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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20110328

Dossier : IMM-4830-10

Référence : 2011 CF 374

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 28 mars 2011

En présence de monsieur le juge Campbell

 

ENTRE :

 

SIRGUN BUDAKH

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

défendeur

 

 

 

 

         MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La présente demande concerne un chrétien assyrien de nationalité iraquienne qui, devant l’obligation de retourner en Iraq, a demandé l’asile le 25 octobre 2005 en vertu de l’article 96 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), en alléguant le bien-fondé d'une crainte de persécution du fait de sa religion, et en vertu de l’alinéa 97(1)b), en affirmant qu’il serait exposé à une menace pour sa vie ou au risque de subir des traitements ou peines cruels et inusités. En application de la LIPR, le représentant du ministre a répondu défavorablement à la seule demande d’asile fondée sur l’article 97.

[2]               La raison de la prise en compte restreinte de la demande d’asile tient au casier judiciaire du demandeur aux États-Unis. Les dispositions prises en vertu de la LIPR qui ont conduit à la présente procédure de contrôle sont les suivantes : le 18 mai 2005, il a été sursis à la demande d’asile du demandeur en vertu de l’alinéa 103(1)a) jusqu’à ce que soit rendue une décision sur sa possible interdiction de territoire pour grande criminalité; le 22 novembre 2005, une interdiction de territoire a été prononcée contre le demandeur en vertu de l’alinéa 36(1)b) de la LIPR parce qu’il avait été déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximale d’au moins dix ans, à savoir une agression sexuelle grave commise dans l’État de l’Illinois en mars 1999; le 15 mai 2007, le ministre a estimé que le demandeur constituait un danger pour le public au Canada, en application de l’alinéa 101(2)b), et l’autorisation d’introduire une procédure de contrôle judiciaire contre cette décision a été refusée au demandeur; le 18 août 2008, dans le cadre d’une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) déposée le 7 avril 2008 en vertu de l’article 112, on concluait que le demandeur serait exposé à un risque s’il était renvoyé en Iraq; enfin, le 5 mars 2010, selon la procédure établie, le représentant du ministre, après réexamen de la décision du 18 août 2008, a conclu que, à cette date-là, le demandeur n’était pas exposé à un tel risque. C’est la décision du 5 mars 2010 qui est contestée dans la présente demande.

 

[3]               L’interdiction de territoire ayant été prononcée contre le demandeur pour raison de grande criminalité, la décision ici contestée a été prise en vertu de l’alinéa 113d), lequel requiert d’une part que la décision faisant suite à la demande d’ERAR ne porte que sur les facteurs énoncés dans l’article 97 et d’autre part que, comme le prévoit l’alinéa 113d)(i), on ait jugé que le demandeur constituait un danger pour le public au Canada à la date de la décision. Il importe de noter que le représentant du ministre a estimé que le demandeur ne constitue pas un danger pour le public. En conséquence, la demande de contrôle judiciaire se limite à un examen des éléments de la décision d’ERAR qui intéressent l’article 97. Pour faciliter la consultation, l’article 97 est reproduit à l’annexe des présents motifs.

 

[4]               L'infirmation, le 5 mars 2010, de la décision d’ERAR du 18 août 2008, où l’on a conclu que le demandeur serait exposé à un risque en cas de renvoi en Iraq, résulte de la conclusion selon laquelle l’opinion de 2008 est « périmée ». Selon moi, il importe de passer en revue l’opinion du 18 août 2008 parce que la tâche que devait accomplir le représentant du ministre était de dire en quoi le risque auquel était exposé personnellement le demandeur en Iraq avait évolué au regard de son identité revendiquée de chrétien assyrien. Les motifs de l’opinion favorable du 18 août 2008 sont reproduits de la façon suivante dans la décision contestée :

[TRADUCTION]

Le demandeur est membre de l’Église assyrienne d’Orient. Il affirme qu’il est exposé à un risque partout en Iraq, et cela parce qu’il est chrétien et qu’il a passé la moitié de sa vie aux États-Unis. Il croit qu’il serait vu comme hostile aux musulmans et comme espion parce qu’il est un chrétien qui a vécu aux États-Unis. Il a déclaré qu’il ne peut espérer aucune protection de la part du gouvernement iraquien et que certains membres de la police sont soupçonnés d’être hostiles aux chrétiens. Il affirme qu’il ne peut pas se réinstaller dans le Nord car les autorités kurdes ne l’autoriseront pas à y vivre en permanence. Il faudrait que le demandeur soit parrainé par un résident kurde, et le demandeur affirme que son unique proche parent qui vivait dans le Nord (la sœur de son père) vit actuellement en Syrie avec son mari et ses enfants.

 

[...]

 

Le rapport d’information de mai 2008 du Royaume-Uni sur le pays d’origine, en l’occurrence l’Iraq, affirmait que la propagande rebelle décrivait souvent les membres de la Force multinationale comme des « croisés chrétiens ». De nombreux Iraquiens, y compris des rebelles, voyaient les chrétiens comme des collaborateurs de la Force multinationale, et comme des infidèles, et donc comme des traîtres à l’Iraq. Des dizaines de milliers de chrétiens ont quitté leurs foyers et ont fui vers d’autres pays, principalement la Jordanie et la Syrie.

 

Le rapport du Royaume-Uni affirmait aussi que d’autres ont fui vers la sécurité relative offerte par les villages chrétiens du Nord, aux mains des Kurdes (le GRK). Cependant, dans son rapport de 2007 relatif à l’Iraq, le Département d’État signalait que, depuis mai, le GRK n’autorisait personne, pas même les Iraquiens de l’extérieur de la région, à s’y rendre si un résident kurde ne les rencontrait pas personnellement et ne garantissait pas leur séjour. Pareillement, les Iraquiens de l’extérieur de la région qui souhaitaient vivre sur le territoire contrôlé par le GRK devaient désigner un répondant qui y résidait et s’inscrire dès leur arrivée au Bureau d’enregistrement des lieux de résidence du GRK.

 

Selon moi, la preuve documentaire montre clairement que les chrétiens sont exposés à un risque en Iraq. Je ne crois pas que le rapport du Département d’État ni la Directive opérationnelle du Royaume-Uni apportent la preuve que la situation des chrétiens s’est notablement améliorée depuis le rapport du HCNUR.

 

(Décision, pages 5 et 6)

 

[5]               La décision du 18 août 2008 renferme une conclusion cruciale sur le risque auquel le demandeur serait exposé en tant que chrétien en Iraq, mais il ressort clairement de la demande soumise au représentant du ministre qu’on lui demande d'évaluer le risque auquel le demandeur serait personnellement exposé en tant que chrétien assyrien. Le représentant du ministre en prend acte dans sa décision :

[TRADUCTION]

L’avocat de M. Budakh a soulevé dans ses observations de mars 2010 plusieurs thèmes se rapportant au risque, thèmes qui semblent s’appuyer sur son affirmation selon laquelle M. Budakh craint la persécution religieuse parce qu’il est chrétien assyrien :

 

[traduction]

D’abord, il est d’une importance cruciale pour le ministre d’admettre, une fois encore, la triste situation que connaissent les populations chrétiennes assyriennes d’Iraq. Par exemple, durant de nombreuses années, les chrétiens assyriens d’Iraq, comme d’autres groupes minoritaires, ont été exposés à des persécutions cruelles et injustes, ainsi qu’à la discrimination et au harcèlement, tant de la part des divers groupes religieux musulmans qui prédominent en Iraq que de la part du gouvernement iraquien même. Par ailleurs, même si Saddam Hussein et le Parti Baas ne règnent plus sur l’Iraq, les risques sérieux et étendus auxquels sont exposés actuellement les chrétiens assyriens en Iraq n’ont pas pour autant diminué, en particulier les risques que constituent les membres de divers groupes religieux musulmans, tant chiites que sunnites. En fait, il est couramment admis aujourd’hui que le sort des chrétiens assyriens d’Iraq s’est aggravé depuis que les États-Unis ont occupé le pays en 2003, et cela à cause de la montée du fondamentalisme musulman radical dans tout le Moyen-Orient et ailleurs. À la suite d’un examen des risques avant renvoi (ERAR), il a été reconnu le 18 août 2008 que M. Budakh serait exposé à un risque en cas de renvoi en Iraq, et Immigration Canada (l’ASFC) ne procède à aucun renvoi vers l’Iraq depuis 2003, ce qui ne fait que renforcer ce qui vient d’être dit plus haut.

 

Rappelons-le, les circonstances dans lesquelles se trouve le demandeur justifient une protection car il sa crainte de persécution est fondée et il continuerait d’être exposé à toute une série de risques identifiables et insurmontables, allant d’une grave discrimination aux violences physiques et psychologiques, en passant par l'iniquité socioéconomique, s’il devait être renvoyé en Iraq, le pays dont il a la nationalité, et les risques en question sont la conséquence de ce qui suit :

 

1.  son appartenance attestée à un groupe social, à savoir la minorité chrétienne et non arabe d’Iraq;

2.  les opinions politiques qu’on lui impute en raison de ses antécédents et de son profil;

3.  le fait qu’il est globalement indésirable, sur les plans religieux, ethnique, politique et sociétal.

 

[...]

 

Il ne fait aucun doute que la minorité chrétienne assyro- chaldéenne d’Iraq continue de souffrir d’une position extrêmement désavantageuse et qu’elle a toujours joué un rôle très inférieur en Iraq par rapport à la population musulmane beaucoup plus importante, et cela visiblement parce que cette minorité représente, semble-t-il, pour l’État iraquien une menace politique, culturelle et idéologique.

 

(Décision, pages 6 et 7)

 

[6]               L’avocat du demandeur souligne aussi que le risque auquel serait exposé le demandeur s’il devait retourner en Iraq n’est pas un risque général. Le représentant du ministre a également pris acte de cet argument :

[TRADUCTION]

L’avocat de M. Budakh soutient aussi que, bien que tous les Iraquiens traversent actuellement des difficultés, les chrétiens sont particulièrement ciblés :

 

[TRADUCTION]

Inutile de le dire, l’abondante preuve documentaire confirme que tous les Iraquiens sont potentiellement exposés à un risque sérieux d’être tourmentés et maltraités par des personnes et organisations qui se disputent le pouvoir et qui ont des comptes à régler entre elles, sans compter l’absence d’un gouvernement iraquien stable et de forces policières qui soient disposées et aptes à faire prévaloir le droit. Cependant, le risque sérieux auquel est exposé le demandeur n’est pas un risque général auquel font face tous les Iraquiens.

 

D’abord, le demandeur est membre de la minorité chrétienne assyrienne qui représente environ 3 p. 100 de la population iraquienne et qui, depuis la fin de la guerre du Golfe de 1991, s’est considérablement réduite, passant de près de 2 millions de personnes à environ 800 000 aujourd’hui.

 

Le Parti Baas n’est plus au pouvoir en Iraq, mais il est évident que les loyalistes de Saddam continuent de faire des ravages et de semer la terreur par des attentats à la bombe, des décapitations, des meurtres et des exécutions de civils, de membres des Forces de la coalition, de représentants civils d’organisations non gouvernementales, y compris d’organisations d’aide et d’organisations religieuses, de membres des médias, d’opposants à l’ancien régime, enfin d’Iraquiens (y compris policiers, agents de sécurité, recrues, interprètes et chauffeurs) soupçonnés de coopérer avec les Forces de la coalition.

 

(Décision, page 7)

 

[7]               En réponse à ces observations, le représentant du ministre s’est exprimé ainsi :

[TRADUCTION]

L’avocat de M. Budakh affirme que les chrétiens sont davantage en butte aux mauvais traitements que les autres Iraquiens, mais il ne compare pas leur situation, ni ne la met en contraste, avec celle des groupes ethniques ou religieux majoritaires (chiites, sunnites, Kurdes, etc.). Un récent rapport des États-Unis explique en détail les menaces à la sécurité en Iraq et décrit les diverses milices concernées, à savoir les milices sunnites et chiites (Jaish al Mahdi, Al-Qadea en Iraq, etc.), en précisant que les violences commises en Iraq s’inscrivent largement dans une épreuve de force entre sunnites et chiites. Les chrétiens ne sont pas mentionnés en tant que population visée par ces importants groupes rebelles, parce qu’ils ne sont pas considérés comme étant une menace pour les principaux protagonistes des régions du Centre et du Sud.

 

(Décision, page 7)

 

Cette observation fait apparaître, sous deux aspects, un contraste frappant par rapport aux prétentions du demandeur : dans le propos du représentant du ministre concernant le risque prospectif, l’identité du demandeur en tant que chrétien assyrien n’est pas rappelée, et même, plutôt que de considérer le risque en fonction de l’identité du demandeur comme chrétien assyrien, ce dont il avait pris acte, le représentant du ministre se prononce sur le risque en voyant le demandeur uniquement comme « chrétien »; et, plutôt que de reconnaître que la demande d’asile se fonde sur le risque propre au demandeur en tant que chrétien assyrien, voire en tant que chrétien seulement, le représentant du ministre tente de qualifier le risque uniquement comme un risque général auquel font face tous les Iraquiens en conséquence de la lutte que se livrent sunnites et chiites.

 

[8]               À partir de là, le représentant du ministre s’emploie, dans le reste de sa décision, à faire plusieurs observations tendant à montrer que les chrétiens ne sont pas exposés à un risque qui leur est propre en Iraq : la population chrétienne d’Iraq décroît non pas parce que [TRADUCTION] « les chrétiens sont ceux qui sont le plus souvent la proie des violences sectaires », mais plutôt à cause d’une [TRADUCTION] « diaspora iraquienne chrétienne grandissante », et [TRADUCTION] « il n’existe aucune preuve d’un “génocide” religieux » (Décision, page  8); [TRADUCTION] « on observe en Iraq une amélioration de la situation en matière de sécurité » (page 9) et l’on constate une [TRADUCTION] « amélioration de la stabilité » (page 10); [TRADUCTION] « le gouvernement a réagi en protégeant la communauté chrétienne, et des familles chrétiennes qui avaient fui auparavant sont rentrées chez elles à Mossoul » (page 11), et cette réaction [TRADUCTION] « montre qu’une application efficace des lois en Iraq commence à se matérialiser et que la communauté chrétienne fait à nouveau confiance aux agents de la force publique » (page 11); on a rapporté [TRADUCTION] « environ 17 agressions à l’encontre de chrétiens en Iraq au cours des six premiers mois de 2008 », et les chrétiens visés étaient principalement des propriétaires de certains commerces qui contreviennent aux normes musulmanes, des activistes chrétiens, des chrétiens qui font du prosélytisme, des apostats et des prêtres (page 11); [TRADUCTION] « il n’y a guère de preuve que des agents de l’État se sont livrés à des mauvais traitements sur la population chrétienne », [TRADUCTION] « les agressions à l’endroit de chrétiens ont plutôt été le fait de milices et de criminels » (pages 11 et 12) et [TRADUCTION] « ces agressions sont un sous-produit des problèmes généraux de sécurité que connaît l’Iraq, et non un composant principal de la violence » (page 12); [TRADUCTION] « le gouvernement iraquien est résolu à apporter une protection aux minorités chrétiennes » (pages 12).

 

[9]               D’ailleurs, le représentant du ministre tire également une conclusion portant sur une possibilité de refuge intérieur :

[TRADUCTION]

Après examen de la situation personnelle de M. Budakh, j’ai considéré comme très probable qu’il voudra se réinstaller soit à Bagdad (dont il est originaire), soit dans la région du Nord, sous contrôle kurde (ses parents sont originaires de cette région, et il s’y trouve une forte population de chrétiens).

 

(Décision, page 12)

 

[10]           La décision du représentant du ministre se termine ainsi :

Conclusion sur le risque :

 

Je suis d’avis, après examen approfondi des conditions qui règnent en Iraq, que M. Budakh, en tant que chrétien, pourrait fort bien décider de se réinstaller n’importe où en Iraq, gardant à l’esprit qu’il se sentirait probablement tout à fait chez lui à Bagdad et que les gouvernorats du Nord sont considérés comme les plus sécuritaires.

 

M. Budakh est un homme qui n’est âgé ni jeune, et on ne m’a pas apporté la preuve qu’il est homosexuel ou transgenre. Il n’a pas de personnes à charge. Il n’a pas été établi devant moi qu’il est politiquement actif, et, bien qu’il soit chrétien, il n’a pas été établi non plus devant moi qu’il est prêtre ou qu’il est susceptible de vouloir faire du prosélytisme s’il est renvoyé en Iraq. Il n’a pas non plus été établi devant moi qu’il est susceptible de chercher à vendre de l’alcool ou de contrevenir d’une autre manière aux normes islamiques. Par conséquent, même si l’Iraq connaît encore des problèmes de sécurité à cause d’éléments criminels et de groupes d’insurgés ou de miliciens, et même s’il n’est pas garanti que M. Budakh ne se heurtera pas aux mêmes difficultés que les autres Iraquiens, on ne m’a pas apporté la preuve qu’il serait exposé, lui personnellement, à des mauvais traitements de la part d’agents de l’État ou d’agents extérieurs à l’État.

 

En conséquence, pour les motifs susmentionnés, je suis d’avis, me fondant sur la prépondérance de la preuve, que M. Budakh n’est pas susceptible d’être exposé aux risques personnalisés mentionnés dans l’article 97 de la LIPR – c’est-à-dire qu’il n’est pas susceptible d’être soumis à la torture ou au risque de subir des traitements ou peines cruels et inusités, ou au risque d’être tué s’il retournait en Iraq.

 

(Décision, page 14)

 

 

[11]           L’avocat du demandeur fait valoir que la décision du représentant du ministre est foncièrement viciée parce qu’elle passe sous silence l’identité revendiquée du demandeur, parce que la conclusion sur la possibilité de refuge intérieur est erronée et parce que la conclusion sur le risque généralisé va à l’encontre de la preuve.

 

[12]           L’argument premier de l’avocat du ministre, en réponse à celui de l’avocat du demandeur, est que le demandeur a l’obligation d’apporter une preuve prépondérante de l’existence d’un risque, et que la preuve statistique des 17 agressions commises contre des chrétiens, sur une population chrétienne se chiffrant entre 600 000 et 800 000 personnes (Décision, page 10), ne permet pas de conclure à l’existence d’un risque. Durant sa plaidoirie, l’avocat du ministre a fait valoir que toute remise en question de la conclusion touchant la possibilité de refuge intérieur est un faux-fuyant parce que cette conclusion n’est pas nécessaire étant donné que le demandeur n’a pas apporté une preuve prépondérante du risque auquel il dit être exposé. L’avocat du ministre fait aussi valoir que la conclusion du représentant du ministre à propos du risque généralisé est autorisée par la jurisprudence de la Cour.

 

[13]           Je suis d'accord avec l’avocat du demandeur et je suis d’avis que, sur chacun des trois points soulevés, la décision du représentant du ministre est entachée d’une erreur donnant lieu à révision.

 

[14]           D’abord, le demandeur a droit à une décision d’ERAR fondée sur son identité de chrétien assyrien, et non sur sa seule identité de chrétien retenue par le représentant du ministre. Je conviens aussi avec l’avocat du demandeur que la décision Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35, est applicable ici; c’est-à-dire, plus convaincante est la preuve, plus la Cour sera encline à conclure à une erreur lorsque la Commission a passé cette preuve sous silence (voir la décision Karayel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1305, paragraphe 16). Il y avait dans le dossier soumis au représentant du ministre une preuve convaincante attestant que les chrétiens, et en particulier les chrétiens assyriens, sont tourmentés par la population musulmane d’Iraq. Le texte qui suit est un exemple de la preuve soumise au représentant du ministre, au paragraphe 18 de l’exposé complémentaire des arguments du demandeur :

[TRADUCTION]

Par ailleurs, dans le récent rapport IRIN des Nations Unies intitulé « Iraq : la communauté chrétienne confrontée à une nouvelle vague de violence », en date du 15 juillet 2009, on peut lire ce qui suit :

 

Une nouvelle vague de violence visant la communauté chrétienne iraquienne soulève des questions sur la sécurité des minorités religieuses, dans un contexte où l’on s’inquiète au sujet de la capacité des forces iraquiennes à assurer la sécurité depuis le 30 juin dernier, date à laquelle les forces armées américaines se sont retirées des villes pour s’installer dans des bases excentrées. Le 12 juillet, cinq attaques d’églises à Bagdad et un assassinat dans le nord du pays ont fait cinq morts et plus de 20 blessés, d’après les informations du ministère iraquien de l’Intérieur.

 

« Ces attaques [systématiques] à une date précise signifient que des groupes militants bien organisés sont toujours actifs et se livrent à des actes de violence et de terrorisme contre les Iraquiens en général et contre les Chrétiens en particulier », a dit à Irin Younandem Kana, un parlementaire iraquien chrétien.

 

« Les Islamistes intégristes essaient, de façon systématique, de faire partir les 100 000 chrétiens assyro-chaldéens qui sont restés dans la capitale », a déclaré, dans un communiqué daté du 13 juillet, Kamal Sido, consultant pour le Proche-Orient auprès de la Société pour les peuples menacés (GfbV) ».

 

[TRADUCTION]

Finalement, le récent rapport annuel de 2009 de la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse dans le monde (USCIRF) — Countries of Particular Concern: Iraq, en date du 1er mai 2009, renferme ce qui suit :

 

En décembre 2008, la Commission a recommandé que le Département d’État des États-Unis désigne l’Iraq comme « pays suscitant une inquiétude particulière », compte tenu des graves atteintes qui y sont portées contre la liberté religieuse, et compte tenu de la tolérance montrée par le gouvernement envers de telles atteintes, dont sont victimes en particulier les minorités religieuses les plus petites et les plus vulnérables d’Iraq.

 

La situation des libertés religieuses en Iraq reste préoccupante, en particulier pour les minorités religieuses les plus petites et les plus vulnérables, ce qui comprend les assyro-chaldéens et autres chrétiens, les mandéens de Saba et les yezidis.

 

En 2003, il y avait environ 1,4 million de chrétiens en Iraq, dont des catholiques chaldéens, des orthodoxes assyriens, des membres de l’Église assyrienne d’Orient, des Syriaques orthodoxes, des Arméniens (catholiques et orthodoxes), des protestants et des évangéliques. Aujourd’hui, on estime que seulement 500 000 à 700 000 chrétiens autochtones demeurent dans le pays. Les dirigeants chrétiens ont prévenu que cet exode pourrait signaler « la fin du christianisme en Iraq ».

 

[Non souligné dans l'original.]

 

Le représentant du ministre a laissé de côté la preuve touchant la réalité particulière du risque auquel sont exposés les chrétiens assyriens en Iraq, et je suis d’avis que cette omission justifie l’annulation de sa décision.

 

[15]           Deuxièmement, s’agissant des prétendues possibilités de refuge intérieur existant dans le Nord, dominé par les Kurdes, pour qu’une telle conclusion soit valide, il faut que la possibilité de refuge intérieur soit raisonnable, et, pour qu’elle soit raisonnable, il faut que l’on juge possible pour le demandeur de s’en prévaloir. L’argument de l’avocat du demandeur selon lequel le demandeur n’a aucun moyen de se prévaloir de la possibilité de refuge intérieur existant dans le Nord n’est pas véritablement abordé dans la décision du représentant du ministre. À mon avis donc, la conclusion du représentant touchant la possibilité de refuge intérieur est déraisonnable.

 

[16]           Et troisièmement, puisque la conclusion sur l’existence d’un prétendu risque généralisé n’est pas fondée sur l’identité revendiquée du demandeur, elle est, selon moi, foncièrement viciée. Quoi qu’il en soit, s’agissant de l’argument relatif au risque généralisé, l’avocat du ministre se fonde sur une décision rendue par la juge Snider, Osorio c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1459, pour affirmer que, puisque le mot « généralement » est communément employé pour signifier « courant » ou « répandu », le simple fait qu’une sous-catégorie puisse être considérée par rapport à l’ensemble des habitants du pays n’enlève pas ce groupe de la catégorie exposée à un risque généralisé. Si je comprends bien l’argument, et pour ce qui concerne l’observation du représentant du ministre selon laquelle la violence en Iraq tient pour une large part à la lutte que se livrent sunnites et chiites, une lutte qui embrase tout le pays, alors le représentant du ministre a eu raison de dire que le risque auquel est exposé le demandeur comme chrétien est le lot de la population tout entière (Exposé complémentaire des arguments du défendeur, paragraphe 35). Selon mon interprétation de la décision Osorio, la validité d’une conclusion portant sur le point de savoir si un demandeur sera exposé à un risque général dépend de la nature du groupe auquel il appartient, ainsi que de la nature du risque. Plus exactement, chaque cas doit être résolu selon son bien-fondé.

 

[17]           Dans l’affaire Osorio, le demandeur disait craindre pour lui-même et pour son jeune fils né au Canada, affirmant que, s’ils devaient retourner en Colombie, ils seraient exposés à un risque à cause des FARC. S’exprimant sur la nature de la demande d’asile, la juge Snider a fait les constatations suivantes, aux paragraphes 22 et 24 à 27 :

Je note d'abord que la Commission, dans le paragraphe qui termine cette partie de ses motifs, déclare être arrivée à la conclusion que les risques auxquels est exposé le gendre « ne sont pas plus grands ni différents du risque général que courent tous les Colombiens ». Il semble donc que la Commission ait compris le critère correctement. La question est de savoir si le risque auquel est exposé un sous‑groupe - en l'occurrence, les parents - correspond au risque visé par le sous-alinéa 97(1)b)(ii). La Commission a manifestement jugé que oui. La question dont je suis saisie est de savoir si cette extension du sens de « généralement » était correcte ou raisonnable. À mon avis, elle l'était.

[…]

Il me semble que c'est le bon sens qui doit déterminer la signification du sous-alinéa 97(1)b)(ii). Disons les choses simplement : si les demandeurs ont raison de dire que les parents en Colombie forment un groupe exposé à un risque auquel les autres personnes de ce pays ne sont généralement pas exposées, cela veut dire que tout ressortissant colombien qui est un père ou une mère et qui vient au Canada est automatiquement une personne à protéger. Il ne peut pas en être ainsi.

Le risque décrit par les demandeurs et la Commission dans la présente affaire est un risque auquel des millions de Colombiens sont exposés; en fait, tous les Colombiens qui ont ou qui auront des enfants font partie de ce groupe. Il est difficile d'imaginer un groupe, à l'intérieur d'un pays, qui soit plus important ou considérable que le groupe formé par les « parents ».

De plus, je ne vois rien dans le sous-alinéa 97(1)b)(ii) qui oblige la Commission à interpréter le mot « généralement » comme s'appliquant à tous les citoyens. Le mot « généralement » est communément utilisé dans le sens de « courant » ou « répandu ». Le législateur a délibérément choisi d'utiliser le mot « généralement » dans le sous-alinéa 97(1)b)(ii), laissant à la Commission le soin de décider si un groupe en particulier correspond à la définition. Si sa conclusion est raisonnable, comme c'est le cas ici, je ne vois pas le besoin d'intervenir.

En conclusion, la Commission a raisonnablement conclu que le risque auquel le gendre et son épouse étaient exposés était un risque général qui ne fait pas d'eux des personnes à protéger au sens de l'article 97.

[Non souligné dans l'original]

 

[18]           En l’espèce, le représentant du ministre avait l’obligation de dire si, d’après la preuve, les chrétiens assyriens constituent un groupe qui répond à la définition figurant au sous‑alinéa 97(1)b)(ii) de la LIPR. À ce propos, il était nécessaire de considérer en quoi la violence générale entre musulmans présente un lien, ou une différence, avec la violence entre musulmans et chrétiens assyriens. Le représentant du ministre ne s’est pas acquitté de cette obligation.

 

[19]           J’ai une observation finale à faire à propos de l’argument de l’avocat du ministre.

 

[20]           Comme je l’ai mentionné, le demandeur a été déclaré coupable d’une agression sexuelle grave commise dans l’État d’Illinois en mars 1999. Le crime a été commis alors qu’il était âgé de 23 ans; il a été condamné à un emprisonnement de sept ans, puis remis en liberté en 2002. La peine imposée rend compte de l’évidente gravité du crime; le demandeur a commis une agression sexuelle sur une jeune femme de 16 ans alors qu’elle était sans connaissance. Au cours de l’accomplissement des formalités d’immigration se rapportant à sa demande d’asile, comme cela est relaté plus haut, le demandeur a été remis en liberté moyennant le dépôt d’un cautionnement en espèces de 5 000 $ et d’une garantie de 10 000 $. La preuve produite ne donne pas à penser qu’il a commis d’autres actes criminels. D’ailleurs, après un examen minutieux de la preuve, le représentant du ministre n’était [TRADUCTION] « pas persuadé que, à ce stade, il y a des motifs raisonnables de croire que [le demandeur] constitue un danger présent ou futur pour le public » (Décision, page 22).

 

[21]           Au moment de rendre la décision ici contestée, le représentant du ministre a abordé, objectivement et avec discernement, la question de l’agression sexuelle et le point de savoir si le demandeur constituait alors un danger. Je me suis exprimé sur l’aspect de la décision se rapportant au risque, mais je suis d’avis que globalement la décision est honnête et exempte de considérations hors de propos. Sur ce dernier point, j’ai de sérieux doutes concernant l’argument écrit communiqué par l’avocat du ministre. L’exposé complémentaire des arguments du défendeur débute par les propos suivants :

[TRADUCTION]

Quand on bénéficie de la généreuse hospitalité d’un pays d’accueil, on ne trompe pas la confiance et la générosité du pays d’accueil en violant sauvagement l’un de ses enfants. Le demandeur affirme être un chrétien exposé à une possible persécution en Iraq. Cependant, puisque le demandeur est considéré comme un grand criminel selon la LIPR pour avoir été déclaré coupable aux États-Unis d’avoir drogué, violé et presque tué une fille mineure, il n’a droit qu’à un examen restreint du risque personnalisé [le mot est souligné dans l’original] aux termes de l’article 97 de la LIPR et non aux moyens prévus par l’article 97 [erreur dans l'original] comme fondement d’une demande d’asile. Les questions humanitaires touchant les épreuves de la vie ne sont pas prises en compte dans l’ERAR. La vie se révélera sans doute difficile en Iraq pour le demandeur, mais les difficultés qu’il pourrait y rencontrer résultent de son propre fait.

 

Le deuxième paragraphe de l’argument se présente ainsi :

[TRADUCTION]

Sans doute le demandeur n’a-t-il violé personne au cours des 12 dernières années – si tel était le cas l’on pourrait dire qu’il constitue un danger immédiat pour la population canadienne –, mais les Canadiens ne devraient pas être tenus de tolérer la présence du demandeur dans leur voisinage. C’est ce que le législateur avait à l’esprit lorsqu’il n’a prévu qu’un ERAR restreint pour les grands criminels.

 

Et, au paragraphe 4, on peut lire ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le représentant du ministre a mentionné que, sur un total de 600 000 à 800 000 chrétiens vivant en Iraq, il y aurait eu 17 agressions commises contre eux au cours des six premiers mois de 2008. Le défendeur affirme que ces agressions, si regrettables qu’elles puissent être, ne montrent pas, selon la prépondérance de la preuve [expression soulignée dans l’original], que le demandeur sera personnellement exposé au risque d’être agressé. Les documents cités par le demandeur donnent le détail de violences sporadiques à l’encontre des chrétiens d’Iraq, violences dont ne faisait pas état le représentant du ministre dans ses motifs, mais ils ne suffisent pas à justifier un réexamen de l’appréciation des risques. Le demandeur voudrait que la Cour apprécie à nouveau la preuve documentaire soumise au représentant du ministre, mais cela ne justifie pas l’intervention de la Cour. Le demandeur a profité, comme grand criminel, de la générosité du Canada durant trop longtemps. Il est temps pour le demandeur de partir.

 

[Non souligné dans l'original.]

 

Je trouve que ces propos sont tout à fait déplacés. Ce sont des propos incendiaires et je suis tenté d’y voir une tentative d’infléchir l’issue de la présente demande par l’évocation de considérations tout à fait étrangères aux points à décider. La conduite criminelle du demandeur a été traitée conformément à la loi, et son statut au regard de l’immigration est en voie d’être fixé conformément à la loi. Les propos reproduits ci-dessus résonnent comme un plaidoyer en faveur d’une peine plus lourde pour l’infraction qui a été commise, alors même que la peine imposée a déjà été purgée. À mon avis, cette rhétorique n'est pas de mise et détonne dans le cours d'un examen judiciaire empreint de sérieux.


ORDONNANCE

 

Par conséquent, la décision contestée est annulée.

 

Il n’y a pas de question à certifier.

                                                                                                            « Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 

 

 

 


ANNEXE

 

L’article 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, est ainsi formulé :

 

Personne à protéger

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

 

Personne à protéger

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

Person in need of protection

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

Person in need of protection

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4830-10

 

INTITULÉ :                                       SIRGUN BUDAKH

c.

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 17 MARS 2011

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MODIFICATIONS :    LE 28 MARS 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Marc J. Herman

POUR LE DEMANDEUR

 

Jamie Todd

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Herman & Herman

Avocats

Toronto (Ontario)

 

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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