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Date : 20120626

Dossier : IMM‑7196‑11

Référence : 2012 CF 814

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 26 juin 2012

En présence de madame la juge Snider

 

 

ENTRE :

 

GURPINDER SINGH

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur, M. Gurpinder Singh, est un citoyen de l’Inde qui souhaite immigrer au Canada. Le 20 juillet 2009, il a demandé un visa de résident permanent au titre de la « catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) » décrite dans le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 [le Règlement].

 

[2]               Le demandeur a une formation de mécanicien de moteurs diesel. Il a fait valoir au soutien de sa demande qu’il pourrait s’établir économiquement au Canada en tant que personne satisfaisant aux critères de la catégorie 7321 de la Classification nationale des professions (la CNP) ‑ Mécaniciens/mécaniciennes et réparateurs/réparatrices de véhicules automobiles, de camions et d’autobus. Il avait une offre d’emploi au Canada, laquelle avait été confirmée par Service Canada dans un avis relatif à un emploi réservé (AER) positif.

 

[3]               La demande a été examinée par un agent d’immigration (l’agent) du Haut‑commissariat du Canada à New Delhi, en Inde. Le demandeur a obtenu les points suivants :

 

POINTS

MAXIMUM

ÂGE

10

10

ÉTUDES

12

25

COMPÉTENCE LINGUISTIQUE

 

05

24

 

EXPÉRIENCE

21

21

EMPLOI RÉSERVÉ

00

10

CAPACITÉ D’ADAPTATION

Études de l’épouse

 

04

10

TOTAL

52

100

 

[4]               Dans une décision datée du 25 août 2011, l’agent a rejeté la demande du demandeur parce que celui‑ci n’avait pas obtenu le minimum de 67 points nécessaire pour obtenir un visa de résident permanent à titre de travailleur qualifié.

 

[5]               Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision de l’agent. Il n’a soulevé qu’une seule question dans les observations qu’il a présentées de vive voix : l’agent a‑t‑il commis une erreur dans l’appréciation de son offre d’emploi réservé, ce qui l’a amené à attribuer moins de points pour les critères de l’adaptabilité et de l’emploi réservé?

 

[6]               C’est la norme de contrôle de la raisonnabilité qui s’applique à la décision de l’agent. Comme l’a enseigné la Cour suprême dans Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47, « [l]e caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Je crois que la décision qui est contestée en l’espèce ne satisfait pas à cette norme et elle sera annulée.

 

[7]               Il ressort de sa décision et de ses motifs, qui sont consignés dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration, que l’agent a établi un lien entre les compétences linguistiques du demandeur et l’emploi réservé. Plus précisément, il a conclu : [traduction] « Je ne suis pas convaincu que le demandeur satisfait à l’exigence en matière linguistique et qu’il sera ainsi en mesure d’exécuter les fonctions décrites dans l’offre d’emploi. » À mon avis, cette conclusion n’est pas étayée par la preuve.

 

[8]               L’offre d’emploi initiale ne précise aucune exigence en matière linguistique. La description de travail est ainsi libellée :

[traduction]

3.  L’EMPLOYÉ(E) convient d’exécuter les tâches suivantes en tant que mécanicien(ne) de moteurs diesel : installer, entretenir, diagnostiquer les défectuosités dans les véhicules automobiles, les camions, les roulottes et les remorques et les réparer. En particulier, régler, réparer ou remplacer les pièces et les composantes des systèmes des camions lourds de transport routier, comme les moteurs et les groupes propulseurs, les circuits d’alimentation en carburant, les dispositifs de freinage pneumatique, les mécanismes de direction et les systèmes hydraulique, électrique et électronique.

 

[Souligné dans l’original.]

 

[9]               Malgré cette offre, l’AER indique que le demandeur doit posséder des compétences en anglais oral et écrit. Je souligne cependant qu’aucun niveau linguistique particulier n’était précisé. Dans une lettre datée du 16 février 2011 (la lettre d’équité), le demandeur était informé de ce qui suit :

[traduction] À l’appui de votre demande de résidence permanente au Canada, vous avez produit une offre d’emploi de […] Cet emploi exige que vous parliez anglais et que vous écriviez dans cette langue au travail. Les résultats que vous avez obtenus au test de l’IELTS [test de langue] montrent que vous avez seulement une maîtrise élémentaire de l’anglais. Vous avez obtenu une note globale de 4,5, et je constate que votre résultat est de 5,5 pour l’anglais parlé et de 3,5 pour l’anglais écrit. J’ai des doutes quant à votre capacité d’exécuter les tâches décrites dans votre offre d’emploi.

 

[10]           La lettre d’équité montre deux choses importantes. Premièrement, les résultats du test de langue, même s’ils étaient faibles, confirment que le demandeur a « une maîtrise élémentaire de l’anglais ». Deuxièmement, la lettre d’équité indique à tort que l’emploi exige que le demandeur parle anglais et écrive dans cette langue au travail. Or, l’offre d’emploi ne disait rien de semblable. La seule référence aux compétences linguistiques se trouve dans l’AER, ce qui n’était pas mentionné dans la lettre d’équité.

 

[11]           Le demandeur a répondu aux doutes exprimés dans la lettre d’équité en produisant une lettre de son employeur éventuel, dans laquelle celui‑ci affirme que la plupart des employés parlent le pendjabi au travail et que [traduction] « nos techniciens ont peu de rapports avec les clients et doivent communiquer surtout avec les autres employés ».

 

[12]           Je ne vois pas comment cette preuve appuie la conclusion de l’agent selon laquelle le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences linguistiques qui lui permettraient d’exécuter ses fonctions. L’agent semble en fait ne pas avoir tenu compte de cette lettre de réponse. À mon avis, sa conclusion n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

[13]           Un résultat différent concernant l’emploi réservé aurait pu procurer dix points additionnels au demandeur au titre de ce critère et cinq points additionnels au titre de la capacité d’adaptation. Il semble donc que le résultat aurait pu être différent si l’agent avait apprécié de manière raisonnable l’offre d’emploi et les communications subséquentes.

 

[14]           En conséquence, j’accueillerai la présente demande de contrôle judiciaire. Je signale que je n’ordonne aucune décision particulière au regard du demandeur. Un agent d’immigration différent pourra, en effectuant son appréciation, rejeter ou accueillir la demande sur la foi de la preuve dont il disposera.

 

[15]           Aucune partie ne propose une question à certifier. Aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent d’immigration pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

 

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

« Judith A. Snider »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑7196‑11

 

 

INTITULÉ :                                                  GURPINDER SINGH c
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 19 juin 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LA JUGE SNIDER

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 26 juin 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lorne Waldman

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Asha Gafar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman et associés

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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