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Date : 20120503


Dossier : IMM‑4184‑11

Référence : 2012 CF 518

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 mai 2012

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

ZHAOBIN WANG

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

        MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Vue d’ensemble

[1]               M. Zhaobin Wang a demandé l’asile au Canada au motif qu’il craint d’être persécuté en Chine du fait de sa religion, en tant que fervent catholique romain. Il a affirmé que, en 2009, les autorités chinoises avaient fait une descente dans la maison-église qu’il fréquentait et arrêté certains de ses coparoissiens.

 

[2]               Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande d’asile de M. Wang aux motifs qu’il ne pouvait établir son identité, que sa version des faits n’était pas crédible et que le risque de persécution en Chine, en particulier dans la province où il habitait – le Fujian –, était faible.

 

[3]               M. Wang soutient que toutes les conclusions de la Commission sont déraisonnables et me demande d’annuler la décision de cette dernière. À mon avis, la conclusion de la Commission selon laquelle M. Wang n’a pas établi son identité est raisonnable, de sorte que je n’ai pas à décider si ses autres conclusions le sont aussi. En conséquence, force m’est de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[4]               Le seul point à trancher est celui de savoir si la conclusion de la Commission sur la question de l’identité est raisonnable.

II.         La décision de la Commission

 

[5]               La Commission a conclu que M. Wang n’avait pas prouvé qu’il habitât en Chine à l’époque pertinente. M. Wang a fait valoir qu’on ne lui avait pas demandé de produire de pièces justificatives. Or la Commission a noté qu’elle lui avait explicitement demandé d’en produire et qu’il n’avait fait aucun effort à cette fin. La Commission a conclu qu’aucun des documents fournis par M. Wang – soit un certificat de compétence professionnelle délivré en 2004 et le certificat de décès d’un oncle établi en 2008 – n’établissait en fait sa présence en Chine en 2009, au moment des faits de persécution allégués. En outre, la Commission a conclu que certains des documents produits par M. Wang étaient frauduleux.

 

•     M. Wang a produit une photocopie de sa carte d’identité de résident [CIR] de première génération, délivrée en 2002, ainsi qu’une pièce justificative et un récépissé afférents à une CIR de deuxième génération, datés de 2009. Il affirme que lorsqu’il a demandé une nouvelle CIR en 2009, le Bureau de la sécurité publique [BSP] a gardé sa carte précédente sans lui en délivrer de nouvelle. Cependant, la preuve documentaire porte que l’ancienne carte doit être rendue lorsqu’une nouvelle est délivrée. Qui plus est, M. Wang ne semblait pas se rappeler exactement quand il avait demandé sa nouvelle CIR. En conséquence, l’authenticité de la CIR de M. Wang est douteuse.

 

•     Selon la preuve documentaire, le demandeur de permis de conduire doit produire quatre photographies en couleur; or M. Wang dit n’en avoir produit que deux. Il a aussi déclaré qu’il n’y avait rien d’autre à produire pour obtenir un permis un conduire, mais il a plus tard convenu qu’il fallait aussi présenter un certificat de condition physique. En outre, M. Wang ne pouvait dire au juste en quelle année le permis avait été délivré, et celui‑ci paraissait falsifié.

 

[6]               La Commission a rappelé qu’elle n’était pas tenue de faire effectuer une analyse judiciaire des documents produits; voir Kazadi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 292; et Farooqi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1396. Elle a également pris acte de la fréquence de la production de documents frauduleux en provenance de Chine. Par conséquent, elle a attribué peu de poids aux documents produits par M. Wang et elle a conclu qu’il n’était probablement pas en Chine au moment de la rafle effectuée dans la maison-église.

 

[7]               La Commission a aussi conclu que, même si le témoignage de M. Wang avait surtout servi à étayer une demande d’asile frauduleuse, il lui incombait néanmoins d’établir s’il était véritablement chrétien. M. Wang a déclaré dans son témoignage devant la Commission qu’il était devenu membre d’une paroisse catholique peu après son arrivée au Canada. Il a produit un extrait de baptême, ainsi qu’une lettre de son curé selon laquelle il participait au culte depuis son arrivée au pays. Il a également fait preuve d’une certaine connaissance du catholicisme romain. Néanmoins, la Commission a conclu que M. Wang n’était pas un authentique catholique romain pratiquant et ne serait pas considéré comme tel en Chine. 

[8]               M. Wang a déclaré que le Bureau de la sécurité publique [BSP] était venu chez sa famille sept ou huit fois pour l’arrêter et fouiller la maison. Il a affirmé que le BSP n’avait pas laissé de citation ni de mandat d’arrêt à sa famille. Or, selon la preuve documentaire alléguée par la Commission, la police chinoise présente en général une citation lorsqu’elle veut interroger quelqu’un. La Commission a conclu qu’une citation aurait vraisemblablement été délivrée si les choses s’étaient passées selon la version de M. Wang, c’est‑à‑dire si le BSP était venu de nombreuses fois chez lui et avait arrêté certains de ses coparoissiens.

 

[9]               La Commission a quand même décidé en tout état de cause d’évaluer le risque de persécution auquel M. Wang serait exposé s’il était véritablement catholique romain. Elle a pris acte du fait que l’Église catholique a une très forte présence dans le Fujian. Les groupes catholiques clandestins y font l’objet de persécutions sporadiques, dirigées surtout contre le clergé et les laïques ordonnés. Les renseignements divergeaient touchant le sort des chrétiens dans cette province. Selon certaines sources, les autorités du Fujian étaient plus tolérantes que celles d’autres provinces chinoises, tandis que selon d’autres documents, les catholiques du Fujian sont « très contrôlés » par les autorités locales. Pour ce qui concerne cette province, les documents faisaient surtout état de persécutions dirigées contre les évêques et les prêtres, et ne citaient que peu de cas où fussent visés des membres ordinaires de l’Église catholique romaine.

 

[10]           En conséquence, la Commission a conclu que M. Wang n’avait qualité ni de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger.

 

III.       La conclusion de la Commission sur la question de l’identité est-elle déraisonnable?

 

[11]           M. Wang, s’il conteste plusieurs des conclusions de la Commission, n’a pas sérieusement mis en discussion celle qu’elle a formulée sur la question de l’identité. La Commission a conclu que les documents produits par M. Wang soit étaient frauduleux, soit n’établissaient pas sa présence en Chine au moment des faits de persécution allégués.

 

[12]           La Commission a conclu que l’explication donnée par M. Wang de la non-production de l’original de sa CIR ne cadrait pas avec la preuve documentaire objective. Cette conclusion était raisonnable eu égard à la preuve dont elle disposait. En outre, M. Wang ne pouvait dire avec certitude quand son permis de conduire avait été délivré, et, en tout en état de cause, ce document avait été falsifié. Il était raisonnable de la part de la Commission de rejeter ces éléments de preuve.

 

[13]           En outre, le certificat de compétence professionnelle de M. Wang ayant été délivré en 2004, il était raisonnable de la part de la Commission de ne pas l’accepter comme preuve de sa présence au Fujian en 2009. De même, le certificat de décès de l’oncle de M. Wang, comme il avait été établi en septembre 2008, ne contribuait en rien à prouver la présence du demandeur en Chine au moment des événements allégués, survenus en 2009.

IV.       Conclusion et décision

 

[14]           Il était raisonnable de la part de la Commission de conclure que la preuve relative à l’identité de M. Wang n’établissait pas sa présence en Chine au moment des faits de persécution allégués. En conséquence, force m’est de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé de question grave de portée générale à la certification, et aucune n’est certifiée.

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE COMME SUIT :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question n’est certifiée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                IMM‑4184‑11

 

INTITULÉ :                                              ZHAOBIN WANG

                                                                   c

                                                                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                   ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                      Le 11 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                     LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS:                               Le 3 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lindsey Weppler

 

 

POUR LE DEMANDEUR

Meva Motwani

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Blanshay & Lewis

Avocats en droit canadien de l’immigration

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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