnaires de telles sociétés » est une phrase type qui apparaît dans les avis de vérification. Traçant un parallèle avec l’affaire Amour Mines, précitée, les demandeurs affirment que la simple possibilité qu’un vérificateur puisse demander d’autres documents ne prouvait pas que la mesure d’exécution aurait déclenché une vérification en profondeur et aurait permis de découvrir les renseignements divulgués par eux. Il n’y avait rien non plus dans les observations du préposé à la sélection, dans les notes du vérificateur ou dans le plan de vérification qui ait pu donner à penser que l’ARC entendait procéder, ou avait procédé, à une vérification à l’égard des demandeurs.

 

Les principes de justice naturelle et l’équité procédurale

 

[73]           Selon les demandeurs, l’agent n’a pas respecté les principes de justice naturelle et l’équité procédurale en prenant ses décisions. Ils soutiennent que, lorsque l’ARC exerce son pouvoir discrétionnaire, elle doit agir et elle est censée agir de manière raisonnable et conformément à ses propres lignes directrices (voir l’arrêt Montréal (Ville) c Administration portuaire de Montréal, 2010 CSC 14, [2010] 1 RCS 427, au paragraphe 33).

 

[74]           Comme il est expliqué ci‑dessus, les demandeurs affirment que l’agent a commis plusieurs erreurs de procédure dans ses décisions, à savoir :

            1.         il n’a pas respecté les critères énoncés dans les Lignes directrices;

            2.         il n’a pas laissé aux demandeurs le bénéfice du doute;

            3.         il n’a pas fourni des motifs suffisants pour ses décisions;

4.         il s’est fondé sur des hypothèses et des conjectures pour étayer ses conclusions de fait;

5.         il s’est fondé sur des éléments de preuve non pertinents au sujet de la relation entre les parties;

            6.         il n’a pas tenu compte d’observations et d’éléments de preuve pertinents.

 

[75]           Les demandeurs reprochent à l’agent de ne pas avoir obtenu, pour les examens de second palier, le dossier complet de vérification et d’enquête. L’agent s’est plutôt fondé sur une preuve incomplète et sur les opinions et sommaires d’autres personnes, laissant ainsi subsister les biais et les erreurs relevés dans les examens de premier palier.

 

[76]           Les demandeurs affirment aussi que la durée du processus d’examens de second palier, c’est-à-dire plus de deux ans et demi, était inacceptable et devrait rendre invalides les décisions ultérieures.

 

[77]           Ainsi, les décisions n’ont pas été prises dans le respect des principes de justice naturelle et de l’équité procédurale.

 

[78]           En résumé, les demandeurs affirment que les décisions n’ont pas été prises conformément aux Lignes directrices et qu’elles reposent sur des motifs déficients et mal étayés. Elles étaient fondées sur des conjectures et ne peuvent pas résister à un examen approfondi. Ces décisions devraient donc être annulées et les demandes des demandeurs faites en vertu du PDV devraient être réexaminées.

 

Observations écrites du défendeur

 

Norme de contrôle

 

[79]           Selon le défendeur, la question de savoir si l’agent a manqué aux principes de justice naturelle ou d’équité procédurale est susceptible de contrôle suivant la norme de la décision correcte. En revanche, la question de savoir si l’agent a fondé ses décisions sur des conclusions de fait erronées tirées d’une manière abusive ou arbitraire ou en faisant abstraction des documents déposés est susceptible de contrôle suivant la norme de la décision raisonnable. Même si la Cour répondait à ces questions par l’affirmative, le défendeur affirme que la Cour devrait, dans sa décision, considérer le résultat de l’exercice, par l’agent, de son pouvoir discrétionnaire.

 

[80]           Le défendeur dit aussi que la norme de contrôle applicable aux décisions prises en vertu du PDV est celle de la décision raisonnable. Il souligne le caractère non structuré du pouvoir discrétionnaire extraordinaire du ministre et soutient que cela empêche la Cour de soumettre à un examen approfondi le processus décisionnel suivi.

 

Relation entre la mesure d’exécution et les demandeurs

 

[81]           Le défendeur mentionne les conditions d’une divulgation valide, qui sont prévues à la circulaire IC00-1R. D’après lui, la demande de contrôle judiciaire concerne la première de ces conditions, à savoir le fait que la divulgation doit être volontaire pour être valide. Le défendeur affirme qu’il n’est pas nécessaire que la mesure d’exécution soit prise à l’encontre du contribuable qui a fait la divulgation (voir la décision L’Heureux, précitée, au paragraphe 24). Pour trancher cette question, tous les faits pertinents doivent être pris en compte. Le défendeur soutient que, si l’agent conclut que la divulgation a été faite en raison de la connaissance d’une mesure d’exécution, il a alors un motif suffisant pour refuser la divulgation parce que cela démontre que la divulgation du contribuable n’est pas volontaire.

 

[82]           Pour ce qui est de Lignes directrices, le défendeur affirme qu’elles n’énoncent pas des critères rigoureux devant impérativement être appliqués lorsqu’on se demande si une divulgation est valide ou non.

 

[83]           Un lien direct entre la mesure d’exécution et les renseignements divulgués peut servir à prouver que la divulgation n’était pas volontaire, mais le défendeur soutient qu’un agent peut se fonder sur autre chose qu’un lien direct. Un agent peut aussi considérer des liens indirects, ou d’autres facteurs. Il s’agit notamment du fait que le contribuable n’aurait pas fait de divulgation si une mesure d’exécution n’avait pas été prise contre une partie liée, ou encore le fait qu’une partie liée ait fait une divulgation en réponse à une mesure d’exécution.

 

[84]           Selon le défendeur, la décision Amour Mines, précitée, n’est pas applicable ici. Le défendeur fait une distinction entre ce précédent, qui concernait une mesure d’exécution prise à l’encontre d’un actionnaire indirect, de la présente affaire, où la mesure d’exécution a été prise contre une société active. Le défendeur relève aussi que, dans l’affaire Amour Mines, il ne faisait aucun doute que la divulgation n’avait pas été provoquée par une mesure d’exécution prise par l’ARC.

 

[85]           Le défendeur soutient aussi que le sens du mot « lié », au sens qui lui est donné dans les Lignes directrices, est plus étendu que la définition donnée à l’article 251 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Il convient de souligner que Lignes directrices ne font pas mention de cette disposition de la Loi de l’impôt sur le revenu et que le PDV lui-même ne se limite pas à Loi de l’impôt sur le revenu, mais s’applique à de nombreux régimes législatifs. Le défendeur affirme donc que, plutôt que d’être employé au sens technique, le mot « lié » s’entend d’une relation plus ou moins étroite entre deux ou plusieurs personnes.

 

Conclusions de fait

 

[86]           Selon le défendeur, les conclusions de fait tirées par l’agent étaient raisonnables et justifiées compte tenu de la preuve. Sur ce point, il a présenté des observations sur les facteurs suivants :

            1.         le caractère volontaire de la divulgation du demandeur principal;

            2.         le caractère volontaire de la divulgation de l’épouse du demandeur principal;

            3.         le caractère volontaire de la divulgation de Stoneridge Management;

            4.         le caractère volontaire de la divulgation de Worsfold Trust;

            5.         l’obligation de l’agent de recueillir des renseignements additionnels;

            6.         la retenue que commandent les conclusions de fait de l’agent.

 

[87]           Sur le premier point, le défendeur dit que la conclusion de l’agent selon laquelle la divulgation du demandeur principal découlait de la mesure d’exécution prise contre Stoneridge était raisonnable et justifiée. Le défendeur souligne :

            1.         Les liens avec Stoneridge : le demandeur principal était un administrateur et un actionnaire important de Stoneridge.

            2.         Les transactions immobilières : le demandeur principal avait participé à des transactions immobilières avec Stoneridge qui figuraient dans les livres et registres de la société.

            3.         La chronologie des faits : la chronologie des faits, en particulier l’avis de vérification et le dépôt ultérieur des divulgations faites entre le 3 et le 5 octobre 2005.

            4.         La portée de la vérification : la portée de la vérification de Stoneridge (y compris des transactions immobilières et des déclarations T2 de sociétés liées) faisait qu’il était raisonnable de conclure que le demandeur principal savait que la vérification mènerait jusqu’à lui.

            5.         Le bien-fonds de Jennings : le rôle de Larry Burton et du demandeur principal dans la transaction immobilière Jennings rendait probable que Larry Burton ait informé le demandeur principal de la vérification.

            6.         L’absence de preuve : l’absence de preuve concrète produite par les demandeurs qui démontrerait que la divulgation du demandeur principal n’avait pas été provoquée par la mesure d’exécution – en particulier l’absence de preuve documentaire sur la teneur et l’objet des communications entre le demandeur principal et DioGuardi.

 

[88]           Le défendeur mentionne aussi les demandes antérieures des demandeurs faites à l’agent et priant celui-ci de ne pas communiquer avec les personnes concernées par la vérification et l’enquête visant le demandeur principal, après quoi les demandeurs avaient reproché à l’agent de s’être plié à ces demandes. Le défendeur affirme aussi que, même si certains renseignements figurant dans le dossier du PDV étaient inexacts, les demandeurs, bien qu’ils aient eu l’occasion de le faire, n’avaient pas soulevé ces inexactitudes ni montré qu’elles auraient changé quelque chose dans les décisions de l’agent.

 

[89]           Selon le défendeur, la décision Livaditis c Canada (Agence du revenu), 2010 CF 950, [2010] ACF n° 1184, n’est pas applicable à la présente affaire. Au lieu de préférer le compte rendu d’un autre agent de l’ARC à celui d’un contribuable, en l’espèce, l’agent a accordé davantage de poids aux éléments de preuve concrets qu’aux allégations du demandeur principal. L’agent pouvait soupeser la preuve de cette manière.

 

[90]           Le défendeur soutient aussi que l’agent n’a pas restreint son examen à la relation entre les parties, mais qu’il a considéré l’ensemble de la preuve ainsi que les liens entre les renseignements en cause. Se fondant sur cet examen, l’agent est arrivé à la conclusion raisonnable que la vérification de Stoneridge, une société fermée, aurait conduit au demandeur principal.

 

[91]           Finalement, le défendeur soutient que les raisons qu’avait le demandeur principal de faire la divulgation et le fait qu’il ait consulté DioGuardi ne rendent pas automatiquement sa divulgation volontaire. Le fait d’envisager une divulgation ne suffit pas, et un contribuable qui tarde à agir le fait à ses propres risques. Le contribuable doit prendre des mesures concrètes.

 

[92]           Selon le défendeur, la décision de l’agent quant à la divulgation de l’épouse du demandeur principal était elle aussi raisonnable. Tout vérificateur raisonnable appelé à examiner le dossier du demandeur principal aurait aussi considéré celui de l’épouse de ce dernier. En outre, l’épouse du demandeur principal était liée à Stoneridge non seulement par son mari, mais également par la transaction immobilière antérieure qu’elle avait conclue avec la société.

 

[93]           Le défendeur soutient que la décision de l’agent quant à la divulgation de Stoneridge Management était elle aussi raisonnable. Cette société était étroitement liée au demandeur principal, qui était l’unique administrateur et actionnaire et qui en tirait un revenu considérable.

 

[94]           Le Worsfold Trust est étroitement lié à la fois au demandeur principal et à son épouse. Les conjoints agissent comme fiduciaires de la fiducie, laquelle avait été établie pour leur avantage et celui de leurs enfants. Par ailleurs, comme le demandeur principal déclarait un revenu tiré d’une fiducie, cela aurait mené le vérificateur à chercher à savoir s’il existait d’autres fiducies dont le demandeur principal tirait un revenu. Finalement, les conjoints auraient également été tenus de produire, avec leurs déclarations de revenu, des bilans de vérification du revenu étranger.

 

[95]           Le défendeur affirme que l’agent n’était pas tenu de recueillir d’autres renseignements. En l’espèce, les demandeurs avaient présenté des observations et l’agent les avait examinées. Le pouvoir discrétionnaire de l’agent lui permettait tout à fait d’écarter les observations des demandeurs.

 

[96]           Finalement, le défendeur soutient que, par leurs observations, les demandeurs s’opposent essentiellement à la manière dont l’agent a apprécié la preuve. L’appréciation de la preuve est au cœur du pouvoir discrétionnaire de l’agent, et la cour qui exerce le contrôle n’a pas comme rôle d’examiner d’autres manières possibles d’apprécier la preuve. La Cour doit plutôt se demander si l’interprétation qu’en a faite l’agent était raisonnable.

 

Principes de justice naturelle et équité procédurale

 

[97]           Le défendeur affirme que l’agent n’a pas violé les principes de justice naturelle ou l’équité procédurale.

 

[98]           Premièrement, selon le défendeur, l’agent a agi d’une manière impartiale dans l’examen de second palier des divulgations des demandeurs. L’agent a tranché la question de savoir si les divulgations étaient volontaires en se fondant sur les faits de 2005 et non sur des faits ultérieurs. L’agent a non seulement préservé son indépendance, mais il a évité de discuter de l’affaire avec les personnes qui y avaient déjà été mêlées.

 

[99]           Deuxièmement, le défendeur soutient que c’est la circulaire IC00-1R qui est le document de politique où sont énoncées les conditions d’une divulgation volontaire, alors que les Lignes directrices ne sont qu’un document interne dont l’objet est d’aider les agents du PDV à faire leur travail; elles ne confèrent aucun droit aux demandeurs. Les Lignes directrices n’établissent aucun critère permettant de déterminer la validité d’une divulgation, et on ne peut pas s’attendre légitimement à ce que l’ARC les observe rigoureusement ou soit liée par elles. Le défendeur soutient aussi que les Lignes directrices ne sont pas censées donner une liste exhaustive des facteurs dont l’agent du PDV doit observer ou restreindre le pouvoir discrétionnaire du défendeur. En fait, la stricte application des Lignes directrices par un agent, sans que celui-ci exerce son discernement dans l’examen du bien-fondé d’un cas donné, constituerait une entrave à ce pouvoir discrétionnaire.

 

[100]       Le défendeur affirme aussi que la théorie de l’attente légitime confère uniquement des droits sur le plan procédural, non sur le fond. Par conséquent, le fait d’affirmer que les Lignes directrices doivent être rigoureusement observées serait leur conférer, à tort, un statut juridique alors qu’il ne s’agit que d’un document interne.

 

[101]       Selon le défendeur, la décision Poon, précitée, n’est pas applicable en l’espèce. C’est faire fi du pouvoir discrétionnaire d’un agent du PDV que de prétendre qu’un critère proposé dans un document interne doit obligatoirement être appliqué dans l’examen d’un dossier.

 

[102]       Finalement, le défendeur dit que les motifs exposés par l’agent étaient suffisants pour justifier les décisions qu’il a prises. Il souligne la description faite par l’agent au sujet des circonstances qui avaient conduit le demandeur principal à faire une divulgation. Il affirme aussi que l’agent a bel et bien considéré le lien entre la mesure d’exécution prise contre Stoneridge et les renseignements divulgués par les demandeurs.

 

Analyse et décision

 

[103]       Question n° 1

            Quelle norme de contrôle faut-il appliquer?

            Lorsque la jurisprudence a établi quelle norme de contrôle s’applique à une question dont est saisie la cour chargée du contrôle, cette dernière peut adopter cette analyse (voir l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[104]       La jurisprudence a clairement établi que la norme de contrôle applicable aux décisions discrétionnaires se rapportant au PDV est celle de la décision raisonnable (voir Charky c Canada (Procureur général), 2010 CF 1327, [2010] ACF n° 1641, aux paragraphes 20 et 21, L’Heureux, précité, au paragraphe 15, et Palonek c Canada (Ministre du Revenu national), 2006 CF 494, [2006] ACF n° 619, aux paragraphes 72 et 73). Cette norme de contrôle oblige la Cour à se demander si le processus décisionnel est transparent et intelligible et si la décision est rationnellement justifiée. Le résultat ultime, tout comme la manière dont il a été obtenu, doit appartenir « aux issues possibles acceptables » (voir l’arrêt Dunsmuir, au paragraphe 47, et la décision Livaditis, précitée, au paragraphe 25).

 

[105]       Les conclusions de fait tirées par l’agent pour arriver à ses décisions appellent également un degré élevé de déférence (voir la décision Spence c Canada (Agence du revenu), 2010 CF 52, [2010] ACF n° 51, au paragraphe 18).

 

[106]       En revanche, le contrôle des questions d’équité procédurale et de justice naturelle relève de la norme de la décision correcte. Les décisionnaires ne jouissent d’aucune déférence de la Cour à cet égard (voir l’arrêt Canada (Procureur général) c Sketchley, 2005 CAF 404, [2006] 3 RCF 392, aux paragraphes 52 à 54, et la décision Poon, précitée, au paragraphe 17).

 

[107]       Question n° 2

            L’agent a-t-il commis une erreur en affirmant que les divulgations faites par les demandeurs avaient été provoquées par la vérification de Stoneridge?

            En l’espèce, les décisions de l’agent reposent fondamentalement sur sa conclusion selon laquelle les divulgations des demandeurs avaient été provoquées par la vérification de Stoneridge, ce qui les rendait non volontaires.

 

[108]       Pour décider si les conclusions de l’agent sur le caractère volontaire des divulgations des demandeurs étaient raisonnables, il faut examiner attentivement les faits sous-jacents. D’abord, il n’est pas contesté que le demandeur principal a communiqué avec Paul DioGuardi, avocat spécialiste des amnisties fiscales, pour la première fois vers le 6 septembre 2005. Le 21 septembre 2009, Philippe DioGuardi, fils de Paul DioGuardi, a envoyé le courriel suivant au demandeur principal :

[traduction]

 

Taxamnesty.ca copie de sauvegarde d’une communication

 

De : support@taxamnesty.ca

 

Envoyé : 21 septembre 2005 18:37:25

 

À : GWORSFOLD61@HOTMAIL.COM

 

Voici notre avis sur votre situation fiscale actuelle :

 

Eu égard aux renseignements que vous nous avez fournis, vous êtes admissible à une amnistie fiscale. Étant donné le total des revenus ou des gains non déclarés, et sous réserve de votre statut de résident permanent, vous pourriez avoir commis l’infraction d’évasion fiscale suivant l’article 239 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Des poursuites pourraient se solder par une peine d’emprisonnement et des pénalités et amendes au criminel et au civil pouvant atteindre jusqu’à 250 % de l’impôt impayé. Une amnistie fiscale régularisera votre situation.

 

Voici ce que vous devez faire :

 

Communiquez avec moi cette semaine afin que je vous représente dans cette affaire. Vous pouvez me téléphoner au 613‑237‑2222, au 416‑657‑4408 ou au 1‑866‑758‑9030. Je vous expliquerai alors les services que nous offrons. En cherchant à vous obtenir une amnistie fiscale, je m’efforcerai de négocier un règlement avec les autorités, selon les modalités suivantes :

 

-          Aucune accusation d’évasion fiscale.

-          Renonciation totale à toutes les pénalités.

-          Une limite aux intérêts à payer, ou une limite au nombre d’années pour lesquelles vous devrez payer l’impôt et les taxes.

 

Votre identité sera toujours protégée par le privilège du secret professionnel de l’avocat. Votre nom ne sera révélé qu’après que vous aurez consenti à un règlement.

 

Il est extrêmement important que vous déposiez une demande d’amnistie fiscale avant que l’Agence du revenu du Canada ne découvre votre évasion fiscale. Je vous conseille de recourir à nos services afin de commencer immédiatement la procédure d’amnistie fiscale.

 

J’espère bien vous parler par téléphone le plus rapidement possible.

 

Veuillez agréer mes sentiments distingués.

 

Philippe DioGuardi

613-237-2222

416-657-4408

1-866-758-9030

 

[109]       Les relevés téléphoniques du demandeur principal montrent qu’il a téléphoné au cabinet d’avocats DioGuardi le 21 septembre 2009, date à laquelle une réunion a été fixée entre le cabinet DioGuardi et le demandeur principal. La réunion a eu lieu comme prévu et il a été décidé qu’une divulgation volontaire devait être faite. Il n’a pas été établi que la vérification de Stoneridge avait été abordée durant cette réunion.

 

[110]       Le 3 octobre 2005, la vérificatrice de l’ARC s’est d’abord entretenue avec Larry Burton, un administrateur de Stoneridge, pour l’informer de la vérification. Deux jours plus tard, dans l’après‑midi du 5 octobre 2005, la vérificatrice a envoyé par télécopie la lettre initiale de vérification à Brad Huggins, le comptable de Stoneridge. M. Huggins n’était pas le comptable du demandeur principal, et aucun élément de preuve n’établit clairement qu’il y a eu communication entre M. Huggins et le demandeur principal. La divulgation faite par le demandeur principal a été déposée une heure après que la vérificatrice eut envoyé par télécopie la lettre initiale de vérification à M. Huggins.

 

[111]       Dans le rapport relatif à la demande d’examen de second palier, l’agent a employé fréquemment les termes [traduction] « allégué » ou « prétendu » pour décrire certaines déclarations factuelles faites par le demandeur principal et ses conseillers fiscaux. L’agent a finalement conclu que, d’après les faits, les divulgations faites par les demandeurs n’étaient pas volontaires.

 

[112]       La règle selon laquelle une divulgation doit être volontaire est énoncée de la manière suivante à la première condition de validité d’une divulgation, dans la circulaire IC00-1R :

Conditions pour qu’une divulgation soit valide

 

6.         Pour qu’une divulgation volontaire soit valide, elle doit remplir les quatre conditions suivantes :

 

a)         L’ADRC détermine que la divulgation est volontaire.

 

La divulgation doit être volontaire. Le client doit prendre l’initiative de faire la divulgation volontaire. Une divulgation pourrait ne pas être admissible à titre de divulgation volontaire en vertu de la politique susmentionnée si l’on constate que le client a fait la divulgation parce qu’il était au courant d’une vérification, d’une enquête ou d’une autre mesure d’exécution de l’ADRC ou d’autres autorités ou administrations pour lesquelles des ententes d’échanges d’informations avec l’ADRC existent.

 

En l’espèce, il s’agit de la seule des quatre conditions de validité d’une divulgation qui est en litige.

 

[113]       La date d’entrée en vigueur de la divulgation est la date à laquelle l’ARC reçoit la divulgation. En l’espèce, cette date est le 5 octobre 2005.

 

[114]       Selon moi, rien ne permet de conclure qu’un seul des demandeurs savait que l’ARC allait procéder à la vérification de Stoneridge. En fait, la preuve indique le contraire. Le défendeur a admis qu’aucun élément de preuve n’établit clairement que le comptable de Stoneridge, M. Huggins, avait communiqué avec l’un des demandeurs. Les lettres de DioGuardi à l’ARC ne faisaient pas mention d’une vérification de Stoneridge.

 

[115]       En outre, les faits démontrent que c’est le demandeur principal qui a enclenché le processus qui a finalement conduit dépôt des divulgations volontaires le 5 octobre 2005. La divulgation volontaire n’entre pas en vigueur effective tant qu’elle n’est pas reçue par l’ARC, mais la chronologie des faits révèle que le processus de divulgation volontaire qui a été amorcé par le demandeur principal le 6 septembre 2005 n’avait pas été déclenché par la vérification de Stoneridge.

 

[116]       Le défendeur se contente de supposer que, après l’appel de la vérificatrice le 3 octobre 2005, l’administrateur Larry Burton aurait communiqué immédiatement avec tous les administrateurs et actionnaires, y compris avec le demandeur principal, qui était également administrateur. Selon le défendeur, cette prétendue communication aurait alors poussé le demandeur principal à déposer la divulgation volontaire. Je rejette cette conclusion, car elle n’est pas suffisamment étayée par les faits. Il s’agit d’une simple hypothèse.

 

[117]       Je note aussi que l’agent n’a pas examiné les faits présentés par M. DioGuardi et par le demandeur principal. La raison pour laquelle il a préféré se fonder sur une hypothèse plutôt que sur les autres faits n’apparaît pas clairement dans ses décisions. Par ailleurs, il faut aussi tenir compte de la dernière phrase de la section 8.3.5 des Lignes directrices :

[traduction]

 

Si la réponse à l’une ou l’autre de ces questions est « NON », on peut considérer que la divulgation est volontaire. Il faut accorder le bénéfice du doute au contribuable.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Vu le manque de preuves dans cette affaire, il semble que le « bénéfice du doute » n’a été laissé à aucun des demandeurs.

 

[118]       Je conclus que les demandeurs n’avaient pas connaissance de la vérification lorsqu’ils ont fait leurs divulgations.

 

[119]       Qui plus est, je note aussi la section 8.3.5 des Lignes directrices, qui expose les deux questions relatives aux mesures d’exécution :

[traduction]

 

8.3.5  Conséquences des mesures d’exécution

 

Ce ne sont pas toutes les mesures d’exécution qui rendent automatiquement une divulgation invalide. Si l’une des recherches ci-dessus suggère que l’ADRC ou un organisme connexe a pris des mesures d’exécution à l’encontre d’un contribuable faisant une divulgation, d’un associé ou d’une société liée, l’agent du PDV devra décider si la divulgation peut quand même être considérée comme volontaire. Par exemple :

 

·         La vérification portant sur les retenues à la source peut n’avoir aucun rapport avec une divulgation de TPS qui est faite;

 

·         L’ADRC a pu établir un protocole de vérification avec un contribuable ayant un dossier important, et le contribuable a pu divulguer une affaire qui n’a aucun rapport avec la vérification.

 

Par conséquent, lorsqu’un agent du PDV découvre qu’une mesure d’exécution a commencé contre un contribuable, il doit d’abord se poser les questions suivantes :

 

·         A-t-on communiqué directement avec le contribuable, ou le contribuable est-il susceptible d’avoir eu connaissance de la mesure d’exécution?

 

·         Est-il probable que la mesure d’exécution aurait permis à l’ADRC de découvrir les renseignements divulgués?

 

Si la réponse à l’une ou l’autre de ces questions est « NON », on peut considérer que la divulgation est volontaire. Il faut accorder le bénéfice du doute au contribuable.

 

[120]       Il importe d’abord de noter qu’aucun des demandeurs ne faisait l’objet d’une vérification. La vérification ou la mesure d’exécution visait Stoneridge, une société non liée. Le seul lien semble être le fait que le demandeur principal était l’un des administrateurs de Stoneridge.

 

A-t-on communiqué directement avec le contribuable, ou le contribuable est-il susceptible d’avoir eu connaissance de la mesure d’exécution?

 

[121]       Pour ce qui est de cette première question, j’ai déjà examiné les faits dans la mesure où ils concernent le demandeur principal. Puisque j’ai conclu qu’il n’est pas prouvé que le demandeur principal avait connaissance de la vérification de Stoneridge lorsqu’il a fait sa divulgation volontaire le 5 octobre 2005, il faut répondre à cette première question par la négative. Il en va de même pour les autres demandeurs, car il n’est pas établi qu’on avait communiqué avec eu ou qu’ils avaient eu connaissance de la mesure d’exécution visant Stoneridge.

 

Est-il probable que la mesure d’exécution aurait permis à l’ARC de découvrir les renseignements divulgués?

 

[122]       À cette étape, il peut être utile d’examiner un organigramme établi par un fonctionnaire de l’ARC, qui relie les diverses entités concernées.

[123]       Pour ce qui est du demandeur principal, l’agent devait décider s’il était probable que la vérification de Stoneridge aurait permis de découvrir les renseignements contenus dans la divulgation volontaire. J’ai examiné la décision de l’agent et je suis d’avis qu’il ne s’est pas penché sur cette question. Le mieux que l’on puisse dire, c’est que l’agent a examiné les relations entre certaines des parties.

 

[124]       Il ne fait aucun doute que les agents savaient qu’ils devaient répondre à cette question, car le courriel suivant avait été envoyé par Harold Howard, C.G.A., à George Deszpoth, l’agent chargé de l’examen de premier palier :

[traduction]

 

De :                 Howard, Harold [Harold.Howard@cra-arc.gc.ca]

Envoyé :          Jeudi 22 mars 2007 16 h 11

À :                   Deszpoth, George

Objet :             Cas PDV pour votre information

Signalement de suivi : Suivi

Statut du signalement :           Signalé

Pièces jointes : L’Heureux v AGC, 2006 FC 1180.doc

 

George, désolé, j’ai manqué votre appel. Mais j’ai pensé qu’il valait mieux vous répondre par courriel, car je voulais vous envoyer la décision ci-jointe.

 

Pour ce qui est de vos trois points :

 

[...]

 

Troisième point – mesure d’exécution contre une partie liée. Examinez la décision ci-jointe – elle pourrait éclairer la situation.

 

Questions à poser – Le revenu indiqué sur le feuillet T1 est-il rattaché à la vérification de la société? Dans l’affirmative, il y a un lien.

 

[...]

 

Harold Howard, CGA

Agent principal, PDV /

Enforcement & Disclosures Directorate / Direction de l’exécution et des divulgations

Compliance Programs Branch / Direction générale des programmes d’observation

Téléphone 613-946-5136 / Télécopieur 613-948-8792

 

[125]       Dans les observations orales des demandeurs, M. Howard est décrit comme le spécialiste de l’ARC pour les questions touchant les divulgations volontaires. À l’époque de la vérification, le demandeur principal n’avait indiqué avoir tiré aucun revenu de Stoneridge. Par conséquent, le revenu indiqué dans le feuillet T1 n’a aucun lien avec la vérification.

 

[126]       De plus, si l’agent avait soupesé les observations fournies par Paul DioGuardi à propos de cette question, il aurait fort bien pu conclure que l’ARC n’aurait pas, en conséquence de la vérification de Stoneridge, découvert les renseignements divulgués par le demandeur principal. Il n’y avait tout simplement aucun lien entre le revenu T1 reçu de Stoneridge Management et les conclusions de vérification issues de la mesure d’exécution prise contre Stoneridge. Il en va de même pour les autres demandeurs.

 

[127]       Dans la décision Poon, précitée, madame la juge Sandra Simpson, de la Cour fédérale, s’exprimait ainsi, aux paragraphes 21 à 26 :

[traduction]

 

[21]     La question est de savoir si, ayant indiqué dans la décision qu’il appliquait les Lignes directrices, le directeur était tenu de considérer la section 8.3.5 des Lignes directrices. On peut y lire que « Ce ne sont pas toutes les mesures d’exécution qui rendent automatiquement une divulgation invalide. »

 

[22]     Comme il est indiqué plus haut, les Lignes directrices donnent notamment à penser que :

 

[...] lorsqu’un agent du PDV découvre qu’une mesure d’exécution a commencé contre un contribuable, il doit d’abord se poser les questions suivantes :

 

[Question 1] A-t-on communiqué directement avec le contribuable, ou le contribuable est-il susceptible d’avoir eu connaissance de la mesure d’exécution?


[Question 2] Est-il probable que la mesure d’exécution aurait permis à l’ADRC de découvrir les renseignements divulgués?

 

Si la réponse à l’une ou l’autre de ces questions est « NON », on peut considérer que la divulgation est volontaire. Il faut accorder le bénéfice du doute au contribuable.

 

[23]     La décision mentionne les Lignes directrices et expose des motifs assez détaillés pour expliquer, en réponse à la première question, la raison pour laquelle le directeur a conclu que le demandeur avait connaissance de la mesure d’exécution prise par l’ARC contre APS.

 

[24]     Ce qui manque dans la décision, c’est le raisonnement et la conclusion du directeur à propos de la deuxième question.

 

[25]     Le demandeur a dit, au sujet de la deuxième question, qu’aucune mesure d’exécution prise par l’ARC à l’encontre d’APS n’aurait révélé toutes les sources personnelles de revenu décrites dans la divulgation personnelle. Plus précisément, il a mentionné le revenu d’investissement, le revenu de location et le revenu tiré d’employeurs autres qu’APS.

 

[26]     Le directeur n’a pas abordé la deuxième question dans la décision, et cela signifie qu’il n’a pas suffisamment expliqué pourquoi il a décidé de refuser la divulgation personnelle faite par le demandeur.

 

[128]       À mon avis, la situation est la même dans la présente affaire. La deuxième question sur laquelle l’agent devait se prononcer n’a tout simplement pas été abordée. L’examen des pièces au dossier n’est d’aucun secours ici. La décision de l’agent est donc déraisonnable et doit être annulée sur ce fondement.

 

[129]       En outre, pour ce qui est de la connaissance que les demandeurs avaient de la mesure d’exécution prise contre Stoneridge, la manière dont l’agent a considéré les éléments de produits par le demandeur principal et par son avocat Paul DioGuardi était déraisonnable. Pourquoi ces éléments de preuve n’ont-ils pas été admis? L’agent n’en a pas fait l’analyse et ne s’en est pas expliqué. Il a tout simplement considéré qu’il s’agissait d’« allégations ».

 

[130]       À mon avis, le même raisonnement vaut pour tous les autres demandeurs, et les décisions qui les concernent sont donc elles aussi déraisonnables.

 

[131]       Vu ma conclusion sur ce point, il n’est pas nécessaire de considérer les points restants.

 

[132]       La demande de contrôle judiciaire est accueillie, et le ministre doit réexaminer la requête des demandeurs en annulation des pénalités et intérêts au titre du PDV.

 

[133]       Les demandeurs ont droit à leurs dépens dans la présente demande.

 

[134]       Une copie des présents motifs et du jugement sera versée dans chacun des dossiers T‑2049‑10, T-2050-10, T-2077-10 et T-2078-10.

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


JUGEMENT

            LA COUR STATUE QUE :

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie, et le ministre doit réexaminer la requête des demandeurs en annulation des pénalités et intérêts au titre du programme des divulgations volontaires.

2.         Les demandeurs ont droit à leurs dépens dans la présente demande.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


ANNEXE

 

 

Dispositions légales applicables

 

Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, ch F-7

 

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

 

 

. . .

 

(4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas :

 

a) a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;

 

 

b) n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale ou toute autre procédure qu’il était légalement tenu de respecter;

 

c) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que celle-ci soit manifeste ou non au vu du dossier;

 

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

 

e) a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignages;

 

f) a agi de toute autre façon contraire à la loi.

 

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

 

. . .

 

(4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

 

(a) acted without jurisdiction, acted beyond its jurisdiction or refused to exercise its jurisdiction;

 

(b) failed to observe a principle of natural justice, procedural fairness or other procedure that it was required by law to observe;

 

(c) erred in law in making a decision or an order, whether or not the error appears on the face of the record;

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

(e) acted, or failed to act, by reason of fraud or perjured evidence; or

 

(f) acted in any other way that was contrary to law.

 

 


Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985 (5e suppl), ch 1

 

220.(3.1) Le ministre peut, au plus tard le jour qui suit de dix années civiles la fin de l’année d’imposition d’un contribuable ou de l’exercice d’une société de personnes ou sur demande du contribuable ou de la société de personnes faite au plus tard ce jour-là, renoncer à tout ou partie d’un montant de pénalité ou d’intérêts payable par ailleurs par le contribuable ou la société de personnes en application de la présente loi pour cette année d’imposition ou cet exercice, ou l’annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

 

. . .

 

239. (1) Toute personne qui, selon le cas :

 

. . .

 

d) a, volontairement, de quelque manière, éludé ou tenté d’éluder l’observation de la présente loi ou le paiement d’un impôt établi en vertu de cette loi;

 

. . .

 

commet une infraction et, en plus de toute autre pénalité prévue par ailleurs, encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire :

 

f) soit une amende de 50 % à 200 % de l’impôt que cette personne a tenté d’éluder;

 

g) soit à la fois l’amende prévue à l’alinéa f) et un emprisonnement d’au plus 2 ans.

 

 

251. (1) Pour l’application de la présente loi :

 

a) des personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance;

 

b) un contribuable et une fiducie personnelle (sauf une fiducie visée à l’un des alinéas a) à e.1) de la définition de « fiducie » au paragraphe 108(1)) sont réputés avoir entre eux un lien de dépendance dans le cas où le contribuable, ou une personne avec laquelle il a un tel lien, aurait un droit de bénéficiaire dans la fiducie si le paragraphe 248(25) s’appliquait compte non tenu de ses subdivisions b)(iii)(A)(II) à (IV);

 

c) en cas d’inapplication de l’alinéa b), la question de savoir si des personnes non liées entre elles n’ont aucun lien de dépendance à un moment donné est une question de fait.

 

(2) Pour l’application de la présente loi, sont des « personnes liées » ou des personnes liées entre elles :

 

a) des particuliers unis par les liens du sang, du mariage, de l’union de fait ou de l’adoption;

 

b) une société et :

 

(i) une personne qui contrôle la société si cette dernière est contrôlée par une personne,

 

(ii) une personne qui est membre d’un groupe lié qui contrôle la société,

 

(iii) toute personne liée à une personne visée au sous-alinéa (i) ou (ii);

 

 

c) deux sociétés :

(i) si elles sont contrôlées par la même personne ou le même groupe de personnes,

 

(ii) si chacune des sociétés est contrôlée par une personne et si la personne contrôlant l’une des sociétés est liée à la personne qui contrôle l’autre société,

 

(iii) si l’une des sociétés est contrôlée par une personne et si cette personne est liée à un membre d’un groupe lié qui contrôle l’autre société,

 

(iv) si l’une des sociétés est contrôlée par une personne et si cette personne est liée à chaque membre d’un groupe non lié qui contrôle l’autre société,

 

(v) si l’un des membres d’un groupe lié contrôlant une des sociétés est lié à chaque membre d’un groupe non lié qui contrôle l’autre société,

 

(vi) si chaque membre d’un groupe non lié contrôlant une des sociétés est lié à au moins un membre d’un groupe non lié qui contrôle l’autre société.

 

 

(3) Lorsque deux sociétés sont liées à une même société au sens du paragraphe (2), elles sont, pour l’application des paragraphes (1) et (2), réputées être liées entre elles.

 

(3.1) Lorsqu’il y a eu fusion ou unification de plusieurs sociétés et que la nouvelle société formée à la suite de la fusion ou l’unification ainsi que toute société remplacée auraient été liées immédiatement avant la fusion ou l’unification, si la nouvelle société avait existé à ce moment et si les personnes qui étaient les actionnaires de la nouvelle société immédiatement après la fusion ou l’unification avaient été les actionnaires de la nouvelle société à ce moment, la nouvelle société toute société remplacée sont réputées avoir été des personnes liées.

 

 

 

(3.2) En cas de fusion ou d’unification de plusieurs sociétés qui étaient liées (autrement qu’à cause d’un droit visé à l’alinéa (5)b)) les unes aux autres immédiatement avant la fusion ou l’unification, la société issue de la fusion ou de l’unification et chacune des sociétés remplacées sont réputées avoir été liées les unes aux autres.

 

 

(4) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

« groupe lié »

“related group”

« groupe lié » Groupe de personnes dont chaque membre est lié à chaque autre membre du groupe.

 

« groupe non lié »

“unrelated group”

« groupe non lié » Groupe de personnes qui n’est pas un groupe lié.

 

(5) Pour l’application du paragraphe (2) et de la définition de « société privée sous contrôle canadien » au paragraphe 125(7) :

 

a) le groupe lié qui est en mesure de contrôler une société est réputé être un groupe lié qui contrôle la société, qu’il fasse ou non partie d’un groupe plus nombreux qui contrôle en fait la société;

 

 

b) la personne qui, à un moment donné, en vertu d’un contrat, en equity ou autrement, a un droit, immédiat ou futur, conditionnel ou non :

(i) à des actions du capital-actions d’une société ou de les acquérir ou d’en contrôler les droits de vote, est réputée occuper la même position relativement au contrôle de la société que si elle était propriétaire des actions à ce moment, sauf si le droit ne peut être exercé à ce moment du fait que son exercice est conditionnel au décès, à la faillite ou à l’invalidité permanente d’un particulier,

 

 

(ii) d’obliger une société à racheter, acquérir ou annuler des actions de son capital-actions dont d’autres actionnaires de la société sont propriétaires, est réputée occuper la même position relativement au contrôle de la société que si celle-ci rachetait, acquérait ou annulait les actions à ce moment, sauf si le droit ne peut être exercé à ce moment du fait que son exercice est conditionnel au décès, à la faillite ou à l’invalidité permanente d’un particulier,

 

 

(iii) aux droits de vote rattachés à des actions du capital-actions d’une société, ou de les acquérir ou les contrôler, est réputée occuper la même position relativement au contrôle de la société que si elle pouvait exercer les droits de vote à ce moment, sauf si le droit ne peut être exercé à ce moment du fait que son exercice est conditionnel au décès, à la faillite ou à l’invalidité permanente d’un particulier,

 

(iv) de faire réduire les droits de vote rattachés à des actions, appartenant à d’autres actionnaires, du capital-actions d’une société est réputée occuper la même position relativement au contrôle de la société que si les droits de vote étaient ainsi réduits à ce moment, sauf si le droit ne peut être exercé à ce moment du fait que son exercice est conditionnel au décès, à la faillite ou à l’invalidité permanente d’un particulier,

 

c) lorsqu’une personne est propriétaire d’actions de plusieurs sociétés, elle est réputée, à titre d’actionnaire d’une des sociétés, être liée à elle-même à titre d’actionnaire de chacune des autres sociétés.

 

(6) Pour l’application de la présente loi :

 

 

a) des personnes sont unies par les liens du sang si l’une est l’enfant ou un autre descendant de l’autre ou si l’une est le frère ou la sœur de l’autre;

 

b) des personnes sont unies par les liens du mariage si l’une est mariée à l’autre ou à une personne qui est ainsi unie à l’autre par les liens du sang;

 

b.1) des personnes sont unies par les liens d’une union de fait si l’une vit en union de fait avec l’autre ou avec une personne qui est unie à l’autre par les liens du sang;

 

c) des personnes sont unies par les liens de l’adoption si l’une a été adoptée, en droit ou de fait, comme enfant de l’autre ou comme enfant d’une personne ainsi unie à l’autre par les liens du sang (autrement qu’en qualité de frère ou de sœur).

 

220.(3.1) The Minister may, on or before the day that is ten calendar years after the end of a taxation year of a taxpayer (or in the case of a partnership, a fiscal period of the partnership) or on application by the taxpayer or partnership on or before that day, waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by the taxpayer or partnership in respect of that taxation year or fiscal period, and notwithstanding subsections 152(4) to (5), any assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made that is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

 

 

 

. . .

 

239. (1) Every person who has

 

. . .

 

 (d) wilfully, in any manner, evaded or attempted to evade compliance with this Act or payment of taxes imposed by this Act, or

 

. . .

 

is guilty of an offence and, in addition to any penalty otherwise provided, is liable on summary conviction to

 

 

(f) a fine of not less than 50%, and not more than 200%, of the amount of the tax that was sought to be evaded, or

 

(g) both the fine described in paragraph 239(1)(f) and imprisonment for a term not exceeding 2 years.

251. (1) For the purposes of this Act,

 

 

(a) related persons shall be deemed not to deal with each other at arm’s length;

 

(b) a taxpayer and a personal trust (other than a trust described in any of paragraphs (a) to (e.1) of the definition “trust” in subsection 108(1)) are deemed not to deal with each other at arm’s length if the taxpayer, or any person not dealing at arm’s length with the taxpayer, would be beneficially interested in the trust if subsection 248(25) were read without reference to subclauses 248(25)(b)(iii)(A)(II) to (IV); and

 

(c) where paragraph (b) does not apply, it is a question of fact whether persons not related to each other are at a particular time dealing with each other at arm’s length.

 

 

(2) For the purpose of this Act, “related persons”, or persons related to each other, are

 

(a) individuals connected by blood relationship, marriage or common-law partnership or adoption;

 

(b) a corporation and

 

(i) a person who controls the corporation, if it is controlled by one person,

 

 

(ii) a person who is a member of a related group that controls the corporation, or

 

(iii) any person related to a person described in subparagraph 251(2)(b)(i) or 251(2)(b)(ii); and

 

(c) any two corporations

(i) if they are controlled by the same person or group of persons,

 

(ii) if each of the corporations is controlled by one person and the person who controls one of the corporations is related to the person who controls the other corporation,

 

(iii) if one of the corporations is controlled by one person and that person is related to any member of a related group that controls the other corporation,

 

(iv) if one of the corporations is controlled by one person and that person is related to each member of an unrelated group that controls the other corporation,

 

(v) if any member of a related group that controls one of the corporations is related to each member of an unrelated group that controls the other corporation, or

 

(vi) if each member of an unrelated group that controls one of the corporations is related to at least one member of an unrelated group that controls the other corporation.

 

(3) Where two corporations are related to the same corporation within the meaning of subsection 251(2), they shall, for the purposes of subsections 251(1) and 251(2), be deemed to be related to each other.

 

(3.1) Where there has been an amalgamation or merger of two or more corporations and the new corporation formed as a result of the amalgamation or merger and any predecessor corporation would have been related immediately before the amalgamation or merger if the new corporation were in existence at that time, and if the persons who were the shareholders of the new corporation immediately after the amalgamation or merger were the shareholders of the new corporation at that time, the new corporation and any such predecessor corporation shall be deemed to have been related persons.

 

(3.2) Where there has been an amalgamation or merger of 2 or more corporations each of which was related (otherwise than because of a right referred to in paragraph 251(5)(b)) to each other immediately before the amalgamation or merger, the new corporation formed as a result of the amalgamation or merger and each of the predecessor corporations is deemed to have been related to each other.

 

(4) In this Act,

 

 

“related group”

« groupe lié »

“related group” means a group of persons each member of which is related to every other member of the group;

 

“unrelated group”

« groupe non lié »

“unrelated group” means a group of persons that is not a related group.

 

(5) For the purposes of subsection 251(2) and the definition “Canadian-controlled private corporation” in subsection 125(7),

 

(a) where a related group is in a position to control a corporation, it shall be deemed to be a related group that controls the corporation whether or not it is part of a larger group by which the corporation is in fact controlled;

 

(b) where at any time a person has a right under a contract, in equity or otherwise, either immediately or in the future and either absolutely or contingently,

(i) to, or to acquire, shares of the capital stock of a corporation or to control the voting rights of such shares, the person shall, except where the right is not exercisable at that time because the exercise thereof is contingent on the death, bankruptcy or permanent disability of an individual, be deemed to have the same position in relation to the control of the corporation as if the person owned the shares at that time,

 

(ii) to cause a corporation to redeem, acquire or cancel any shares of its capital stock owned by other shareholders of the corporation, the person shall, except where the right is not exercisable at that time because the exercise thereof is contingent on the death, bankruptcy or permanent disability of an individual, be deemed to have the same position in relation to the control of the corporation as if the shares were so redeemed, acquired or cancelled by the corporation at that time;

 

(iii) to, or to acquire or control, voting rights in respect of shares of the capital stock of a corporation, the person is, except where the right is not exercisable at that time because its exercise is contingent on the death, bankruptcy or permanent disability of an individual, deemed to have the same position in relation to the control of the corporation as if the person could exercise the voting rights at that time, or

 

(iv) to cause the reduction of voting rights in respect of shares, owned by other shareholders, of the capital stock of a corporation, the person is, except where the right is not exercisable at that time because its exercise is contingent on the death, bankruptcy or permanent disability of an individual, deemed to have the same position in relation to the control of the corporation as if the voting rights were so reduced at that time; and

 

(c) where a person owns shares in two or more corporations, the person shall as shareholder of one of the corporations be deemed to be related to himself, herself or itself as shareholder of each of the other corporations.

 

(6) For the purposes of this Act, persons are connected by

 

(a) blood relationship if one is the child or other descendant of the other or one is the brother or sister of the other;

 

 

(b) marriage if one is married to the other or to a person who is so connected by blood relationship to the other;

 

 

(b.1) common-law partnership if one is in a common-law partnership with the other or with a person who is connected by blood relationship to the other; and

 

(c) adoption if one has been adopted, either legally or in fact, as the child of the other or as the child of a person who is so connected by blood relationship (otherwise than as a brother or sister) to the other.

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T-1944-10

 

INTITULÉ :                                      GRAHAM WORSFOLD, STONERIDGE

                                                            MANAGEMENT SERVICES INC.,

                                                            LYN WORSFOLD, JONATHAN COLES, EN

                                                            TANT QUE FIDUCIAIRES DE GR AND LS WORSFOLD LIFE INTEREST SETTLEMENT TRUST

 

                                                            - et -

 

                                                            LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 29 novembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 25 mai  2012

 

COMPARUTIONS :

 

Robert McMechan

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Natalie Worsfold

POUR LES DEMANDEURS

 

Hong Ky (Eric) Luu

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Robert McMechan Professional Corporation

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Natalie Worsfold

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 POUR LE DÉFENDEUR

 

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