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Date : 20110518

Dossier : T‑378‑10

Référence : 2011 CF 570

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 mai 2011

En présence de madame la juge Johanne Gauthier

ENTRE :

PAULINE KAUR GOSAL

 

demanderesse

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               La demanderesse, Mme Pauline Kaur Gosal, qui agit pour son propre compte, cherche à obtenir le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) a rejeté sa plainte contre la Gendarmerie royale du Canada (la GRC), en application de l’alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6 (la Loi), parce que la preuve ne corroborait ni l’allégation selon laquelle la GRC n’avait pas fourni un environnement exempt de harcèlement ni celle voulant que la plaignante se soit vu refuser un emploi pour un motif fondé sur le sexe ou l’origine nationale ou ethnique.

 

[2]               Pour les motifs exposés ci‑dessous, la Cour est d’avis que la décision est raisonnable et que la demanderesse n’a pas établi qu’il y avait eu manquement à l’équité procédurale.

 

[3]               Il ne fait aucun doute que la demanderesse sera profondément déçue de mes conclusions. Il se peut qu’elle ne saisisse pas parfaitement que la Commission peut seulement examiner les actes fondés (ne serait‑ce qu’en partie) sur un motif de discrimination illicite (articles 7 et 14 de la Loi). En outre, il n’appartient pas à la Commission d’examiner de façon générale des questions qui n’intéressent pas directement la plainte. Cela signifie que, même si la plaignante et d’autres personnes, comme le caporal (cap.) Dave Reichert, peuvent avoir été [traduction] « rejetées par certaines personnes à Port Mann » et astreintes à un environnement de travail [traduction] « vindicatif », ces difficultés, qui n’ont aucun lien avec la plainte dans laquelle elle a allégué que sa demande en vue de devenir membre régulier de la GRC a été rejetée pour des motifs de distinction illicites, sont dépourvues de pertinence.

 

I.  Contexte

[4]               La demanderesse est fonctionnaire fédérale (fonctionnaire) depuis 1990 à Douanes Canada. Depuis avril 1995, elle a occupé divers postes administratifs dans différents services de la GRC, dont l’Unité mixte des produits de la criminalité, Division E – Personnel et affectation (commis au recrutement), et l’Unité de l’intégrité des frontières (commis de soutien), où elle a passé plus de trois ans. En décembre 2002, elle a accepté d’être mutée à la Section de la sécurité routière du district du Lower Mainland, plus précisément au Bureau de la patrouille autoroutière de Port Mann, comme commis de détachement (poste classifié CR‑04), et elle y a travaillé jusqu’en février 2006. La demanderesse travaillait également depuis 2000 comme agente de la paix dans le cadre du Programme de la police auxiliaire de la GRC à Surrey.

 

[5]               Comme je l’ai mentionné précédemment, la demanderesse a fait allusion au fait qu’elle avait éprouvé beaucoup de difficultés à Port Mann. Puisqu’elle confond, dans les observations qu’elle a présentées à la Commission en octobre 2009, les faits de la plainte interne qu’elle a déposée contre une collègue en décembre 2004 et les commentaires racistes et sexistes dont il est fait état dans sa plainte à la Commission, il convient de parler un peu de cette situation. Je n’ai toutefois pas l’intention de décrire en long et en large tout ce que la demanderesse a vécu durant cette période.

 

[6]               Il semble que Port Mann était pendant un certain temps aux prises avec des difficultés opérationnelles, parce qu’il y avait suffisamment de travail pour deux postes d’échelon CR‑04 à plein temps, sinon trois. Pour diverses raisons, la demanderesse a été surchargée de travail et elle ne s’entendait pas avec certains collègues, en particulier Mme Bobbi Bodden, également employée d’échelon CR‑04, qui avait été auparavant affectée aux tâches qu’accomplissait maintenant la demanderesse. Au début de décembre 2004, une fonctionnaire qui travaillait comme commis occasionnelle avec la demanderesse a fait savoir qu’elle était incapable de travailler avec elle. Par la suite, le directeur des services du district, le sergent d’état‑major (s. é.‑m) Jim McVey, aurait reçu un rapport des Services informatiques révélant que Port Mann avait un taux d’erreurs très élevé dans les rapports du système des RSO (puis dans celui du CPIC), ce qui l’a incité à se rendre à Port Mann le 13 décembre 2004 pour rencontrer tous les employés concernés, y compris la demanderesse, qui étaient affectés à ces tâches. Au cours de la réunion, Mme Gosal aurait soulevé la question de l’iniquité dans la répartition du travail.

 

[7]               Le 17 décembre 2004, la demanderesse a écrit au s.e.-m. McVey pour se plaindre formellement de la situation qu’elle vivait au travail, et plus particulièrement de l’intimidation dont elle était victime de la part de Mme Bodden qui, selon elle, voulait absolument qu’elle accomplisse ses tâches exactement de la même manière que Mme Bodden les avait accomplies auparavant[1]. Elle a en outre mentionné que les problèmes survenus entre elle et la commis occasionnelle, dont il a été fait état précédemment, étaient en fait le résultat de l’ingérence de Mme  Bodden. Après avoir expliqué en détail la situation qui régnait à Port Mann, la demanderesse a demandé au s.e.-m. McVey de mettre fin à l’intimidation faite par Mme Bodden qui, à son avis, perturbait également d’autres fonctionnaires, en déplaçant Mme Bodden au bureau de Surrey où se trouvait son supérieur hiérarchique immédiat (l’inspecteur (insp.) Derek Cooke). Si l’on se fie aux observations formulées plus tard par l’insp. Cooke à ce sujet, ce déplacement n’était pas possible en raison du manque d’espace au bureau de Surrey et du fait que Mme Bodden était responsable de toute une région et que Port Mann, qui était situé au cœur de cette région, était l’une de ses unités les plus occupées.

 

[8]               Si l’on se fie aux documents produits par la demanderesse, il a été établi, au début de 2005, que Port Mann se classait au cinquième rang des unités de la Division E offrant le pire rendement et au quinzième rang des unités offrant le pire rendement dans tout le Canada en ce qui a trait aux rapports d’erreurs du système RSO, tâche dont la demanderesse était responsable, du moins en partie comme nous l’avons vu. Il convient de souligner à cette étape‑ci qu’il semble également que la demanderesse n’ait reçu aucune formation particulière pour cette tâche[2] et que, après avoir obtenu du soutien des Services informatiques, elle s’est rapidement améliorée et le taux d’erreurs a été considérablement réduit en quelques mois.

 

[9]               Toutefois, les difficultés avec Mme Bodden ne sont pas dissipées. La demanderesse mentionne que, après le dépôt de sa plainte visant Mme Bodden, même son supérieur hiérarchique immédiat (le cap. Robert Nordlund agissant comme sergent intérimaire)[3] a changé d’attitude envers elle, alors qu’auparavant elle ne le trouvait pas [traduction] « particulièrement déplaisant ou désagréable » (affidavit de la demanderesse, au paragraphe 21). L’insp. Cooke a dressé la liste de toutes les options qui s’offraient à Mme Gosal en vue de corriger la situation et ensuite, dans le seul but de régler le différend, la demanderesse a accepté son offre d’affectation à une nouvelle unité à Langley. C’est dans ce contexte qu’a eu lieu la mutation volontaire de la demanderesse à une unité dirigée par le sergent (serg.) Jim Dallin, qui est intervenu ultérieurement pour demander un réexamen du dossier de sa demande de recrutement[4].

 

[10]           Dans le courriel qu’elle a envoyé à l’insp. Cooke le 28 novembre 2005 concernant cette mutation, elle souligne qu’elle croit toujours fermement que, même si elle quitte, [traduction] « une révision des tâches inégalement réparties entre les deux postes CR‑04 demeure impérative ». Je le répète, cet aspect n’est clairement pas une question qu’on a demandé à la Commission d’étudier.

 

[11]           Pendant que ces événements se déroulaient, la demanderesse a présenté, en septembre 2004, une demande en vue de devenir membre régulier de la GRC, fait qu’elle n’a pas été ébruité. Le 19 octobre 2005, elle a été avisée que sa demande avait été rejetée.

 

[12]           On ne sait pas trop quand elle a appris, de deux anciens collègues de Port Mann, le gendarme (gend.) Marvin Wawia et le gend. Ken McKinny[5], que le serg. Nordlund avait tenu des propos sexistes et racistes à son endroit en novembre 2004. Il est certain qu’elle n’a fait aucune mention de ce comportement dans les communications qu’elle a envoyées à l’insp. Cooke à la fin de novembre 2005. Cependant, elle souligne, dans la plainte écrite qu’elle a déposée auprès de la Commission, que ces propos lui ont été rapportés vers le mois de novembre 2005.

 

[13]           Quoi qu’il en soit, le 1er mai 2006, la demanderesse a déposé une plainte de harcèlement en bonne et due forme auprès de l’insp. Cooke relativement à la conduite du serg. Nordlund.

 

[14]           En septembre 2006, la demanderesse a communiqué une première fois avec la Commission concernant les questions qui ont plus tard fait l’objet de la plainte en cause en l’espèce, mais elle a été avisée qu’elle devait d’abord épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts (voir l’alinéa 41(1)a) de la Loi). Un an plus tard, après avoir épuisé les mécanismes internes à sa disposition, elle a communiqué de nouveau avec la Commission. Le 29 janvier 2008, la Commission lui a envoyé une lettre dans laquelle elle acceptait de traiter sa plainte.

 

[15]           Bien que l’on ne trouve pas, devant le décideur ou devant la Cour, beaucoup de détails concernant les plaintes ou les griefs déposés par Mme Gosal, il semble, d’après la plainte qu’elle a déposée à la Commission, qu’au moins deux des cinq plaintes[6] qu’elle a faites à la GRC étaient suffisamment corroborées pour justifier qu’une enquête interne soit effectuée par le commissaire adjoint et ont finalement donné lieu à une réprimande à l’endroit du serg. Nordlund, à une recommandation de suivre une séance spéciale de sensibilisation et, enfin, à la perte de son emploi à Port Mann.

 

[16]           Le 23 novembre 2007, la demanderesse a déposé la plainte à l’origine du processus qui a donné lieu à la décision visée par le présent contrôle judiciaire.

 

[17]           Dans la plainte visant la GRC, la demanderesse souligne que, pendant qu’elle travaillait, elle a été [traduction] « victime de discrimination et de harcèlement pour des considérations fondées sur le sexe et l’origine ethnique [elle a déclaré faire partie de la minorité des Indiens de l’Est] ». Elle affirme croire [traduction] « que ces propos méprisants, de nature raciale et sexuelle [...] étaient fondés sur le sexe et l’origine ethnique et la visaient personnellement ».

 

[18]           La demanderesse parle ensuite du poste qu’elle a occupé au Service de la sécurité routière de Port Mann, à Burnaby, où elle était sous la supervision directe du serg. Nordlund pendant la majeure partie de la période de quatre ans où elle y a travaillé. Elle parle ensuite de la demande qu’elle a présentée en septembre 2004 en vue de devenir membre régulier de la GRC et du fait que cette demande a été rejetée en octobre 2005. Elle souligne de plus que, en novembre 2005, elle a cherché à obtenir auprès de nombreux collègues et anciens supérieurs hiérarchiques des lettres de recommandation pour [traduction] « redorer » son dossier de recrutement. Cette démarche aurait, paraît‑il, été entreprise dans l’espoir que son dossier de demande fasse l’objet d’un réexamen complet. Elle affirme ensuite, tel qu’il a déjà été expliqué, que, vers le mois de novembre 2005, elle a appris des deux collègues susmentionnés que le serg. Nordlund avait tenu [traduction] « des propos de nature raciale et sexuelle la visant directement vers le mois de novembre 2004 ». Après avoir cité ces propos, elle ajoute ceci :

[traduction] « Je crois que ces propos malveillants, humiliants, désagréables, de nature raciale et sexuelle, et l’opinion déformée de mon supérieur immédiat ont par la suite anéanti mes chances de devenir membre de la Gendarmerie royale du Canada.

 

 

[19]           La demanderesse souligne ensuite qu’elle a maintenant épuisé toutes les voies de recours internes et toutes les autres procédures possibles au sein de la GRC et elle fait état plus particulièrement des deux plaintes qui ont donné lieu à des enquêtes. Elle mentionne que, en avril 2007, elle a été avisée, de façon informelle seulement, au moyen d’un courriel envoyé par l’inspecteur, que le [traduction] « serg. Nordlund avait fait l’objet d’une réprimande en bonne et due forme (par écrit) et d’une recommandation de suivre une formation spécialisée ». Elle mentionne de plus que la GRC ne s’est pas penchée sur [traduction] « ses préoccupations en matière de réparation à titre personnel » concernant la conduite du serg. Nordlund étant donné qu’aucuns dommages‑intérêts ne lui avaient été accordés. À cet égard, elle affirme ce qui suit :

[traduction]

 

Lors de ces deux enquêtes, la GRC ne s’est pas penchée sur la mesure de réparation que je voulais. En raison de la pression constante du milieu, je me suis trouvée aux prises avec des difficultés psychologiques et financières. Ma réputation a été salie de façon irréparable, par suite des propos faux et malveillants qu’a tenus cette personne qui occupait un poste d’autorité. Par suite de ce préjudice, ma façon de voir les pratiques de gestion de la GRC a grandement changé.

 

Après les épreuves que j’ai vécues lors de ce détachement, j’étais très mécontente et découragée, j’avais une mauvaise opinion de moi‑même et j’avais grandement perdu confiance en moi. Il semble que le harcèlement, le racisme, la discrimination et la vengeance personnelle soient tolérés, voire avalisés, par la GRC.

 

Jusqu’à ce jour, je n’ai reçu aucune lettre de quelque nature que ce soit ni aucune communication concernant un possible dédommagement.

 

 

[20]           Le 8 mai 2008, les parties ont été informées que la Commission ferait enquête sur la plainte.

 

[21]           Le rapport d’enquête a été remis le 2 octobre 2009 et communiqué aux parties le 8 octobre 2009. Comme la demanderesse conteste les résultats de l’enquête et le traitement qu’ont reçu les observations qu’elle a présentées à la Commission après avoir reçu copie du rapport, la Cour va décrire de manière assez détaillée l’enquête et la réponse de la demanderesse y faisant suite.

 

[22]           L’enquêteur a interrogé les six témoins suivants : Mme Gosal; le gend. Richard Chow, la personne de l’Unité de recrutement de la Division E qui a examiné le dossier de demande de Mme Gosal; l’insp. Davis Wendell, commandant de la section du recrutement de la région du Pacifique; le serg. Robert Nordlund; le cap. Dave Reichert et la gend. Patricia Yiendrys, deux témoins de Mme Gosal.

 

[23]           Dans son rapport, l’enquêteur dresse la liste des documents reçus du défendeur. L’enquêteur a aussi consulté les [traduction] « documents fournis par la plaignante à l’appui de sa position, principalement des lettres, des évaluations de travail, des commentaires positifs de diverses personnes et des notes personnelles ».

 

[24]           D’après l’affidavit de la demanderesse, il semble que le dossier d’enquête comprenait environ 800 pages, y compris tous les documents qu’elle avait envoyés à la première personne chargée de l’enquête[7].

 

[25]           L’analyse se divise en deux volets : la question de savoir si le défendeur a omis de fournir un environnement de travail exempt de harcèlement et celle de savoir si la plaignante s’est vu refuser l’emploi pour des considérations fondées sur le sexe ou l’origine nationale ou ethnique.

 

[26]           Dans le volet se rapportant au harcèlement, l’enquête sur le comportement lui‑même n’a pas été très longue étant donné que la GRC avait reconnu dans les diverses enquêtes internes qu’elle a menées que ce comportement avait bel et bien eu lieu. Les mots employés par le serg. Nordlund indiquaient clairement qu’ils étaient fondés sur un motif de distinction illicite.

 

[27]           Par conséquent, en vertu du paragraphe 65(2) de la Loi, la véritable question qu’il restait à trancher était de savoir si la GRC, l’employeur du serg. Nordlund, pouvait ne pas être tenue responsable de l’acte ou omission de son employé. Pour prétendre au bénéfice de cette exonération, la GRC devait établir : a) que l’acte avait été commis sans le consentement de l’employeur[8]; b) que l’employeur avait pris toutes les mesures nécessaires pour l’empêcher; c) que l’employeur a tenté par la suite d’en atténuer ou d’en annuler les effets. Sur la foi des documents mentionnés précédemment, plus particulièrement le rapport sur les deux enquêtes menées par le serg. Nelson Aranguiz, et compte tenu des mesures prises (lettre de réprimande, séance de sensibilisation supplémentaire et, finalement, renvoi du serg. Nordlund du bureau de Port Mann), l’enquêteur a conclu que la réaction de l’employeur [traduction] « semble avoir été rapide, efficace et proportionnelle à la situation de harcèlement dénoncée ».

 

[28]           Ainsi, il a recommandé que cette partie de la plainte (les propos de nature raciale et sexuelle tenus par le serg. Nordlund en novembre 2004) soit rejetée parce que la preuve obtenue ne soutenait pas l’allégation suivant laquelle l’employeur n’avait pas fourni un environnement de travail exempt de harcèlement au sens de l’article 65.

 

[29]           Dans les dix pages d’observations qu’elle a déposées en réponse le 28 octobre 2009, la demanderesse commente les paragraphes du rapport d’enquête. Les observations les plus pertinentes quant à la première question sont celles qui concernent les paragraphes 12 à 30, 50 et 53. Après avoir soulevé certaines questions quant à la signification du paragraphe 14, la demanderesse insiste sur le fait que l’enquêteur aurait dû interroger d’autres témoins et elle se dit en profond désaccord avec la conclusion que la GRC a pris les mesures appropriées pour corriger la situation.

 

[30]           C’est ici que la demanderesse confond les faits de la plainte du 1er mai 2006 et les manœuvres d’intimidation rapportées au s.e.-m. McVey le 17 décembre 2004. Elle souligne également que tous les employés de la GRC ont participé à un atelier de formation en ligne, suivi d’un test, sur le harcèlement, ce qui l’amène à se demander quelle [traduction] « autre formation spécialisée » le serg. Nordlund aurait eu à suivre, compte tenu du fait que la formation générale offerte couvrait pour ainsi dire tous les aspects du harcèlement, de la discrimination et du comportement de nature sexuelle. De plus, elle note que le fait qu’il avait été démis de ses fonctions n’avait aucune incidence sur elle étant donné qu’elle avait déjà quitté le bureau de Port Mann. Enfin, en ce qui a trait à la réprimande, elle signale que celle‑ci aurait une incidence seulement si le serg. Nordlund demandait une promotion ou une mutation à nouvelle unité. Cette réprimande ne s’est pas traduite pour lui par une perte de salaire ou des conséquences difficiles sur le plan pécuniaire. La demanderesse ajoute également, comme nous l’avons vu, que les autres plaintes qu’elle a faites dans le cadre du processus prévu par la GRC, qui ont été jugées non fondées et qui n’ont donc pas fait l’objet d’une enquête, auraient dû être étudiées par la Commission. Elle nomme ensuite des parties dont il n’est question nulle part dans sa plainte, notamment le cap. Paulo Baptista[9] et le cap. Dan Boyer, en alléguant que ces deux hommes avaient été déclarés coupables dans des plaintes déposées par des tierces parties[10].

 

[31]           Sous le titre [traduction] « La plaignante était‑elle qualifiée ou autrement admissible à occuper l’emploi? », l’enquêteur note que la demanderesse a affirmé que le serg. Nordlund encourageait d’autres membres à l’influencer négativement dans ses efforts en vue de devenir membre régulière de la GRC. Elle ajoute qu’il avait beaucoup d’influence dans le dossier de recrutement, tant et si bien que tous les rapports positifs d’autres membres à Port Mann et des unités pour lesquelles elle avait travaillé antérieurement avaient été écartés.

 

[32]           Mme Gosal a apparemment estimé que les personnes suivantes avaient eu une incidence défavorable dans le traitement de sa demande sous l’influence du serg. Nordlund : le s.e.-m. McVey, le gend. Richard Chow, le serg. int. Joe Lew et l’insp. Sutherland. Dans la réponse aux observations de la GRC qu’elle a présentée à l’enquêteur, il semble que Mme Gosal ait également cité les commentaires négatifs de ces personnes qui faisaient partie de l’enquête menée sur place pour évaluer si elle avait les qualités requises. L’enquêteur mentionne qu’elle a insisté pour dire que l’évaluation se fondait uniquement sur les commentaires de ce petit groupe de personnes[11].

 

[33]           Après avoir passé en revue les détails de la première enquête concernant l’évaluation des aptitudes (étape cruciale dans le traitement de la demande), l’enquêteur affirme que le membre à la retraite qui a mené cette enquête avait interrogé 38 personnes. Abstraction faite des personnes qui, selon la demanderesse, avaient eu une incidence défavorable sur sa demande, l’enquêteur note que 17 personnes avaient soulevé des problèmes, en ce qui concerne son rendement au travail ou comme témoin de moralité, susceptibles d’avoir une incidence sur l’évaluation des aptitudes de la demanderesse dans leur ensemble[12].

 

[34]           Il s’est ensuite penché sur l’examen de la demande déposée par le gend. Chow le 2 novembre 2005 (approuvée par le serg. int. Lew, un homme qui serait, selon ce que prétend Mme Gosal, un acolyte du s.e.-m. McVey et, par voie de conséquence, du serg. Nordlund, parce qu’il a signé un courriel adressé au s.e.-m. McVey qui comportait la remarque suivante : [traduction] « Joe (la recrue de 1995 à Coquitlam) »).

 

[35]           L’enquêteur a également interrogé le gend. Chow, qui lui a décrit les différentes étapes et les examens indépendants réalisés au cours du processus de sélection ainsi que le portrait général obtenu avec les déclarations faites par un grand nombre de témoins qui l’ont amené à conclure que la demanderesse n’avait pas les qualités requises pour devenir membre régulier. Au cours de l’entrevue, le gend. Chow a déclaré qu’il connaissait de nom le serg. Nordlund et qu’il ne connaissait pas le s.e.-m. McVey ni le cap. Boyer. L’enquêteur a ensuite consulté le rapport de l’examen final du dossier de Mme Gosal, effectué par la cap. Lana Jardine qui avait été désignée par l’insp. Wendell pour réexaminer ce dossier en avril 2007[13]. L’insp. Wendell a entre autres expliqué à l’enquêteur que la cap. Jardine avait été choisie parce qu’elle était nouvelle à la section du recrutement et qu’elle n’avait donc pas du tout participé aux enquêtes antérieures.

 

[36]           Les deux témoins interrogés par l’enquêteur parce que, selon ce que Mme Gosal croyait, ils étaient susceptibles de soutenir son allégation, n’ont fait que des déclarations générales et vagues en ce qui a trait à cet aspect particulier de l’affaire. Le cap. Reichert a expliqué avoir fait l’objet [traduction] « d’un traitement semblable à celui subi par la plaignante, parce qu’il avait été “rejeté” par certaines personnes à Port Mann, à savoir le serg. Nordlund, le s.e.-m. McVey et le cap. Boyer » et qu’il avait été accusé à tort de ne pas se présenter au travail parce que le cap. Boyer, paraît‑il, [traduction] « voulait avoir son poste ». Son opinion selon laquelle ce groupe était [traduction] « dysfonctionnel » et « très vindicatif » a été bien prise en compte, mais l’enquêteur note qu’il ne pouvait fournir aucune preuve concernant une possible influence que ces personnes auraient eue sur le processus de sélection. De la même manière, la gend. Yiendrys ne pouvait fournir pareille preuve. Elle a mentionné qu’elle avait le [traduction] « sentiment » qu’un groupe de personnes [traduction] « s’organisait pour faire échouer la demande [de Mme Gosal] » et que la plaignante et elle étaient toutes les deux extrêmement stressées. La majeure partie de sa déclaration reprenait en fait ce que la demanderesse lui avait dit.

 

[37]           Après avoir analysé les documents et l’évaluation initiale ainsi que les deux examens du dossier effectués par des personnes différentes, l’enquêteur a conclu que le rejet de la demande se fondait sur le rendement au travail de Mme Gosal et sur une contradiction dans son entrevue de sécurité et de fiabilité. D’après sa propre analyse des documents à l’appui et les entrevues qu’il a réalisées, il a estimé que les conclusions des rapports mentionnés précédemment semblaient être corroborées et que la plaignante ne pouvait faire la preuve de l’allégation suivant laquelle l’enquête initiale se fondait entièrement sur les commentaires faits par la [traduction] « clique de Nordlund ».

 

[38]           La plus grande partie des observations présentées à la Commission par Mme Gosal portent sur cette section du rapport. Elle dit et répète plusieurs fois que l’enquêteur ne s’était pas montré juste et impartial, tout comme les personnes qui ont signé les divers rapports confirmant l’échec de sa demande. À son avis, l’enquêteur avait été naïf de croire les nouveaux faux motifs concoctés par l’insp. Wendell pour tenir la promesse faite à son supérieur que la position de la GRC à l’égard de sa plainte reposait sur des bases solides[14].

 

[39]           Elle souligne également le manque d’équité de l’enquêteur, qui ne lui a pas fourni de copie de certains documents énumérés dans le rapport, à savoir les tableaux d’attrition de la section Recrutement pour la région du Pacifique (paragraphe 10 j.) et les plans du processus de sélection du demandeur (paragraphe 10 k.). Elle attaque également le caractère équitable de l’enquête en disant qu’elle était incomplète, car l’enquêteur n’avait pas interrogé tous les témoins dont elle avait parlé dans les documents très détaillés qu’elle avait soumis. Elle avance qu’il n’a manifestement pas consulté ces documents avant de conclure qu’elle [traduction] « n’était pas en mesure de fournir une preuve à l’appui de sa position ». Elle a aussi demandé des copies de l’évaluation effectuée par le serg. Ferguson, datée du 5 décembre 2007 (paragraphe 10 h.), et du résumé général de son dossier établi par l’insp. Wendell (paragraphe 10 i.). Ces deux documents produits récemment visent, a‑t‑elle allégué, à déformer les motifs qui avaient initialement justifiés le rejet de sa demande. Mme Gosal explique ensuite en détail sa version de ce qui s’était réellement produit et comment les commentaires du serg. Nordland et de sa clique avaient influencé l’évaluation initiale de sa demande. Elle couvre dans ses remarques essentiellement tous les motifs qu’elle a présentés à la Cour relativement au manque de rigueur et de fiabilité de la décision, sauf en ce qui a trait au fait que l’enquêteur était partial vu sa carrière antérieure dans les Forces canadiennes, élément qu’elle a ajouté dans l’affidavit qu’elle a produit à l’appui de la présente demande. Entre autres choses, Mme Gosal fait état d’une série de courriels qui avaient été transmis initialement à la première personne chargée de l’enquête pour soutenir l’allégation selon laquelle le serg. Nordlund et le s.e.-m. McVey, par l’entremise d’Alex Bodden (le mari de Bobbi Bodden) et des membres du groupe de recrutement, l’avaient empêché d’aller à la Division Dépôt (ou d’être admise à la formation en vue de devenir membre régulier).

 

[40]           Dans les observations qu’il a présentées à la Commission le 4 décembre 2009, le défendeur a affirmé que la lettre de réponse de Mme Gosal n’introduisait aucune nouvelle preuve susceptible d’éclaircir sa cause et il expliqué les points suivants : i) devenir membre régulier n’est pas une promotion au sein de la GRC; ii) les différences entre le travail des gendarmes auxiliaires et celui des membres réguliers de la GRC, iii) les mesures disciplinaires prises sont confidentielles et les détails ne sont pas normalement divulgués.

 

[41]           Le défendeur a également fait état des divers mécanismes d’examen et de reddition de compte qui sont en place au sein du groupe de recrutement, et il a expliqué que la mutation de Mme Gosal était régie par les politiques et les conventions collectives du Conseil du Trésor, tandis que la mutation d’un membre régulier de la GRC est principalement dictée par les moyens opérationnels. C’est ce qui expliquerait la tardiveté alléguée dans le cas de sa mutation.

 

[42]           Le 3 février 2010, la Commission a rendu sa décision, laquelle est, comme d’habitude, brève. La Commission fait état des observations reçues, mais elle n’aborde expressément aucune des questions soulevées par Mme Gosal. Elle souscrit pour l’essentiel aux conclusions du rapport d’enquête.

 

 

II.  Analyse

[43]           Mme Gosal a soulevé les points suivants :

  1. La Commission a manqué à l’équité procédurale en ne fournissant pas des motifs suffisants et en s’appuyant sur une enquête qui n’était pas exhaustive. De plus, l’enquêteur n’était pas neutre.
  2. La décision de la Commission est déraisonnable si l’on tient compte de toute la preuve soumise à l’enquêteur.

 

[44]           Les dispositions pertinentes de la Loi sont présentées à l’annexe A.

 

[45]           Au début de l’audience, le défendeur s’est opposé à de nombreux paragraphes de l’affidavit de Mme Gosal, au motif qu’ils étaient fondés sur du ouï‑dire, des hypothèses et des suppositions, et à la prise en considération des pièces produites à l’appui de sa demande. La Cour a décidé que toutes les pièces qui avaient été soumises à l’enquêteur pouvaient être prises en considération (ce qui exclut la pièce W et les évaluations de travail postérieures à la date du rapport d’enquête se trouvant à la pièce S) pour déterminer s’il y avait eu manquement à l’équité procédurale, particulièrement en ce qui a trait à l’exhaustivité (ou la rigueur) de l’enquête. Elles ne peuvent normalement pas être prises en considération pour évaluer si la décision dans son ensemble était raisonnable (Niaki c. Canada (PG), 2006 CF 1104, aux paragraphes 25 et 26; Société Radio‑Canada c. Paul, 2001 CAF 93, au paragraphe 69; Canada (Commission des droits de la personne) c. Pathak, [1995] 2 C.F. 445 (C.A.), au paragraphe 12). Cela dit, pour prévenir toute injustice et pour bien analyser les documents sur lesquels s’est appuyé M. Beitel le membre retraité de la GRC qui a évalué le dossier de Mme Gosal en août 2005 avant de recommander le rejet de sa demande de recrutement, dont il est question au paragraphe 35 du rapport d’enquête , la Cour a bel et bien examiné ses pièces susmentionnées.

 

[46]           Il ressort clairement de la jurisprudence que le pouvoir de la Commission de rejeter une plainte en vertu du paragraphe 44(3) de la Loi est un pouvoir discrétionnaire et que les décisions rendues à cet égard devraient faire l’objet d’une grande retenue. La Cour appliquera la norme de la décision raisonnable pour déterminer la validité de la décision sur le fondement de l’ensemble de la preuve produite, puisqu’il s’agit d’une question mixte de fait et de droit (décision Niaki, précitée, au paragraphe 31; Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 51 et 53).

 

[47]           Pour ce qui concerne l’allégation de manquement à l’équité procédurale, la norme de contrôle est celle de la décision correcte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43, et arrêt Dunsmuir, précité).

 

A.  Manquement à l’équité procédure

Principes applicables

[48]           Il est bien établi en droit que le contenu du devoir d’équité procédurale est variable et dépend du contexte. Dans Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, il a été jugé qu’une brève décision contenue dans une lettre, comme celle en l’espèce, constituait des motifs valables si elle était complétée par le rapport d’enquête. Lorsque la Commission souscrit aux conclusions de l’enquêteur, le rapport fait partie intégrante des motifs de la Commission pour l’application du paragraphe 44(3) de la Loi (Sketchley, au paragraphe 37).

 

[49]           Il n’est pas contesté que, lorsque les observations présentées à la Commission par une partie à propos du rapport de l’enquêteur font état d’omissions importantes ou substantielles dans l’enquête et étayent ces affirmations, la Commission doit mentionner ces divergences et préciser, même brièvement, pourquoi à son avis elles ne sont pas importantes ou ne suffisent pas à mettre en doute la recommandation de l’enquêteur (Herbert c. Canada (Procureur général), 2008 CF 969, au paragraphe 26).

 

[50]           Dans Tahmourpour c Canada (Solliciteur général), 2005 CAF 113, au paragraphe 8, la Cour d’appel fédérale a désigné la décision Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574 (1re inst.), comme la décision clé sur la question du devoir de la Commission d’agir équitablement. Dans Slattery, après analyse du contenu de l’obligation d’équité défini par le juge Sopinka dans Syndicat des employés de production du Québec et de l’Acadie c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879 (S.E.P.Q.A.), le juge Marc Nadon a conclu que les parties devaient être informées de la substance de l’enquête et avoir la possibilité d’y répondre et que la Commission, pour rendre sa décision, peut prendre en considération le rapport d’enquête, les observations des parties et les documents de fond qu’elle juge nécessaires. À son avis :

Pour qu’il existe un fondement juste pour que la CCDP estime qu’il y a lieu de constituer un tribunal en vertu de l’alinéa 44(3)a) de la Loi, je crois que l’enquête menée avant cette décision doit satisfaire à au moins deux conditions : la neutralité et la rigueur. [par. 49]

 

 

[51]           Le critère de la neutralité n’est pas « de savoir s’il existe une crainte raisonnable de partialité de la part de l’enquêteur mais plutôt de savoir si l’enquêteur a abordé l’affaire avec un “esprit fermé” » comme l’a confirmé la juge Anne Mactavish dans Sanderson c. Canada (Procureur général), 2006 CF 447, au paragraphe 75 (voir également Zündel c. Canada (Procureur général) (1999), 175 D.L.R. (4th) 512, aux paragraphes 17 à 22).

 

[52]           Pour déterminer le degré d’exhaustivité de l’enquête requis pour satisfaire aux règles d’équité procédurale, le juge Nadon, au paragraphe 55 de l’arrêt Slattery, a expliqué ce qui suit :

[...] il faut tenir compte des intérêts en jeu : les intérêts respectifs du plaignant et de l’intimé à l’égard de l’équité procédurale, et l’intérêt de la CCDP à préserver un système qui fonctionne et qui soit efficace sur le plan administratif. [...]

 

 

[53]           Le point de vue exprimé par le juge Nadon en décrivant en quoi pouvait consister une enquête exhaustive a été confirmé dans Sketchley, précité, au paragraphe 121, comme étant une description appropriée du contenu de l’obligation d’agir équitablement. Les deux paragraphes suivants de l’arrêt Slattery, qui ont été mis en application par la suite, établissent des lignes directrices additionnelles à suivre pour déterminer s’il y a eu manquement à l’équité procédurale dans une enquête donnée :

56     Il faut faire montre de retenue judiciaire à l’égard des organismes décisionnels administratifs qui doivent évaluer la valeur probante de la preuve et décider de poursuivre ou non les enquêtes. Ce n’est que lorsque des omissions déraisonnables se sont produites, par exemple lorsqu’un enquêteur n’a pas examiné une preuve manifestement importante, qu’un contrôle judiciaire s’impose. Un tel point de vue correspond à la retenue judiciaire dont la Cour suprême a fait preuve à l’égard des activités d’appréciation des faits du Tribunal des droits de la personne dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554.

 

57     Dans des situations où les parties ont le droit de présenter des observations en réponse au rapport de l’enquêteur, comme c’est le cas en l’espèce, les parties peuvent compenser les omissions moins graves en les portant à l’attention du décideur. Par conséquent, ce ne serait que lorsque les plaignants ne sont pas en mesure de corriger de telles omissions que le contrôle judiciaire devrait se justifier. Même s’il ne s’agit pas d’une liste exhaustive, il me semble que les circonstances où des observations supplémentaires ne sauraient compenser les omissions de l’enquêteur devraient comprendre : (1) les cas où l’omission est de nature si fondamentale que le seul fait d’attirer l’attention du décideur sur l’omission ne suffit pas à y remédier; ou (2) le cas où le décideur n’a pas accès à la preuve de fond en raison de la nature protégée de l’information ou encore du rejet explicite qu’il en a fait.

                                                                        [Non souligné dans l’original.]

 

 

[54]           Dans Beauregard c. Postes Canada, 2005 CF 1383, notre Cour a reconnu que le « critère [de la preuve] manifestement importante » exige qu’il soit évident pour n’importe quelle personne rationnelle que la preuve qui, selon le demandeur, aurait dû être examinée durant l’enquête était importante compte tenu des éléments allégués dans la plainte (au paragraphe 21). Pour décider si la preuve est manifestement importante, la Cour doit se placer au moment de l’enquête et tenir compte des renseignements fournis à l’enquêteur par le plaignant.

 

[55]           Cela dit, il convient de noter qu’il n’appartient pas à la Cour de jouer le rôle de l’enquêteur et qu’il n’est pas nécessaire que l’enquêteur interroge chacun des témoins recommandés par le demandeur (Slattery, précité, au paragraphe 69).

 

[56]           Dans l’arrêt Tahmourpour, précité, le juge John Evans, s’exprimant au nom de la Cour, a qualifié l’affaire dont il était saisi de « cas exceptionnel » parce qu’il considérait que le fait que l’enquêteur avait omis d’interroger certains témoins était tout simplement injustifiable.

 

[57]           À cet égard et compte tenu des arguments soulevés par la demanderesse, la Cour souligne également que l’omission d’un enquêteur d’interroger le plaignant n’influe pas en soi sur la rigueur de l’enquête si le demandeur a eu amplement l’occasion d’établir le bien‑fondé des éléments essentiels de sa plainte et de répondre à l’interprétation de sa situation par l’enquêteur (voir Best c. Canada (Procureur général), 2011 CF 71, aux paragraphes 22 et 23).

 

[58]           Finalement, en ce qui a trait à l’obligation de divulguer à un plaignant particulier tous les documents échangés entre un enquêteur et une partie intéressée, la Cour d’appel fédérale, dans Hutchison c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2003 CAF 133, aux paragraphes 49 et 50, a indiqué clairement lors de son examen de la jurisprudence ce qui suit :

Il n’y a rien dans ces arrêts qui étayerait la thèse selon laquelle toute communication entre un enquêteur et une partie intéressée doit être divulguée à l’autre partie. Le droit de connaître la preuve à réfuter et d’y répondre se rapporte à des éléments qui seront mis à la disposition du décideur plutôt qu’à des éléments qui passent entre les mains d’un enquêteur dans le cadre de l’enquête.

 

Si le rapport d’enquête divulgue des renseignements contenus dans une lettre ou un document, la demanderesse a amplement exercé son droit d’y répondre. Si les renseignements contenus dans une lettre ou un document n’étaient pas inclus dans le rapport d’enquête et s’ils n’avaient par ailleurs pas été mis à la disposition de la Commission, le droit d’y réponde n’a pas pris naissance.

 

[59]           Dans le même ordre d’idées, la Cour d’appel fédérale a affirmé ce qui suit dans Gardner c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 284, au paragraphe 18 :

De toute façon, la Commission n’était pas tenue de présenter la nouvelle preuve à Mme Gardner pour la simple raison que cette preuve n’avait jamais été présentée à la Commission elle‑même. Ce qu’on devait à Mme Gardner, et ce qui lui a été accordé, c’était la possibilité de faire des commentaires au sujet des observations formulées par le Conseil du Trésor qui, finalement, comportaient l’essentiel de l’information contenue dans cette nouvelle preuve.

 

 

[60]           Finalement, les tribunaux administratifs tels que la Commission sont présumés avoir examiné toute la preuve soumise et ne sont pas tenus de faire état expressément de tous les éléments de preuve sur lesquels se fondent leurs motifs. Cela dit, plus la preuve qui n’a pas été mentionnée expressément dans les motifs du tribunal administratif est importante, plus une cour de justice sera disposée à inférer que ce tribunal a tiré une conclusion de fait erronée sans tenir compte des éléments dont il disposait (Cepeda‑Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 1425, 157 F.T.R. 35, aux paragraphes 14 à 17).

 

 

Application des principes

 

[61]           Gardant ces principes à l’esprit, la Cour a soigneusement examiné chacun des documents produits par Mme Gosal à l’appui de ses allégations selon lesquelles l’enquête n’était pas exhaustive et l’enquêteur n’était pas neutre[15]. En fait, la Cour a lu et relu plusieurs fois les documents soumis.

 

[62]           Premièrement, il est important d’établir ce sur quoi l’enquêteur devait se concentrer. Sa tâche consistait à vérifier s’il existait des motifs pour soutenir l’allégation de la demanderesse selon laquelle le rejet de sa demande par la GRC en octobre 2005 se fondait sur le sexe ou l’origine ethnique. Comme première étape, il devait déterminer si la demanderesse avait bel et bien les qualités requises pour occuper le poste. Il n’avait pas besoin de faire enquête sur l’ambiance de travail à Port Mann et il n’avait pas à se pencher sur la question de savoir s’il existait des motifs pour justifier sa plainte voulant que Bobbi Bodden l’ait intimidée ou que le serg. Nordlund ait essayé de se débarrasser d’elle comme employée d’échelon CR‑04 ni sur celle de savoir si on lui avait donné beaucoup trop de travail et pas suffisamment de formation pour faire son travail à Port Mann. Il n’avait pas non plus à faire enquête sur d’autres plaintes déposées par son syndicat qui n’ont aucun lien avec la plainte déposée contre le serg. Nordlund.

 

[63]           Dans les observations écrites qu’elle a présentées à la Cour, la demanderesse ne parle que de l’omission de l’enquêteur d’interroger les gend. Wawia et McKinny. On ne sait donc pas trop si elle insiste encore sur l’argument soulevé dans ses observations présentées à la Commission suivant lequel ledit enquêteur aurait également dû interroger Monalee Rendall ou Melissa Bell.

 

[64]           D’après les documents produits par Mme Gosal, il semble que l’enquêteur avait une copie des lettres que le gend. Wawia, le gend. McKinny et Monalee Rendell avaient fournies après le rejet de sa demande. Il est difficile de dire ce qu’ils pourraient avoir ajouté de plus. Il convient également de mentionner que les gend. Wawia et McKinny sont les personnes qui ont informé la plaignante des propos discriminatoires que le serg. Nordlund avait tenus à son endroit. Cet aspect de leur preuve potentielle avait été entièrement reconnu et n’avait pas besoin d’être corroboré davantage par l’enquêteur.

 

[65]           Il n’existe absolument aucune preuve (aucune preuve n’est mentionnée dans les observations présentées à la Commission) démontrant que l’un de ces messieurs ou l’une de ces deux dames aurait eu quelque chose d’important à ajouter relativement au traitement de la demande comme tel. En fait, il semble, d’après les documents fournis, que ces personnes n’aient pas été interrogées par M. Beitel, qui a mené l’enquête d’évaluation des aptitudes à l’été 2005. Rien n’indique qu’on ait demandé à l’une de ces personnes d’avoir devant M. Beitel des propos négatifs à l’endroit de la demanderesse. Leur preuve semble être liée à des questions, tel qu’il a été mentionné précédemment, dépourvues de pertinence quant au fait que la demanderesse n’a pas été acceptée comme cadette à la Division Dépôt.

 

[66]           Après avoir bien soupesé tout que l’on sait au sujet de ces quatre témoins, la Cour n’est pas convaincue que l’enquêteur ait omis d’examiner une preuve manifestement importante.

 

[67]           En ce qui concerne le serg. Dallin, il n’avait lui aussi rien à voir avec le processus d’enquête concernant la demande. Son intervention au nom de la demanderesse était bien documentée, même dans le résumé du dossier de Mme Gosal fait par l’insp. Wendell. Je le répète, compte tenu des principes directeurs applicables en l’espèce, la Cour ne peut conclure qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale parce que ce témoin, qui ne connaissait même pas la demanderesse au moment où la GRC a rejeté sa demande, n’a pas été interrogé.

 

[68]           Enfin, même si, encore une fois, cette question n’est pas soulevée dans les observations de la demanderesse mais dans son affidavit seulement, la Cour a examiné l’allégation selon laquelle l’enquêteur était peu consciencieux parce qu’il ne l’a interrogée que pendant 15 minutes. La demanderesse ne donne aucune précision quant aux faits ou arguments qu’elle voulait soulever, qui étaient essentiels et n’avaient pas déjà été soumis à l’enquêteur, compte tenu du fait qu’elle avait, tel qu’il a été mentionné, parlé à l’enquêteur précédent à plusieurs occasions et lui avait fourni beaucoup de documents, qui faisaient partie des 800 pages de documents compris dans son dossier.

 

[69]           La présente affaire n’en n’est pas une où le demandeur n’a pas eu l’occasion de combler les lacunes (ou les présumées lacunes), tel qu’il a été discuté dans la décision Niaki, précitée, et où le demandeur n’a tout simplement pas fourni un renseignement quelconque dont l’absence donnerait à penser que l’enquête était très insuffisante. Les décisions invoquées par Mme Gosal, notamment Egan c. Canada (Procureur général), 2008 CF 649 (le juge Roger Hughes), et la décision Herbert, précitée (le juge Russel Zinn), se distinguent de l’espèce par les faits.

 

[70]           Compte tenu de tout ce qui précède, la Cour est convaincue qu’il ne s’agit pas d’une affaire où il y a eu manquement à l’équité procédurale, mais bien d’une affaire où on se questionne sur le caractère raisonnable de la décision vu l’ensemble de la preuve dont la Commission a été saisie. Cette question sera examinée plus loin.

 

[71]           En ce qui a trait au manque de neutralité dont fait état la demanderesse, il n’y a aucune preuve à l’appui de cet argument, mis à part le fait que l’enquêteur était un ancien lieutenant‑colonel qui avait servi dans les Forces canadiennes pendant plus de 20 ans. Il ressort des observations écrites concernant la réparation demandée par Mme Gosal et de ses observations de vive voix, qu’il y a, à son avis, apparence de partialité chaque fois qu’il est permis à une personne ayant travaillé dans les forces militaires ou policières d’examiner les mesures prises par la GRC.

 

[72]           En outre, elle souligne que l’examen déficient par l’enquêteur de la preuve de l’insp. Wendell, sa naïveté et les conclusions qu’il a tirées indiquent qu’il avait en fait un parti pris.

 

[73]           Ici encore une fois, la Cour ne peut tout simplement pas souscrire à cet argument. Il en faut davantage pour qu’une cour conclue que la Commission avait un esprit fermé. La Cour n’est certainement pas prête à dire que toute personne ayant l’expérience de l’enquêteur choisi dans la présente affaire ne pourrait faire enquête de manière impartiale sur une plainte visant la GRC ou toute autre force policière.

 

[74]           Tel qu’il a été mentionné précédemment, il faut plus qu’une crainte raisonnable de partialité pour qu’il soit satisfait au critère. Comme nous le verrons plus loin, la Cour est d’avis que la décision finale est raisonnable. Elle ne peut donc pas être utilisée comme preuve d’un esprit fermé. La Cour n’est pas convaincue que l’on pourrait avec raison affirmer qu’il y a eu préjugement de la question portée devant l’organisme d’enquête (voir la décision Zündel, précitée, au paragraphe 21).

 

[75]           Enfin, la demanderesse soutient que, comme dans Egan, les arguments soulevés dans les observations qu’elle a présentées à la Commission étaient de nature si fondamentale qu’ils auraient dû être abordés expressément dans les motifs. Elle allègue que l’omission de le faire équivaut soit à un manquement à l’équité procédurale soit à un manque de transparence dans la décision.

 

[76]           Comme nous l’avons vu, le principe établi dans la décision Herbert, précitée, mentionné seulement dans une remarque incidente dans Egan n’est pas contesté. Ce qui fait l’objet de la controverse en l’espèce, c’est l’affirmation que les observations de la demanderesse justifiaient une réponse expresse plus élaborée que ce qui avait été dit dans le rapport d’enquête. En fait, selon le défendeur, les observations que Mme Gosal a présentées à la Commission étaient simplement une reformulation de ce qu’indiquaient tous les documents qu’elle avait fournis à l’enquêteur durant l’enquête.

 

[77]           Pour répondre à cette question, il faut dire que la Cour ne tient pas compte de la longueur ou de la quantité des détails contenus dans les observations présentées. Les observations ne sont pas évaluées au poids. La Cour doit plutôt se demander si les allégations du demandeur font état « d’omissions importantes ou substantielles dans l’enquête et étayent ces affirmations » (décision Herbert, précitée, au paragraphe 26). Tel qu’il a été mentionné, la plupart des questions soulevées ne visaient pas la plainte visée par le mandat même de la Commission. Celle‑ci n’a reçu aucune précision expliquant en quoi les quatre témoins dont il était fait mention étaient importants pour les questions véritablement en litige.

 

[78]           Aucun des documents mentionnés dans les observations de la demanderesse (aux paragraphes 10 h, i, j et k) n’avait été soumis à la Commission.

 

[79]           Elle a formulé des allégations générales d’iniquité et de partialité à l’endroit de l’enquêteur, pour lesquelles elle n’a offert aucun fondement ou appui convaincant dans son argumentation détaillée.

 

[80]           En ce qui a trait à ses opinions personnelles sur la validité de la preuve offerte par diverses personnes, notamment le manque d’« indépendance » des enquêteurs qui ont examiné le dossier de demande initial, tels que le cap. Chow et la cap. Jardine, elles n’étaient tout simplement soutenues par rien de tangible. Il ne s’agit en fait que de simples hypothèses ou suppositions. À cette étape‑ci, il est important de mentionner que les examens relatifs à la décision de rejeter la demande de Mme Gosal n’étaient pas censés être de nouvelles évaluations de ses aptitudes fondées sur des documents comprenant des lettres envoyées pour [traduction] « redorer son dossier de recrutement » après la décision rendue en octobre 2005. Il me semble que les opinions exprimées dans les observations qu’elle a présentées à la Commission se rapportent en fait à l’importance que l’enquêteur a accordée à cette preuve et que, par conséquent, la Commission y a répondu suffisamment en souscrivant aux conclusions du rapport d’enquête.

 

[81]           Compte tenu de ce qui précède, la demanderesse n’a pas réussi à convaincre la Cour que la Commission a manqué à son devoir d’agir équitablement ou d’être transparente.

 

B.  Caractère raisonnable de la décision

[82]           On comprend bien, en se fondant sur le rapport d’enquête et l’adoption des recommandations de l’enquêteur, que la Commission a refusé d’intervenir dans les conflits interpersonnels et les problèmes liés au travail autres que ceux dont il était expressément fait état dans la plainte, à savoir les propos dénigrants et le rejet de la demande par la GRC, communiqué à la demanderesse en octobre 2005[16].

 

[83]           Pour cette raison, le rapport d’enquête met l’accent sur la preuve dont disposait le décideur initial en 2005. Rien n’indique que la décision initiale a été prise sur un fondement autre que l’enquête d’évaluation des aptitudes menée par M. Beitel et sa recommandation[17]. Rien n’indique non plus que les autres examens ont été influencés par quelque chose qui ne se trouvait pas dans le dossier de demande à ce moment‑là ou ont été faits par un enquêteur qui était fermé d’esprit.

 

[84]           Mme Gosal allègue que la démarche adoptée par l’enquêteur de la Commission est simpliste, particulièrement compte tenu du fait qu’aucune des personnes ayant participé à l’évaluation de son dossier de demande, que ce soit en octobre 2005 ou au moment des examens subséquents, n’était impartiale.

 

[85]           Mme Gosal souligne que M. Beitel, en sa qualité d’agent de la GRC à la retraite, se serait senti obligé de faire des recommandations fondées uniquement sur les déclarations faites par le serg. Nordlund et sa clique. Selon elle, M. Beitel y avait encore des amis de qui il espérait obtenir du travail à temps partiel. Le gend. Chow aurait également eu un parti pris en tant que membre de l’équipe de recrutement et parce qu’il relevait du serg. int. Lew qui faisait probablement partie de la [traduction] « clique raciste » puisqu’il avait envoyé un courriel au s.e.-m. McVey en signant [traduction] « la recrue de 1995 à Coquitlam »[18]. Enfin, en ce qui a trait à la cap. Jardine et au serg. Ferguson, Mme Gosal dit qu’ils travaillaient sous les ordres de l’insp. Wendell et que, par conséquent, ils ne pouvaient être indépendants, même si la cap. Jardine était nouvelle dans l’équipe de recrutement. Selon elle, la cap. Jardine aurait suivi les instructions reçues de son supérieur, l’insp. Wendell, qui, encore une fois de l’avis de Mme Gosal, ne l’appuyait visiblement pas pour diverses raisons décrites dans ses observations.

 

[86]           En toute déférence, ces allégations ne sont rien de plus que des hypothèses, des suppositions ou des opinions personnelles. La Cour ne peut inférer à partir de ces allégations qu’il n’était pas raisonnablement loisible à la Commission de conclure comme elle l’a fait, et elle n’est pas disposée à le faire, d’autant plus que le gend. Chow a confirmé à l’enquêteur au cours de son entrevue qu’il connaissait le serg. Nordlund de nom seulement et qu’il ne connaissait ni le s.e.-m. McVey ni le cap. Boyer. En fait, retenir le profil injustifié que Mme Gosal a établi à l’égard des enquêteurs qui sont intervenus dans son dossier serait, à mon avis, particulièrement inapproprié.

 

[87]           Mme Gosal a mis beaucoup l’accent sur le fait que le serg. Alex Bodden a recommandé au serg. int. Lew d’interroger le serg. Nordlund et le s.e.-m. McVey. Toutefois, il ressort clairement de la méthode employée par M. Beitel qu’il avait l’intention d’interroger les supérieurs de Mme Gosal et certains de ses collègues de travail dans chacune des unités ou divisions où elle avait travaillé, ce qui incluait forcément son supérieur immédiat à Port Mann (le serg. Nordlund), où elle travaillait au moment où elle a déposé sa demande.

 

[88]           Bien que certains indices permettent de croire que Mme Gosal avait effectivement proposé des noms de collègues à interroger dans diverses unités ou divisions, il n’existe aucune preuve qu’elle ait inclus des noms ou des références pour Port Mann. Il n’y a donc pas de preuve que l’une de ses propositions n’ait pas été prise en considération.

 

[89]           Tel qu’il a été mentionné, le serg. Nordlund, qui a été le supérieur immédiat de Mme Gosal pendant les deux ou trois années qui ont précédé le dépôt de sa demande, devait nécessairement être interrogé. M. Beitel n’a pas restreint son enquête à la [traduction] « clique de Nordlund », étant donné qu’il a également parlé à un homme des Services informatiques qui avait travaillé avec M. Gosal pour corriger diverses erreurs commises à Port Man au début de 2005. Ce membre régulier qui n’avait absolument rien à voir avec la clique du serg. Nordland a affirmé qu’il ne serait pas favorable à ce qu’elle devienne membre régulier parce qu’elle ne satisfaisait notamment pas à l’exigence d’être capable de prendre des décisions rapides et appropriées.

 

[90]           Même si Mme Gosal allègue dans les observations qu’elle a présentées à la Commission que la [traduction] « similarité presque totale » des commentaires négatifs faits par diverses personnes sur son rendement au travail à Port Mann prouve que ces personnes ont été contraintes de faire pareils commentaires, la Cour note que les déclarations dont elle fait mention décrivent en fait les mêmes problèmes soulevés par des personnes qui ont travaillé avec elle dans d’autres divisions et qui ont été interrogées par M. Beitel. Par conséquent, il se peut bien que la [traduction] « similarité presque totale » des commentaires soit attribuable au fait que ces personnes ont donné d’elle une description exacte.

 

[91]           Il ressort clairement de la preuve (abstraction faite des commentaires du serg. Nordlund et de sa prétendue clique) que la demanderesse se trouve depuis longtemps mêlée à des conflits interpersonnels, particulièrement avec des collègues de sexe féminin. Port Mann n’était pas la première division où elle a déposé une plainte de harcèlement ou menacé de le faire. De plus, même dans le cadre du Programme de la police auxiliaire où les rapports étaient généralement positifs, elle semble avoir eu des conflits du même genre avec d’autres auxiliaires qui auraient déposé contre elle des plaintes qu’on a finalement jugées non corroborées.

 

[92]           Abstraction faite encore une fois des commentaires du serg. Nordlund et de sa clique, d’autres éléments de preuve sont venus corroborer les doutes de M. Beitel au sujet des aptitudes de Mme Gosal (mis à part les conflits avec des collègues de sexe féminin). Dans plus d’une division où la demanderesse a travaillé, au moins une personne a mis en doute ses aptitudes à devenir membre régulier, notamment à Port Mann où, tel qu’il a été mentionné précédemment, un membre régulier qui n’avait absolument rien à voir avec la clique du serg. Nordlund a affirmé qu’il n’était pas favorable à ce qu’elle devienne membre régulier.

 

[93]           L’allégation suivant laquelle la formulation [traduction] « utilisera la “carte de la race” si elle est offensée par ceux qui tentent de l’aider » vient sûrement du serg. Nordlund n’est pas corroborée[19]. En fait, rien n’indique que le serg. Nordlund ait utilisé ces termes au cours de son entrevue (les notes de l’entrevue étant incluses dans la preuve) et, en fait, il se peut que ce soient les mots employés par M. Beitel lui‑même pour faire état de la question des plaintes de harcèlement de la demanderesse, qui a été soulevée par plus d’une personne ailleurs qu’à Port Mann.

 

[94]           Dans ses observations écrites, Mme Gosal a également discuté brièvement du caractère déraisonnable de la décision. Elle semble préoccupée par le fait que, compte tenu de toute la preuve au dossier, la Commission aurait dû décider qu’il existait un fondement suffisant pour passer à l’étape suivante. Je pense, pour répondre à cette préoccupation, qu’il ne s’agit pas tant d’une question de preuve qui a été écartée, mais bien d’une question de preuve dépourvue de pertinence quant à la plainte déposée devant la Commission[20].

 

[95]           La Cour est également convaincue que la remarque de M. Beitel citée au paragraphe 36 du rapport d’enquête est corroborée par les commentaires faits par des personnes interrogées ailleurs qu’à Port Mann[21].

 

[96]           Finalement, Mme Gosal semble en désaccord avec la conclusion de la Commission suivant laquelle les mesures prises par la GRC relativement aux commentaires dénigrants du serg. Nordlund avaient été rapides, efficaces et proportionnelles à la situation particulière du harcèlement. Il s’agit évidemment d’une question d’opinion et la Cour n’est pas convaincue qu’il n’était pas loisible à la Commission d’arriver à cette conclusion compte tenu de la preuve.

 

[97]           Tel qu’il a été expliqué dans Dunsmuir et Khosa, précités, pour évaluer une décision suivant la norme de la décision raisonnable, la Cour doit déterminer si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Il peut exister plus d’une issue raisonnable et la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable. Tel qu’il a été mentionné précédemment, la Cour est convaincue que la décision de la Commission, compte tenu du rapport d’enquête, satisfait aux principes de justification, de transparence et d’intelligibilité.

 

[98]           À la lumière de ce qui précède, la Cour conclut que la décision ne comporte aucune erreur donnant matière à révision. Elle était raisonnable.

 

[99]           Après avoir examiné soigneusement la question, la Cour croit qu’aucuns dépens ne devraient être adjugés.

 


 

JUGEMENT

 

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Johanne Gauthier »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


ANNEXE

 

 

Les dispositions pertinentes en l’espèce de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H‑6, sont les suivantes :

  2. La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en donnant effet, dans le champ de compétence du Parlement du Canada, au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l’égalité des chances d’épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience ou l’état de personne graciée.

 

 

 

  3. (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

 

 

  3.1 Il est entendu que les actes discriminatoires comprennent les actes fondés sur un ou plusieurs motifs de distinction illicite ou l’effet combiné de plusieurs motifs.

 

 

 

  7. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

 

 

 

 

  14. (1) Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de harceler un individu :

a) lors de la fourniture de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public;

b) lors de la fourniture de locaux commerciaux ou de logements;

c) en matière d’emploi.

 

 

 

  (2) Pour l’application du paragraphe (1) et sans qu’en soit limitée la portée générale, le harcèlement sexuel est réputé être un harcèlement fondé sur un motif de distinction illicite.

 

 

  44. (1) L’enquêteur présente son rapport à la Commission le plus tôt possible après la fin de l’enquête.

 

 

  (2) La Commission renvoie le plaignant à l’autorité compétente dans les cas où, sur réception du rapport, elle est convaincue, selon le cas :

a) que le plaignant devrait épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) que la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale.

 

 

 

  (3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

a) peut demander au président du Tribunal de désigner, en application de l’article 49, un membre pour instruire la plainte visée par le rapport, si elle est convaincue :

(i) d’une part, que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle‑ci est justifié,

(ii) d’autre part, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la plainte en application du paragraphe (2) ni de la rejeter aux termes des alinéas 41c) à e);

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

 

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle‑ci n’est pas justifié,

(ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

 

 

 

  65. (1) Sous réserve du paragraphe (2), les actes ou omissions commis par un employé, un mandataire, un administrateur ou un dirigeant dans le cadre de son emploi sont réputés, pour l’application de la présente loi, avoir été commis par la personne, l’organisme ou l’association qui l’emploie.

 

 

  (2) La personne, l’organisme ou l’association visé au paragraphe (1) peut se soustraire à son application s’il établit que l’acte ou l’omission a eu lieu sans son consentement, qu’il avait pris toutes les mesures nécessaires pour l’empêcher et que, par la suite, il a tenté d’en atténuer ou d’en annuler les effets.

 

 

  2. The purpose of this Act is to extend the laws in Canada to give effect, within the purview of matters coming within the legislative authority of Parliament, to the principle that all individuals should have an opportunity equal with other individuals to make for themselves the lives that they are able and wish to have and to have their needs accommodated, consistent with their duties and obligations as members of society, without being hindered in or prevented from doing so by discriminatory practices based on race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability or conviction for an offence for which a pardon has been granted.

 

 

  3. (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for which a pardon has been granted.

 

 

 

  3.1 For greater certainty, a discriminatory practice includes a practice based on one or more prohibited grounds of discrimination or on the effect of a combination of prohibited grounds.

 

 

  7. It is a discriminatory practice, directly or indirectly,

 

(a) to refuse to employ or continue to employ any individual, or

(b) in the course of employment, to differentiate adversely in relation to an employee,

on a prohibited ground of discrimination.

 

  14. (1) It is a discriminatory practice,

 

 

(a) in the provision of goods, services, facilities or accommodation customarily available to the general public,

(b) in the provision of commercial premises or residential accommodation, or

(c) in matters related to employment,

to harass an individual on a prohibited ground of discrimination.

 

  (2) Without limiting the generality of subsection (1), sexual harassment shall, for the purposes of that subsection, be deemed to be harassment on a prohibited ground of discrimination.

 

 

  44. (1) An investigator shall, as soon as possible after the conclusion of an investigation, submit to the Commission a report of the findings of the investigation.

 

  (2) If, on receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission is satisfied

 

 

(a) that the complainant ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available, or

 

(b) that the complaint could more appropriately be dealt with, initially or completely, by means of a procedure provided for under an Act of Parliament other than this Act,

it shall refer the complainant to the appropriate authority.

 

  (3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

(a) may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry under section 49 into the complaint to which the report relates if the Commission is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is warranted, and

(ii) that the complaint to which the report relates should not be referred pursuant to subsection (2) or dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e); or

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

(ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).

 

 

  65. (1) Subject to subsection (2), any act or omission committed by an officer, a director, an employee or an agent of any person, association or organization in the course of the employment of the officer, director, employee or agent shall, for the purposes of this Act, be deemed to be an act or omission committed by that person, association or organization.

 

  (2) An act or omission shall not, by virtue of subsection (1), be deemed to be an act or omission committed by a person, association or organization if it is established that the person, association or organization did not consent to the commission of the act or omission and exercised all due diligence to prevent the act or omission from being committed and, subsequently, to mitigate or avoid the effect thereof.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑378‑10

 

INTITULÉ :                                                   PAULINE KAUR GOSAL c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 12 janvier 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LA JUGE GAUTHIER

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 18 mai 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pauline Kaur Gosal

 

LA DEMANDERESSE AGISSANT POUR SON PROPRE COMPTE

 

Helen Park

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pauline Kaur Gosal

Surrey (Colombie‑Britannique)

 

LA DEMANDERESSE AGISSANT POUR SON PROPRE COMPTE

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 



[1] Une fiche de rendement présentée à la pièce K, page 3 de l’affidavit de la demanderesse, fait état de plaintes déposées contre la demanderesse par un autre employé d’échelon CR‑04, en plus de celle déposée par un employé occasionnel. On ne sait pas si cette autre plainte a été déposée avant ou après le dépôt par la demanderesse de la plainte visant Mme Bodden.

[2] On ne sait pas trop si ce manque de formation s’appliquait également dans le cas des inscriptions du CPIC.

[3] Dans les présents motifs, abstraction faite d’une citation des propos de quelqu’un d’autre, Robert Nordlund sera désigné comme sergent, ce qui semble être son grade actuel. Cela dit, la Cour comprend bien qu’il était en réalité caporal à l’époque pertinente.

[4] Dans ses observations, la demanderesse s’est plainte du fait que sa mutation au sein de la GRC avait pris plus de temps que ce qui est normalement nécessaire. Encore une fois, elle avance que cela démontrait l’incapacité de son employeur à faire preuve de diligence dans le traitement de sa plainte. Le défendeur a réagi à cette déclaration dans sa propre réponse et il n’y a pas lieu pour la Cour de formuler d’autres observations sur cette question.

[5] La demanderesse écrit le nom du gend. McKinny de plusieurs façons, mais la Cour va suivre l’orthographe employée par celui‑ci dans la signature qui apparaît dans la lettre présentée à la pièce S de l’affidavit de la demanderesse. 

[6] Dans ses observations datées du 28 octobre 2009, Mme Gosal mentionne que les trois autres plaintes auraient également dû faire l’objet d’une enquête par la Commission. Tel qu’il a été mentionné, on ne sait pas trop quelle était la teneur de ces plaintes et comment elles étaient liées aux faits contenus dans la plainte exacte déposée auprès de la Commission. Il est certain que la plainte qu’elle a déposée auprès de la Commission ne fait aucunement mention de ces trois autres plaintes.

[7] Affidavit de la demanderesse, au paragraphe 7. Selon ce qu’elle affirme, Mme Gosal a parlé plusieurs fois à la première personne chargée du dossier et lui a envoyé des documents. Cette personne a quitté son emploi à la Commission et a été remplacée par l’enquêteur qui a rédigé le rapport dont il est question en l’espèce.

[8] Il n’a pas été réellement contesté que la GRC avait une politique visant à prévenir le harcèlement fondé sur des motifs de distinction et les comportements de nature sexuelle. En fait, même le gend. Wawia affirme clairement, dans sa lettre d’appui à Mme Gosal, que [traduction] « [l]a politique de la GRC en matière de discrimination et de harcèlement est une politique de tolérance zéro qui doit être observée et qui n’admet aucune exception ».

[9] Pour dire les choses franchement, il n’y avait aucune preuve que cette personne a rencontré M. Beitel ou qu’elle avait quoi que ce soit à voir avec son dossier de demande.

[10] Par exemple, le cap. Boyer a été directement impliqué dans l’affaire intéressant M. Tahmourpour lorsqu’il travaillait à la Division Dépôt.

[11] Il convient de noter que les observations présentées à l’enquêteur en réponse aux commentaires de la GRC ne font pas partie des documents joints à l’affidavit qu’elle a déposé à l’appui de l’allégation selon laquelle l’enquête n’était pas exhaustive.

[12] Au paragraphe 89, la Cour fera état de certains de ces commentaires pour illustrer la situation.

[13] Bien qu’il semble que l’examen effectué par la cap. Jardine ait eu lieu avant l’intervention du serg. Dallin auprès du superintendant principal Watts au nom de la demanderesse, il est difficile de dire si l’examen effectué par le serg. Ferguson a été entrepris par suite de l’intervention du serg. Dallin. Le surintendant principal Watts a retransmis la lettre du serg. Dallin à l’insp. Wendell qui lui a répondu qu’il [traduction] « ne doutait pas que la bonne décision avait été prise relativement à cette demande et qu’elle saurait résister à toute contestation » (affidavit de la demanderesse, pièce E, à la page 1).

[14] Cette déclaration a été faite après que le serg. Dallin a demandé au surintendant principal Watts de rouvrir le dossier de Mme Gosal (voir la note 13).

[15] Cet élément de parti pris de la part de l’enquêteur n’est pas soulevé dans les observations écrites de la demanderesse, mais il a été soulevé comme point litigieux dans les observations qu’elle a présentées à la Commission ainsi que dans son affidavit. La Cour a donc décidé d’examiner cet élément compte tenu du fait que, à l’audience, le défendeur a eu l’occasion d’aborder la question.

[16] Lettre de la Commission envoyée à la demanderesse en date du 29 janvier 2008 (affidavit de la demanderesse, pièce D).

[17] La Cour a alors mis l’accent sur l’enquête d’évaluation des aptitudes et la recommandation de M. Beitel. Il n’y a pas lieu d’analyser les allégations de réponses incohérentes données par Mme Gosal relativement à un incident passé.

[18] Comme cet événement avait eu lieu dix ans avant l’envoi de ce courriel, on peut à juste titre comprendre que cette remarque révèle qu’il n’y a eu en fait aucune communication entre ces deux personnes depuis ce temps.

[19] Passage cité par l’enquêteur au paragraphe 36 du rapport d’enquête et extrait du rapport de M. Beitel.

[20] Autrement dit, les propos malveillants du serg. Nordlund et le rejet de sa demande pour les motifs de distinction énoncés dans la Loi. La Cour note que, dans l’une des premières lettres que la Commission a envoyées à Mme Gosal en 2008, il est clairement mentionné que la Commission examinerait essentiellement les faits qui se sont déroulés entre octobre 2005 et septembre 2006.

[21] Voir la note 19.

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