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Date : 20101217

Dossier : T‑2029‑10

Référence : 2010 CF 1286

TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE

Ottawa (Ontario), le 17 décembre 2010

En présence de monsieur le juge Pinard

ENTRE :

RICHARD CONDO

 

demandeur

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               Le demandeur sollicite une ordonnance suspendant les conditions qui lui ont été imposées au cours de sa période de libération d’office jusqu’à ce que soit tranchée sa demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Commission nationale des libérations conditionnelles lui a imposé ces conditions, qui sont les suivantes :

-                     un couvre‑feu, à son propre domicile, entre 12 h et 6 h;

-                     l’interdiction d’entrer dans un établissement dont l’objet principal est la vente et la consommation d’alcool;

-                     l’obligation d’informer le superviseur de tout contact ou rencontre avec une personne du sexe opposé, sauf s’il s’agit d’un événement fortuit.

 

 

[2]               En supposant qu’il existe une question sérieuse à trancher en l’espèce, la demande de suspension est refusée au motif que le demandeur n’a pas prouvé qu’il subira un préjudice irréparable si le sursis n’est pas accordé, ni que la prépondérance des inconvénients le favorise (voir RJR ‑ MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311).

 

[3]               Dans Condo c. Le Procureur général du Canada, 2002 CFPI 1135 (conf. par 2002 CAF 442), la conséquence de la décision dont M. Condo désirait obtenir la suspension résidait dans le fait qu’il devait rester dans sa cellule entre 18 h et 23 h sans qu’il lui soit possible de participer à des activités ou d’utiliser le téléphone pour appeler les membres de sa famille ou des amis. Dans la décision Condo rendue par la Cour fédérale, le juge Pierre Blais a formulé les commentaires suivants au sujet du préjudice irréparable :

[16]     Néanmoins, la cellule ne sera pas verrouillée et le détenu aura également la possibilité de parler à son compagnon de cellule.

 

[17]     À ce stade, le demandeur n’a pas réussi à me convaincre que pareille réduction partielle des privilèges constitue une violation de l’article 7 de la Charte.

 

[18]     Comme l’a soutenu le défendeur, je devrais tenir compte du fait qu’au cas où la suspension serait refusée, si la Cour conclut, dans la demande de contrôle judiciaire, que le défendeur a commis une erreur, le demandeur aura la possibilité de réclamer des dommages‑intérêts fondés sur la perte partielle de sa liberté pendant ces vingt (20) heures.

 

[19]     Les ennuis que le demandeur subira par suite de l’application de la peine seront donc minimes et ne constituent pas un préjudice irréparable.

 

 

[4]               Je conviens avec le défendeur que les mêmes motifs s’appliquent avec les adaptations nécessaires à la présente affaire. En fait, le demandeur verra sa liberté encore moins entravée, car il aura encore accès aux membres de sa famille pendant le couvre‑feu. En tout état de cause, s’il est décidé en définitive qu’il y a eu atteinte au droit à la liberté du demandeur, celui‑ci aura la possibilité de réclamer des dommages‑intérêts une fois que sa demande de contrôle judiciaire sera tranchée, ce qui constituera une réparation suffisante (voir également Vancouver (Ville) c. Ward, 2010 CSC 27, 321 D.L.R. (4th) 1).

 

[5]               En tirant cette conclusion, je sais pertinemment que le juge Nadon, de la Cour d’appel fédérale, a confirmé la décision que le juge Blais avait rendue dans l’affaire Condo, précitée, pour la seule raison que la prépondérance des inconvénients favorisait l’intimé et que, de ce fait, il n’était pas nécessaire d’examiner la question du préjudice irréparable.

 

[6]               En ce qui concerne la prépondérance des inconvénients, le principal facteur dont la Commission doit tenir compte pour prendre une décision conformément à l’article 101 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition est la protection de la société. Selon les paragraphes 753.1(1) et (3) et 753.2(1) du Code criminel, il appartient à la Commission de surveiller le demandeur, puisqu’un tribunal siégeant en matière criminelle a déclaré être convaincu que le demandeur présentait un risque élevé de récidive et qu’il existait une possibilité réelle que ce risque puisse être maîtrisé au sein de la collectivité.

 

[7]               De toute évidence, le mandat de la Commission concerne l’intérêt public, qui doit l’emporter sur le type d’ennuis subis par le demandeur. La Commission est également tenue de prendre les mesures nécessaires pour respecter les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en la liberté sous condition. Je conviens avec le défendeur que la suspension de la décision de la Commission toucherait directement la capacité de celle‑ci de s’acquitter de son mandat, ce qui serait contraire aux décisions susmentionnées rendues dans Condo, ainsi qu’aux décisions Teale c. Canada (Procureur général), [2000] A.C.F. no 1666 (C.F. 1re inst.) (QL), et Plamondon c. Canada (Procureur général), [2001] A.C.F. no 221 (C.F. 1re inst.) (QL).

 

[8]               Je suis donc d’avis que la prépondérance des inconvénients favorise le défendeur.

 

[9]               En conséquence, la demande du demandeur est rejetée avec dépens.


ORDONNANCE

 

            La demande du demandeur est rejetée avec dépens.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑2029‑10

 

INTITULÉ :                                                   RICHARD CONDO c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 9 décembre 2010

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LE JUGE PINARD

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 17 décembre 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Diane Condo

POUR LE DEMANDEUR

 

Dominique Guimond

POUR LE DÉFENDEUR

Véronique Forest

 

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Condo Law Office

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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