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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110505

Dossier : IMM-6005-09

Référence : 2011 CF 520

[traduction française certifiée , non révisée]

Ottawa (Ontario), le 5 mai 2011

En présence de madame la juge Snider

 

 

ENTRE :

TSEGEROMAN ZENAWI KIDANE

demanderesse

 

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE
L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.                   Introduction

 

[1]               La demanderesse, Tsegeroman Zenawi Kidane, est une citoyenne érythréenne. En 2008, elle s’est installée au Caire (Égypte) et a présenté une demande de résidence permanente au Canada à titre de réfugiée à l’extérieur du pays. Une agente des visas (l’agente) de l’ambassade du Canada au Caire (Égypte) a refusé sa demande par une lettre (aussi appelée lettre de rejet) datée du 12 octobre 2009. La demanderesse demande que cette décision soit infirmée. Pour les motifs qui suivent, je ferai droit à cette demande de contrôle judiciaire.

 

II.        Questions en litige

 

[2]               Les questions soulevées par la présente demande sont les suivantes :

 

1.                  L’agente a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte du statut de réfugié au sens de l’UNHCR de la demanderesse ou du guide OP 5 de CIC (dont nous discuterons plus bas)?

 

2.                  Les conclusions de l’agente quant à la crédibilité étaient-elles erronées, parce que celle-ci n’aurait pas tenu compte de la preuve dont elle disposait ou l’aurait mal comprise ou mal interprétée?

 

3.                  L’agente a-t-elle commis une erreur en omettant d’évaluer tous les motifs possibles de persécution – et plus précisément, l’allégation de la demanderesse selon laquelle elle a quitté l’Érythrée illégalement?

 

4.                  L’agente a-t-elle commis une erreur en omettant de fournir des motifs adéquats?

 

5.                  La décision de l’agente soulève-t-elle une crainte raisonnable de partialité?

 

III.       Les dossiers connexes

 

[3]               Le présent dossier est l’une des quatre demandes de contrôle judiciaire instruites conjointement par la Cour. Les numéros de greffe des trois autres dossiers sont IMM-6000-09 (Henok Aynalem GHIRMATSION), IMM-6009-09 (Tsegay Kiflay WELDESILASSIE) et IMM-6010-09 (Selam Petros WOLDESELLASIE). Ces quatre dossiers sont représentatifs d’un groupe de près de quarante autres pour lesquels des demandes de contrôle judiciaire ont été introduites. Les dossiers restants sont en suspens en attendant l’issue de ces quatre-ci. Les éléments communs aux quatre dossiers, et à tous les autres, d’après ce que j’en ai compris, sont les suivants :

 

·                    tous les demandeurs d’asile sont des citoyens érythréens;

 

·                    tous les demandeurs se veulent des adeptes de l’église pentecôtiste;

 

·                    les demandes de résidence permanente de chacun d’eux ont été refusées;

 

·                    c’est la même agente qui a interviewé chaque demandeur d’asile et qui a décidé de refuser leur demande de résidence permanente.

 

[4]               Même si le bien-fondé de chacune des demandes de contrôle judiciaire est soulevé dans les différents dossiers de demande, les quatre dossiers ont été jugés représentatifs, car, comme le dit la demanderesse, [traduction] « ils révèlent plusieurs erreurs et un schéma de prise de décision communs à un grand nombre ou à l’ensemble des autres cas ».

 

[5]               J’aimerais souligner que la présente décision se rapporte à la demande particulière présentée par la demanderesse en l'espèce. Je n’ai l’intention de formuler ni conclusion ni ordonnance générale susceptible d’être contraignante pour le règlement des autres dossiers. Chaque dossier présente une série unique de faits et réclame un examen et une décision distincts.

 

[6]               Cela étant dit, les quatre dossiers soulèvent certaines questions communes. À l’égard de ces questions, mon analyse et mes conclusions sont présentées de manière plus détaillée dans le premier des quatre dossiers – IMM-6000-09. Il est possible de consulter les motifs du jugement et le jugement se rapportant à ce dossier dans la décision Ghirmatsion c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 519 [Ghirmatsion]. Dans les présents motifs, je renverrai les parties et le lecteur, s’il y a lieu, aux sections pertinentes de cette décision.

 

IV.       Les affidavits

 

[7]               Dans la décision Ghirmatsion, précitée, j’ai examiné les affidavits déposés à l’appui de la demande de contrôle judiciaire.

 

[8]               Les affidavits présentés en l’espèce par la demanderesse (en dehors de ceux qu’elle a soumis elle-même) sont identiques. Mes préoccupations sont identiques à celles qui ont été formulées plus tôt. Pour les motifs énoncés aux paragraphes 6 à 23 de la décision Ghirmatsion :

 

·                    les affidavits de Mme Janet Dench ne recevront que peu de poids;

 

·                    l’affidavit de M. Tewolde Yohanes ne recevra que peu de poids;

 

·                    la qualité d’expert est reconnue à M. William Griffin sur les questions touchant la foi pentecôtiste; la preuve et les opinions exposées dans son affidavit seront traitées comme une preuve d’expert fournie pour assister la Cour, s’il y a lieu;

 

·                    les documents joints à l’affidavit de Mme Natalia Shchepetova n’ont pas été produits devant l’agente et ne seront pas pris en compte par la Cour.

 

[9]               Dans la mesure où il entend compléter ou réviser ses motifs, tels qu’ils figurent dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI) et la lettre de rejet, l’affidavit de l’agente ne sera pas pris en compte.

 

V.        Situation de la demanderesse

 

[10]           Dans ce segment des motifs, j’exposerai brièvement la situation de la demanderesse telle qu’elle l’a décrite. Je fais remarquer qu’il s’agit de l’histoire de la demanderesse, telle qu’en atteste principalement le récit contenu dans sa demande; je ne me prononce ni sur sa véracité ni sur le bien-fondé de la demande d’asile.

 

[11]           La demanderesse est née le 29 juin 1963 à Adibzage (Érythrée). Elle s’est convertie au pentecôtisme lorsqu’elle était jeune et en est une figure dirigeante depuis 1984.

 

[12]           Après le décès de son époux , la demanderesse a commencé à travailler en 1993 comme employée de bureau au ministère de la Santé de l’Érythrée. Elle a occupé ce poste pendant dix ans.

 

[13]           En mai 2002, le gouvernement érythréen s’est mis, dans le cadre d’une action concertée, à prendre pour cible et à fermer les églises minoritaires, dont les églises pentecôtistes.

 

[14]           En 2003, la demanderesse quittait son emploi au sein du ministère et commençait à travailler à temps plein pour l’église, se chargeant du secrétariat et de la traduction de livres.

 

[15]           En 2007, la demanderesse s’est vu refuser un passeport pour pouvoir rendre visite à sa sœur aux États-Unis parce qu’elle n’était pas adepte d’une religion reconnue. Elle s’est donc rendue au Soudan et a obtenu un passeport de l’ambassade de l’Érythrée sans qu’on l’interroge sur son identité religieuse.

 

[16]           Durant l’été 2008, la demanderesse s’est installée au Caire (Égypte), où le statut de réfugié au sens de l’UNHCR lui a été reconnu. Elle a présenté ensuite une demande de résidence permanente au Canada à titre de réfugiée à l’extérieur du pays.

 

VI.       L’entrevue

 

[17]           Le 30 septembre 2009, la demanderesse était interviewée par l’agente. L’entrevue s’est déroulée en anglais et en tigrigna, avec l’aide d’un interprète. Il n’existe aucune transcription de cette entrevue. L’agente a pris des notes sur son ordinateur qu’elle a recopiées, le jour même semble-t-il, dans le STIDI.

 

[18]           Les affidavits de l’agente et de la demanderesse (déposés sous serment le 5 septembre 2010 et le 24 février 2011, respectivement) contiennent de plus amples descriptions du déroulement de cette entrevue. Compte tenu de la période qui sépare l’entrevue de la rédaction de ces affidavits, durant laquelle les souvenirs ont pu s’estomper ou se dénaturer, je suis peu disposée à m’y fier en ce qui a trait aux détails de l’entrevue de 2009.

 

[19]           En l’espèce, comme dans Ghirmatsion, précitée, une organisation nommée Africa and Middle East Refugee Assistance (AMERA) s’est intéressée à la demanderesse. Le rôle d’AMERA est expliqué de façon plus détaillée dans Ghirmatsion, précitée, aux paragraphes 33 et 34.

 

[20]           Le 1er novembre 2009, la demanderesse a été interviewée par un représentant d’AMERA : elle lui a fourni d’autres détails sur son entrevue avec l’agente. Les notes, jointes à l’affidavit de la demanderesse, ont été prises peu de temps après l’entrevue avec l’agente et sont plus contemporaines que les commentaires contenus dans leurs affidavits respectifs. Comme je le concluais dans Ghirmatsion, précitée, et pour les mêmes motifs, j’accepterai les notes d’AMERA avec beaucoup de réserve, ce qui pourra en affecter la valeur probante.

 

VII.     La décision

 

[21]           Dans la lettre de rejet du 12 octobre 2009, les motifs de refus de l’agente étaient énoncés comme suit :

[Traduction] Après avoir soigneusement examiné tous les facteurs relatifs à votre demande, je ne suis pas convaincue que vous apparteniez à l’une des catégories prescrites, car je ne vous ai pas trouvée crédible à l’entrevue. Le fait que vous vous soyez convertie à la foi pentecôtiste dès 1984 et que vous n’ayez commencé à travailler avec l’église qu’en 2003, un an après l’interdiction de cette religion, me paraît déraisonnable. Le fait que vous n’ayez jamais eu de problèmes en tant que croyante pentecôtiste durant vos longues années de services auprès du gouvernement me semble également déraisonnable. Par ailleurs, je ne suis pas convaincue que vous êtes effectivement une adepte du pentecôtisme, car vous n’avez pas été en mesure de fournir des informations élémentaires au sujet de cette religion. Vous avez également déclaré que l’un de vos problèmes était que vous n’aviez pas pu obtenir de passeport; cependant, vous êtes arrivée en Égypte avec un passeport valide émis par votre ambassade au Soudan. Je ne suis pas convaincue que vous ne pouvez vous prévaloir d’une solution durable en Érythrée. Comme je ne vous trouve pas crédible, je ne suis pas convaincue que vous satisfassiez à la définition de pays d’asile, que vous étiez et continuez d’être personnellement victime de violations graves de vos droits civils, ni que vous satisfassiez à la définition de réfugié au sens de la Convention ayant une crainte fondée de persécution.

 

 

 

[22]           Le refus de l’agente semble fondé sur une conclusion d’ensemble selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible. Les motifs avancés pour justifier cette conclusion sont les suivants :

 

1.                  elle n’a pas été en mesure de fournir des « informations élémentaires » sur la foi pentecôtiste;

 

2.                  il est invraisemblable qu’une personne pentecôtiste ait pu travailler de nombreuses années pour le gouvernement sans rencontrer de difficultés;

 

3.                  il est invraisemblable qu’elle ait commencé à travailler pour l’église pentecôtiste en 2003, un an après l’interdiction de cette église;

 

4.                  il est invraisemblable qu’elle n’ait pas pu se procurer un passeport en Érythrée, mais qu’elle se soit arrangée pour en obtenir un de l’ambassade de l’Érythrée au Soudan.

 

[23]           Les trois premiers motifs se rapportent à l’allégation voulant que la demanderesse soit pentecôtiste. Le quatrième peut se définir comme une inférence touchant les pratiques du gouvernement érythréen.

 

[24]           Il est fréquent que les motifs de l’agent figurent dans la lettre annonçant la décision, et qu’ils soient complétés par le contenu des notes du STIDI repris dans le dossier. Quels motifs additionnels peut-on trouver dans ces notes eu égard à ces deux principales conclusions? Le segment des notes du STIDI est ici retranscrit aussi fidèlement que possible par rapport à la version originale.

 

1.         Religion pentecôtiste : d’après les notes du STIDI, la demanderesse a évoqué sa religion à quelques reprises durant l’entrevue.

 

À la question de savoir pourquoi elle s’était convertie au pentecôtisme, la demanderesse a répondu : [traduction] « JE VEUX ALLER AU PARADIS ». Les notes du STIDI contiennent elles aussi une annotation très brève : [traduction] « QU’EST-CE QUE LE SECOND AVÈNEMENT? INFO TRÈS ÉLÉMENTAIRE » [Note : durant son entrevue avec le représentant d’AMERA, la demanderesse a fourni des explications beaucoup plus détaillées].

 

Dans les notes du STIDI, l’agente déclare qu’elle a posé la question suivante : [traduction] « QUELLES SONT LES DIFFÉRENCES [entre la foi évangéliste de ses parents et le pentecôtisme]? » Cependant, aucune réponse n’est consignée. Dans son affidavit, l’agente affirme que la demanderesse s’est montrée incapable de les lui expliquer [Note : cela ne concorde pas avec les notes de l’entrevue du représentant d’AMERA, selon lesquelles la demanderesse prétend avoir évoqué la notion de nouvelle naissance].

 

D’après l’affidavit de l’agente et les notes de l’entrevue du représentant d’AMERA, la demanderesse a été interrogée sur les [traduction] « sept dons (ou fruits) de l’Esprit ». L’affidavit de l’agente et les notes du représentant d’AMERA se rapportant à l’entrevue de la demanderesse donnent des comptes rendus différents de l’échange qui s’est ensuivi. La référence la plus fiable se trouve dans les notes du STIDI :

[Traduction] JE TROUVE VRAIMENT PRÉOCCUPANT QUE VOUS VOUS SOYEZ CONVERTIE À UNE AUTRE RELIGION À CAUSE DES DONS DU SAINT-ESPRIT ET QUE VOUS EN IGNORIEZ LA NATURE. SEULES QUELQUES PERSONNES BÉNÉFICIENT DE CES DONS, VOUS NAISSEZ PAR L’EAU ET LE SAINT-ESPRIT, VOUS ÊTES BAPTISÉE ET COMMENCEZ À PARLER EN LANGUES.

 

2.         Au service du gouvernement : tel que noté, la demanderesse a été employée de bureau pour le ministère de la Santé de 1993 à 2003, date à laquelle elle a quitté cet emploi pour travailler à temps plein pour l’église pentecôtiste. D’après les notes du STIDI, l’entretien suivant a eu lieu :

[Traduction] LORSQUE VOUS TRAVAILLIEZ POUR LE MINISTÈRE ALORS QUE VOUS ÉTIEZ PENTECÔTISTE, VOUS N’AVEZ PAS RENCONTRÉ DE DIFFICULTÉS? JE N’AI JAMAIS EU DE PROBLÈMES. SI LA RELIGION EST ILLÉGALE ET QUE VOUS TRAVAILLIEZ POUR LE GOUVERNEMENT, JE M’ATTENDRAIS À CE QUE VOUS AYEZ EU DES PROBLÈMES? CEUX QUI ÉTAIENT FRAPPÉS D’INTERDICTION ÉTAIENT LES RELIGIEUX, LES TÉMOINS DE JOHEAH [SIC].

 

3.         Au service de l’église : la demanderesse a travaillé pour l’église pentecôtiste en Érythrée de 2003 à 2007. Rien n’indique dans les notes du STIDI que l’agente ait demandé à la demanderesse pourquoi elle avait commencé à travailler pour l’église après son interdiction.

4.         Passeport : la demanderesse a obtenu un passeport érythréen valide de l’ambassade de l’Érythrée à Khartoum (Soudan), après que les autorités érythréennes lui eurent supposément refusé un passeport parce qu’elle n’était pas adepte d’une religion reconnue. D’après les notes du STIDI, la demanderesse a expliqué ceci à l’agente :

[Traduction] COMMENT AVEZ-VOUS OBTENU VOTRE PASSEPORT? JE SUIS ALLÉE AU SOUDAN, OÙ ON NE VOUS INTERROGE PAS SUR VOTRE RELIGION. VOUS AVEZ OBTENU VOTRE PASSEPORT AU SOUDAN? OUI. OÙ? À L’AMBASSADE D’ÉRYTHRÉE.

 

VIII.    Cadre législatif

 

[25]           On trouvera un survol rapide du cadre législatif se rapportant à la présente demande dans les motifs que j’ai exposés dans Ghirmatsion, précitée, aux paragraphes 41 à 45. La version intégrale des dispositions législatives pertinentes y figure en annexe A.

 

[26]           En résumé, pour être admissible à une réinstallation au Canada à titre de réfugié outre-frontières aux termes du paragraphe 139(1) et des articles 144 et 145 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le RIPR), il faut :

 

·                    satisfaire à la définition de réfugié au sens de la Convention;

 

·                    se trouver à l’extérieur du Canada;

 

·                    satisfaire à l’exigence qu’aucune possibilité raisonnable de solution durable n’est réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada, à savoir :

 

o                   soit le rapatriement volontaire ou la réinstallation dans le pays dont l’étranger a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

 

o                   soit la réinstallation ou une offre de réinstallation dans un autre pays.

 

IX.       Norme de contrôle

 

[27]           En général, il convient d’examiner la décision d’un agent des visas selon la norme de la raisonnabilité, c’est-à-dire que la Cour doit s’intéresser « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. » Autrement dit, la décision sera maintenue à moins qu’elle n’appartienne pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Nouveau-Brunswick c. Dunsmuir, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 [Dunsmuir], au paragraphe 47).

 

[28]           Cependant, les questions relatives au défaut d’avoir tenu compte d’un motif de persécution, à la crainte raisonnable de partialité et à l’adéquation des motifs, doivent être envisagées selon la norme de la décision correcte (Ghirmatsion, précitée, aux paragraphes 46 à 53).

 

X.        Défaut d’avoir considéré certains facteurs ou éléments de preuve

 

A.        Statut au sens de l’UNHCR

 

[29]           La demanderesse a été reconnue comme réfugiée au sens de la Convention par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), comme en témoigne la « carte bleue » délivrée en août 2008. D’après ce que j’en déduis, la carte d’identité bleue indique que le titulaire a fait l’objet d’une évaluation individuelle et qu’il est officiellement reconnu par cette agence des Nations Unies comme un réfugié. La demanderesse fait valoir que l’agente a commis une erreur en ne tenant aucun compte de son statut au sens de l’UNHCR dans sa décision.

 

[30]           L’importance de l’octroi du statut de réfugié par l’UNHCR étant évoquée en détail dans Ghirmatsion, précitée, nous n’y reviendrons pas ici. Je rappelle que le guide OP 5 de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), intitulé Sélection et traitement à l’étranger des cas de réfugiés au sens de la Convention outre-frontières et de personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières (13 août 2009) (OP 5), renseigne les agents sur l’importance du statut de réfugié au sens de l’UNHCR. Au paragraphe 13.3 de l’OP 5, on indique aux agents des visas qu’une décision de l’UNHCR ayant trait au statut de réfugié d’un demandeur est un facteur à considérer au moment de se prononcer sur son admissibilité au statut de réfugié.

 

[31]           Les notes du STIDI et la décision ne font aucune mention du statut de la demanderesse au sens de l’UNHCR. Je reconnais que la qualité de réfugié au sens de l’UNHCR n’est pas déterminante. L’agente a pour mandat d’évaluer la crédibilité de la demanderesse et de se prononcer sur le bien-fondé de sa demande aux termes du droit canadien applicable. Le guide OP 5 reconnaît néanmoins l’importance et la pertinence de l’UNHCR en regard du traitement des demandes présentées au titre de la catégorie des réfugiés outre-frontières. À mon avis, le statut de réfugié au sens de l’UNHCR de la demanderesse était une considération particulière et pertinente.

 

[32]           La preuve concernant la qualification au sens de l’UNHCR était si déterminante pour le dossier de la demanderesse que le fait qu’il n’y en ait aucune mention dans les motifs de l’agente autorise à déduire qu’elle est parvenue à sa décision sans en tenir compte (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35, [1998] A.C.F. no 1425 (QL)(C.F. 1re inst.), au paragraphe 17). Il s’agit d’un élément crucial dans le contexte de la décision. L’agente avait devant elle une réfugiée au sens de l’UNHCR : elle aurait pu expliquer pourquoi son évaluation ne rejoignait pas celle de cette organisation. Elle n’était pas du tout tenue de souscrire aveuglément à la qualification de l’UNHCR; cependant, elle devait en tenir compte. À moins que les agents des visas n’expliquent la raison pour laquelle il n’y acquiescent pas, nous n’avons aucun moyen de savoir si cet élément de preuve très pertinent a été pris en compte.

 

[33]           Cette erreur de l’agente est suffisante pour infirmer la décision. J’aimerais toutefois répéter que la décision de l’UNHCR n’est pas déterminante; il incombe toujours à l’agente de se livrer à sa propre évaluation de la preuve, notamment celle qui touche le statut de réfugié au sens de l’UNHCR.

 

B.         Défaut d’avoir évalué l’admissibilité comme le recommande le guide OP 5

 

[34]           La demanderesse soutient que l’agente n’a pas évalué si elle satisfaisait à la définition de réfugié au sens de la Convention. Elle lui reproche notamment de ne pas avoir expressément suivi les étapes énoncées au paragraphe 13.3 du guide OP 5.

 

[35]           J’ai soulevé et rejeté cet argument dans Ghirmatsion, précitée. Pour les mêmes motifs, je ne suis pas convaincue que l’agente a commis une erreur en ne respectant pas les étapes énoncées au paragraphe 13.3 du guide OP 5.

 

[36]           Comme dans Ghirmatsion, précitée, j’estime que l’argument de la demanderesse est problématique en ceci qu’il revient à ignorer que la décision de l’agente se fondait sur une conclusion défavorable quant à la crédibilité. Par ailleurs, la demanderesse était titulaire d’un passeport valide (sans égard à la manière ou au lieu de son obtention). Par conséquent, une grande partie de la preuve documentaire ayant trait à la persécution des pentecôtistes en Érythrée, ou au traitement réservé à ceux qui ont quitté ce pays illégalement, était dénuée de pertinence. Si donc les conclusions touchant la crédibilité sont défendables, j’en inférerai que l’agente n’a commis aucune erreur en ne se rapportant pas à chacune des étapes énoncées au paragraphe 13.3 du guide OP 5.

 

XI.       Raisonnabilité des conclusions touchant la crédibilité

 

A.        Passeport de l’ambassade de l’Érythrée

 

[37]           L’agente a estimé qu’il était invraisemblable que la demanderesse ait pu obtenir un passeport à l’ambassade du Soudan alors qu’on le lui avait refusé en Érythrée. À mon avis, cette conclusion n’est soutenue par aucune preuve. La preuve documentaire ne nous permet pas de déduire si cette partie de l’histoire de la demanderesse est véridique ou pas. Tirer une inférence en l’absence totale de preuve documentaire revient a) à se livrer à de pures conjectures; b) à se fonder sur les connaissances de l’agente concernant les procédures en droit canadien de l’immigration.

 

[38]           Le sens commun, ancré dans notre confiance dans les autorités canadiennes, nous amènerait à présumer qu’une personne qui se voit refuser un passeport au Canada essuierait le même refus dans toute autre ambassade canadienne. Mais pouvons-nous prendre la mesure de ce que feraient les ambassades étrangères de tous les pays suivant cette norme exigeante – surtout lorsque le pays en question a été critiqué pour sa corruption? Les agents des visas doivent s’efforcer de ne pas préjuger de certains actes qui paraissent invraisemblables d’un point de vue canadien, mais qui peuvent être plausibles dans le milieu dont provient le demandeur d’asile (Ye c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] A.C.F. no 584 (QL), 34 ACWS (3d) 241(CAF)). Dans le cas d’espèce, l’agente peut avoir méjugé la raisonnabilité de ce qu’a fait l’ambassade érythréenne à la lumière du traitement qu’une telle demande de passeport aurait reçu dans une ambassade canadienne. Il se peut aussi, tout simplement, qu’elle ait conjecturé. Quoi qu’il en soit, l’agente a commis une erreur sur une question importante.

 

B.         Religion pentecôtiste

 

[39]           Les principales conclusions de l’agente eu égard à la crédibilité de la demanderesse se rapportaient à l’allégation voulant qu’elle soit pentecôtiste. L’agente a formulé trois constatations sous-jacentes venant étayer la conclusion selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible en cette matière; les voici :

 

1.                  elle s’est montrée incapable de fournir des [traduction] « informations élémentaires » sur la foi pentecôtiste;

 

2.                  il est invraisemblable qu’une pentecôtiste ait pu travailler pour le gouvernement pendant autant d’années sans rencontrer de difficultés;

 

3.                  il est invraisemblable qu’elle ait commencé à travailler pour l’église pentecôtiste en 2003, après l’interdiction de cette église.

 

[40]           En ce qui concerne les [traduction] « informations élémentaires », la lettre de rejet et les notes du STIDI sont bien imprécises quant aux questions qu’a posées l’agente. D’après l’affidavit et les notes de l’entrevue prises par le représentant d’AMERA, je peux raisonnablement déduire que l’agente a demandé à la demanderesse de nommer les [traduction] « sept dons du Saint-Esprit ». Si l’on se fie aux notes du STIDI, la demanderesse n’a fourni qu’une réponse très succincte.

 

[41]           La question de savoir si l’agente a interrogé la demanderesse sur les [traduction] « fruits de l’Esprit », concept probablement assez étranger à un pentecôtiste, ou sur les dons de l’Esprit, a peut-être aussi donné lieu à une certaine confusion. L’affidavit de la demanderesse et les notes de l’entrevue du représentant de l’AMERA parlent des [traduction] « fruits ». Après avoir examiné le dossier, je suis convaincue qu’il est plus probable que le contraire que la question de l’agente concernait les [traduction] « dons de l’Esprit ». Il est très clair en tout cas que l’agente s’est référée dans sa question à « sept » dons.

 

[42]           Dans ses observations écrites et orales, le défendeur fait valoir que les références de l’agente aux [traduction] « dons du Saint-Esprit » n’étaient pas retorses, mais tirées directement de la Bible, en particulier de 1 Corinthiens 12:4-11.

 

[43]           Le problème est que la question de l’agente portait arbitrairement sur [traduction] « les sept dons du Saint-Esprit », qui ne sont pas un concept défini dans la foi pentecôtiste. Comme l’a noté M. Griffin (voir Dossiers de la demande de la demanderesse, volume 2, affidavit de M. Griffin, par. 13) :

[Traduction] Ce serait une grave erreur que d’estimer la foi pentecôtiste de quelqu’un en se fondant sur son ignorance des “sept dons de l’Esprit”. Une telle expression est absolument étrangère au pentecôtisme. [Non souligné dans l’original.]

 

[44]           Interrogée sur la manière dont elle s’était renseignée sur la foi pentecôtiste, l’agente a offert les réponses suivantes (contre-interrogatoire d’AnnMarie McNeil, 22 et 23 mars 2011, Q195 à 197 et Q239) :

[Traduction

Q.        Donc, est-il exact de dire que vous vous êtes renseignée sur la foi pentecôtiste pendant que vous viviez au Caire?

 

R.         Oui.

 

Q.        Et où avez-vous fait ces recherches et qu’avez-vous lu pour en apprendre sur la foi pentecôtiste?

 

R.         J’ai effectué des recherches sur Google et visité des sites Web dont je ne me souviens plus maintenant.

 

[…]

 

Q.        Et diriez-vous que votre connaissance du pentecôtisme se rapporte spécifiquement au pentecôtisme en Érythrée ou au pentecôtisme plus généralement?

 

R.         Au pentecôtisme plus généralement.

 

[…]

 

Q.        Reconnaissez-vous qu’il n’existe aucune référence à un nombre précis de dons, que ce soit dans 1 Corinthiens 12 ou dans les dossiers d’information du Royaume-Uni sur l’Érythrée?

 

R.         Oui, je le reconnais. Aucun chiffre précis n’est mentionné.

 

[45]           Interrogée sur la manière dont elle en était venue à interroger la demanderesse sur [traduction] « les sept dons du Saint-Esprit », l’agente a déclaré (contre-interrogatoire d’AnnMarie McNeil, 22 et 23 mars 2001, Q241) :

[Traduction

Q.        Comment en êtes-vous venue à demander – s’il existait sept ou neuf dons?

 

R.         J’ai juste choisi un chiffre. J’aurais pu dire trois ou quatre. J’ai choisi sept.

 

[46]           À mon avis, les questions en rapport avec la foi posées par l’agente étaient sans fondement factuel. L’une des fonctions importantes des agents des visas consiste à sonder la sincérité de la croyance religieuse d’un demandeur. Pour ce faire, l’agent des visas doit être informé des croyances et pratiques religieuses pertinentes. Il ne peut s’acquitter de cette fonction en imposant arbitrairement un test susceptible de déconcerter le demandeur. C’est pourtant ce qu’a fait l’agente des visas avec sa stratégie d’interrogatoire. Elle n’a pas soupesé la sincérité des croyances religieuses pentecôtistes de la demanderesse. Elle lui a plutôt posé des questions destinées à tester ses connaissances sur les [traduction] « sept dons du Saint-Esprit ». Par ailleurs, en admettant qu’elle ne savait pas grand-chose de la foi pentecôtiste en Érythrée, l’agente a jeté le discrédit sur toutes ses questions et les inférences qu’elle a tirées des réponses de la demanderesse. La foi de cette dernière est un élément crucial dans sa demande d’asile. Cette erreur d’évaluation eu égard à cet aspect de la demande est fatale à la décision.

 

[47]           Les deuxième et troisième constatations se rapportent au travail de la demanderesse en Érythrée. À mon avis, aucune des constatations n’est abusive ou ne se situe en dehors des issues raisonnables et acceptables. Même si la foi pentecôtiste n’a été interdite qu’en 2002, la preuve indique que les adeptes de cette foi se sont heurtés à des difficultés avant cela. L’agente a raisonnablement conclu qu’il aurait été difficile pour une pentecôtiste de conserver un emploi au sein d’un ministère du gouvernement pendant dix ans sans rencontrer de problèmes. Deuxièmement, il était tout aussi loisible à l’agente de demander pourquoi une pentecôtiste, consciente des risques, quitterait de son plein gré un emploi au sein du gouvernement pour accepter un poste de secrétaire à temps plein pour un culte interdit. Même si les motifs de l’agente auraient pu être mieux rédigés relativement à ces deux points, je n’infirmerais pas sa décision sur la base de l’une ou l’autre de ces deux constatations.

 

C.        Conclusion sur les constatations relatives à la crédibilité

 

[48]           Après avoir respectueusement étudié les motifs qu’a offerts ou qu’auraient pu proposer l’agente en l’espèce, je conclus que ses conclusions sur la crédibilité se rapportant à la foi de la demanderesse et à l’obtention de son passeport manquent de justification, de transparence et d’intelligibilité. Elles sont déraisonnables. Ces deux constatations de l’agente étaient cruciales eu égard à la demande d’asile de la demanderesse. Par conséquent, la conclusion de l’agente selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible est déraisonnable.

 

XII.     Autres motifs de persécution

 

[49]           En l’occurrence, comme l’indiquent la lettre de rejet et les notes du STIDI, l’agente n’a considéré qu’un seul motif de persécution. Elle a cherché plus précisément à savoir si la demanderesse courait un risque de persécution religieuse. La demanderesse soutient qu’elle a également évoqué son départ illégal pour justifier sa crainte de persécution en Érythrée. Elle fait valoir que l’agente a commis une erreur en ne tenant pas compte de ce motif additionnel de persécution. À son avis, la preuve documentaire suggère fortement que ceux qui reviennent après avoir quitté le pays illégalement sont sévèrement traités par les autorités érythréennes.

 

[50]           Le problème que pose cette affirmation est que l’agente n’avait pas trouvé crédible la demanderesse lorsqu’elle a raconté comment elle avait obtenu un passeport de l’ambassade de l’Érythrée au Soudan. Bien qu’elle ne l’ait pas explicitement formulé en ces termes, l’agente pensait que la demanderesse avait obtenu son passeport en Érythrée, et donc qu’elle n’avait pas quitté le pays légalement. En dehors de ce qu’elle a affirmé dans son récit personnel, à savoir qu’elle avait obtenu son passeport au Soudan, rien dans le dossier ne ressemble à mon sens à une allégation voulant qu’elle ait quitté le pays illégalement. L’agente n’a pas commis d’erreur en ne tenant pas compte de ce motif subsidiaire de persécution.

 

XIII.    Adéquation des motifs

 

[51]           La demanderesse affirme que les motifs de l’agente sont inadéquats. Pour les raisons exposées dans Ghirmatsion, précitée, sur la question précise de l’adéquation des motifs avec l’obligation imposée à l’agente, je conclus que les motifs offerts par cette dernière sont convenables.

 

XIV.    Crainte raisonnable de partialité

 

[52]           La demanderesse fait valoir que la décision de l’agente soulève une crainte raisonnable de partialité. Pour les motifs énoncés dans Ghirmatsion, précitée, je ne suis pas d’accord avec elle.

 

XV.      Conclusion

 

A.        Sommaire de la décision

 

[53]           Pour revenir aux questions soulevées dans les premiers paragraphes de ces motifs, je conclurai que l’agente a commis les erreurs suivantes susceptibles d’examen :

 

1.                  l’agente a eu tort de ne pas tenir compte du statut de réfugié de la demanderesse au sens de l’UNHCR;

 

2.                  les principaux éléments soutenant la conclusion ayant trait au manque de crédibilité n’ont ni justification ni transparence ni intelligibilité; cette partie de la décision est déraisonnable.

 

[54]           Ces conclusions suffisent à justifier l’intervention de la Cour. Cependant, pour compléter ce sommaire, mes autres conclusions sont les suivantes :

 

1.                  l’agente n’a pas commis d’erreur en omettant de se rapporter aux étapes énoncées au paragraphe 13.3 du guide OP 5, ou de les suivre expressément;

 

2.                  l’agente n’a pas commis d’erreur en omettant d’évaluer tous les motifs de persécution;

 

3.                  les motifs de l’agente (les notes du STIDI et la lettre de rejet) étaient conformes à son obligation d’en fournir;

 

4.                  la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau de démontrer que la décision de l’agente a fait naître une crainte raisonnable de partialité.

 

B.         Réparations

[55]           La demanderesse sollicite un certain nombre de réparations qui vont bien au-delà de la désignation d’un autre décideur qui statuerait à nouveau sur la demande. Comme en témoigne l’exposé additionnel des arguments des demandeurs (une observation commune aux quatre contrôles judiciaires), la demanderesse réclame ce qui suit :

[Traduction] Les demandeurs demandent à la Cour de casser les décisions que l’agente des visas a rendues dans chacun des quatre « cas types », et de renvoyer les affaires à un chef décideur non affecté au bureau des visas du Caire pour qu’il statue à nouveau sur leur admissibilité dans les 60 jours; si une décision favorable était rendue sur ce point, les demandeurs sollicitent en outre que la vérification des antécédents soit effectuée dans un délai de 30 jours additionnels et que des visas soient délivrés dans les 7 jours suivants.

 

[56]           Je suis disposée à casser les décisions et à renvoyer l’affaire à un autre agent des visas pour qu’il statue à nouveau sur les demandes. Je suis également disposée à ordonner que la demanderesse puisse soumettre les autres documents qu’elle juge nécessaires à l’appui de sa demande d’asile. Cependant, je ne suis pas disposée à rendre l’ordonnance détaillée que la demanderesse appelle de ses vœux en l’espèce. Quant au reste de la demande, je renvoie à mes motifs dans Ghirmatsion, précitée, aux paragraphes 118 à 122.

 

C.        Dépens

 

[57]           La demanderesse demande que les dépens de ce dossier et des trois autres lui soient adjugés. Elle a jusqu’au 27 mai 2011 pour présenter d’autres observations à ce sujet. Il devra s’agir d’une observation conjointe concernant les quatre dossiers connexes et qui ne devra pas dépasser dix pages. Par ailleurs, l’observation doit préciser le montant total des dépens demandés, soit pour chaque dossier, soit pour l’ensemble des quatre dossiers. Le défendeur aura jusqu’au 9 juin 2011 pour répondre aux observations de la demanderesse se rapportant aux dépens.

 

D.        Prochaines étapes

 

[58]           Comme je l’ai mentionné au début de ces motifs, près de quarante demandeurs d’asile sont dans une situation comparable à celle de la demanderesse. Dans les motifs du jugement et le jugement prononcés simultanément, j’ai conclu que les demandes de contrôle judiciaire se rapportant aux trois autres dossiers instruits en même temps que celui qui nous occupe seront accueillies. Comme je l’ai fait plus tôt, j’aimerais préciser que cette décision ne concerne que la demande particulière de Mme Tsegeroman Zenawi Kidane. Je ne suis parvenue à aucune conclusion ni n’ai rendu aucune ordonnance contraignante quant à l’issue des autres dossiers. Chacun de ces dossiers présente une série de faits uniques et commande un examen et une décision distincts. Cependant, j’espère que les présents motifs permettront aux avocats de la demanderesse et du défendeur de s’entendre sur le règlement adéquat de certaines des demandes restantes du groupe, voire toutes.

 

[59]           Au terme de l’audience, les parties se sont dites intéressées à convoquer une conférence avec moi pour discuter des prochaines étapes. Si elles estiment toujours qu’une telle réunion sera utile, elles sont invitées à présenter une demande en ce sens au greffe de la Cour.

 

E.         Question certifiée

 

[60]           Aucune partie ne propose de question de portée générale à certifier. Je conviens qu’il n’y a aucune question à certifier.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE comme suit :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agente est cassée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il procède à un nouvel examen.

 

2.                  La demanderesse sera autorisée à fournir tout document additionnel qu’elle jugera pertinent à l’agent des visas nouvellement désigné eu égard à l'examen de sa demande d’asile.

 

3.                  La demanderesse a jusqu’au 27 mai 2011 pour présenter d’autres observations sur les dépens. Il doit s’agir d’une recommandation conjointe concernant les quatre dossiers connexes et ne devant pas dépasser dix pages. Par ailleurs, le montant total des dépens réclamés doit y être précisé. Le défendeur aura jusqu’au 9 juin 2011 pour répondre aux observations de la demanderesse sur les dépens.

 

4.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

« Judith A. Snider »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6005-09

 

INTITULÉ :                                       TSEGEROMAN ZENAWI KIDANE
c. LE MINISTRE DE
LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 6 AVRIL 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE SNIDER

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 5 MAI 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Andrew Brouwer

Timothy Wichert

 

POUR LA DEMANDERESSE

Stephen H. Gold

Alex Kam

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jackman & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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