Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20101216


Dossier : T-1097-09

Référence : 2010 CF 1296

 

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 décembre 2010

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SIMPSON

 

 

ENTRE :

 

INTERACTIVE SPORTS

TECHNOLOGIES INC.

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Ainsi que le permet l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), Interactive Sports Technologies Inc. (la demanderesse) a interjeté appel de la décision du 15 mai 2009 par laquelle le registraire des marques de commerce (le registraire) a refusé la demande d’enregistrement no 1277334 (la demande) pour la marque de commerce HIGH DEFINITION GOLF (la marque).

 

[2]               Le défendeur n’a pas présenté d’observations et, bien que présent, il n’a pas pris part à l’instruction de l’appel.

 

LE CONTEXTE

 

[3]               La demanderesse fabrique et vend des simulateurs de golf. La publicité décrit ses simulateurs comme [traduction] « les simulateurs de golf les plus réalistes du monde ». En plus de simuler le golf sur plusieurs parcours existants, le simulateur offre d’autres services, notamment des analyses détaillées de l’élan du joueur et de la trajectoire de la balle.

 

[4]               La demanderesse a produit sa demande le 18 octobre 2005; celle‑ci était fondée sur l’emploi projeté de la marque en liaison avec les marchandises [traduction] « simulateurs de golf ». La demanderesse emploie la marque en liaison avec ses simulateurs depuis au moins décembre 2005.

 

[5]               Un premier rapport d’examinateur concernant la marque a été rendu le 11 avril 2006. Le rapport est bref et son auteur conclut en ces termes :

[traduction]

Nous considérons que la marque qui fait l’objet de la demande donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature des marchandises à l’égard desquelles on projette de l’employer, car elle indique clairement que les simulateurs de golf de la demanderesse sont des simulateurs de golf de haute définition.  

 

[6]               Un second rapport d’examinateur a été établi le 12 février 2008. Ce rapport, plus détaillé, indique que la marque [traduction] « décrit clairement, de manière facile à comprendre, que les simulateurs de golf sont des appareils utilisant la technologie de la haute définition pour offrir un jeu de golf virtuel ». L’auteur du rapport conclut ainsi :

[traduction]

Compte tenu de l’usage répandu de l’expression HIGH DEFINITION dans le domaine de la radiodiffusion, nous sommes d’avis que le consommateur moyen réagirait à la marque HIGH DEFINITION GOLF employée pour des simulateurs de golf en pensant qu’il s’agit de simulateurs de golf qui utilisent la technologie de la haute définition.

 

LA DÉCISION

 

[7]               Dans sa décision, en date du 15 mai 2009 (la décision), le registraire a déclaré qu’il lui fallait répondre à la question de savoir si la marque donne une description claire de la nature des marchandises de la demanderesse. Il a fait remarquer que la question devait être évaluée du point de vue du consommateur ou de l’utilisateur moyen des marchandises, à partir de sa première impression. Il a aussi précisé que la marque devait être examinée comme un tout et non être disséquée.

 

[8]               Le registraire a renvoyé à la définition du terme « HIGH DEFINITION » extraite du dictionnaire Merriam-Webster Online. Le terme y est défini comme suit : [traduction] « … se rapporte à un système de télévision souvent numérique qui comporte deux fois plus de lignes de balayage par trame qu’un système conventionnel et qui présente une image proportionnellement plus nette et un format grand écran ». Compte tenu de cette définition, le registraire a conclu que le commerçant ou l’acheteur canadien ordinaire se trouvant devant la marque employée en liaison avec des simulateurs de golf, déduirait immédiatement que la technologie de la haute définition est employée dans les simulateurs.

 

[9]               Le registraire a également fait remarquer que HIGH DEFINITION GOLF représente une combinaison naturelle de mots que [traduction] « d’autres commerçants pourraient vouloir utiliser pour décrire une particularité, un trait ou une caractéristique de leurs simulateurs de golf », et a mentionné un arrêt dans lequel la Cour suprême du Canada a indiqué qu’une seule personne ne saurait s’approprier des mots descriptifs.

 

[10]           Le registraire a conclu que, la marque donnant une description claire, l’alinéa 12(1)b) de la Loi rend la marque non enregistrable en vertu de l’alinéa 37(1)b) de la Loi.

 

 

LA NOUVELLE PREUVE

 

[11]           Voici une description des nouveaux éléments de preuve déposés par la demanderesse dans le cadre du présent appel, conformément au paragraphe 56(5) de la Loi. Cette preuve est consignée dans l’affidavit souscrit par Elenita Anastacio le 5 novembre 2009 :

(i)                  Précisions sur des demandes et enregistrements de marques de commerce de tierces parties inscrits dans la base de données sur les marques de commerce canadiennes. Les mots « high definition » apparaissent dans ces documents et ils sont employés en liaison avec les marchandises et services suivants : optométrie, chirurgie oculaire au laser, etc.; lunettes; produits cosmétiques; bardeaux à toiture; tissus et surfaces rigides à motifs de camouflage; stratifiés, planchers et meubles en stratifié; prothèses auditives; luminaires et ampoules; coutellerie en acier inoxydable. Je remarque qu’un seul des enregistrements énumérés traite de l’utilisation de la haute définition en matière d’écrans vidéo : il s’agit de l’enregistrement de mai 2008 de la marque « Living in HD » en liaison avec des produits électroniques tels que cinémas maison, téléviseurs et ordinateurs portatifs;

(ii)                Site Web d’un tiers distributeur de produits appelés systèmes de golf virtuels. Le site Web emploie l’expression HIGH DEFINITION GOLF dans la description de ses présentations vidéo de parcours de golf;

(iii)               Copies archivées du site Web de la demanderesse. Ces copies remontent à 2005 et attestent l’emploi continu de la marque;

(iv)              Précisions sur des demandes et des enregistrements de marques de commerce inscrits dans la base de données sur les marques de commerce canadiennes et appartenant à d’autres commerçants offrant des simulateurs de golf. Aucun de ceux‑ci ne mentionne la haute définition;

(v)                Copies imprimées de pages du site Web « Dictionary.com ». Ces copies montrent que le Merriam-Webster ne contient aucune entrée pour HIGH DEFINITION ni pour HIGH-DEFINITION;

(vi)              Détails concernant les marques High Resolution Vision, Bent Grass Golf, Homegolf et Ultimate Golf.

 

[12]           La demanderesse soutient que compte tenu de cette nouvelle preuve, je devrais instruire l’affaire de novo. Je ne procéderai pas à une instruction de novo, parce que je ne suis pas convaincue que la nouvelle preuve est substantielle et importante. À mon avis, cette preuve n’aurait pas eu une incidence déterminante sur la décision.

 

 

LA NORME DE CONTRÔLE

 

[13]           Dans la décision Tradition Fine Foods Ltd. c. Groupe Tradition’l Inc., 2006 CF 858, M. le juge Edmond Blanchard a conclu au paragraphe 53 que la méthode pragmatique et fonctionnelle adoptée par M. le juge Ian Binnie dans l’arrêt Mattel de la Cour suprême du Canada s’applique également à l’examen du caractère distinctif par le registraire. Dans Mattel, le registraire avait examiné la question de la confusion (voir Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., [2006] 1 R.C.S. 772, 2006 CSC 22). Dans les deux affaires, la norme de contrôle retenue a été celle de la décision raisonnable.

 

[14]           À mon avis, l’analyse du juge Binnie est pertinente en l’espèce également et m’amène à conclure qu’une décision du registraire sur la question de savoir si une marque projetée donne une description claire, devrait aussi être examinée suivant la norme de la décision raisonnable.  

 

LES QUESTIONS EN LITIGE ET L’ANALYSE

 

[15]           Selon la demanderesse, le registraire n’a pas pris conscience du fait que le terme HIGH DEFINITION revêt diverses significations dans le contexte des simulateurs de golf. Ainsi, explique la demanderesse, la première impression qu’aurait un golfeur en voyant la marque est que celle‑ci transmet l’idée que le simulateur est un instrument d’apprentissage de précision grâce auquel l’élan du golfeur serait analysé en détail. Or, on ne m’a pas convaincue que le terme HIGH DEFINITION a diverses significations. J’estime qu’il était raisonnable de la part du registraire de conclure que la marque désigne un simulateur de golf dont l’écran vidéo intègre la technologie de la haute définition.

 

[16]           La demanderesse fait valoir que les documents de marketing dont disposait le registraire montrent qu’en réalité, la technologie de haute définition n’est pas toujours offerte dans le simulateur qu’elle propose. Je conclus cependant, à la lecture des éléments qui figurent à la page 23 du dossier de la demanderesse, que le registraire pouvait raisonnablement supposer que le simulateur de la demanderesse utilise la technologie de la haute définition en tout temps. 

 

[17]           J’arrive à cette conclusion car, sous l’en‑tête HIGH DEFINITION GOLF, on peut lire ce qui suit : [traduction] « Notre logiciel révolutionnaire de traitement d’image combine images numériques de haute résolution et données satellite pour créer un modèle de parcours de golf tridimensionnel qui procure une expérience de golf en salle d’un réalisme absolu […] »; [traduction] « High Definition Golf - C’est tout comme y être! […] L’affichage compatible avec la TVHD produit […] ». De plus, les acheteurs peuvent choisir entre un projecteur domestique ou un projecteur commercial compatible avec une télévision à haute définition.  

 

[18]           La demanderesse soutient en outre que le registraire a utilisé un critère erroné lorsqu’il a écrit ce qui suit, au paragraphe 6 de la décision : [traduction] « Les tribunaux ont reconnu et jugé que les mots descriptifs sont la propriété de tous … » De l’avis de la demanderesse, cette déclaration vicie la décision parce que le mot « clairement » ne figure pas avant le mot « descriptifs ». Or, le paragraphe 4 de la décision du registraire commence par les mots suivants : [traduction] « La question de savoir si la marque de commerce High Definition Golf de la requérante donne une description claire de la nature ou de la qualité des marchandises doit être évaluée … » Je suis donc convaincue qu’il a appliqué le bon critère même s’il n’a pas employé le mot « clairement » au paragraphe 6 de sa décision. 

 

[19]           La demanderesse affirme que le registraire n’a pas indiqué la source de sa définition de HIGH DEFINITION, et que la définition donnée par le registraire n’existe pas, car lorsque la demanderesse a fait faire une recherche dans un site Web intitulé Dictionary.com, aucune définition de la sorte ne se trouvait dans le Miriam‑Webster. Pourtant, comme je l’ai déjà mentionné au paragraphe 8, le registraire a bien indiqué la source de sa définition; la demanderesse n’a pas effectué de recherche à partir de cette source. Le dictionnaire Miriam‑Webster Online contient bel et bien la définition reproduite par le registraire.

 

[20]           Selon la demanderesse, le registraire n’a étayé d’aucun élément de preuve sa conclusion de fait portant que HIGH DEFINITION GOLF constitue une combinaison naturelle de termes que d’autres commerçants pourraient vouloir utiliser. La preuve présentée dans l’affidavit de Mme Anastacio, avance‑t‑elle, montre que les autres fournisseurs de simulateurs n’ont pas encore utilisé les mots High Definition en liaison avec leurs marchandises.

 

[21]           À mon avis, la justification de la décision est exposée dans le paragraphe 5; elle a trait au caractère descriptif de la marque. Les remarques subséquentes concernant la combinaison naturelle des éléments formant la marque, que d’autres commerçants pourraient vouloir utiliser, sont de simples observations du registraire. Elles ne constituent pas des conclusions de fait fondant la décision. Aussi n’est‑il pas nécessaire qu’elles soient étayées par une preuve.  

 

CONCLUSION

 

[22]           Je conclus que la décision est raisonnable. En conséquence, l’appel sera rejeté.


 

 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que l’appel est rejeté.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 


Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1079-09

 

INTITULÉ :                                       Interactive Sports Technologies Inc. c. Procureur général du Canada

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 15 juin 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LA JUGE SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 16 décembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Kenneth McKay

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Abigal Browne

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Sim Lowman Ashton & McKay s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.