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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20120508


Dossier : T‑987‑11

Référence : 2012 CF 550

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 mai 2012

En présence de monsieur le juge de Montigny

 

 

ENTRE :

 

NEIL JOSEPH TOWNSEND

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LA FINANCIÈRE SUN LIFE

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

       MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie, sous le régime de l’article 14 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, LC 2000, c 5 [la LPRPDE], d’une demande relative à la plainte présentée par le demandeur au Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (le Commissariat) le 24 mars 2010. M. Townsend soutient que la Financière Sun Life a communiqué des renseignements médicaux le concernant à un tiers sans son consentement et qu’elle a manqué à l’obligation de protéger les renseignements personnels qu’elle possédait à son sujet.

 

[2]               Le Commissariat a rendu le 13 mai 2011 une décision selon laquelle [TRADUCTION] « la plainte concernant les mesures de sécurité et celle relative à l’utilisation et à la communication [étaient] toutes deux réglées ».

[3]               Le demandeur sollicite une ordonnance :

i)          enjoignant à la défenderesse de lui verser la somme de 352,56 $ au titre des frais liés à la fermeture des portefeuilles de retraite du Groupe Investors;

ii)         déclarant que la défenderesse a enfreint la LPRPDE et manqué à ses obligations fiduciaires envers lui;

iii)        obligeant la défenderesse à publier des avis énonçant les mesures prises pour éviter d’enfreindre la LPRPDE;

iv)        lui octroyant des dommages-intérêts de 25 000,00 $;

v)         lui adjugeant les dépens devant notre Cour;

vi)        prévoyant toutes autres mesures de réparation que notre Cour estimerait appropriées.

 

LES FAITS

 

[4]               Le 15 juillet 2009, le demandeur a présenté à la Financière Sun Life (Sun Life ou la défenderesse) une demande d’assurance de soins de longue durée avec l’aide d’un conseiller autorisé à vendre les produits Sun Life (le conseiller).

 

[5]               Sun Life a reçu le formulaire de demande rempli du demandeur le 22 juillet 2009. Le lendemain 23 juillet, cette demande a été enregistrée dans le système d’émission de polices de Sun Life pour traitement. Ce système a alors produit une confirmation sur le site Web de la société destiné aux conseillers (le site des conseillers).

 

[6]               Le 4 août 2009, Sun Life a communiqué la demande de M. Townsend, par courrier électronique sécurisé, à un fournisseur tiers, assureur chargé des demandes d’assurance de soins de longue durée présentées à Sun Life (l’assureur). L’assureur a à son tour chargé un autre tiers (le demandeur de renseignements médicaux) d’obtenir des renseignements médicaux complémentaires du demandeur et/ou de son médecin.

 

[7]               Le 14 août 2009, Sun Life a produit sur le site sécurisé de l’assureur un rapport confirmant la réception des dossiers médicaux de M. Townsend communiqués par le demandeur de renseignements médicaux. Le 27 du même mois, l’assureur a informé Sun Life par courriel de sa décision de remettre à plus tard, au motif d’un état pathologique, l’examen de la demande d’assurance de soins de longue durée présentée par M. Townsend.

 

[8]               Le 29 août 2009, le système d’émission de polices de Sun Life a produit sur le site des conseillers un message d’alerte automatique signalant que la demande d’assurance de M. Townsend était en suspens. Le 3 septembre de la même année, la décision de l’assureur a été enregistrée dans ce même système.

 

[9]               Le 7 janvier 2010, un consultant en relations avec la clientèle de Sun Life a répondu à une demande de renseignements de M. Townsend par une lettre contenant des renseignements médicaux sensibles. Une copie de cette lettre a été envoyée par erreur au conseiller du demandeur.

 

[10]           Le 20 janvier 2010, le service de protection de la vie privée de Sun Life a expédié au demandeur une lettre l’informant de cette communication involontaire. Malgré l’interversion de chiffres dans le numéro de son adresse, la Société canadienne des postes a bien livré cette lettre à M. Townsend.

 

[11]           Le 12 février 2010, Sun Life a envoyé au demandeur une autre lettre comportant la même erreur d’adresse. Cette lettre a été retournée à l’expéditeur. Après vérification, Sun Life a réexpédié cette lettre à la bonne adresse le 1er mars 2010.

[12]           Le demandeur a ensuite déposé auprès du Commissariat une plainte portant que la défenderesse avait manqué à l’obligation de protéger les renseignements personnels qu’elle possédait à son sujet, et qu’elle avait communiqué à son conseiller des renseignements médicaux le concernant à son insu et sans son consentement.

 

LA DÉCISION ATTAQUÉE

 

[13]           Le Commissariat a d’abord constaté que les allégations du demandeur entraînaient l’application des principes 4.3, 4.3.4, 4.6, 4.7, 4.7.1, 4.7.2 et 4.7.4 énoncés à l’annexe 1 de la LPRPDE, pour examiner ensuite en détail le contenu de ces allégations contre Sun Life.

 

[14]           Premièrement, le demandeur se plaignait de ce que Sun Life avait mal classé les renseignements médicaux le concernant. Le Commissariat a conclu que Sun Life avait assuré en tout temps la bonne garde des renseignements médicaux concernant le demandeur. Le problème s’était produit après que le personnel de la défenderesse eut négligé de mettre à jour le système d’émission de polices de manière à confirmer la réception de tous les dossiers médicaux de M. Townsend. Cette omission avait entraîné la production sur le site des conseillers d’un message informant le conseiller de M. Townsend que des [TRADUCTION] « conditions non encore remplies » empêchaient pour l’instant de poursuivre le traitement de la demande d’assurance de ce dernier. Sun Life a expliqué que la mention [TRADUCTION] « conditions non encore remplies » [outstanding requirements] était une réponse générique applicable à de nombreuses possibilités et que, en l’occurrence, elle signifiait qu’une décision de souscription n’avait pas encore été prise concernant l’assurance de soins de longue durée demandée par M. Townsend. Le Commissariat a accepté l’explication suivante de Sun Life : elle avait ajouté à l’été 2009 l’assurance de soins de longue durée au portefeuille des assurances qui pouvaient être vendues directement par des conseillers financiers; par suite, l’assurance de soins de longue durée avait exigé l’établissement de nouvelles politiques divisionnaires et la mise à jour manuelle des systèmes de la société au moment de la réception des décisions de souscription; or la demande d’assurance de M. Townsend avait été l’une des premières que la défenderesse avait administrées suivant la nouvelle procédure. La défenderesse a confirmé que les mises à jour se feraient automatiquement à partir de juin 2011.

 

[15]           Pour ce qui concerne les rapports avec les tiers – c’est‑à‑dire l’assureur et le demandeur de renseignements médicaux –, Sun Life a expliqué qu’elle est liée avec eux par des accords contractuels qui prévoient des mesures de confidentialité et de sécurité propres à assurer la protection des renseignements personnels. Qui plus est, Sun Life a pour pratique d’informer ses clients de la possibilité que les renseignements les concernant soient communiqués à des fournisseurs de services tiers. 

 

[16]           Le Commissariat a conclu que Sun Life n’avait pas contrevenu aux principes 4.7 et 4.7.1, et que, si elle avait dérogé durant un certain temps au principe 4.6, elle avait réglé ce problème.

 

[17]           Deuxièmement, le demandeur affirme que Sun Life n’avait pas pris de mesures de sécurité suffisantes pour garantir que les lettres lui étant destinées soient expédiées à la bonne adresse. À ce sujet, Sun Life a reconnu qu’elle avait expédié au demandeur deux lettres mal adressées et qu’une erreur humaine en était cause.

 

[18]           Sur ce point, le Commissariat a constaté que la première lettre avait été livrée directement au demandeur malgré l’erreur. Pour ce qui est de la seconde, elle avait été retournée directement à Sun Life. Par conséquent, l’erreur en question n’avait pas entraîné de communication non autorisée. Qui plus est, Sun Life avait pris des mesures pour remédier à la situation en corrigeant ses dossiers. En conséquence, estimait le Commissariat, Sun Life avait fait en sorte de remplir ses obligations sous le régime des principes 4.6 et 4.7.4 de l’annexe 1, et elle avait réglé le problème qui avait entraîné l’infraction.

 

[19]           Troisièmement, le demandeur se plaignait de ce que Sun Life avait communiqué sans son consentement des renseignements médicaux le concernant. À ce sujet, le Commissariat a constaté que la lettre en cause contenait des renseignements personnels sensibles touchant le demandeur, qui auraient dû faire l’objet de mesures de sécurité conformément au principe 4.7.2. Par conséquent, elle a conclu à une infraction manifeste au principe 4.3 de l’annexe 1. La lettre adressée au demandeur et contenant des renseignements médicaux n’aurait dû être communiquée qu’aux personnes ayant besoin de ces renseignements, et après obtention du consentement de M. Townsend. Sun Life avait donc contrevenu à ses propres procédures.

 

[20]           Le Commissariat a néanmoins accepté les explications de Sun Life selon lesquelles elle avait donné une formation de rappel sur les procédures à l’employé responsable de la communication accidentelle. De plus, Sun Life était entrée en rapport avec le conseiller du demandeur pour s’assurer que la lettre avait été détruite. En outre, le Commissariat a pris acte de ce que Sun Life avait mis à jour ses modèles de lettres aux clients en y ajoutant des messages contextuels pour rappeler aux consultants d’examiner avec soin le point de savoir si le conseiller du client destinataire devrait ou non recevoir copie de la lettre en cours de rédaction.

 

[21]           En résumé, le Commissariat a conclu que Sun Life avait réglé tous les problèmes relatifs aux mesures de sécurité, à l’utilisation et à la communication

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[22]           La présente demande soulève les questions suivantes :

a)        La défenderesse a‑t‑elle mal classé les renseignements médicaux concernant le demandeur, enfreignant ainsi les dispositions de la LPRPDE?

b)       La défenderesse a‑t‑elle enfreint les dispositions de la LPRPDE en envoyant copie au conseiller du demandeur de la lettre en date du 7 janvier 2010?

c)        La défenderesse a‑t‑elle enfreint les dispositions de la LPRPDE en envoyant au demandeur des lettres incorrectement adressées?

d)       Si la défenderesse a enfreint les dispositions de la LPRPDE, ces infractions ont‑elle causé un préjudice au demandeur?

 

ANALYSE

[23]           Les parties n’ont pas pris de conclusions touchant la norme de contrôle applicable. Toutefois, mon collègue le juge Mosley a bien défini cette norme dans Randall c Nubodys Fitness Centres, 2010 CF 681, 371 FTR 180 [Randall], où il a posé en principe que l’instruction d’une demande formée sous le régime de l’article 14 de la LPRPDE n’est pas un contrôle judiciaire de la décision contestée du commissaire, mais en fait un examen de novo des actes de la personne contre qui la plainte a été déposée (Randall, précitée, paragraphes 32 et 33). Par conséquent, si notre Cour conclut que la défenderesse a enfreint les dispositions de la LPRPDE, elle doit ensuite se demander quelles mesures de réparation il est possible de prononcer en faveur du demandeur (Randall, précitée, paragraphe 35).

 

a) La défenderesse a‑t‑elle mal classé les renseignements médicaux concernant le demandeur, enfreignant ainsi les dispositions de la LPRPDE?

[24]           Rien ne donne à penser que les renseignements médicaux concernant M. Townsend aient jamais été mal classés ou mal placés. La défenderesse a expliqué que le message générique automatisé reçu par M. Townsend et son conseiller, selon lequel toutes les conditions n’étaient pas encore remplies, ne signifiait pas qu’on avait mal classé un quelconque élément des renseignements médicaux. Même si le personnel de la défenderesse, comme celle‑ci l’a reconnu, a omis de mettre à jour le système d’émission de polices de manière à confirmer la réception des renseignements médicaux demandés, il ne s’ensuit pas qu’il y a eu atteinte à la vie privée du demandeur. En fait, M. Townsend a paru admettre, aussi bien à l’audience que dans son affidavit en date du 20 juillet 2011, que Sun Life avait protégé les renseignements médicaux le concernant et ne les avait pas mal classés. En conséquence, cette question n’est plus en litige.

 

b) La défenderesse a‑t‑elle enfreint les dispositions de la LPRPDE en envoyant une copie au conseiller du demandeur de la lettre en date du 7 janvier 2010?

[25]           Selon le principe 4.3 de l’annexe 1, toute communication de renseignements personnels est soumise à la condition préalable que la personne qu’ils concernent en soit informée et y consente. De plus, le principe 4.3.4 porte expressément que les renseignements médicaux sont presque toujours considérés comme sensibles, de sorte que le consentement à leur communication doit être plus explicite que ce n’est le cas pour d’autres catégories de renseignements.

 

[26]           Dans la présente espèce, Sun Life a admis volontiers avoir contrevenu au principe 4.3 en adressant une copie de la lettre du 7 janvier 2010 au conseiller de M. Townsend.

 

[27]           Toutefois, j’adhère à l’observation de la défenderesse selon laquelle, mis à part le fait que cette lettre contenait des renseignements médicaux personnels, il était compréhensible qu’elle en envoie une copie au conseiller. M. Townsend avait en effet intérêt à ce que son conseiller sache que Sun Life ne faisait que reporter l’examen de sa demande d’assurance. L’envoi d’une copie de la lettre en question au conseiller aurait donc été acceptable si l’on en avait retranché la phrase – il n’y en avait qu’une – touchant l’état pathologique du demandeur.

 

c) La défenderesse a‑t‑elle enfreint les dispositions de la LPRPDE en envoyant au demandeur des lettres incorrectement adressées?

[28]           Sun Life reconnaît avoir mal adressé par mégarde deux lettres destinées au demandeur. Des chiffres avaient été intervertis dans le numéro de l’adresse du fait d’une erreur humaine. C’est manifestement là une contravention au principe 4.6 de l’annexe 1, selon lequel les renseignements personnels recueillis doivent être exacts.

 

[29]           Cela dit, cette contravention mineure n’a eu aucune conséquence dans la présente espèce. La Société canadienne des postes a livré la lettre du 20 janvier 2010 à la bonne adresse. Quant à celle du 12 février de la même année, la poste l’a renvoyée à Sun Life non ouverte. Par conséquent, cette erreur n’a pas entraîné en fait de communication non autorisée.

 

d) Si la défenderesse a enfreint les dispositions de la LPRPDE, ces infractions ont‑elles causé un préjudice au demandeur?

[30]           L’article 16 de la LPRPDE confère à la Cour le pouvoir discrétionnaire d’accorder des réparations, y compris des dommages-intérêts pour humiliation. Dans la décision Randall, précitée, le juge Mosley a exprimé l’opinion que la Cour ne doit pas octroyer des dommages‑intérêts à la légère, mais seulement dans les cas les plus graves (paragraphe 55).

 

[31]           La jurisprudence est très mince concernant l’octroi de dommages-intérêts pour atteinte à la vie privée, en particulier dans le contexte de la LPRPDE. L’une des analyses les plus complètes de cette question se trouve dans Nammo c TransUnion of Canada Inc, 2010 CF 1284, 379 FTR 130 [Nammo], où mon collègue le juge Zinn a proposé d’utiles lignes directrices. S’inspirant de l’arrêt de la Cour suprême Vancouver (Ville) c Ward, 2010 CSC 27, [2010] 2 RCS 28, le juge Zinn a d’abord distingué trois fonctions des dommages-intérêts, soit l’indemnisation, la dissuasion et la défense du droit en cause, pour ensuite proposer une liste non exhaustive des facteurs à prendre en considération afin de décider si des dommages-intérêts s’imposent et d’en fixer le montant, soit les points de savoir :

i)    si l’octroi de dommages-intérêts sert les fins générales de la LPRPDE et favorise le respect des valeurs qu’elle exprime;

ii)   s’il convient d’en accorder dans le but de décourager de nouvelles violations;

iii)  si la violation est grave ou particulièrement odieuse.

(Nammo, précitée, paragraphe 76.)

 

[32]           Pour établir si la violation doit être considérée comme grave ou particulièrement odieuse, on peut appliquer les critères suivants :

i)    son effet sur la santé, le bien-être, ou la situation sociale, professionnelle ou pécuniaire du demandeur;

ii)   la conduite du défendeur avant et après cette violation;

iii)  le point de savoir si le défendeur a tiré profit de ladite violation.

(Randall, précitée, paragraphe 47.)

 

[33]           Dans la présente espèce, le demandeur réclame des dommages-intérêts de 25 000,00 $. Cependant, il n’a proposé aucun élément de preuve à l’appui de cette réclamation – mis à part ses affirmations – ni de précisions sur l’humiliation qu’il aurait subie du fait des actes de la défenderesse.

 

[34]           En fait, contrairement aux affirmations non étayées du demandeur, la défenderesse ne me paraît pas avoir agi de manière délibérée, brutale ou odieuse, ni d’une quelconque autre façon qui témoignerait d’un mépris complet de son droit à la vie privée. Il est louable de la part de la défenderesse de n’avoir jamais nié qu’elle avait commis les erreurs qu’on lui reproche. Qui plus est, aucun élément ne tend à prouver qu’elle ait agi de mauvaise foi ou tiré un avantage commercial de ces erreurs, ainsi que l’admet le demandeur. La Cour prend également acte que la défenderesse a présenté des excuses au demandeur à de nombreuses reprises (dossier de la défenderesse, affidavit de Rosemary Knez : pièce B, page 8; pièce D, pages 11 et 12; et pièce F, page 14), et qu’elle l’a même informé des mesures prises pour éviter que de telles erreurs ne se reproduisent (ibid., pièce D, page 11). À mon avis, la défenderesse a corrigé ses erreurs avec autant de promptitude que d’efficacité. Elle aurait peut-être dû, comme le fait valoir le demandeur, mettre ces mesures en place avant de commettre les erreurs qu’il lui reproche, mais on ne peut exiger la perfection de personne, et elle appliquait déjà un protocole détaillé avant que ne se produise ce qu’on ne peut considérer que comme des erreurs humaines.

 

[35]           En outre, le montant des dommages-intérêts réclamés est tout à fait disproportionné aux sommes dont fait état la jurisprudence de notre Cour. En effet, même dans les cas où cette dernière avait conclu à la mauvaise foi du défendeur, elle a accordé des montants inférieurs à ceux que M. Townsend réclame ici.

 

[36]           Par exemple, dans la décision Nammo, précitée, le juge Zinn a conclu que la défenderesse avait enfreint les dispositions de la LPRPDE en communiquant à la Banque Royale du Canada des renseignements financiers inexacts qui avaient entraîné le rejet de la demande de prêt de M. Nammo. Qui plus est, la défenderesse n’avait pas promptement corrigé son erreur et avait fait preuve de mauvaise foi en refusant d’en assumer la responsabilité. Or, dans ce contexte, la Cour n’a accordé au demandeur que 5 000,00 $ en dommages-intérêts.

 

[37]           Autre exemple : dans Landry c Banque Royale du Canada, 2011 CF 687, 391 FTR 153, la Cour a prononcé des dommages-intérêts de 4 500,00 $ seulement en réparation de ce qu’elle estimait être un « manquement grave de la préposée de la défenderesse », auquel s’ajoutait une « dissimulation subséquente » (paragraphe 32).

 

[38]           Vu les faits de la présente espèce, j’estime que la communication de renseignements personnels était sans gravité et que l’erreur d’adresse n’a causé aucun préjudice au demandeur. Je reconnais que les renseignements médicaux sont extrêmement sensibles et doivent faire l’objet du plus haut degré de protection. Toutefois, dans la présente affaire, sans vouloir minimiser la déception du demandeur, il n’a été communiqué que très peu de renseignements personnels, et seulement au conseiller de M. Townsend, qui semble ne pas s’en être aperçu et qui a ensuite détruit la lettre dès qu’on le lui a demandé. Qui plus est, la défenderesse s’est sincèrement excusée de l’infraction et a pris sans délai des mesures pour corriger ses politiques et procédures. Pour ces motifs, je n’estime pas nécessaire d’ordonner à la défenderesse de corriger ses pratiques, ou de publier un avis énonçant les mesures prises ou projetées à cette fin, ni de prononcer des dommages-intérêts en faveur du demandeur.

 

[39]           En outre, le demandeur n’a pas proposé d’arguments ni d’éléments de preuve à l’appui de sa réclamation de 352,56 $ au titre de frais liés à la fermeture des portefeuilles de retraite du Groupe Investors. De toute façon, je ne vois aucun lien clair et manifeste entre ces frais et les actes de la défenderesse. En conséquence, la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire de ne pas ordonner le paiement de ces frais.

 

[40]           Pour tous les motifs qui précèdent, la présente demande est rejetée, et chacune des parties supportera ses propres dépens.


JUGEMENT

 

LA COUR rejette la présente demande. Chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T‑987‑11

 

INTITULÉ :                                      NEIL TOWNSEND c LA FINANCIÈRE SUN LIFE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Regina (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 15 décembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE de MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 8 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Neil Townsend

 

LE DEMANDEUR

(SE REPRÉSENTANT LUI-MÊME)

 

Paul Harasen

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Neil Townsend

Regina (Saskatchewan)

 

LE DEMANDEUR

(SE REPRÉSENTANT LUI-MÊME)

Kanuka Thuringer, s.r.l.

Regina (Saskatchewan)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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