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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20101208

Dossier : IMM-1704-10

Référence : 2010 CF 1253

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 décembre 2010

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

ENTRE :

 

TANYA MASYCH

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

demandeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), visant une décision datée du 24 mars 2010 d’un agent des visas (l’agent) à l’ambassade canadienne à Kiev en Ukraine, par laquelle l’agent a refusé la demande de permis de travail temporaire de la demanderesse.

 

[2]               La demanderesse prie la Cour de rendre une ordonnance annulant la décision de l’agent et renvoyant l’affaire à un autre agent des visas pour nouvel examen.

 

Le contexte

 

[3]               Tetyana (aussi appelée Tanya) Masych (la demanderesse) est une citoyenne de l’Ukraine. Elle est mariée et a un fils de dix-sept ans. Elle est propriétaire d’une maison et d’une société de construction à Buchach, en Ukraine, avec son mari.

 

[4]               La demanderesse a une formation de cuisinière et de boulangère-pâtissière. Elle a étudié la cuisine au collège de technologie de Ternopil de 1985 à 1987. Elle a obtenu ensuite un certificat d’ingénieure et de technologue en boulangerie et en fabrication de pâte à l’université de l’industrie alimentaire à Kiev, en Ukraine. Elle a de plus suivi des cours par correspondance sur l’organisation et l’étiquette en restauration en 2008 et 2009. Elle travaille comme cuisinière et chef depuis 1987.

 

[5]               La demanderesse a travaillé à Middlesex (Angleterre) au restaurant-bar New England à titre de chef adjoint de 2002 à 2006.

 

[6]               La demanderesse n’a pas été déclarée coupable d’une infraction criminelle en Ukraine ou au Royaume-Uni (R.-U.).

 

[7]               Olga Lozinski, la propriétaire et exploitante de l’auberge Way Out à Candle Lake (Saskatchewan), a interviewé la demanderesse au moyen de Skype, sur Internet, relativement à un poste de cuisinière à son auberge. Mme Lozinski a offert à la demanderesse un emploi ainsi que le gîte et le couvert à son auberge et a obtenu, le 16 décembre 2009, de Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC), un avis relatif au marché du travail (l’avis) favorable pour la demanderesse quant au poste de cuisinière.

 

[8]               La demanderesse connaît le programme Candidats immigrants pour la Saskatchewan (PCIS) grâce auquel, après avoir travaillé pendant six mois en Saskatchewan dans un poste spécialisé, elle peut espérer obtenir la résidence permanente au Canada. La demanderesse affirme qu’elle ne veut pas vivre sans statut juridique au Canada.

 

[9]               La demanderesse a demandé un permis de travail temporaire à l’ambassade canadienne à Kiev, en Ukraine. Elle a été interrogée par l’agent le 8 février 2010. La demanderesse a mentionné à l’agent qu’elle avait travaillé à titre de chef adjoint et vécu au R.-U pendant plusieurs années. L’agent a dit à la demanderesse qu’elle avait un mois pour fournir des recommandations de travail et des déclarations de revenus du R.‑U. et pour subir un examen médical. Il lui a également remis une lettre dans laquelle cela était expliqué.

 

[10]           L’agent a joint la demanderesse au téléphone le 17 mars le 2010 pour lui rappeler la question des documents en suspens.

 

[11]           Après avoir subi l’examen médical, la demanderesse est retournée à l’ambassade canadienne le 24 mars 2010 avec une recommandation de son employeur précédent au R.‑U. ainsi qu’une lettre de son cousin attestant qu’elle avait vécu avec lui lorsqu’elle travaillait dans ce pays. Elle n’a pas fourni de déclarations de revenus pour la période pendant laquelle elle a vécu et travaillé au R.‑U.

 

[12]           Sa demande a été refusée le 24 mars 2010.

 

La décision de l’agent des visas

 

[13]           Dans sa lettre du 24 mars 2010, l’agent a déclaré, au moyen de cases cochées, que la demanderesse ne l’avait pas convaincu qu’elle satisfaisait aux exigences de l’article 179 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), et qu’elle quitterait le Canada à la fin de la période temporaire de séjour autorisé.

 

[14]           L’agent a aussi coché la case « Autre » et a écrit [traduction] « défaut de fournir des documents fiscaux du R.‑U. ».

 

[15]           Selon les notes du Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI) l’agent a conclu, à l’entrevue initiale, que la demanderesse avait une bonne connaissance de l’anglais et qu’elle avait une expérience pertinente de cuisinière. L’agent a requis des déclarations de revenus du R.‑U. et des recommandations. Les notes du STIDI révèlent en outre que, plus d’un mois plus tard, l’agent a joint la demanderesse au téléphone et lui a rappelé qu’il n’avait pas reçu certains documents.

 

[16]           L’agent a constaté que la demanderesse n’avait pas soumis la documentation relative à sa situation fiscale au R.‑U. et a conclu qu’elle n’avait vraisemblablement déclaré aucun revenu. En conséquence, il a estimé qu’il était dans l’impossibilité de conclure qu’elle n’était pas interdite de territoire et a refusé la demande de permis de travail temporaire.

 

 

Les questions en litige

 

[17]           La demanderesse a présenté la question en litige suivante :

            L’agent a-t-il manqué à son obligation d’équité procédurale envers la demanderesse?

 

[18]           Je reformulerais les questions en litige comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

            2.         L’agent a-t-il manqué à son obligation d’équité procédurale envers la demanderesse?

            3.         L’agent a-t-il commis une erreur de droit en requérant de la demanderesse qu’elle produise des déclarations de revenus du Royaume-Uni?

 

Les observations écrites de la demanderesse

 

[19]           La demanderesse fait valoir que l’agent était tenu de lui délivrer un permis de travail temporaire parce qu’elle satisfaisait aux critères de délivrance énoncés dans la Loi. La demanderesse avance que l’agent est tenu, en application de l’article 200 du Règlement, de délivrer un permis de travail à un étranger sauf si celui-ci a poursuivi des études ou exercé un emploi au Canada sans autorisation à moins qu’une période de six mois se soit écoulée depuis les faits reprochés.

 

[20]           La demanderesse allègue qu’elle n’a pas été rejetée en raison de l’article 179 du Règlement, mais plutôt en raison de son défaut de produire un document fiscal du R.‑U., ce qui constituait un facteur arbitraire et extrinsèque et était contraire aux principes de la justice naturelle. La demanderesse fait en outre valoir que le guide sur le traitement des demandes à l’étranger OP 11 – Résidents temporaires ne donne pas la directive aux agents des visas à l’étranger de considérer les impôts payés dans les pays étrangers dans l’évaluation d’une demande de résidence temporaire.

 

[21]           La demanderesse fait également valoir que les lettres de refus et les notes de l’agent ne suffisaient pas pour satisfaire au degré d’équité procédurale requis.

 

[22]           La demanderesse soutient que l’agent n’a pas tenu compte des renseignements pertinents dont il disposait, notamment les liens étroits de la demanderesse avec l’Ukraine, son désir d’avoir un statut juridique et d’être avec son mari et son fils ainsi que son intention double. La demanderesse allègue que ces renseignements, dont il n’a pas été tenu compte, établissaient qu’elle observerait toutes les lois canadiennes.

 

Les observations écrites du défendeur

 

[23]           Le défendeur avance que les arguments de la demanderesse touchant à l’équité procédurale doivent être considérés au vu du contexte. Une demande de permis de travail temporaire requiert un niveau d’équité procédurale moindre qu’une décision défavorable en matière d’expulsion.

 

[24]           Le défendeur allègue que les agents des visas n’ont pas l’obligation d’accorder une nouvelle entrevue au demandeur ou de prendre des mesures pour répondre à toute préoccupation soulevée par des documents non fournis par le demandeur.

 

[25]           Le défendeur soutient que la demanderesse ne s’est pas conformée aux paragraphes 11(1) et 16(1) de la Loi et que l’article 200 du Règlement n’oblige l’agent des visas à délivrer un permis de travail que lorsque les critères prescrits sont satisfaits. Le défendeur avance qu’il ressort clairement de la jurisprudence que l’agent des visas peut à juste titre rejeter une demande de résidence permanente si le demandeur ne fournit pas les documents nécessaires empêchant ainsi l’agent des visas de déterminer si le demandeur est interdit de territoire.

 

[26]           Le défendeur soutient en outre que le manuel sur le traitement des demandes à l’étranger n’est qu’un simple guide, alors que le paragraphe 16(1) est un texte de loi et qu’il prescrit au demandeur de produire tous les documents pertinents.

 

[27]           Le défendeur avance que, même si les documents fiscaux du R.‑U. exigés ont trait à un poste occupé il y a quatre ans, ils étaient néanmoins pertinents pour déterminer si la demanderesse était interdite de territoire. L’agent se demandait si le défaut de la demanderesse de produire les documents fiscaux voulait dire que la demanderesse ne s’était pas conformée aux lois fiscales applicables au R.‑U., ce qui aurait fait en sorte qu’elle aurait été interdite de territoire. Le défendeur allègue que la demanderesse avait l’obligation de convaincre l’agent qu’elle n’avait pas commis d’infraction et qu’elle n’était pas interdite de territoire. Son refus de se conformer à la requête a donné lieu au rejet raisonnable de sa demande. À ce titre, la Cour ne devrait pas modifier la décision de l’agent.

 

Analyse et décision

 

[28]           La question litigieuse no 1

            Quelle est la norme de contrôle applicable?

            Il est clair que le rejet d’une demande de permis de travail temporaire constitue une décision administrative prise par l’agent en vertu du pouvoir que lui confère la loi et que cette décision constitue manifestement une conclusion de fait (voir Samuel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 223, au paragraphe 26). La Cour suprême a statué qu’il convenait d’exercer un degré élevé de déférence à l’égard des conclusion de fait tirées par un organisme administratif et que la norme de contrôle applicable est la raisonnabilité (voir Khosa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, au paragraphe 46).

 

[29]            Toutes les questions d’équité procédurale ayant trait à des agents des visas, y compris en ce qui concerne le caractère adéquat des motifs, sont contrôlées selon la norme de la décision correcte (voir Miranda c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 424, au paragraphe 10; Khosa précité, au paragraphe 43). Aucune déférence n’est accordée au décideur à cet égard et « il appartient à la Cour de se faire sa propre opinion quant au caractère équitable de l’audience » (voir Gonzalez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 983, 169 A.C.W.S. (3d) 173, au paragraphe 16).

 

[30]           La question litigieuse no 2

            L’agent a-t-il manqué à son obligation d’équité procédurale envers la demanderesse?

            Les exigences en matière d’équité procédurale varient selon l’affaire considérée. Dans la décision Qin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 815 au paragraphe 5, le juge Marshall Rothstein a statué que « […] lorsque rien ne montre que les conséquences pour le demandeur seront sérieuses […] les exigences liées à l’équité procédurale seront relativement minimes ». Comme la demanderesse peut présenter une nouvelle demande de permis de travail temporaire et que rien ne démontre que cela lui causerait des difficultés, les exigences en matière d’équité procédurale en ce qui a trait à l’évaluation de sa demande sont relativement faibles.

 

[31]           Il incombe au demandeur de convaincre l’agent de tous les éléments de sa demande. L’agent n’est pas tenu de demander des renseignements additionnels lorsque les documents du demandeur sont insuffisants. L’agent n’est pas non plus tenu de fournir au demandeur plusieurs occasions de se conformer à des points qu’elle aurait pu négliger (voir Madan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 172 F.T.R. 262 (F.C.T.D.), [1999] A.C.F. no 1198 (QL), au paragraphe 6). Cela dit, plusieurs occasions ont été données à la demanderesse de défendre sa cause. Elle eu une entrevue avec l’agent, une lettre lui a été remise dans laquelle on mentionnait ce qu’elle devait présenter afin que sa demande soit en règle, l’agent l’a jointe au téléphone pour lui rappeler les documents en suspens et une nouvelle occasion lui a alors été donnée de présenter les documents requis. Cela satisfait aux exigences relatives à l’équité procédurale.

 

[32]           De plus, quoique les motifs de l’agent aient été brefs, ils satisfaisaient également aux exigences en matière d’équité procédurale.

 

[33]            La Cour suprême du Canada a statué dans l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, [1999] A.C.S. no 39 (QL), au paragraphe 43 que :

[…] dans certaines circonstances, l’obligation d’équité procédurale requerra une explication écrite de la décision. Les solides arguments démontrant les avantages de motifs écrits indiquent que, dans des cas comme en l’espèce où la décision revêt une grande importance pour l’individu, dans des cas où il existe un droit d’appel prévu par la loi, ou dans d’autres circonstances, une forme quelconque de motifs écrits est requise.

 

 

 

[34]           La Cour a statué qu’il est satisfait à l’obligation de donner des motifs lorsque le décideur expose « ses conclusions de fait et les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ses conclusions » (voir VIA Rail Canada Inc. c. Office national des transports, [2001] 2 C.F. 25, [2000] A.C.F. no 1685 (QL) (C.F.), au paragraphe 22).

 

[35]           Il est de jurisprudence constante que les notes du STIDI font partie des motifs de la décision (voir Toma c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 779, 295 F.T.R. 158, aux paragraphes 10 et 12).

 

[36]           La lettre de refus et les notes du STIDI révèlent que la décision de l’agent est fondée sur la conclusion selon laquelle la demanderesse n’a pas présenté les documents requis ayant trait à l’impôt sur le revenu pour la période pendant laquelle elle a travaillé au R.‑U. et, pour cette raison, elle n’a pas convaincu l’agent qu’elle satisfaisait aux exigences de l’article 179 du Règlement, qu’elle n’était donc pas interdite de territoire.

 

[37]           Comme plusieurs occasions ont été données à la demanderesse de convaincre l’agent de tous les éléments de sa demande et que les motifs qui lui ont été communiqués quant au rejet de sa demande étaient clairs, l’obligation d’équité procédurale a été respectée.

 

[38]      La question litigieuse no 3

            L’agent a-t-il commis une erreur de droit en requérant de la demanderesse qu’elle produise des déclarations de revenus du Royaume‑Uni?

            Selon le paragraphe 11(1) de la Loi, l’agent avait l’obligation d’être convaincu que la demanderesse n’était pas interdite de territoire. De plus, la demanderesse, vu le paragraphe 16(1) de la Loi, était tenue de produire tous les documents pertinents que l’agent a raisonnablement requis.

 

[39]           Un demandeur est interdit de territoire s’il commet un acte à l’extérieur du Canada qui constitue une infraction dans le pays où il est commis et qui serait une infraction punissable par mise en accusation au Canada (voir l’alinéa 36(2)c) de la Loi). Le défaut de payer des impôts sur le revenu peut être une infraction punissable par mise en accusation au Canada (voir la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), paragraphes 238(1) et 239(2) et alinéa 239(1)d)). En outre, le défaut de payer l’impôt sur le revenu constitue également une infraction au R.‑U. (voir le Finance Act 2000, R.‑U., ch. 17, paragraphe 144(1)). Par conséquent, si la demanderesse n’a pas payé d’impôt sur le revenu au R.‑U., elle pourrait être interdite de territoire en application de la Loi.

 

[40]           Étant donné la combinaison de la Loi, du Règlement et des lois fiscales respectives du Canada et du R.‑U., il était raisonnable de la part de l’agent d’exiger des déclarations de revenus du R.‑U. pour déterminer si la demanderesse était interdite de territoire.

 

[41]           La demanderesse fait valoir que [traduction] « la lettre de son employeur en Angleterre disait qu’elle ne payait pas d’impôt parce qu’elle ne travaillait qu’à temps partiel ». La demanderesse soutient également avoir complètement répondu à la requête de l’agent relative aux questions fiscales.

 

[42]           Cependant, rien ne démontre que la demanderesse a dissipé les réserves de l’agent. La lettre de l’employeur de la demanderesse au restaurant-bar New England disait qu’elle ne travaillait qu’à temps partiel; elle ne disait rien sur ses impôts sur le revenu. De plus, la seule mention de la question des impôts sur le revenu de la demanderesse se trouve dans une phrase de son affidavit selon laquelle, à la suite de la requête de l’agent ayant trait à ses déclarations de revenus, elle avait répondu ce qui suit : [traduction] « [C]ela faisait presque six ans et je travaillais à temps partiel et j’étais payée comptant, mais j’essaierais d’obtenir une recommandation. »

 

[43]           L’agent a rejeté la demande parce qu’il avait conclu que la demanderesse ne satisfaisait pas aux exigences de l’article 179 du Règlement. Selon l’alinéa 79e) du Règlement, l’agent délivre un visa de résident temporaire à un étranger s’il est établi que l’étranger n’est pas interdit de territoire. La demanderesse n’a pas fourni tous les éléments et les documents pertinents que l’agent a raisonnablement requis en application du paragraphe 16(1). Par conséquent, la demanderesse n’a pas convaincu l’agent qu’elle n’était pas interdite de territoire, et il était raisonnable que l’agent conclût qu’il ne pouvait pas prendre cette décision sans les documents qu’il avait requis.

 

[44]           La demanderesse n’a pas démontré que la procédure liée au processus décisionnel était inéquitable ou que l’agent a commis une erreur en requérant de la demanderesse la production des documents fiscaux du R.‑U., et la demande de contrôle judiciaire sera par conséquent rejetée.

 

[45]           La demanderesse a proposé à la Cour de certifier la question grave de portée générale suivante :

[traduction]

 

Un permis de résident temporaire peut-il être refusé à un travailleur muni d’un avis relatif au marché du travail lorsque ce travailleur ne fait pas l’objet d’une interdiction fondée sur l’un des facteurs énoncés à l’article 179 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés?

 

 

 

[46]           La Cour a établi le critère relatif à la certification d’une question dans la décision Dehar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 558, [2008] 2 R.C.F. 358, au paragraphe 37 :

Il est de jurisprudence constante que, pour être certifiée, une question doit : 1) transcender les intérêts des parties au litige; 2) aborder des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale; 3) être déterminante quant à l’issue de l’appel. […]

 

 

Je ne suis pas disposé à certifier la question, car elle ne serait pas déterminante quant à l’issue de l’appel. Il n’y a pas de doute qu’un demandeur recevrait un visa de résident permanent s’il satisfaisait aux exigences de l’article 179 du Règlement. Cependant, en l’espèce, la question est de savoir si la demanderesse est interdite de territoire.


 

JUGEMENT

 

[47]           LA COUR ORDONNE :

            1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.         La question grave proposée par la demanderesse n’est pas certifiée.

 

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 



 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


ANNEXE

 

Les dispositions légales et réglementaires pertinentes

 

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

 

11.(1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

 

16.(1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

 

36.(2) Emportent, sauf pour le résident permanent, interdiction de territoire pour criminalité les faits suivants :

 

[. . .]

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation;

 

 

[. . .]

 

(3) Les dispositions suivantes régissent l’application des paragraphes (1) et (2) :

 

a) l’infraction punissable par mise en accusation ou par procédure sommaire est assimilée à l’infraction punissable par mise en accusation, indépendamment du mode de poursuite effectivement retenu;

 

[. . .]

 

c) les faits visés aux alinéas (1)b) ou c) et (2)b) ou c) n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui, à l’expiration du délai réglementaire, convainc le ministre de sa réadaptation ou qui appartient à une catégorie réglementaire de personnes présumées réadaptées;

 

 

d) la preuve du fait visé à l’alinéa (1)c) est, s’agissant du résident permanent, fondée sur la prépondérance des probabilités; [. . .]

 

 

72.(1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

11.(1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

16.(1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

 

 

36.(2) A foreign national is inadmissible on grounds of criminality for

 

 

. . .

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament; or

 

. . .

 

(3) The following provisions govern subsections (1) and (2):

 

 

(a) an offence that may be prosecuted either summarily or by way of indictment is deemed to be an indictable offence, even if it has been prosecuted summarily;

 

 

 

. . .

 

(c) the matters referred to in paragraphs (1)(b) and (c) and (2)(b) and (c) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or foreign national who, after the prescribed period, satisfies the Minister that they have been rehabilitated or who is a member of a prescribed class that is deemed to have been rehabilitated;

 

(d) a determination of whether a permanent resident has committed an act described in paragraph (1)(c) must be based on a balance of probabilities; and . . .

 

72.(1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

 

18.(2) Font partie de la catégorie des personnes présumées réadaptées les personnes suivantes :

 

[. . .]

 

c) la personne qui a commis, à l’extérieur du Canada, au plus une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation si les conditions suivantes sont réunies :

 

 

 

(i) l’infraction est punissable au Canada d’un emprisonnement maximal de moins de dix ans,

 

 

(ii) au moins dix ans se sont écoulés depuis le moment de la commission de l’infraction,

 

(iii) la personne n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation,

 

(iv) elle n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire dans les dix dernières années ou de plus d’une telle infraction avant les dix dernières années, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(v) elle n’a pas, dans les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(vi) elle n’a pas, avant les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, de plus d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire,

 

(vii) elle n’a pas été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation.

 

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

 

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

 

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre pays;

 

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

 

e) il n’est pas interdit de territoire;

 

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

200.(3) Le permis de travail ne peut être délivré à l’étranger dans les cas suivants :

 

[. . .]

 

e) il a poursuivi des études ou exercé un emploi au Canada sans autorisation ou permis ou a enfreint les conditions de l’autorisation ou du permis qui lui a été délivré, sauf dans les cas suivants :

 

(i) une période de six mois s’est écoulée depuis les faits reprochés,

 

 

 

(ii) ses études ou son travail n’ont pas été autorisés pour la seule raison que les conditions visées à l’alinéa 185a), aux sous-alinéas 185b)(i) à (iii) ou à l’alinéa 185c) n’ont pas été respectées,

 

18.(2) The following persons are members of the class of persons deemed to have been rehabilitated:

 

. . .

 

(c) persons who have committed no more than one act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament, if all of the following conditions apply, namely,

 

(i) the offence is punishable in Canada by a maximum term of imprisonment of less than 10 years,

 

(ii) at least 10 years have elapsed since the day after the commission of the offence,

 

(iii) the person has not been convicted in Canada of an indictable offence under an Act of Parliament,

 

 

(iv) the person has not been convicted in Canada of any summary conviction offence within the last 10 years under an Act of Parliament or of more than one summary conviction offence before the last 10 years, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

 

(v) the person has not within the last 10 years been convicted outside of Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

 

(vi) the person has not before the last 10 years been convicted outside Canada of more than one offence that, if committed in Canada, would constitute a summary conviction offence under an Act of Parliament, and

 

 

 

(vii) the person has not been convicted outside of Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament.

 

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

 

 

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

 

 

(d) meets the requirements applicable to that class;

 

(e) is not inadmissible; and

 

 

(f) meets the requirements of section 30.

 

200.(3) An officer shall not issue a work permit to a foreign national if

 

. . .

 

(e) the foreign national has engaged in unauthorized study or work in Canada or has failed to comply with a condition of a previous permit or authorization unless

 

 

(i) a period of six months has elapsed since the cessation of the unauthorized work or study or failure to comply with a condition,

 

(ii) the study or work was unauthorized by reason only that the foreign national did not comply with conditions imposed under paragraph 185(a), any of subparagraphs 185(b)(i) to (iii) or paragraph 185(c);

 

 

Loi de l’impôt sur le revenu, 1985, ch. 1 (5e suppl.)

 

238.(1) La personne qui ne produit ou ne présente pas ou ne remplit pas une déclaration de la manière et dans le délai prévus à la présente loi ou à son règlement ou qui contrevient au paragraphe 116(3), 127(3.1) ou (3.2), 147.1(7) ou 153(1) ou à l’un des articles 230 à 232 ou à une disposition réglementaire prise en vertu du paragraphe 147.1(18) ou encore qui contrevient à une ordonnance rendue en application du paragraphe (2) commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et outre toute pénalité prévue par ailleurs :

 

a) soit une amende de 1 000 $ à 25 000 $;

 

b) soit une telle amende et un emprisonnement maximal de 12 mois.

 

 

239.(1) Toute personne qui, selon le cas :

 

[. . .]

 

d) a, volontairement, de quelque manière, éludé ou tenté d’éluder l’observation de la présente loi ou le paiement d’un impôt établi en vertu de cette loi;

 

e) a conspiré avec une personne pour commettre une infraction visée aux alinéas a) à d),

commet une infraction et, en plus de toute autre pénalité prévue par ailleurs, encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire :

 

f) soit une amende de 50 % à 200 % de l’impôt que cette personne a tenté d’éluder;

 

 

g) soit à la fois l’amende prévue à l’alinéa f) et un emprisonnement d’au plus 2 ans.

 

(2) Toute personne accusée d’une infraction visée aux paragraphes (1) ou (1.1) peut, au choix du procureur général du Canada, être poursuivie par voie de mise en accusation et, si elle est déclarée coupable, encourt, en plus de toute autre pénalité prévue par ailleurs :

 

a) d’une part, une amende de 100 % à 200 % des montants suivants :

 

(i) dans le cas de l’infraction visée au paragraphe (1), l’impôt que cette personne a tenté d’éluder,

 

(ii) dans le cas de l’infraction visée au paragraphe (1.1), l’excédent du montant du remboursement ou du crédit obtenu ou demandé sur le montant auquel elle ou l’autre personne, selon le cas, a droit;

 

 

 

b) d’autre part, un emprisonnement maximal de cinq ans.

 

238.(1) Every person who has failed to file or make a return as and when required by or under this Act or a regulation or who has failed to comply with subsection 116(3), 127(3.1) or 127(3.2), 147.1(7) or 153(1), any of sections 230 to 232 or a regulation made under subsection 147.1(18) or with an order made under subsection 238(2) is guilty of an offence and, in addition to any penalty otherwise provided, is liable on summary conviction to

 

 

 

 

 

 

(a) a fine of not less than $1,000 and not more than $25,000; or

 

(b) both the fine described in paragraph 238(1)(a) and imprisonment for a term not exceeding 12 months.

 

239.(1) Every person who has

 

 

. . .

 

(d) wilfully, in any manner, evaded or attempted to evade compliance with this Act or payment of taxes imposed by this Act, or

 

(e) conspired with any person to commit an offence described in paragraphs 239(1)(a) to 239(1)(d),

is guilty of an offence and, in addition to any penalty otherwise provided, is liable on summary conviction to

 

(f) a fine of not less than 50%, and not more than 200%, of the amount of the tax that was sought to be evaded, or

 

(g) both the fine described in paragraph 239(1)(f) and imprisonment for a term not exceeding 2 years.

 

(2) Every person who is charged with an offence described in subsection 239(1) or 239(1.1) may, at the election of the Attorney General of Canada, be prosecuted on indictment and, if convicted, is, in addition to any penalty otherwise provided, liable to

 

(a) a fine of not less than 100% and not more than 200% of

 

 

(i) where the offence is described in subsection 239(1), the amount of the tax that was sought to be evaded, and

 

(ii) where the offence is described in subsection 239(1.1), the amount by which the amount of the refund or credit obtained or claimed exceeds the amount, if any, of the refund or credit to which the person or other person, as the case may be, is entitled; and

 

(b) imprisonment for a term not exceeding 5 years.

 

 

Le Finance Act 2000, 2000, ch. 17, Royaume‑Uni

 

                        [traduction]

 

144. Infraction de fraude fiscale

 

(1) Commet une infraction quiconque, pour son propre compte ou pour autrui, participe sciemment à une fraude fiscale.

 

(2) Quiconque est déclaré coupable de l’infraction établie au présent article encourt :

 

a) par procédure sommaire, un emprisonnement maximal de six mois et une amende ne dépassant pas le maximum prévu par la loi, ou l’une de ces peines;

 

b) par mise en accusation, un emprisonnement maximal de sept ans et une amende, ou l’une de ces peines.

 

(3) Le présent article s’applique à l’acte et à l’omission commis le 1er janvier 2001 ou après.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1704-10

 

INTITULÉ :                                       TANYA MASYCH

 

                                                            c.

 

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE

                                                            L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Saskatoon (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 16 septembre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 8 décembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter A. Abrametz

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Marcia Jackson

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Eggum, Abrametz & Eggum Law

Prince Albert (Saskatchewan)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Saskatoon (Saskatchewan)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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