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Date : 20111207


Dossier : T-1520-10

Référence : 2011 CF 1433

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 décembre 2011

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

FRANCO TANGORRA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

 

[1]               M. Franco Tangorra est un citoyen canadien qui purge une peine d’emprisonnement aux États‑Unis pour trafic de drogue. Il a présenté une demande au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile afin d’être transféré au Canada pour y purger le reste de sa peine. Le ministre a rejeté sa demande.

 

[2]               M. Tangorra prétend que la décision du ministre était fondée sur des allégations auxquelles il n’a pas eu la possibilité de répondre et, par conséquent, qu’elle a été prise de manière inéquitable. Il prétend également que cette décision était déraisonnable parce qu’elle n’était pas étayée par la preuve. Il me demande d’infirmer la décision du ministre et d’ordonner à ce dernier de réexaminer son cas.

 

[3]               Je suis d’accord avec M. Tangorra : la décision du ministre devrait être infirmée. Je dois donc accueillir la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[4]               La principale question en litige en l’espèce consiste à déterminer si la décision du ministre était déraisonnable. Comme je suis d’accord avec M. Tangorra qu’elle l’était, il n’est pas nécessaire que j’examine séparément la question du manque d’équité. À mon avis, les deux questions sont liées compte tenu des faits de l’espèce.

 

II.         Le cadre législatif

 

[5]               Les délinquants canadiens incarcérés à l’étranger peuvent demander de purger leur peine au Canada. Un transfèrement exige le consentement de l’État étranger et du ministre.

 

[6]               Pour décider s’il consent à un transfèrement, le ministre doit tenir compte des facteurs énumérés aux paragraphes 10(1) et (2) de la Loi sur le transfèrement international des délinquants, LC 2004, c 21 (les dispositions législatives pertinentes se trouvent en annexe), notamment les suivants :

 

•           le retour au Canada du délinquant peut constituer une menace pour la sécurité du Canada;

 

•           le délinquant a des liens sociaux ou familiaux au Canada;

 

•           selon le ministre, le délinquant commettra, après son transfèrement, une infraction de terrorisme ou une infraction d’organisation criminelle, au sens de l’article 2 du Code criminel [LRC 1985, c C‑46].

 

[7]               Le ministre peut aussi tenir compte d’autres facteurs qui sont pertinents au regard des objets de la Loi (voir Holmes c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 112, au paragraphe 12; Balili c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 396, au paragraphe 3).

 

III.       La décision du ministre

 

[8]               Le ministre a rejeté la demande de transfèrement de M. Tangorra. Dans ses motifs, il a cité les objets qui sous‑tendent la Loi. En permettant aux délinquants de purger leur peine dans leur pays d’origine, la Loi facilite leur réadaptation et leur réinsertion sociale, de même que l’administration de la justice. Elle renforce ainsi la sécurité publique.

 

[9]               En ce qui concerne la situation particulière de M. Tangorra, le ministre a rappelé que celui‑ci purgeait une peine de sept ans et trois mois aux États‑Unis pour [traduction] « complot de possession en vue de distribuer » de la MDMA (connue sous le nom d’« ecstasy »), suivie d’une libération surveillée d’une durée de deux ans. Il a ensuite résumé l’infraction. En août 2007, M. Tangorra a pris des dispositions afin de fournir 30 000 unités de MDMA à une personne qui était en fait un agent d’infiltration. Au cours des semaines qui ont suivi, M. Tangorra a fait parvenir la drogue à l’agent par la poste. La drogue était alors dissimulée dans des casques de motocycliste. M. Tangorra a été arrêté en octobre 2007 alors qu’il tentait de se faire payer.

 

[10]           Le ministre a indiqué qu’il devait déterminer si, à son avis, M. Tangorra allait commettre, après son transfèrement, une infraction d’organisation criminelle au sens de l’article 2 du Code criminel. Il a souligné que M. Tangorra avait vendu de la drogue à une autre personne et que les circonstances semblaient indiquer que d’autres personnes étaient aussi impliquées, mais n’avaient pas été arrêtées. Il a fait allusion aux renseignements contenus dans le dossier de M. Tangorra selon lesquels ce dernier avait des liens avec le crime organisé. Le ministre a ensuite affirmé que M. Tangorra avait commis une infraction grave concernant une grande quantité de drogue qui aurait permis au « groupe » qu’il aidait d’obtenir un avantage matériel ou financier. M. Tangorra avait notamment planifié et entrepris un certain nombre de démarches à des fins financières.

 

[11]           Le ministre a conclu que, compte tenu des faits particuliers relatifs à la demande de M. Tangorra et des facteurs pertinents, un transfèrement ne servirait pas les objets de la Loi.

 

IV.       La décision du ministre était-elle déraisonnable?

 

[12]           Le ministre a fondé sa décision sur les objets de la Loi et sur les facteurs pertinents. Les objets de la Loi sont décrits de la façon suivante :

Objet

 

  3.  La présente loi a pour objet de faciliter l’administration de la justice et la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en permettant à ceux-ci de purger leur peine dans le pays dont ils sont citoyens ou nationaux.

Purpose

 

  3.  The purpose of this Act is to contribute to the administration of justice and the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community by enabling offenders to serve their sentences in the country of which they are citizens or nationals.

 

 

[13]           La Loi vise à permettre aux délinquants de purger leur peine dans leur pays d’origine dans le but de faciliter leur réadaptation et leur réinsertion sociale, ainsi que l’administration de la justice, ce qui, comme le ministre l’a explicitement reconnu dans le cas de M. Tangorra, renforce la sécurité publique.

 

[14]           Les facteurs dont le ministre doit tenir compte pour décider si ces objets sont servis sont prévus par la Loi, mais, comme je l’ai mentionné, la liste de ces facteurs n’est pas exhaustive. En effet, le ministre peut tenir compte d’autres facteurs qui servent les objets de la Loi.

 

[15]           En l’espèce, le ministre disposait d’un dossier volumineux concernant M. Tangorra. Le Service correctionnel du Canada (le SCC) a préparé le résumé suivant de la preuve relative aux objets et aux facteurs pertinents de la Loi et l’a remis au ministre :

 

•           il n’y avait aucune raison de croire que le retour de M. Tangorra au Canada constituerait une menace pour la sécurité;

 

•           rien n’indiquait que M. Tangorra avait l’intention de ne plus considérer le Canada comme le lieu de sa résidence permanente;

 

•           les liens sociaux et familiaux de M. Tangorra au Canada lui étaient d’un très grand soutien;

 

•           le système carcéral des États‑Unis ne constituait pas une menace pour la sécurité de M. Tangorra;

 

•           il n’y avait aucune raison de croire que M. Tangorra allait commettre un acte de terrorisme au Canada;

 

•           M. Tangorra avait des liens avec le crime organisé, mais simplement en tant que passeur de drogue;

 

•           si M. Tangorra demeurait aux États‑Unis, il serait renvoyé au Canada en 2014 et ne ferait alors l’objet d’aucune surveillance;

 

•           si M. Tangorra était transféré au Canada, il serait évalué et un plan correctionnel serait élaboré pour lui;

 

•           M. Tangorra n’avait pas de casier judiciaire avant d’être emprisonné aux États‑Unis et il n’a jamais été déclaré coupable d’une infraction sexuelle;

           

•           M. Tangorra avait travaillé pour son père et il avait possédé sa propre entreprise;

 

•           l’épouse de M. Tangorra, Mme Lucia Fosco, était une véritable source de soutien;

 

•           M. Tangorra s’était bien comporté en détention, n’avait aucun antécédent de violence ou d’agression sexuelle et était peu susceptible de récidiver.

 

[16]           Le dossier de M. Tangorra contenait aussi des lettres d’appui de son député et de son avocat. Son épouse a déclaré qu’il était un bon mari et un bon père et a demandé au ministre de permettre son transfèrement afin qu’il puisse voir sa fille et le reste de la famille.

 

[17]           Le dossier contenait également des renseignements médicaux concernant M. Tangorra, ainsi que son explication de l’infraction. M. Tangorra a indiqué qu’il avait eu des problèmes de santé et des difficultés financières et qu’il était désespéré. Il a fait faillite et sa mère, sa fille et son neveu ont eu de graves problèmes de santé. Ces pressions l’ont amené à commettre l’infraction. Son médecin a confirmé que les parents de M. Tangorra sont souffrants et que le transfèrement de leur fils au Canada les aiderait. M. Tangorra a reconnu qu’il avait commis un acte répréhensible et a affirmé qu’il s’agissait d’un incident isolé.

 

[18]           Une décision est raisonnable si elle est intelligible et transparente et si elle peut se justifier au regard des faits et du droit dont le décideur disposait. Les faits pertinents et les critères prévus par la loi sont exposés ci‑dessus. Je résumerai maintenant la jurisprudence applicable.

 

[19]           En exigeant que le ministre consente à un transfèrement, la Loi limite la possibilité, pour les Canadiens emprisonnés, de revenir au Canada, ce qui est contraire à l’article 6 de la Charte canadienne des droits et libertés (Divito c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CAF 39, aux paragraphes 42 à 45). La Loi constitue cependant une limite raisonnable aux droits garantis à l’article 6, mais le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire d’une manière compatible avec les droits qui sont garantis par la Charte à un demandeur (au paragraphe 47).

 

[20]           Aux termes de la Loi, le ministre doit donner des motifs écrits (article 11). Ces motifs doivent servir les différentes fins auxquelles ils sont requis. En particulier, ils doivent exposer, d’une manière transparente et intelligible, le fond de la décision et sa justification : Holmes, précitée, au paragraphe 44, fondée sur Administration de l’aéroport international de Vancouver c Alliance de la fonction publique du Canada, 2010 CAF 158, aux paragraphes 16 et 17.

 

[21]           La Cour doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard de la décision du ministre, mais celle‑ci doit être raisonnable (Holmes, précitée, aux paragraphes 45 et 46).

 

[22]           Le ministre peut ne pas souscrire à l’analyse du SCC, mais il doit expliquer pourquoi (Singh c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 115, au paragraphe 12), en particulier lorsque le SCC conclut que le demandeur n’a aucun lien avec le crime organisé, alors que l’existence de tels liens constitue le principal motif de refus du ministre (aux paragraphes 13 et 14; Vatani c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 114, au paragraphe 9; Yu c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la protection civile), 2011 CF 819, au paragraphe 25).

 

[23]           Lorsque le ministre s’appuie sur la preuve de prétendus liens avec le crime organisé pour refuser un transfèrement, le fait qu’il ne détermine pas si le demandeur commettra une infraction d’organisation criminelle (comme l’exige la Loi) rend sa décision déraisonnable (Randhawa c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 625, au paragraphe 4; Downey c Canada (Ministre de la Sécurité publique), 2011 CF 116, au paragraphe 10; Yu, précitée, au paragraphe 26).

[24]           De plus, lorsque le ministre s’appuie sur une allégation selon laquelle le demandeur a été impliqué dans le crime organisé, il doit donner au demandeur la possibilité de réfuter cette preuve (Balili, précitée, aux paragraphes 14 et 15).

 

[25]           Dans ce contexte, l’emploi du futur ne signifie pas qu’il faut qu’il soit certain que le demandeur sera impliqué dans une infraction d’organisation criminelle. La question est de savoir si, « de l’avis du ministre, il existe une preuve qui […] amène [le ministre] à conclure raisonnablement que le demandeur, après son transfèrement, commettra une infraction d’organisation criminelle » (Grant c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 958, au paragraphe 37).

 

[26]           Dans la plupart des affaires mentionnées ci‑dessus, la décision du ministre a été infirmée au motif qu’elle ne remplissait pas au moins l’une des exigences applicables. La décision du ministre a cependant été confirmée dans deux cas qui sont assez semblables à celui de M. Tangorra.

 

[27]           Dans Holmes, précitée, où le demandeur était un simple passeur de drogue pour une organisation criminelle, le juge Michael Phelan a conclu que la décision du ministre était raisonnable. Le ministre avait tenu compte des différents facteurs liés à l’administration de la justice, notamment la nature de l’infraction, les circonstances relatives au crime, les conséquences de celui‑ci et les autres objets de Loi, dont la réadaptation et la réinsertion sociale. Il avait tenu compte également du soutien solide dont le demandeur bénéficiait de la part de sa famille, de l’absence de dossier criminel et de ses efforts pour se réadapter. Le juge Phelan a conclu qu’il ne pouvait pas modifier la décision du ministre, même si le demandeur semblait être un candidat parfait pour le transfèrement, parce que le ministre avait pris en compte et soupesé les facteurs pertinents (au paragraphe 62).

 

[28]           De la même façon, lorsque le demandeur avait entretenu des liens avec une organisation criminelle, qu’il possédait déjà un dossier criminel au Canada et qu’il avait participé à un crime concernant une grande quantité de drogue avec plusieurs autres personnes, le ministre pouvait ne pas souscrire à l’opinion du SCC selon laquelle le demandeur n’allait vraisemblablement pas commettre une infraction d’organisation criminelle (Duarte c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 602, au paragraphe 20).

 

[29]           Il faut donc déterminer si le ministre a tenu compte des facteurs appropriés, a fondé sa décision sur la preuve dont il disposait, a expliqué adéquatement pourquoi le transfèrement devait être refusé et a donné à M. Tangorra la possibilité de réfuter la preuve sur laquelle il s’est appuyé.

 

[30]           Contrairement à ce qu’il avait fait dans Holmes et dans Duarte, le ministre semble s’être fondé sur un seul facteur en l’espèce : les circonstances relatives au crime commis par M. Tangorra. Il n’a mentionné aucun des autres facteurs pertinents, par exemple la sécurité du Canada, le fait que le délinquant ne considérait plus le Canada comme le lieu de sa résidence permanente, ses liens sociaux ou familiaux au Canada ou la menace représentée par le système carcéral étranger pour sa sécurité ou ses droits fondamentaux.

 

[31]           En fait, le ministre n’a pas explicitement examiné la probabilité que M. Tangorra commette une infraction d’organisation criminelle, soit une « infraction grave commise au profit ou sous la direction » d’un groupe composé d’au moins trois personnes dont l’objectif principal est de commettre des crimes graves à son avantage, « ou en association avec » un tel groupe (voir Code criminel, LRC 1985, c C‑46, article 2 et paragraphe 467.1(1)). Le ministre n’a pas non plus expliqué pourquoi il n’avait pas tenu compte de l’opinion du SCC selon laquelle M. Tangorra ne commettrait pas une autre infraction. Le ministre était manifestement cependant très préoccupé par la nature de l’infraction commise par M. Tangorra. Il n’a toutefois pas conclu que M. Tangorra commettrait une infraction d’organisation criminelle s’il était transféré au Canada. Ses motifs n’expliquent pas pourquoi la demande de M. Tangorra devait être rejetée.

 

[32]           Enfin, M. Tangorra n’a jamais su que le SCC croyait qu’il était un passeur de drogue pour une organisation criminelle. Il n’a pas eu la possibilité de répondre à cette allégation. On semble cependant avoir accordé une grande importance au fait qu’il avait des liens – dont la nature n’a pas été précisée – avec le crime organisé. Le ministre semble avoir fondé sa décision sur le passage suivant du résumé :

 

[traduction] [L]a division de la sécurité régionale du SCC confirme que M. Tangorra a des liens avec le crime organisé. Rien n’indique qu’il jouait un autre rôle que celui de passeur de drogue.

 

[33]           C’est vraisemblablement cette information qui a amené le ministre à considérer que M. Tangorra avait des liens avec le crime organisé et qu’il agissait pour le compte d’un « groupe ». Aucun autre élément du dossier ne fait état de liens entre M. Tangorra et le crime organisé. M. Tangorra soutient qu’il était inéquitable que le ministre s’appuie sur des renseignements qu’il ne connaissait pas et auxquels il n’avait pas eu la possibilité de répondre. La mesure dans laquelle le ministre s’est appuyé sur une vague affirmation que M. Tangorra ne connaissait pas et dont la source est inconnue concerne aussi cependant le caractère raisonnable (c.‑à‑d. la transparence et l’intelligibilité) de la décision.

 

[34]           À mon avis, la décision du ministre doit être infirmée. Conformément à la jurisprudence, la décision du ministre doit être annulée si elle n’explique pas pourquoi le transfèrement devrait être refusé, en particulier si elle ne renferme pas une conclusion qui justifierait le rejet de la demande de transfèrement, par exemple le fait que le délinquant commettra une infraction d’organisation criminelle après son transfèrement. Une décision devrait aussi être infirmée si elle est fondée sur des renseignements auxquels le demandeur n’a pas eu la possibilité de répondre. Les deux motifs s’appliquent en l’espèce.

V.        Conclusion et décision

 

[35]           Les juges saisis d’une demande de contrôle visant une décision rendue par un ministre sont naturellement soucieux de confirmer cette décision. Ils ont cependant aussi l’obligation de veiller à ce que celle‑ci soit conforme à la Constitution, aux paramètres établis par le législateur et aux principes de justice définis dans la jurisprudence dominante en matière de droit administratif, en particulier au regard du caractère raisonnable, de l’équité et du caractère suffisant des motifs.

 

[36]           En l’espèce, la décision du ministre n’était pas conforme aux paramètres établis par le législateur ou aux principes de justice applicables. Elle ne précisait pas pourquoi la demande de M. Tangorra était rejetée. En outre, le ministre n’a pas donné à ce dernier la possibilité de réagir à l’allégation selon laquelle il avait eu des liens avec le crime organisé, alors qu’il s’agissait du principal motif de sa décision de refuser le transfèrement.

 

[37]           En conséquence, je conclus que la décision du ministre était déraisonnable. Je dois donc accueillir la présente demande de contrôle judiciaire, avec dépens.


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie, avec dépens.

 

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

Mélanie Lefebvre, LL.B.

Traduction certifiée conforme

 


Annexe

 

Loi sur le transfèrement international des délinquants, LC 2004, c 21

 

Facteurs à prendre en compte : délinquant canadien

  10. (1) Le ministre tient compte des facteurs ci-après pour décider s’il consent au transfèrement du délinquant canadien :

a) le retour au Canada du délinquant peut constituer une menace pour la sécurité du Canada;

b) le délinquant a quitté le Canada ou est demeuré à l’étranger avec l’intention de ne plus considérer le Canada comme le lieu de sa résidence permanente;

c) le délinquant a des liens sociaux ou familiaux au Canada;

d) l’entité étrangère ou son système carcéral constitue une menace sérieuse pour la sécurité du délinquant ou ses droits de la personne.

Facteurs à prendre en compte : délinquant canadien ou étranger

  (2) Il tient compte des facteurs ci-après pour décider s’il consent au transfèrement du délinquant canadien ou étranger :

a) à son avis, le délinquant commettra, après son transfèrement, une infraction de terrorisme ou une infraction d’organisation criminelle, au sens de l’article 2 du Code criminel;

b) le délinquant a déjà été transféré en vertu de la présente loi ou de la Loi sur le transfèrement des délinquants, chapitre T-15 des Lois révisées du Canada (1985).


[…]

Documents écrits

  11. (1) Le consentement au transfèrement, le refus de consentement et le retrait de consentement se font par écrit.

Refus du ministre

  (2) Le ministre est tenu de motiver tout refus de consentement.

 

Code criminel, LRC (1985), c C-46

 

  2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

Infraction d’organisation criminelle

 

a) Soit une infraction prévue aux articles 467.11, 467.12 ou 467.13 ou une infraction grave commise au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle, ou en association avec elle;

 

b) soit le complot ou la tentative en vue de commettre une telle infraction ou le fait d’en être complice après le fait ou d’en conseiller la perpétration.

International Transfer of Offenders Act, SC 2004, c 21

 

Factors — Canadian offenders

  10. (1) In determining whether to consent to the transfer of a Canadian offender, the Minister shall consider the following factors:

(a) whether the offender’s return to Canada would constitute a threat to the security of Canada;

(b) whether the offender left or remained outside Canada with the intention of abandoning Canada as their place of permanent residence;

(c) whether the offender has social or family ties in Canada; and

(d) whether the foreign entity or its prison system presents a serious threat to the offender’s security or human rights.



Factors — Canadian and foreign offenders

  (2) In determining whether to consent to the transfer of a Canadian or foreign offender, the Minister shall consider the following factors:

 

(a) whether, in the Minister’s opinion, the offender will, after the transfer, commit a terrorism offence or criminal organization offence within the meaning of section 2 of the Criminal Code; and

(b) whether the offender was previously transferred under this Act or the Transfer of Offenders Act, chapter T-15 of the Revised Statutes of Canada, 1985.



Writing

  11. (1) A consent, a refusal of consent or a withdrawal of consent is to be given in writing.

Reasons

  (2) If the Minister does not consent to a transfer, the Minister shall give reasons.

 

Criminal Code, RSC, 1985, c C-46

 

2.  In this Act,

“Criminal organization offence” means

 

 

(a) an offence under section 467.11, 467.12 or 467.13, or a serious offence committed for the benefit of, at the direction of, or in association with, a criminal organization, or

 

(b) a conspiracy or an attempt to commit, being an accessory after the fact in relation to, or any counselling in relation to, an offence referred to in paragraph (a);

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1520-10

 

INTITULÉ :                                       FRANCO TANGORRA c.

                                                            MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

                                                            ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 14 juillet 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 7 décembre 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

John W. Conroy, c.r.

 

                        POUR LE DEMANDEUR

 

Lucy Bell

                        POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Conroy & Company

Avocats

Abbotsford (Colombie-Britannique)

 

                        POUR LE DEMANDEUR

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

                        POUR LE DÉFENDEUR

 

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