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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20120208


Dossier : IMM-4501-11

Référence : 2012 CF 181

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 février 2012

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

CARMEN ROSA PINTO PONCE

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               Il s’agit d’une demande visée au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), concernant le contrôle judiciaire de la décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la CISR), rendue en date du 13 juin 2011, de rejeter la demande présentée par la demanderesse afin que la qualité de réfugié au sens de la Convention ou celle de personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi lui soit reconnue (la décision).

LE CONTEXTE

[2]               La demanderesse, une citoyenneté de Bolivie âgée de 38 ans, vit actuellement à Toronto et a une fillette d’un an. Celle‑ci est une citoyenne canadienne de naissance qui n’est pas partie à la présente demande.

[3]               La demanderesse a fait la connaissance de son ancien conjoint de fait, Manuel Rodriguez (Manuel), en 2004. Le couple s’est installé dans une maison à Cliza, en Bolivie, peu de temps après, puis Manuel a commencé à être violent physiquement et sexuellement à l’égard de la demanderesse. Il rentrait souvent ivre à la maison et interdisait à la demanderesse de voir sa famille. Le 4 mai 2005, Manuel a jeté la demanderesse sur le sol alors qu’ils se trouvaient dans leur maison et lui a donné des coups de pied. La demanderesse s’est rendue au poste de police de Cliza après cette agression.

[4]               Au poste de police, le policier qui a reçu la plainte de la demanderesse s’est moqué d’elle. Il a dit que, si Manuel s’en prenait à elle, elle devrait être une meilleure épouse et arrêter d’imputer ses problèmes à son mari. Il est ensuite allé dans son bureau et a fait un appel téléphonique. La demanderesse l’a entendu dire à son interlocuteur qu’une femme portait plainte contre Manuel. Le policier a ensuite dit à la demanderesse qu’il avait parlé à Demetrio Rodriguez, l’oncle de Manuel et un haut gradé de la police (Demetrio). Il a ajouté que Demetrio avait dit qu’elle devrait retourner chez elle et ne plus faire perdre de temps à la police. Demetrio a dit également que les policiers étaient là pour résoudre les crimes graves, non pour entendre les plaintes d’une femme incapable de rendre son mari heureux.

[5]               Le même jour, la demanderesse a consulté un médecin. Ce dernier lui a remis un rapport daté du 6 mai 2005, qui décrivait les blessures infligées par Manuel. La demanderesse n’est pas retournée au poste de police avec ce rapport.

[6]               La demanderesse n’a rien dit à Manuel au sujet de sa visite au poste de police. Pourtant, Manuel était furieux à son retour à la maison le lendemain. Il a dit à la demanderesse qu’elle l’avait ridiculisé devant son oncle et que ce qui se passait sous son toit ne regardait que lui. Pour montrer à la demanderesse que c’était lui qui commandait, il l’a battue et violée.

[7]               En juillet 2005, estimant que sa situation était devenue intolérable, la demanderesse a quitté son emploi et s’est enfuie de la maison pendant que Manuel était au travail. Elle est allée vivre avec son frère à Cochabamba, au Belize. Manuel a poursuivi la demanderesse jusque dans cette ville. Lorsqu’il l’a aperçue dans un marché, il l’a agrippée par les cheveux, l’a traînée sur le sol et lui a donné des coups de pied. Il lui a dit qu’elle allait retourner vivre avec lui, que cela lui plaise ou non. Des personnes qui se trouvaient dans le marché sont intervenues pour mettre fin aux actes de violence. Manuel a dit à la demanderesse qu’il n’en avait pas fini avec elle et il est parti.

[8]               La demanderesse a consulté un médecin de Cliza après cette agression. Ce médecin lui a également remis un rapport faisant état de ses blessures. La demanderesse est ensuite retournée au poste de police où elle était allée précédemment. Elle est retournée à ce poste de police parce qu’elle croyait qu’elle devait porter plainte à l’endroit où Manuel habitait. Le policier à qui elle a parlé – qui n’était pas le même que lors de sa première visite – lui a remis un formulaire à remplir. Une fois le formulaire rempli, le policier y a apposé un timbre et a remis à la demanderesse une lettre portant un timbre. Il lui a dit que la police appellerait Manuel. Elle lui a donc donné les coordonnées de ce dernier. Elle lui a aussi donné les coordonnées de ses parents à Cochabamba, mais elle ne lui a pas remis une copie du rapport du médecin qu’elle avait obtenu un peu plus tôt ce jour‑là. La demanderesse est ensuite retournée à Cochabamba.

[9]               Comme elle pensait qu’elle ne pouvait pas rester à Cochabamba et que Manuel la retrouverait à nouveau dans cette ville, la demanderesse est allée vivre avec son oncle à La Paz, en Bolivie. Elle ne sortait jamais parce qu’elle craignait que Manuel ne la retrouve comme cela s’était produit à Cochabamba. Elle a été informée par ses parents que Manuel était toujours à sa recherche et que la police ne faisait pas enquête sur la plainte qu’elle avait déposée contre lui.

[10]           L’oncle de la demanderesse lui a conseillé de quitter la Bolivie parce qu’elle n’était en sécurité nulle part dans ce pays. Elle a quitté la Bolivie le 22 août 2005 pour Managua, au Nicaragua, où elle a versé 1 300 $ US à un passeur pour qu’il l’emmène au Guatemala. Un deuxième passeur l’a ensuite conduite au Mexique et un troisième, au Texas, aux États‑Unis. De là, elle s’est rendue à Arlington, en Virginie. Elle a habité et travaillé dans la région jusqu’au 20 décembre 2009, lorsqu’elle est venue au Canada.

[11]           En juillet 2009, la demanderesse a pris des renseignements au sujet du système canadien de protection des réfugiés. Elle a embauché un passeur qui lui a fait traverser la frontière américano‑canadienne à Sherbrooke (Québec) le 20 décembre 2009. Elle a demandé l’asile le 22 décembre suivant.  

[12]           La SPR a instruit la demande d’asile de la demanderesse le 30 mai 2011. La demanderesse, son avocat, un agent de protection des réfugiés, un traducteur et le membre du tribunal de la SPR étaient présents à l’audience. Après celle‑ci, la SPR a étudié la demande d’asile de la demanderesse. Elle a rejeté cette demande le 13 juin 2011 et en a avisé la demanderesse le 28 juin suivant.

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[13]           La SPR a fondé sa décision uniquement sur la possibilité, pour la demanderesse, d’obtenir la protection de l’État et elle a conclu que la présomption de protection de l’État n’avait pas été réfutée.

[14]           La SPR a passé en revue les allégations de la demanderesse concernant les actes de violence commis à son endroit par Manuel, ses tentatives d’obtenir l’aide de la police bolivienne et son voyage de la Bolivie au Canada. Elle a indiqué qu’elle avait tenu compte des Directives de la présidente de la CISR intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe. Elle a aussi mentionné qu’elle avait tenu compte de l’ensemble de la preuve dont elle disposait, notamment un rapport psychologique préparé par Judith Pilowsky, une psychologue clinique spécialiste de la réadaptation de Toronto, le témoignage de la demanderesse et les observations des conseils.

La protection de l’État

[15]           S’appuyant sur Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689, la SPR a rappelé que les États sont présumés être en mesure de protéger leurs citoyens et que la protection internationale entre en jeu seulement lorsque le propre État du demandeur est incapable d’assurer sa protection. Bien que la demanderesse soit originaire de la Bolivie, la SPR a indiqué que le Costa Rica contrôle son territoire et dispose d’une force de sécurité efficace. Elle a aussi rappelé que, selon Carrillo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94, un demandeur d’asile doit, pour réfuter la présomption de protection de l’État, produire une preuve digne de foi et ayant une valeur probante suffisante pour convaincre la SPR, selon la prépondérance des probabilités, que la protection de l’État est insuffisante. La SPR a également indiqué qu’un demandeur d’asile ne peut faire valoir une réticence subjective de l’État pour réfuter la présomption (voir Camacho c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 830, au paragraphe 10) et que, plus le niveau de démocratie dans l’État à l’encontre duquel la protection est demandée est élevé, plus le fardeau de preuve incombant au demandeur d’asile est lourd.

[16]           La SPR a indiqué que, la Bolivie étant une démocratie, la demanderesse ne devait pas se contenter de démontrer qu’elle avait sollicité la protection de la police et que ses efforts à cet égard avaient été vains. La SPR a souligné qu’on ne peut s’attendre d’aucun gouvernement qu’il assure une protection parfaite et que les manquements locaux concernant la fourniture de cette protection ne sont pas suffisants pour réfuter la présomption de protection de l’État.

La preuve relative aux conditions existant en Bolivie

[17]           Après avoir passé en revue la preuve qui lui avait été présentée, la SPR a conclu que la Bolivie est une démocratie multipartite où le président, Evo Morales, a été élu en 2009 à la suite d’élections libres et justes. Elle a fait remarquer qu’il y avait eu certains problèmes en matière de droits de la personne en Bolivie, notamment des assassinats par les forces de sécurité, des conditions de détention très dures et des juges corrompus. Elle a constaté qu’en Bolivie le viol est un problème grave qui ne fait pas toujours l’objet d’un signalement, même s’il s’agit d’une infraction criminelle. De plus, elle a constaté également que le viol conjugal n’est pas un crime en Bolivie et que la violence contre les femmes est un problème répandu qui est peu signalé; les lois contre la violence conjugale en Bolivie n’ont pas toujours été appliquées et le gouvernement a pris peu de mesures importantes pour lutter contre cette violence. La SPR a fait remarquer que la brigade de protection de la famille (BPF) avait traité 70 792 dossiers de violence conjugale jusqu’en novembre 2010. La BPF est une instance policière chargée de traiter les cas d’agression qui ne constituent pas des crimes selon le code pénal bolivien et compte des sous‑services dans de nombreuses régions de la Bolivie.

[18]           Quoique les services offerts aux femmes victimes de violence conjugale soient limités, la SPR a indiqué que le Bolivie prenait des mesures pour régler le problème. Le gouvernement bolivien a réécrit une loi (la loi no 1674) afin de définir le rôle des BPF, des services juridiques municipaux et des organisations non gouvernementales dans la lutte contre la violence conjugale. Cette loi n’a cependant pas répondu aux attentes. En Bolivie, les municipalités sont tenues par la loi de fournir des refuges aux femmes. S’il n’existait que 13 refuges de ce genre au moment où elle a rendu sa décision, la SPR a fait remarquer que d’autres refuges allaient être créés prochainement. Les victimes de violence conjugale en Bolivie peuvent porter plainte contre leurs agresseurs auprès des BPF, des tribunaux de la famille et des centres de santé publique. De plus, une victime peut porter plainte auprès d’un ombudsman si elle n’est pas satisfaite de la réponse qu’elle a reçue.

Les efforts de la demanderesse

[19]           La SPR a constaté que la demanderesse n’avait rien fait après avoir tenté de déposer une plainte contre Manuel le 4 mai 2005, lorsque le policier s’est moqué d’elle et lui a dit de rentrer chez elle. En outre, la demanderesse n’a pas remis à la police une copie du rapport qu’elle avait obtenu de son médecin. La SPR a estimé que la demanderesse formulait une hypothèse lorsqu’elle a dit que le policier avait téléphoné à Demetrio et que sa première tentative d’obtenir la protection de l’État contre Manuel ne réfutait pas de manière crédible la présomption de protection de l’État parce qu’il s’agissait d’un manquement des autorités locales et qui était en outre seulement hypothétique.

[20]           La SPR a aussi examiné la deuxième plainte déposée par la demanderesse auprès de la police après que Manuel l’avait attaquée dans le marché de Cochabamba. Elle a fait remarquer que le deuxième policier avait consigné sa plainte et lui avait remis une lettre portant un timbre, même s’il travaillait au poste de police où elle avait porté plainte inutilement la première fois. Après être allée au poste de police une deuxième fois, la demanderesse s’est enfuie à La Paz, puis elle a quitté la Bolivie. La SPR a fait remarquer en outre que, à l’occasion de sa deuxième plainte, la demanderesse n’avait pas donné à la police une adresse où elle pouvait être rejointe à La Paz et ne l’avait pas informée de son départ de la Bolivie. La SPR a conclu que ces faits n’étaient pas suffisants pour réfuter la présomption de protection de l’État parce que le départ de la demanderesse de la Bolivie avait, dans les faits, mis fin à l’enquête policière sur l’agression commise contre elle par Manuel.

[21]           La SPR a fait remarquer également que la demanderesse avait vécu aux États‑Unis pendant quatre ans entre son départ de la Bolivie et la présentation de sa demande d’asile au Canada. Elle a conclu que la crainte que lui inspirait toujours Manuel était fondée sur la violence dont sa mère et sa sœur avaient été victimes et sur sa conviction que la police ne prend pas au sérieux la violence conjugale en Bolivie. Bien que la Bolivie ait eu de la difficulté à protéger les femmes contre la violence dans le passé, la SPR a indiqué que le pays reconnaît ses problèmes et fait des progrès en ce qui concerne la protection des femmes contre la violence conjugale.

            La conclusion

[22]           La SPR a conclu que la preuve ne la convainquait pas que la demanderesse avait été exposée à la persécution en Bolivie. Elle a conclu également que la demanderesse ne serait pas exposée à une menace à sa vie, au risque de traitements ou peines cruels et inusités ou au risque d’être soumise à la torture si elle retournait en Bolivie. En conséquence, elle a conclu que la demanderesse n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger et elle a rejeté sa demande d’asile.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[23]           La demanderesse soulève les questions suivantes dans sa demande :

a.                   La conclusion de la SPR concernant la protection de l’État était‑elle raisonnable?

b.                  Les motifs de la SPR étaient‑ils suffisants?

c.                   La SPR a-t-elle appliqué le critère approprié concernant la protection de l’État?

 

LA NORME DE CONTRÔLE APPLICABLE

[24]           La Cour suprême du Canada a statué dans Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, que l’analyse relative à la norme de contrôle n’a pas à être menée dans tous les cas. Lorsque la norme de contrôle applicable à une question particulière dont la cour est saisie est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut tout simplement appliquer cette norme. Ce n’est que lorsque cette démarche s’avère infructueuse que la cour de révision doit examiner les quatre facteurs faisant partie de l’analyse relative à la norme de contrôle.

[25]         Dans Carrillo, précité, la Cour d’appel fédérale a statué, au paragraphe 36, que la norme de contrôle qui s’applique à une conclusion relative à la protection de l’État est celle de la raisonnabilité. Cette approche a été suivie par le juge Leonard Mandamin dans Lozada c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 397, au paragraphe 17. La juge Danièle Tremblay-Lamer était arrivée à la même conclusion au paragraphe 11 de Chaves c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 193. La norme de contrôle applicable à la première question est celle de la raisonnabilité.

[26]           Récemment, la Cour suprême du Canada a statué, au paragraphe 14 de Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, que l’insuffisance des motifs ne permet pas à elle seule de casser une décision. En fait, « les motifs doivent être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles ». Le caractère suffisant des motifs sera analysé en fonction de la raisonnabilité de la décision dans son ensemble.

[27]           Lorsque la norme de la raisonnabilité s’applique, l’analyse portera sur « la justification de la décision, [...] la transparence et [...] l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi [que sur] l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. En d’autres termes, la Cour ne devrait intervenir que si la décision était déraisonnable en ce sens qu’elle ne fait pas partie des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

[28]           En ce qui concerne la troisième question, le juge Michael Kelen a statué, au paragraphe 12 de Ramotar c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 362, que, dans les cas où le demandeur prétend qu’un agent a appliqué le mauvais critère, la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision correcte. En outre, dans Saeed c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1016, le juge Yves de Montigny a statué, au paragraphe 35, que l’application, par la SPR, du critère relatif à la protection de l’État est assujettie à la norme de la décision correcte. Le juge Paul Crampton est arrivé à la même conclusion dans Cosgun c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 400, au paragraphe 30. La norme de contrôle qui s’applique à la troisième question est celle de la décision correcte.

[29]           La Cour suprême du Canada a statué, au paragraphe 50 de Dunsmuir, précité :

La cour de révision qui applique la norme de la décision correcte n’acquiesce pas au raisonnement du décideur; elle entreprend plutôt sa propre analyse au terme de laquelle elle décide si elle est d’accord ou non avec la conclusion du décideur. En cas de désaccord, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose. La cour de révision doit se demander dès le départ si la décision du tribunal administratif était la bonne.

 

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[30]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent à la présente demande :

Définition de « réfugié »

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa  nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa

résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

Personne à protéger

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au  sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

[...]

Convention refugee

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political

opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

Person in Need of Protection

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning ‑ of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or  incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care

 

 

[...]

LES PRÉTENTIONS DES PARTIES

La demanderesse

            La SPR a accepté sa preuve

 

[31]           La SPR n’a tiré aucune conclusion défavorable concernant la crédibilité dans sa décision, ce qui, selon la demanderesse, signifie que la SPR a accepté son récit de la violence dont elle a été victime en Bolivie et de ses tentatives d’obtenir une protection dans ce pays. La demanderesse affirme en outre que la SPR a jugé crédible la preuve qu’elle a produite pour démontrer que Manuel était toujours à sa recherche.

 

La conclusion concernant la protection de l’État était déraisonnable

La SPR n’a pas tenu compte de tous les éléments de preuve

 

[32]           La demanderesse prétend que la SPR a préféré, en ce qui concerne les conditions existant en Bolivie, des éléments de preuve plus anciens à des éléments de preuve plus récents.

[33]           La SPR s’est appuyée sur la Réponse à une demande d’information BOL102093.F de la CISR, datée du 15 décembre 2006 (la RDI de 2006), qui indiquait que la loi no 1674 n’avait pas tenu ses promesses. La RDI de 2006 indiquait également que ce ne sont pas toutes les BPF régionales qui reçoivent des plaintes de violence conjugale. En outre, elle mentionne que la loi no 1674 est préventive et non punitive et que, si les victimes de violence conjugale peuvent porter plainte auprès des services juridiques municipaux, de tels services sont offerts dans seulement 39 % des municipalités. La SPR a également fait référence à un rapport de 2009 de l’Agence canadienne de développement international ((le rapport de l’ACDI), selon lequel celle‑ci allait financer un refuge pour femmes en Bolivie.

[34]           La SPR a eu tort de préférer ces deux éléments de preuve à un rapport de 2011 du département d’État des États‑Unis intitulé Bolivia: Country Reports on Human Rights Practices for 2010 (le rapport du département d’État). Ce rapport établit que la violence conjugale est répandue en Bolivie et que la situation ne s’est pas améliorée. La conclusion tirée par la SPR relativement à la protection de l’État était déraisonnable parce que les éléments de preuve sur lesquels elle était fondée n’étaient pas les plus récents qui étaient disponibles. Si la SPR s’était appuyée sur les éléments de preuve les plus récents comme elle aurait dû le faire, elle aurait conclu que les femmes victimes de violence, dont la demanderesse, ne peuvent obtenir la protection de l’État en Bolivie. On ne peut pas dire que la SPR a tenu compte de toute la preuve dont elle disposait si sa conclusion est contredite par des éléments de preuve plus récents.

[35]           Dans Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1425, le juge John Evans a affirmé au paragraphe 17 :

[...] plus la preuve qui n’a pas été mentionnée expressément ni analysée dans les motifs de l’organisme est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que l’organisme a tiré une conclusion de fait erronée « sans tenir compte des éléments dont il [disposait] » : Bains c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 63 F.T.R. 312 (C.F. 1re inst.). Autrement dit, l’obligation de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. Ainsi, une déclaration générale affirmant que l’organisme a examiné l’ensemble de la preuve ne suffit pas lorsque les éléments de preuve dont elle n’a pas discuté dans ses motifs semblent carrément contredire sa conclusion. Qui plus est, quand l’organisme fait référence de façon assez détaillée à des éléments de preuve appuyant sa conclusion, mais qu’elle passe sous silence des éléments de preuve qui tendent à prouver le contraire, il peut être plus facile d’inférer que l’organisme n’a pas examiné la preuve contradictoire pour en arriver à sa conclusion de fait.

[36]           La demanderesse dit que la preuve documentaire présentée à la SPR montre clairement que la police bolivienne n’est pas capable d’accepter les plaintes de violence conjugale et d’y donner suite. La conclusion de la SPR selon laquelle la demanderesse n’a pas produit une preuve claire et convaincante réfutant la présomption de protection de l’État était déraisonnable.

                        La protection de l’État ne peut pas prendre la forme de changements futurs

[37]           La demanderesse affirme également que la SPR a eu tort de prendre en considération ce qui se passera en Bolivie en ce qui concerne la protection contre la violence conjugale et non ce qui se passe actuellement. Le rapport du département d’État, qui décrit la situation actuelle, contredit la conclusion de la SPR. Celle‑ci s’est appuyée de manière déraisonnable sur des changements qui ne se sont pas encore concrétisés pour conclure que la demanderesse peut obtenir la protection de l’État.

Le traitement de la preuve de la demanderesse était déraisonnable

[38]           Après s’être rendue au poste de police le 4 mai 2005 et avoir fait rire d’elle, la demanderesse n’a pas porté plainte à un officier supérieur. Elle affirme que la SPR a minimisé l’importance de sa rencontre avec le policier qui s’est moqué d’elle. La conclusion de la SPR selon laquelle elle aurait dû se plaindre de la conduite du policier à un officier supérieur n’était pas réaliste parce que Demetrio est un haut gradé de la police. Demetrio et le policier en question ont refusé de l’aider. En outre, la conclusion de la SPR selon laquelle elle avançait une hypothèse lorsqu’elle disait que le policier qui s’était moqué d’elle avait parlé à Demetrio était déraisonnable. Le policier a dit à la demanderesse qu’il avait parlé à Demetrio. De plus, le fait que Manuel avait battu la demanderesse après la visite de celle‑ci au poste de police montre que le policier avait téléphoné à Demetrio.

[39]           La SPR a omis de tenir compte de plusieurs éléments de preuve lorsqu’elle a conclu que le départ de la demanderesse avait mis fin à l’enquête policière sur sa deuxième plainte :

a.                   la demanderesse a fourni l’adresse de ses parents, mais la police n’a jamais communiqué avec personne;

b.                  Manuel continue de harceler sa famille et ses amis, ce qui montre que la police n’a pris aucune mesure contre lui;

c.                   la demanderesse craignait que Manuel obtienne son adresse si elle la donnait à la police;

d.                  la police n’a pas fait enquête sur la plainte qu’elle a déposée contre Manuel.

 

La SPR ne s’est pas intéressée aux personnes se trouvant dans une situation semblable à celle de la demanderesse

[40]           À l’audience, la demanderesse a témoigné que sa sœur aussi avait été victime de violence conjugale en Bolivie et qu’elle avait essayé de dénoncer cette violence, mais que la police n’avait pas voulu accepter sa plainte. La demanderesse soutient que la SPR n’a pas tenu compte de ce témoignage lorsqu’elle a conclu qu’elle aurait dû se plaindre à un officier supérieur de la conduite du policier à qui elle avait parlé. Le traitement réservé à sa sœur par la police et la preuve documentaire présentée à la SPR montrent qu’il ne sert à rien de demander la protection de la police contre la violence conjugale en Bolivie.

La SPR n’a pas pris en compte le bon pays

[41]           La déclaration de la SPR selon laquelle « le Costa Rica a le contrôle efficient de son territoire et peut compter sur une force de sécurité efficace pour faire observer les lois et la constitution du pays » montre que la SPR a pris en considération des documents qui ne concernent pas le bon pays. En conséquence, sa décision est déraisonnable.

Les motifs sont insuffisants

[42]           Selon la demanderesse, comme la SPR a omis de tirer une conclusion concernant la question de savoir si la protection de l’État offerte en Bolivie était suffisante, les motifs de sa décision sont insuffisants. Lorsqu’elle a statué que la Bolivie reconnaissait ses problèmes et avait fait des progrès, la SPR a omis de déterminer si ces progrès ont résulté en une protection de l’État suffisante (voir E.Y.M.V. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1364).

La SPR n’a pas appliqué le critère approprié concernant la protection de l’État

[43]           La SPR a fondé sa conclusion relative à la protection de l’État en partie sur les lois de la Bolivie. La demanderesse affirme toutefois que la preuve documentaire présentée à la SPR démontrait que ces lois sont inefficaces en pratique. De plus, dans Garcia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 79, le juge Douglas Campbell a statué au paragraphe 14 :

On ne saurait dire que l’État fait de « sérieux efforts » pour protéger les femmes du seul fait qu’il prend certaines mesures préventives avec diligence, par exemple en instituant des commissions d’enquête chargées d’examiner la réalité de la violence contre les femmes, en créant des postes de médiateurs chargés de recevoir les plaintes de femmes contre l’inertie policière, ou en organisant à l’intention des policiers des séminaires destinés à les sensibiliser à l’égalité des sexes. De tels efforts ne prouvent pas que l’État assure concrètement la protection des femmes, en d’autres termes, qu’il est capable, à l’heure actuelle de les protéger  [...] [Souligné dans l’original.]

[44]           Dans Elcock c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF no 1438, le juge Frederick Gibson a affirmé au paragraphe 15 :

Non seulement le pouvoir protecteur de l’État doit-il comporter un encadrement légal et procédural efficace mais également la capacité et la volonté d’en mettre les dispositions en œuvre.

[45]           Bien que la SPR ait conclu que des services de counseling, de l’aide juridique et médicale et des refuges étaient offerts en Bolivie, ceux‑ci ne satisfont pas à la norme de protection suffisante de l’État qui s’applique. Des lois boliviennes protègent les victimes de violence conjugale, mais il a été établi dans Garcia et Elcock, précitées, que la législation seule ne suffit pas; la législation doit se traduire en protection suffisante sur le terrain. En ne déterminant pas si la protection de l’État était suffisante, la SPR a appliqué le mauvais critère. En conséquence, l’affaire doit être renvoyée pour faire l’objet d’un nouvel examen.

Le défendeur

            La SPR a tenu compte de tous les éléments de preuve

 

[46]           Quoique la demanderesse ait prétendu que la SPR n’avait pas tenu compte du rapport du département d’État, le défendeur fait remarquer que la SPR a fait expressément référence à ce rapport aux paragraphes 10 à 12 de sa décision. Comme la SPR a pris en considération le rapport du département d’État, lequel allait à l’encontre de ses conclusions, Cepeda‑Gutierrez, précitée, ne s’applique pas en l’espèce.

La demanderesse n’a pas réfuté la présomption de protection de l’État

[47]           Selon Ward et Carrillo, précités, la protection de l’État se présume et cette présomption ne peut être réfutée qu’au moyen d’une preuve claire et convaincante. La Cour d’appel a dit dans Kadenko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] ACF no 1376, qu’il ne suffit pas de démontrer que le gouvernement d’un État ne réussit pas toujours à protéger ses citoyens. En l’espèce, il y avait une preuve claire et convaincante que la Bolivie est une démocratie, de sorte que la demanderesse avait donc le lourd fardeau de réfuter la présomption de protection de l’État. Or, elle n’a pas réussi à le faire.

[48]           Il ressortait de la preuve dont disposait la SPR que la demanderesse avait tenté d’obtenir la protection de l’État à deux reprises et qu’elle ne l’avait pas obtenue la première fois qu’elle avait eu recours à la police. La deuxième fois qu’elle a fait appel à la police, une copie d’une plainte en bonne et due forme lui a été remise, mais elle a quitté la Bolivie avant que l’enquête policière ne soit terminée. Sur la foi de la preuve dont elle disposait, la SPR a conclu de manière raisonnable que la demanderesse n’avait fait que peu de démarches pour obtenir la protection de l’État. Son témoignage selon lequel ses parents avaient fait le suivi auprès de la police n’est pas étayé par l’affidavit de sa mère qui a été produit devant la SPR.

[49]           La preuve documentaire présentée à la SPR était suffisante pour conclure que la demanderesse n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État. La SPR a fait référence à des éléments de preuve qui démontraient que les BPF avaient traité 70 792 cas de violence conjugale jusqu’en 2010. Selon la demanderesse, ce chiffre révèle une protection insuffisante. Le défendeur souligne cependant que Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Villafranca, [1992] ACF no 1189 (CAF), nous enseigne que la présomption de protection de l’État n’est pas réfutée par le fait que la protection est imparfaite.

[50]           Le défendeur s’appuie aussi sur la preuve présentée à la SPR pour affirmer que les BPF, auxquelles les victimes de violence conjugale et leur famille peuvent porter plainte, sont présentes dans de nombreuses régions de la Bolivie. La demanderesse a dit que des BPF n’existent pas dans toutes les régions, mais le défendeur fait valoir qu’elle n’a pas établi qu’il n’y en avait pas dans la région où elle vivait. Le nombre limité de BPF en Bolivie ne peut en soi réfuter la présomption de protection de l’État.

[51]           Par ailleurs, le gouvernement bolivien a adopté des lois pour lutter contre la violence conjugale. L’existence d’un cadre juridique est un indicateur valable des efforts d’un État de fournir une protection. La SPR a pris en considération non seulement l’existence des lois en question, mais également leur application.

[52]           Le défendeur reconnaît que la violence conjugale est répandue en Bolivie, mais il rappelle les propos suivants tenus par le juge Gibson au paragraphe 16 de Cho c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 1371 :

Dans Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c. Villafranca, le juge Hugessen écrit :

Aucun gouvernement qui affirme vouloir défendre les valeurs démocratiques et protéger les droits de la personne ne peut garantir à tous ses citoyens qu’ils seront toujours protégés. Dès lors, il ne suffit pas que le demandeur démontre que son gouvernement n’a pas toujours réussi à protéger des personnes dans sa situation. Le terrorisme au service d’une idéologie perverse est un fléau qui afflige aujourd’hui de nombreuses sociétés; ces victimes, bien qu’elles puissent grandement mériter notre sympathie, ne deviennent pas des réfugiés au sens de la Convention simplement parce que leurs gouvernements ont été incapables de supprimer ce mal.

On peut dire exactement la même chose au sujet du mal que représente la violence conjugale.

 

 

[53]           Par ses prétentions, la demanderesse invite la Cour à apprécier à nouveau la preuve. Or, ce n’est pas le rôle de la Cour. Comme la SPR a tenu compte de la preuve et a tiré une conclusion raisonnable, sa décision doit être maintenue.

Il incombe à la demanderesse de réfuter la présomption de protection de l’État

[54]           Malgré le fait que la demanderesse a soutenu que la SPR n’avait pas appliqué le critère approprié au regard de la question de la protection de l’État, le défendeur affirme que la SPR a bien énoncé le droit établi par Ward et Carrillo, précités, et par Hinzman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 171. La SPR n’avait pas l’obligation de tirer une conclusion sur la question de savoir si la protection de l’État était suffisante ou non. La demanderesse ne s’est tout simplement pas acquittée de son fardeau de réfuter la présomption de protection de l’État. La SPR a clairement appliqué le critère approprié lorsqu’elle a déterminé si la demanderesse avait réfuté la présomption de protection de l’État.

Le mémoire complémentaire du défendeur

[55]           Le défendeur soutient en outre que Newfoundland Nurses’ Union, précité, et Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, établissent que la norme de la décision correcte s’applique seulement lorsque la question en litige revêt une importance capitale pour le système juridique et est étrangère au domaine d’expertise du décideur. La conclusion de la SPR concernant la protection de l’État étant assujettie à la norme de la raisonnabilité, le fait de ne pas mentionner des éléments de preuve qui contredisent cette conclusion ne rend pas la décision déraisonnable. La cour de révision doit plutôt se demander si, « lorsqu’on les examine à la lumière des éléments de preuve dont il disposait et de la nature de la tâche que la loi lui confie, on constate que les motifs du [t]ribunal expliquent de façon adéquate le fondement de sa décision » (Newfoundland Nurses’ Union, au paragraphe 18).

[56]           En l’espèce, la décision de la SPR était raisonnable parce que celle‑ci a étayé de motifs clairs et intelligibles sa conclusion selon laquelle la demanderesse n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État. Comme cette conclusion fait partie des issues décrites dans Dunsmuir, la Cour ne devrait pas intervenir.

La demanderesse n’a pas tenté adéquatement d’obtenir la protection de l’État

[57]           Le défendeur affirme qu’il ne fait aucun doute que la SPR a rejeté la demande d’asile de la demanderesse parce que celle‑ci n’a pas réfuté la présomption de protection de l’État. La SPR a conclu que la protection de l’État était disponible après la deuxième plainte de la demanderesse, mais que celle‑ci a prématurément mis fin à l’enquête sur cette plainte en ne fournissant pas une adresse exacte à la police ou en ne l’informant pas qu’elle quittait la Bolivie. La demanderesse n’a pas porté plainte à une instance supérieure en Bolivie au sujet de la conduite du premier policier à qui elle avait parlé et n’a entrepris que peu de démarches pour obtenir la protection de l’État.

La conclusion concernant la protection de l’État était une issue possible

[58]           La demanderesse n’a pas fait de suivi auprès de la police au sujet de l’enquête et son allégation selon laquelle sa mère s’en est chargée pour elle n’est pas étayée par l’affidavit de cette dernière. En outre, en soutenant que le fait que Manuel est encore en liberté montre que la protection de l’État est insuffisante, la demanderesse semble laisser entendre que la police bolivienne aurait dû emprisonner Manuel sans procès, en raison uniquement de la force de ses allégations.

[59]           Si la demanderesse avait raison lorsqu’elle a affirmé à l’audience que ses parents lui ont dit que la police les avait informés qu’elle ne pouvait rien faire au sujet de Manuel, cela étaye en fait la conclusion de la SPR selon laquelle le départ de la demanderesse a mis fin à l’enquête sur sa plainte. La police bolivienne ne pouvait rien faire sans le témoignage de la demanderesse. La conclusion de la SPR concernant la protection de l’État est étayée par la propre preuve de la demanderesse et, comme le dossier permet cette conclusion, la Cour ne devrait pas intervenir.

La SPR a tenu compte de la preuve de manière appropriée

[60]           La demanderesse se sert de la RDI de 2006 tout en contestant l’utilisation que la SPR en a faite. Elle a fait référence à ce document à l’audience (voir la page 206 du dossier certifié du tribunal), et elle ne peut pas maintenant se plaindre du fait que la SPR s’est appuyée sur lui. Comme ce document faisait partie du Cartable national de documentation de la CISR concernant la Bolivie, la SPR pouvait en tenir compte.

[61]           Dans sa décision, la SPR a fait référence à des éléments de preuve qui contredisaient ses conclusions. De plus, elle a explicitement reconnu que la Bolivie avait de la difficulté à régler le problème de la violence conjugale. La preuve objective dont la SPR disposait démontrait également que l’agression est un crime selon le code pénal bolivien; le deuxième incident signalé par la demanderesse était une agression interdite par le code pénal bolivien. Bien que des éléments de preuve semblent indiquer que les lois visant spécifiquement la violence conjugale ne sont pas appliquées, la preuve ne démontre pas que le code pénal bolivien n’est pas appliqué.

[62]           Même si la preuve démontrait que jusqu’à 70 % des femmes boliviennes sont victimes de violence conjugale, cela ne signifie pas que la protection de l’État ne peut pas être obtenue. Ces statistiques révèlent l’ampleur d’un problème social, mais n’indiquent rien au sujet de la capacité de la Bolivie de protéger ses citoyens. Il n’est pas clair que les lois sur le viol conjugal s’appliquaient dans le cas de la demanderesse puisque celle‑ci n’était pas mariée avec Manuel.

[63]           Même si la mère et la sœur de la demanderesse ont peut‑être été victimes de violence conjugale, leurs expériences ne permettent pas de conclure à une absence de protection de l’État en l’espèce. Outre le témoignage de la demanderesse, aucun élément de preuve n’indiquait que la sœur de la demanderesse avait demandé la protection de l’État et ne l’avait pas obtenue. La mère de la demanderesse n’a pas déclaré dans son affidavit que la protection de l’État lui avait aussi été refusée. Les expériences de la mère et de la sœur de la demanderesse ne constituaient pas la preuve claire et convaincante nécessaire pour réfuter la présomption de protection de l’État.

            La SPR n’est pas tenue de mentionner tous les éléments de preuve

[64]           Le défendeur soutient que Newfoundland Nurses’ Union, précité, est présumé avoir infirmé Cepeda‑Gutierrez, précitée, et toute autre décision exigeant une conclusion ou une analyse particulière. Il souligne que Cepeda‑Gutierrez était fondée sur Singh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] ACF no 1044, où la Cour avait statué que le fait de ne pas mentionner un rapport constituait une erreur de droit. Depuis Alberta Teachers’ Association, précité, les questions de droit ne sont plus présumées être assujetties à la norme de la décision correcte. Cet arrêt établit plutôt que c’est la norme de la raisonnabilité qui s’applique en l’espèce; dans le contexte d’un examen de la norme de la raisonnabilité, la prétention de la demanderesse selon laquelle la SPR a omis de traiter d’éléments de preuve contradictoires est précisément le genre d’argument formaliste que la Cour suprême du Canada du Canada a rejeté dans Newfoundland Nurses’ Union. Cet argument ne saurait soulever une erreur susceptible de contrôle.

[65]           Subsidiairement, le défendeur affirme que Cepeda‑Gutierrez, précitée, n’établit pas ce que la demanderesse prétend. Dans cette affaire, le juge Evans a statué que la conclusion de la SPR concernant la persécution n’était pas entachée d’une erreur susceptible de contrôle, même si la SPR n’avait pas fait mention d’un élément de preuve contradictoire en particulier (voir le paragraphe 22). L’ensemble de la preuve établissait que les Cepeda‑Gutierrez ne couraient pas le risque d’être persécutés. Si la SPR mentionne les éléments de preuve justifiant l’inférence qu’elle s’est référée à cette preuve, il n’y a pas d’erreur susceptible de contrôle (Cepeda‑Gutierrez, au paragraphe 28). En l’espèce, la SPR a mentionné tous les éléments de preuve contradictoires qui lui avaient été présentés, de sorte que la Cour peut conclure qu’elle a tenu compte de l’ensemble de la preuve.

[66]           Le défendeur affirme en outre que, selon Nation-Eaton c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 294, Shen c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 1001, Pena c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 746, et Quinatzin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 937, Cepeda‑Gutierrez, précitée, ne s’applique pas à la preuve relative aux conditions existant dans un pays. Dans Monjaras c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 771, le juge Michael Kelen a statué aux paragraphes 20 à 22 :

Il est constant en droit que les motifs exposés par la SPR ne doivent pas être examinés à la loupe par une cour de justice et que la SPR n’est pas tenue de faire état de chaque élément qui lui a été soumis et qui va à l’encontre de sa conclusion, ni d’expliquer le poids qu’elle lui a accordé : décision Cepeda-Gutierrez c. Canada (MCI) (1998), 157 F.T.R. 35, 83 A.C.W.S. (3d) 264 (C.F. 1re inst.), rendue par le juge Evans (maintenant juge à la Cour d’appel), au paragraphe 16. La SPR est présumée avoir examiné toutes les preuves, cependant, plus les preuves qui ne sont pas mentionnées explicitement et analysées dans les motifs de la SPR sont importantes, plus une cour de justice sera encline à en déduire que la SPR a tiré sa conclusion sans tenir compte de la preuve : décision Cepeda-Gutierrez, précitée, au paragraphe 17.

La demanderesse a énuméré plusieurs jugements récents de la Cour où les conclusions de la SPR sur la protection de l’État ont été infirmées parce que la SPR avait analysé d’une manière sélective, voire laissé de côté, la preuve qui attestait une insuffisance de la protection de l’État : décision Gilvaja c. Canada (MCI), 2009 CF 598, rendue par le juge O’Keefe, au paragraphe 38; décision Mendoza c. Canada (MCI), 2008 CF 387, rendue par la juge Dawson, au paragraphe 15; décision Mejia c. Canada (MCI), 2010 CF 530, rendue par le juge Near, au paragraphe 17; décision Villicana c. Canada (MCI), 2009 CF 1205, rendue par le juge Russell, aux paragraphes 70 et 71. Dans tous ces précédents, la SPR avait négligé d’expliquer pourquoi elle privilégiait certaines preuves documentaires plutôt que des preuves documentaires et testimoniales substantielles et dignes de foi qui attestaient les lacunes de la protection de l’État.

En l’espèce, la SPR a reconnu, au paragraphe 14 de sa décision, que la violence contre les femmes était endémique au Mexique et que le dispositif de répression mis en place contre les abuseurs était cruellement déficient :

¶14 Dans ses observations soigneusement préparées, la conseil a mentionné plusieurs manquements de la part des autorités mexicaines relativement au traitement de la violence fondée sur le sexe, dont la culture d’acceptation de cette pratique, même parmi les personnes chargées d’appliquer les lois contre cette violence, la culture d’impunité à l’égard des auteurs de tels actes et les obstacles à la protection, comme la corruption, la situation financière des femmes, la discrétion des juges lorsqu’ils décident des mesures à prendre, et les aspects pratiques, comme les ordonnances qui ne prennent pas effet avant d’être signifiées aux agresseurs. Il ressort manifestement de la preuve documentaire que le Mexique mène une lutte constante contre la violence faite aux femmes, le crime et la corruption. Même si la preuve documentaire corrobore certaines craintes de la demandeure d’asile, elle comprend également de l’information sur les efforts actuellement déployés par le Mexique pour lutter contre le crime, la corruption et la violence faite aux femmes.

Au vu de l’extrait susmentionné, il est impossible de dire que la SPR a laissé de côté la preuve contraire. Sans doute n’a-t-elle pas fait état de documents précis, mais il ressort clairement de ses motifs qu’elle a lu et étudié les conclusions écrites des demandeurs, ainsi que les références documentaires qui y apparaissaient.

[67]           En l’espèce, la SPR a tenu compte de l’ensemble de la preuve présentée par la demanderesse et a examiné toutes ses prétentions. Il n’y a donc aucune raison de conclure que sa décision est déraisonnable.

 

Il incombait à la demanderesse de réfuter la présomption de protection de l’État

[68]           Lorsqu’elle prétend que la SPR n’a pas établi le caractère suffisant ou l’efficacité de la protection de l’État, la demanderesse lui transfère à tort le fardeau de la preuve. C’est à la demanderesse qu’incombe en tout temps le fardeau de démontrer que la protection de l’État était insuffisante. La SPR a conclu que la demanderesse pouvait obtenir la protection de l’État sans restriction ni condition, et elle savait que le critère applicable à la protection de l’État est celui du caractère suffisant.

[69]           Selon Newfoundland Nurses’ Union, précité, un tribunal n’a pas l’obligation de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement qui a mené à sa conclusion finale. Dans la mesure où les motifs permettent à la Cour de déterminer comment un résultat faisant partie des issues acceptables a été atteint, la décision doit être maintenue. La Cour ne devrait pas substituer sa propre opinion en qualifiant de fatales certaines omissions qu’elle a relevées dans les motifs (voir Newfoundland Nurses’ Union, au paragraphe 16).

ANALYSE

[70]           La crédibilité ne posait pas problème en l’espèce et la SPR a fondé sa décision sur le fait que la demanderesse n’avait pas produit « des éléments de preuve clairs et convaincants quant à l’incapacité de l’État de lui offrir une protection ».

[71]           La SPR a conclu que la demanderesse n’avait pas accompli des démarches suffisantes pour obtenir la protection de l’État, de sorte que ses expériences ne démontraient pas qu’elle n’aurait pas obtenu une protection suffisante si elle avait raisonnablement tenté de l’obtenir. La demanderesse a toutefois fait valoir, en faisant référence à la preuve pertinente, que les femmes victimes de violence conjugale ne sont pas protégées en Bolivie et que l’État ne veut pas ou ne peut pas la protéger.

[72]           Afin de répondre à ces prétentions, la SPR a passé en revue les documents sur les conditions existant en Bolivie et a conclu ce qui suit :

La demandeure d’asile est demeurée aux États‑Unis pendant les quatre années suivantes avant de présenter une demande d’asile au Canada, mais elle soutient que Manuel la cherche toujours. Elle craint que la police n’assure pas sa protection si elle retourne en Bolivie, parce que [traduction] « la police n’accorde aucune importance à la violence conjugale. C’est un comportement normal. » L’opinion de la demandeure d’asile est fondée en partie sur les expériences passées de sa mère et de sa sœur, qui ont été victimes de violence fondée sur le sexe. Je reconnais que la Bolivie a un passé peu reluisant en matière de protection des femmes victimes de violence conjugale et que, en plus, cette violence a déjà été socialement acceptée comme étant une réalité quotidienne. En revanche, comme cette demande d’asile est de nature prospective, je constate que la Bolivie montre une prise de conscience de ses problèmes passés et accomplit des progrès à cet égard en légiférant, en faisant appliquer ses lois et en poursuivant ses concertations entre le gouvernement, ses citoyens et d’autres pays au sujet des moyens à prendre pour corriger ses lacunes passées relativement à la violence conjugale.

 

 

[73]           À mon avis, la SPR a omis de déterminer si, nonobstant les initiatives gouvernementales mentionnées dans sa décision, la protection était suffisante en pratique. La SPR disposait assurément de nombreux éléments de preuve indiquant que le passé « peu reluisant » de la Bolivie en matière de protection des femmes victimes de violence conjugale n’avait pas changé. C’est pour cette raison qu’il était important qu’elle examine la situation sur le terrain et détermine si la présomption de protection de l’État avait été infirmée.

[74]           Plusieurs décisions récentes de la Cour portent sur cette question, mais je pense qu’il suffit de se référer aux indications données par le juge Mosley dans E.Y.M.V., précitée, aux paragraphes 13 et 16. Les propos qu’il a tenus dans cette affaire au sujet du Honduras peuvent s’appliquer en l’espèce :

La Commission a bien cerné les principes juridiques applicables aux demandeurs d’asile qui allèguent être victime de persécution aux mains d’acteurs non étatiques ainsi que la présomption de protection de l’État établis dans les arrêts Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Flores Carrillo, 2008 CAF 94, [2008] ACF no 399 (Carrillo). Le demandeur « doit produire une preuve pertinente, digne de foi et convaincante qui démontre au juge des faits, selon la prépondérance des probabilités, que la protection accordée par l’État en question est insuffisante » (Carrillo, précité, paragraphe 38). La protection de l’État n’a pas à être parfaite, mais elle doit être suffisante.

 

[...]

 

La Commission n’a fourni aucune analyse quant au caractère satisfaisant des efforts concrets déployés par le gouvernement du Honduras et par les acteurs internationaux pour améliorer la protection de l’État au Honduras. Bien que les efforts déployés par un État soient effectivement pertinents quant à l’analyse de la protection de l’État, ils ne sont ni déterminants ni suffisants (Jaroslav c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 634, [2011] ACF no 816, paragraphe 75). Les efforts doivent avoir, dans les faits, « véritablement engendré une protection adéquate de l’État » (Beharry c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 111, paragraphe 9).

 

[75]           En l’espèce, la SPR s’est appuyée sur la preuve de 2006, qui démontre comment la loi de 1995 sur la violence conjugale a été « réécrite », et sur le rapport de l’ACDI, dans lequel la SPR a relevé qu’un refuge allait être construit avec les fonds de l’ACDI et que les choses « [sont] sur le point de changer » en Bolivie. Le rapport du département d’État semble toutefois indiquer que la situation ne s’est pas améliorée et confirme :

1.                  que la violence contre les femmes est répandue;

2.                  que 70 % des femmes sont victimes de violence en Bolivie;

3.                  que le viol conjugal n’est pas un crime;

4.                  que le gouvernement a pris peu de mesures utiles ou concrètes pour lutter contre la violence conjugale;

5.                  que les BPF, qui sont censées aider les femmes, manquent de structures et de ressources financières et humaines pour donner suite aux plaintes et que la plupart des cas ne sont pas signalés.

 

[76]           Compte tenu de cette preuve, je pense qu’il était déraisonnable que la SPR ne se penche pas sur ce que le juge Mosley appelle « le caractère satisfaisant des efforts concrets » du gouvernement de la Bolivie avant de conclure que la demanderesse n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État. Si la SPR l’avait fait, son opinion sur les efforts de la demanderesse aurait bien pu être différente.

 

[77]           Les avocats conviennent qu’il n’y a aucune question à certifier et la Cour partage leur avis.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

 

1.                  La demande est accueillie. La décision de la SPR est annulée et l’affaire est renvoyée à un tribunal de la SPR différemment constitué pour faire l’objet d’un nouvel examen.

2.                  Il n’y a aucune question à certifier.

 

« James Russell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                        IMM-4501-11

 

INTITULÉ :                                                       CARMEN ROSA PINTO PONCE c.

                                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                               Le 17 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                              LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                      Le 8 février 2012

 

 

COMPARUTIONS :   

 

J. Byron M. Thomas                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Raoul Boulakia

 

David Duggins                                                                          POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

J. Byron M. Thomas                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Myles J. Kirvan                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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