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Date : 20120510

Dossier : IMM-6804-11

Référence : 2012 CF 565

[traduction certifiée non révisée]

Toronto (Ontario), le 10 mai 2012

En présence de madame la juge Mactavish

 

 

ENTRE :

 

JUE CHEN

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande d’asile de Jue Chen. Elle n’a pas cru que la demanderesse était une chrétienne pratiquante habitant Shanghai, qu’elle était recherchée par le Bureau de la sécurité publique (BSP) et que le BSP avait fait une descente dans l’église.

 

[2]               La Commission a toutefois accepté la preuve que Mme Chen était devenue chrétienne au Canada, mais elle a estimé qu’elle pourrait pratiquer sa foi en sécurité en Chine.

 

[3]               Bien que j’estime raisonnable la conclusion défavorable de la Commission en matière de crédibilité, je suis d’avis que le risque auquel Mme Chen serait exposée si elle tentait de pratiquer sa foi en Chine n’a pas été bien apprécié. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

 

La conclusion défavorable en matière de crédibilité

 

[4]               La Commission a signalé que Mme Chen avait fait sa demande d’asile quelques jours à peine après le refus de sa dernière demande visant à demeurer au Canada. La Commission pouvait raisonnablement considérer que le dossier d’immigration de l’intéressée et le moment où la demande d’asile avait été présentée pouvaient faire douter de la véracité des faits.

 

[5]               La Commission pouvait également trouver problématique que le BSP n’ait pas laissé d’assignation pour Mme Chen. Elle était au courant de la preuve documentaire indiquant que de telles assignations n’étaient pas toujours délivrées. Elle a aussi examiné minutieusement les faits particuliers de l’affaire et conclu qu’on pouvait raisonnablement penser qu’une assignation aurait été laissée chez la demanderesse.

 

[6]               Mme Chen avait soutenu que le BSP était venu chez elle 12 ou 13 fois, à sa rechercher, ce qui indique un intérêt plus que passager à son égard. Le fait que la famille de Mme Chen continue à vivre en sécurité à Shanghai et que son mari n’a jamais été emmené pour interrogatoire a également influé sur la décision de la Commission.

 

[7]               Dans les circonstances, la Commission pouvait raisonnablement conclure que l’absence d’assignation laissait planer un doute au sujet de la crédibilité des faits relatés par Mme Chen.

 

[8]               J’ajouterais que la Commission a fait état de plusieurs autres raisons de mettre la crédibilité de Mme Chen en doute, lesquelles n’ont pas été contestées par l’intéressée. Mme Chen ne m’a donc pas convaincue que la Commission avait erré en concluant à la non‑crédibilité de la déclaration qu’elle avait été persécutée par le BSP en raison de sa religion.

 

La demande d’asile sur place de Mme Chen

 

[9]               Même si elle n’avait pas jugé crédible l’affirmation de Mme Chen qu’elle était une chrétienne pratiquante lorsqu’elle vivait en Chine, la Commission a néanmoins estimé qu’elle l’était devenue au Canada. La Commission devait donc examiner la demande d’asile sur place.

 

[10]           La Commission a examiné si Mme Chen pourrait pratiquer sa foi en sécurité à Shanghai dans une petite église installée au sous‑sol d’une maison privée. Après examen de la preuve documentaire à ce sujet, elle a conclu que cela serait possible. Il s’agit là d’une conclusion qu’elle pouvait raisonnablement tirer compte tenu de la preuve dont elle disposait.

 

[11]           Toutefois, la Commission a commis une erreur en n’examinant pas si Mme Chen pourrait pratiquer librement d’autres aspects de sa religion en Chine. Il avait été mis en preuve devant elle que la religion de Mme Chen l’obligeait à prêcher publiquement l’évangile.  Bien que la question ait été expressément soulevée dans l’argumentation, la Commission n’a jamais examiné si Mme Chen pourrait faire du prosélytisme à Shanghai ni si l’impossibilité de le faire équivaudrait à de la persécution religieuse, en sorte que son appréciation de la demande d’asile sur place est déraisonnable.

 

Conclusion

 

[12]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est accueillie. Je souscris à la position des parties selon laquelle la présente affaire ne soulève pas de question à certifier.

 

 

 


JUGEMENT

 

            LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

 

            1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie, et l’affaire est renvoyée devant un tribunal différemment constitué pour nouvel examen;

 

            2.         Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

                                                                                                               « Anne Mactavish »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6804-11

 

 

INTITULÉ :                                      JUE CHEN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 9 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LA JUGE MACTAVISH

 

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 10 mai 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lindsey Weppler

POUR LA DEMANDERESSE

 

Norah Dorcine

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Blanshay &Lewis

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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