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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20101006

Dossier : T‑1270‑08

Référence : 2010 CF 996

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 6 octobre 2010

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

GARFORD PTY LTD.

demanderesse

 

et

 

DYWIDAG SYSTEMS INTERNATIONAL,

CANADA, LTD., M. BOB BISHOP

ET M. KENNETH SOSTEK

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

 

DYWIDAG SYSTEMS INTERNATIONAL, CANADA, LTD.

 

demanderesse reconventionnelle

 

et

 

GARFORD PTY LTD.

 

défenderesse reconventionnelle

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               La défenderesse, Dywidag Systems International, Canada, Ltd., a déposé une requête pour que soit rendu un jugement sommaire rejetant la partie de l’action de la demanderesse visant l’obtention d’une réparation pour les pertes et dommages subis, conformément aux paragraphes 36(1) et 45(1) de la Loi sur la concurrence, LC 1985, c C‑34, parce que la procédure a été introduite le 15 août 2008, soit bien après l’expiration du délai de prescription prévu par le paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence.

 

Principes applicables aux jugements sommaires

 

[2]               Les parties s’entendent sur les principes fondamentaux régissant les requêtes en jugement sommaire. Un résumé pertinent en a été fait par la juge Tremblay‑Lamer dans la décision Granville Shipping Co c Pegasus Lines Ltd, [1996] 2 CF 853, [1996] ACF no 481 (la décision Granville Shipping) :

J’ai examiné toute la jurisprudence se rapportant aux jugements sommaires et je résume les principes généraux en conséquence :

 

1.         ces dispositions ont pour but d’autoriser la Cour à se prononcer par voie sommaire sur les affaires qu’elle n’estime pas nécessaire d’instruire parce qu’elles ne soulèvent aucune question sérieuse à instruire (Old Fish Market Restaurants Ltd. c. 1000357 Ontario Inc. et al., [1994] A.C.F. no 1631, 58 C.P.R. (3d) 221 (1re inst.));

 

2.         il n’existe pas de critère absolu (Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le)), mais le juge Stone, J.C.A. semble avoir fait siens les motifs prononcés par le juge Henry dans le jugement Pizza Pizza Ltd. v. Gillespie. Il ne s’agit pas de savoir si une partie a des chances d’obtenir gain de cause au procès, mais plutôt de déterminer si le succès de la demande est tellement douteux que celle‑ci ne mérite pas d’être examinée par le juge des faits dans le cadre d’un éventuel procès;

 

3.         chaque affaire devrait être interprétée dans le contexte qui est le sien (Blyth et Feoso);

 

4.         les règles de pratique provinciales (spécialement la Règle 20 des Règles de procédure civile de l’Ontario) peuvent faciliter l’interprétation (Feoso et Collie);

 

5.         saisie d’une requête en jugement sommaire, notre Cour peut trancher des questions de fait et des questions de droit si les éléments portés à sa connaissance lui permettent de le faire (ce principe est plus large que celui qui est posé à la Règle 20 des Règles de procédure civile de l’Ontario) (Patrick);

 

6.         le tribunal ne peut pas rendre le jugement sommaire demandé si l’ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires pour lui permettre de trancher les questions de fait ou s’il estime injuste de trancher ces questions dans le cadre de la requête en jugement sommaire (Pallman et Sears);

 

7.         lorsqu’une question sérieuse est soulevée au sujet de la crédibilité, le tribunal devrait instruire l’affaire, parce que les parties devraient être contre‑interrogées devant le juge du procès (Forde et Sears). L’existence d’une apparente contradiction de preuves n’empêche pas en soi le tribunal de prononcer un jugement sommaire; le tribunal doit « se pencher de près » sur le fond de l’affaire et décider s’il y a des questions de crédibilité à trancher (Stokes).

 

[3]               Pareillement, dans la décision Pizza Pizza Ltd c Gillespie, [1990] OJ No 2011 (C Ont, Div gén), au paragraphe 42, la Cour de l’Ontario, qui a examiné une disposition équivalente des Règles de procédure civile de l’Ontario (l’article 20), a conclu que l’objet d’une requête en jugement sommaire [traduction] « est d’éliminer les réclamations qui, de l’avis du tribunal, et compte tenu de la preuve produite selon ce que requiert la disposition, ne devraient pas atteindre le stade d’un procès parce qu’elles ne résisteraient pas au critère de l’“examen attentif” ».

 

[4]               La Cour d’appel fédérale a confirmé les normes énoncées dans les décisions Granville Shipping et Pizza Pizza dans l’arrêt ITV Technologies Inc c WIC Television Ltd, [2001] ACF no 400 (CAF), et l’arrêt Feoso Oil Ltd c Sarla (Le), [1995] ACF no 866 (CAF).

 

[5]               Les dispositions relatives aux jugements sommaires doivent être interprétées d’une manière libérale de manière à apporter au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible. Le juge Evans s’exprimait ainsi dans la décision F Von Langsdorff Licensing Ltd c SF Concrete Technology, Inc, [1999] ACF no 526 (CF 1re inst) :

Il me semble que la tendance générale dans la jurisprudence de notre Cour est d’interpréter libéralement les principes régissant les jugements sommaires de manière à forcer le juge saisi de la requête à « examiner de près » la preuve pour décider s’il existe des questions de fait qui justifient bel et bien le type d’évaluation et d’appréciation de la preuve qui reviennent légitimement à l’arbitre des faits. Outre les décisions susmentionnées, citons également le jugement Collie Woollen Mills Ltd. c. La Reine, 96 D.T.C. 6146 (C.F. 1re inst.).

 

 

[6]               Il est aussi de droit constant que, même si les deux parties doivent « présenter leurs meilleurs arguments », c’est le requérant qui a le fardeau ultime d’établir tous les faits nécessaires à l’obtention d’un jugement sommaire. La partie visée par la requête en jugement sommaire n’est tenue d’établir tous les faits de l’affaire; il lui suffit plutôt d’exposer certains faits précis et de produire les éléments de preuve démontrant l’existence d’une véritable question litigieuse.

 

[7]               Chaque cas doit être interprété selon son propre contexte et, si les faits nécessaires ne peuvent être établis, ou s’il existe des questions de crédibilité sérieuses, l’affaire doit être instruite.

 

[8]               Comme le fait observer la demanderesse, il y a des différences fondamentales entre une requête préliminaire et un procès. Un jugement sommaire aura notamment pour effet que l’une des parties sera empêchée de produire dans un procès en bonne et due forme toute preuve se rapportant à la question litigieuse à l’égard de laquelle la requête en jugement sommaire a été accueillie. Elle perdra son droit d’être entendue. C’est pourquoi les tribunaux doivent s’assurer qu’une requête en jugement sommaire n’aura pas pour effet de priver de ce droit l’une des parties.

 

[9]               Une requête en jugement sommaire n’est pas censée tenir lieu de procès, et elle ne saurait être assimilée à un procès. Quand il se demande si un procès serait superflu et présenterait un quelconque intérêt, le juge saisi de la requête soit se garder d’exercer le rôle d’un juge du procès et de statuer sur les questions en litige.

 

[10]           Je souscris également à la prétention de la demanderesse selon laquelle un jugement sommaire ne devrait être rendu que dans les cas manifestes où la Cour est absolument convaincue qu’un procès ne serait pas nécessaire. Un jugement sommaire ne sera pas rendu lorsque le juge n’est pas en mesure de dégager les faits essentiels à partir de l’ensemble de la preuve ou lorsqu’il serait injuste de le faire. S’il y a de sérieux points de fait ou de droit à décider, l’affaire ne se prête pas à un jugement sommaire.

 

La question du délai de prescription

 

[11]           Le point sur lequel les parties divergent de façon importante est celui du délai de prescription et de l’application de ce délai à l’affaire dont je suis saisi.

 

[12]           La présente requête se rapporte à la demande de dommages‑intérêts de la demanderesse fondée sur le paragraphe 36(1) de la Loi sur la concurrence :

36 (1) Toute personne qui a subi une perte ou des dommages par suite :

 

a) soit d’un comportement allant à l’encontre d’une disposition de la partie VI;

 

b) soit du défaut d’une personne d’obtempérer à une ordonnance rendue par le Tribunal ou un autre tribunal en vertu de la présente loi,

 

peut, devant tout tribunal compétent, réclamer et recouvrer de la personne qui a eu un tel comportement ou n’a pas obtempéré à l’ordonnance une somme égale au montant de la perte ou des dommages qu’elle est reconnue avoir subis, ainsi que toute somme supplémentaire que le tribunal peut fixer et qui n’excède pas le coût total, pour elle, de toute enquête relativement à l’affaire et des procédures engagées en vertu du présent article.

 

36 (1) Any person who has suffered loss or damage as a result of

 

(a) conduct that is contrary to any provision of Part VI, or

 

 

(b) the failure of any person to comply with an order of the Tribunal or another court under this Act,

 

 

may, in any court of competent jurisdiction, sue for and recover from the person who engaged in the conduct or failed to comply with the order an amount equal to the loss or damage proved to have been suffered by him, together with any additional amount that the court may allow not exceeding the full cost to him of any investigation in connection with the matter and of proceedings under this section.

 

 

[13]           Le recours prévu au paragraphe 36(1) est subordonné au délai de prescription énoncé au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence :

(4) Les actions visées au paragraphe (1) se prescrivent :

 

a) dans le cas de celles qui sont fondées sur un comportement qui va à l’encontre d’une disposition de la partie VI, dans les deux ans qui suivent la dernière des dates suivantes :

 

(i) soit la date du comportement en question,

 

(ii) soit la date où il est statué de façon définitive sur la poursuite;

 

 

b) dans le cas de celles qui sont fondées sur le défaut d’une personne d’obtempérer à une ordonnance du Tribunal ou d’un autre tribunal, dans les deux ans qui suivent la dernière des dates suivantes :

 

(i) soit la date où a eu lieu la contravention à l’ordonnance du Tribunal ou de l’autre tribunal,

 

(ii) soit la date où il est statué de façon définitive sur la poursuite.

 

(4) No action may be brought under subsection (1),

 

(a) in the case of an action based on conduct that is contrary to any provision of Part VI, after two years from

 

 

 

 

(i) a day on which the conduct was engaged in, or

 

(ii) the day on which any criminal proceedings relating thereto were finally disposed of, whichever is the later; and

 

(b) in the case of an action based on the failure of any person to comply with an order of the Tribunal or another court, after two years from

 

 

 

(i) a day on which the order of the Tribunal or court was contravened, or

 

 

(ii) the day on which any criminal proceedings relating thereto were finally disposed of, whichever is the later.

 

 

[14]           Le délai de prescription qui est applicable en l’espèce est celui énoncé au sous‑alinéa 36(4)a)(i), à savoir deux ans à compter de « la date du comportement en question ».

 

[15]           Le comportement en question est celui qui est décrit au paragraphe 45(1) de la Loi sur la concurrence :

45(1) Commet une infraction quiconque, avec une personne qui est son concurrent à l’égard d’un produit, complote ou conclut un accord ou un arrangement :

 

a) soit pour fixer, maintenir, augmenter ou contrôler le prix de la fourniture du produit;

 

b) soit pour attribuer des ventes, des territoires, des clients ou des marchés pour la production ou la fourniture du produit;

 

c) soit pour fixer, maintenir, contrôler, empêcher, réduire ou éliminer la production ou la fourniture du produit.

 

45(1) Every person commits an offence who, with a competitor of that person with respect to a product, conspires, agrees or arranges

 

 

(a) to fix, maintain, increase or control the price for the supply of the product;

 

(b) to allocate sales, territories, customers or markets for the production or supply of the product; or

 

 

(c) to fix, maintain, control, prevent, lessen or eliminate the production or supply of the product.

 

 

[16]           La demanderesse a précisé ses actes de procédure en fournissant des explications sur ce qu’elle considère comme le « comportement » qui fait naître un droit à réparation aux termes du paragraphe 36(1) de la Loi. Au départ, dans sa réponse du 1er octobre 2008, elle a fourni les précisions suivantes :

[traduction]

1.         Les actes manifestes, mentionnés dans la demande de précisions sur les points nos 9, 16, 23 et 30 de votre lettre, renvoient aux actes de DSI consistant à conclure avec diverses parties des conventions d’achat dont DSI savait ou aurait dû savoir qu’elles limiteraient ou compromettraient indûment la concurrence, et aux négociations et discussions ayant précédé lesdites conventions d’achat.

 

[…]

 

4.         Les dates auxquelles DSI, Thiessen, Ground Control et SMP sont parvenues à un accord ou un arrangement, mentionnées dans la demande de précisions sur les points nos 5, 12, 19 et 26, étaient les dates auxquelles DSI a conclu des conventions d’achat avec chacune des sociétés Thiessen, Ground Control et SMP, et mené les négociations et discussions ayant précédé lesdites conventions d’achat. [Non souligné dans l’original.]

 

[17]           La demanderesse a aussi donné la réponse suivante le 14 octobre 2008 :

[traduction]

1.         Les parties ayant pris part au complot, à l’association d’intérêts, à l’accord ou à l’arrangement dont il est question aux alinéas 47a) – c) de la déclaration étaient :

 

a)         DSI et Thiessen, dans le premier cas;

b)         DSI et Ground Control, dans le deuxième cas; et

c)         DSI et Stewart, dans le troisième cas.

 

2.         L’accord ou arrangement présumé entre les parties mentionnées aux alinéas 1a) – c) ci‑dessus dans chaque cas était la convention d’achat (et les documents transactionnels, résolutions d’entreprise, certificats de dirigeants, garanties, avis juridiques et autres pièces et documents connexes, ainsi que les ententes informelles ou orales connexes) produits ou communiqués en rapport avec l’opération d’achat et avec les négociations et discussions ayant précédé telle opération :

 

a)                  concernant DSI et Thiessen, dans le premier cas;

b)                  concernant DSI et Ground Control, dans le deuxième cas;

c)                  concernant DSI et Stewart, dans le troisième cas.

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[18]           Partant, les allégations figurant dans les actes de procédure concernent les événements ayant précédé ce que les documents appellent l’Acquisition Thiessen de novembre 2003, l’Acquisition Stewart de février 2005 et l’Acquisition Ground Control de mars 2006, et les accords conclus.

 

[19]           Il apparaît donc évident que, au regard du sous‑alinéa 36(4)a)(i) de la Loi sur la concurrence et du délai de prescription applicable, le comportement « en question » s’entend des négociations et discussions ayant précédé les trois conventions d’achat, ces trois conventions d’achat ainsi que des documents transactionnels connexes mentionnés dans lesdites conventions.

 

[20]           L’Acquisition Thiessen a été conclue en novembre 2003. L’Acquisition Stewart l’a été en février 2005. Quant à l’Acquisition Ground Control, elle l’a été en mars 2006. Ainsi, on serait porté à croire, eu égard aux actes de procédure de la demanderesse et aux précisions qu’elle a fournies, que l’expiration du délai de prescription pour chacune des opérations (c’est‑à‑dire le « comportement » visé au sous‑alinéa 36(4)a)(i)) reprochées était le suivant :

a.                   Acquisition Thiessen – novembre 2005;

b.                  Acquisition Stewart – février 2007;

c.                   Acquisition Ground Control – mars 2008.

 

[21]           Ainsi, même si l’accord ou l’arrangement évoqué par la demanderesse est la somme totale des trois conventions distinctes, une interprétation littérale du sous‑alinéa 36(4)a)(i) tend à indiquer que le délai de prescription a expiré au plus tard en mars 2008.

 

[22]           L’action a été introduite le 15 août 2008. Donc manifestement, si l’on applique le sous‑alinéa 36(4)a)(i) d’après son sens clair et évident, la réclamation de la demanderesse fondée sur les paragraphes 36(1) et 45(1) de la Loi sur la concurrence est prescrite et ne révèle dès lors aucune cause d’action raisonnable.

 

[23]           La demanderesse tente d’esquiver cette conclusion par divers moyens. Avant d’examiner successivement chacun des points qu’elle soulève, je pense qu’il convient de garder à l’esprit que le paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence a déjà été abondamment examiné et appliqué par la Cour.

 

[24]           D’abord, dans la décision Laboratoires Servier c Apotex Inc., 2008 CF 825, [2008] ACF no 1094 (CF) 9, la juge Snider a tiré une conclusion subsidiaire sur la question :

479     Dans le cas où j’aurais commis une erreur en concluant qu’ADIR exerçait ses droits en application de la Loi sur les brevets d’une manière qui interdit à Apotex de réclamer des dommages‑intérêts en vertu de la Loi sur la concurrence, j’examinerai la prochaine question : l’application du délai de prescription prévu au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence. Tel qu’il est indiqué ci‑dessus, l’alinéa 36(4)a) prévoit que les actions en vertu de l’article 36 se prescrivent « dans le cas de celles qui sont fondées sur un comportement qui va à l’encontre d’une disposition de la partie VI, dans les deux ans qui suivent la dernière des dates suivantes : (i) soit la date du comportement en question [...] ».

 

480     Servier fait valoir que la demande reconventionnelle d’Apotex au titre de la Loi sur la concurrence est prescrite en application du paragraphe 36(4) de cette loi pour deux raisons : a) le « comportement », soit la conclusion de l’entente de règlement, a eu lieu quelque six ans avant l’introduction de la demande reconventionnelle; b) Apotex est au courant de l’entente de règlement depuis avril 2003. Pour sa part, Apotex soutient que le comportement d’ADIR a eu lieu non seulement à la date à laquelle ADIR a conclu l’entente de règlement, mais a eu lieu tous les jours par la suite tant et aussi longtemps que les brevets délivrés en vertu de l’entente de règlement sont en vigueur. Elle fait valoir de plus qu’une interprétation du paragraphe 36(4) comme celle qu’a proposée Servier interdirait à tout jamais à Apotex d’intenter une action en vertu de la Loi sur la concurrence. Il en est ainsi parce qu’Apotex pourrait uniquement intenter une action en vertu de l’article 36 de la Loi sur la concurrence dans le cas où elle « a subi une perte ou des dommages ». Sa perte ou ses dommages ont lieu uniquement si la prétention de Servier concernant la contrefaçon du brevet 196 par Apotex est acceptée.

 

481     Malgré les habiles arguments de l’avocat d’Apotex sur ce point, je suis d’avis que le comportement en l’espèce est très vraisemblablement la conclusion de l’entente de règlement. Au plus tard, le comportement est la délivrance du brevet 196 (et des brevets à Schering et à Hoechst qui ont également découlé de l’ordonnance du juge Nadon). La réduction indue de la concurrence, si elle existe, est l’effet du complot reproché et non du « comportement ».

 

482     Ce point de vue est étayé par le libellé de l’infraction prévue par la Loi. Plus précisément, l’article 45 prévoit ce qui suit : « Commet un acte criminel [...] quiconque complote, se coalise ou conclut un accord ou arrangement avec une autre personne [...] [pour réduire, indûment, la concurrence] [...] ». L’infraction est le complot ou l’accord. L’effet du complot ou de l’accord est la réduction indue de la concurrence. Bien que la réduction indue de la concurrence puisse se poursuivre, l’acte du complot se produira, dans la plupart des cas, à un moment qu’il est possible de déterminer. En conséquence, lorsque nous examinons le délai de prescription établi au paragraphe 36(4), la disposition renvoie à la date à laquelle l’accord a été conclu ou le complot ourdi. Pour les besoins de la présente instance, le comportement a eu lieu à la date de l’entente de règlement conclue par ADIR, Schering et Aventis, vers décembre 2000. Ainsi, le délai de prescription de deux ans prévu au paragraphe 36(4) a été dépassé.

 

483     Ma conclusion aurait pu être différente si j’avais été saisie d’une preuve indiquant une collusion ou un accord continu entre les parties à l’entente de règlement. Je ne l’ai pas été. En effet, la preuve indique que les parties à l’entente se font activement concurrence (à titre d’exemple, comme l’a expliqué M. Sumpter, au moyen de documents comparant l’utilité des divers composés « pril » utilisés par l’équipe des ventes de Servier). La situation dans 351694 Ontario Ltd. c. Paccar du Canada ltée, 2004 CF 1565 (Paccar), une décision sur laquelle s’appuie Apotex, était très différente.

 

484     Dans l’affaire Paccar, les demanderesses vendaient des pièces de camions à des prix fortement réduits. En réaction, les défenderesses ont établi une règle (appelée la règle Palings) en vertu de laquelle les pièces étaient fournies à des concessionnaires. L’application de la règle Palings « avait pour effet de réduire le bénéfice du concessionnaire et de réduire aussi probablement ses ventes. Il est possible de déduire que, dans ces circonstances, cela constituait une mesure discriminatoire à l’égard de la fourniture de ces produits [ce qui contrevient à l’alinéa 61(1)b) de la Loi sur la concurrence] ». (Paccar, précité, au paragraphe 26.) Le juge von Finckenstein a tiré la conclusion suivante au paragraphe 27 :

 

La règle Palings était une règle permanente qui est demeurée en vigueur à l’égard des deux concessionnaires jusqu’à la date de la résiliation du contrat; c’est‑à‑dire, à l’intérieur du délai de prescription.

 

485     Le savant juge a déclaré ce qui suit au paragraphe 30 :

 

Compte tenu de ma conclusion au sujet des violations possibles de l’alinéa 61(1)b) en raison de la règle Palings, et compte tenu du fait que cette règle a été appliquée aux deux concessionnaires, les allégations concernant les pièces fondées sur la violation établie de l’alinéa 61(1)b) ne peuvent être déclarées irrecevables en raison du sous‑alinéa 36(4)a)(i).

 

486     Les faits de la décision Paccar se distinguent de la présente espèce. Dans Paccar, il y avait une collaboration continue entre les demanderesses, vraisemblablement en vertu d’un accord permanent. Les demanderesses ont continué à appliquer la règle Palings. En fait, l’accord n’a pas pris fin. L’acte de complot a eu lieu chaque fois qu’une transaction était conclue en vertu de la règle Palings. En l’espèce, il n’y a aucun élément de preuve de la sorte. À compter de l’ordonnance du juge Nadon ou, au plus tard, à compter de la délivrance des brevets, l’entente de règlement n’avait pas d’effet permanent; elle était entièrement exécutée. Voilà une distinction importante.

 

487     Je conclus que le délai de prescription court à compter de la date de l’entente de règlement ou, au plus tard, à compter de la date de la délivrance du brevet 196.

 

488     Le principe de la possibilité de découverte peut, dans certaines circonstances, s’appliquer de façon à proroger le délai de prescription. Ce principe s’applique lorsqu’une partie ne pouvait pas raisonnablement connaître l’existence d’un événement. En l’espèce, Servier soutient que, puisque le délai de prescription prévu au paragraphe 36(4) court expressément d’une date précise indépendante de la connaissance, le principe de la possibilité de découverte ne peut pas s’appliquer. J’estime qu’il s’agit vraisemblablement d’une interprétation correcte du droit (voir Fehr c. Jacob, [1993] 5 W.W.R. 1, 85 Man. R. (2d) 63 (C.A. Man.)).

 

489     Toutefois, le principe de la possibilité de découverte, s’il s’applique, n’est pas utile à Apotex. Il est possible de prétendre qu’Apotex a réellement eu connaissance de l’entente de règlement : a) soit dès qu’elle a été versée au dossier public du dossier du tribunal no T‑228‑97 à titre d’annexe de l’ordonnance du juge Nadon; b) soit lorsque le brevet 196 a été délivré en 2001. À l’un ou l’autre de ces deux moments, on pourrait présumer qu’Apotex a eu connaissance de la délivrance du brevet pour le perindopril et que le brevet 196 avait été délivré en vertu d’une entente conclue par trois sociétés. Même si je ne peux pas conclure avec certitude qu’Apotex était au courant du complot reproché en 2001, la preuve dont je suis saisie indique sans équivoque qu’Apotex était au courant de l’entente de règlement au plus tard en avril 2003. M. Peter Gingras, directeur mondial des programmes d’Apotex Inc., en réponse à des engagements donnés lors de son interrogatoire préalable, a dit qu’Apotex a eu connaissance de l’entente de règlement et en a reçu copie en avril 2003. En conséquence, même si le principe de la possibilité de découverte s’applique, la date la plus tardive à compter de laquelle le délai de prescription de deux ans court serait avril 2003. Apotex a donc bien dépassé le délai de prescription de deux ans prévu au paragraphe 36(4).

 

490     Pour ces motifs, je conclus qu’une action intentée par Apotex en vertu de l’article 36 de la Loi sur la concurrence est prescrite au motif qu’Apotex intente cette action plus de deux ans après que s’est produit le comportement reproché.

 

[25]           La juge Gauthier a aussi eu l’occasion d’examiner récemment le paragraphe 36(4) et d’autres dispositions de la Loi sur la concurrence qui intéressent la requête dont je suis saisi. Elle s’exprimait ainsi dans la décision Eli Lilly and Co c Apotex Inc, 2009 CF 991, [2009] ACF no 1229 :

725     Le droit d’action en dommages‑intérêts que confère l’article 36 de la Loi sur la concurrence est un recours spécial, prévu dans une partie précisément intitulée « Recours spéciaux ». Il ne peut donc y avoir d’enquêtes sur les actes d’autres personnes dans le contexte de l’application des dispositions de fond de la Loi, qui relève en général du commissaire, que lorsqu’il est clair que le comportement anticoncurrentiel supposé a eu pour effet de faire subir une perte ou des dommages à une personne. L’objet de l’article 36 de la Loi n’est pas d’encourager qui que ce soit à prendre la place du commissaire et à faire mener des enquêtes sur la conduite d’autres personnes. Cet article vise plutôt à fournir un moyen d’indemnisation aux victimes d’actes anticoncurrentiels.

 

[…]

 

728     Comme il n’a pas été engagé de poursuites criminelles relativement au comportement anticoncurrentiel supposé de Lilly et de Shionogi, le sous‑alinéa 36(4)a)(i) de la Loi sur la concurrence est d’application. Par suite, la Cour doit établir la date du dernier jour à laquelle on s’est livré au comportement supposé enfreindre l’article 45 de la Loi sur la concurrence : Transamerica Life Insurance Co. of Canada c. Canada Life Assurance Co., (1995), 25 O.R. (3d) 106, 41 C.P.C. (3d) 75 [C. Ont. (Div. gén.)], paragraphe 23.

 

729     Lilly et Shionogi invoquent toutes deux la décision Laboratoires Servier, où la juge Judith Snider écrit que « lorsque nous examinons le délai de prescription établi au paragraphe 36(4), la disposition renvoie à la date à laquelle l’accord a été conclu ou le complot ourdi » (paragraphe 482). Par conséquent, étant donné que Lilly et Shionogi ont conclu leur accord de cession des droits de brevet le 27 avril 1995, le délai de prescription applicable aurait expiré en 1997.

 

730     Même si l’on appliquait à la présente espèce le principe de la possibilité de découverte, dont Lilly et Shionogi soutiennent qu’il ne peut être invoqué dans le contexte du paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence, Apotex a eu connaissance de la cession au plus tard en 1997, moment où l’accord a été plaidé dans la déclaration de Lilly. Par conséquent, font valoir Lilly et Shionogi, le délai de prescription ne peut avoir expiré après 1999.

 

731     Apotex réplique que la Cour doit prendre en considération les éléments de l’infraction créée par le paragraphe 45(1) de la Loi sur la concurrence dans l’interprétation de son paragraphe 36(4), opération que la juge Snider a omis d’effectuer dans Laboratoires Servier et qui mène à la conclusion [traduction« que le délai de prescription de deux ans commence à courir, au plus tôt, à partir du comportement découlant de l’accord qui constitue une réduction indue de la concurrence ».

 

732     Selon Apotex, le délai de prescription ne devrait commencer à courir qu’à compter du moment où [traduction] « il [lui] a été donné avis que Lilly considérait comme contrefaisant chacun des procédés de rechange [qu’elle] avait employés ». Ce moment est, selon Apotex, janvier 2001, où Lilly a modifié sa déclaration pour y ajouter des allégations de contrefaçon de ses brevets à propos du céfaclor en vrac obtenu de Lupin.

 

733     Subsidiairement, Apotex soutient que le paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence vise un comportement continu. Selon elle, [traduction« le comportement attaqué de Lilly se poursuit chaque jour après qu’elle a fait valoir contre Apotex les droits de brevet acquis du fait de l’accord conclu avec Shionogi et sur la durée où la concurrence s’en trouve indûment réduite ». Or, comme Lilly continue de faire valoir les droits découlant des brevets de Shionogi dans l’action principale, le comportement enfreignant l’article 45 de la Loi sur la concurrence s’est poursuivi jusqu’aujourd’hui, de sorte que le délai de prescription n’a pas expiré.

 

734     Le juge Evans a expliqué cette position dans le contexte du deuxième arrêt de la Cour d’appel fédérale concernant une requête en jugement sommaire relative à la demande reconventionnelle d’Apotex :

 

Apotex fait valoir que la cession doit être examinée dans son contexte, sur le fait qu’elle a entraîné un renforcement du pouvoir commercial de Lilly, autrement dit, sur le fait qu’elle a renforcé la capacité de Lilly à agir de manière indépendante sur le marché puisqu’elle détenait désormais les brevets de tous les procédés de fabrication du céfaclor connus et commercialement viables. Dans cette perspective, le complot a continué d’exister tant et aussi longtemps que la cession a eu des effets anticoncurrentiels. Compte tenu de tous les éléments de preuve en jeu, il ne serait pas approprié de trancher cette question par un jugement sommaire.

 

735     L’affirmation voulant que le comportement anticoncurrentiel et ses effets continuent après le dépôt de la déclaration dans une action en contrefaçon et jusqu’à ce que la Cour statue sur cette action ne mérite tout simplement pas qu’on l’examine plus avant.

 

736     Cela dit, la Cour est disposée à admettre que le comportement enfreignant la partie VI de la Loi sur la concurrence « peut prendre la forme d’un incident isolé ou être de nature permanente », selon l’infraction dont il s’agit dans le cas particulier. Cependant, selon la Cour, le comportement permanent ou continu ne peut être ainsi qualifié pour l’application du paragraphe 36(4) que tant qu’il continue à constituer une infraction sous le régime de la partie VI de la Loi sur la concurrence.

 

737     Il est par conséquent essentiel, pour établir le délai de prescription applicable, de se demander quel comportement peut former la base de l’infraction alléguée par Apotex, à savoir le complot en vue de réduire indûment la concurrence que vise l’article 45 de la Loi sur la concurrence.

 

738     Dans R. c. Nova Scotia Pharmaceutical Society, [1992] 2 R.C.S. 606, (1992), 93 D.L.R. (4th) 36 (Nova Scotia Pharmaceutical Society), le juge Charles Gonthier, écrivant au nom de la Cour suprême, expliquait que l’infraction créée par la disposition qui a précédé l’article 45 de la Loi sur la concurrence, à savoir l’alinéa 32(1)c) de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, L.R.C. 1970, ch. C‑23, comprenait deux éléments importants :

 

(1) Un accord conclu par l’accusé (« toute personne qui complote, se coalise, se concerte ou s’entend avec une autre »);

 

(2) Le fait d’empêcher ou de diminuer la concurrence, résultant de cet accord (« pour empêcher ou diminuer, indûment, la concurrence dans la production, la fabrication, l’achat, le troc, la vente, l’entreposage, la location, le transport ou la fourniture d’un produit, ou dans le prix d’assurances sur les personnes ou les biens »).

 

739     L’examen qu’il faut effectuer pour établir si les éléments de l’infraction sont présents porte sur deux points : i) la structure du marché (« vérifier le degré de puissance commerciale des parties [à l’accord] ») et ii) le comportement des entreprises. Comme, s’agissant de déterminer la date d’ouverture du délai de prescription, la Cour s’intéresse au comportement, c’est ce deuxième point qui nous retiendra ici.

 

740     Cependant, on n’examine pas la question du comportement du point de vue des effets réels de l’accord, mais on se demande plutôt quels sont, au moment de sa conclusion, son objet et les effets probables de celui‑ci sur la concurrence. Ainsi que l’explique le juge Gonthier, « [d]ans l’examen, l’objet de l’accord est sans contredit l’élément relatif au comportement qui est le plus important ».

 

741     Le juge Gonthier cite en l’approuvant une décision antérieure de la Haute Cour de justice de l’Ontario, soit R. c. Northern Electric Co., [1955] 3 D.L.R. 449, aux pages 469 et 470 de laquelle le juge en chef James McRuer formule les observations suivantes :

 

[traduction] Quand il s’agit de décider si l’accord ou le complot tombe sous le coup de la loi, on ne juge pas de son illégalité par rapport à ce qui a été accompli en exécution de l’accord (quoique cela puisse servir à prouver l’accord), mais, comme je le disais plus haut, on examine la nature et la portée de l’accord tel que prouvé et on établit si celui‑ci, dans le cas où il serait exécuté, porterait préjudice à l’intérêt public à l’égard de la libre concurrence dans une mesure qui serait en fait indue. Pour paraphraser les remarques du juge en chef Duff dans Container Materials, [1942], 1 D.L.R. 529, R.C.S. 147, 77 Can.C.C. 129, et adapter celles du juge Kerwin, on examine l’accord conclu, qu’il ait ou non été exécuté en quoi que ce soit, on répond selon le sens commun à la question de fait de savoir quel est l’objet direct de l’arrangement attaqué, et l’on établit si cet objet, dans le cas où il serait mis à exécution, aurait pour effet d’empêcher ou de diminuer indûment la concurrence. Il peut très bien arriver que des personnes physiques ou morales concluent un accord illicite que, pour des raisons indépendantes de leur volonté, elles ne puissent pas mettre à exécution; la conclusion d’un tel accord n’en serait pas moins un acte criminel.

 

[Non souligné dans l’original, pages 469‑470]

 

742     Le juge en chef McRuer invoque l’arrêt de la Cour suprême du Canada R. c. Container Materials Ltd., [1942] R.C.S. 147, [1942] 1 D.L.R. 529, où l’on peut lire ce qui suit sous la plume du juge Kerwin, à la page 159 :

 

[traduction] (...) une fois que l’accord est conclu, qu’on fasse ou non quoi que ce soit pour l’exécuter, il faut dans chaque espèce considérer la question comme un point de fait qu’il appartient au tribunal des faits d’établir, selon le point de vue du sens commun sur l’objet direct de l’arrangement attaqué. Dans ces affaires, la preuve relative à ce qui a été fait est seulement une meilleure preuve de cet objet que celle dont on aurait pu disposer s’il n’avait été commis aucun acte pour servir les fins communes.

 

[Non souligné dans l’original, page 159.]

 

743     Ces précédents militent pour la thèse que le comportement à examiner n’inclut aucun élément postérieur à la conclusion proprement dite de l’accord, qui n’est rien d’autre dans la présente espèce que l’accord de cession conclu par Lilly et Shionogi le 27 avril 1995. On peut examiner les effets de cet accord aux fins d’établir s’il devait avoir vraisemblablement pour effet de réduire indûment la concurrence, mais la durée de ce comportement ne se trouve pas pour autant prolongée. La preuve la plus convaincante en est que, même si l’accord n’avait été suivi d’aucune mesure, le fait de l’avoir conclu constituerait néanmoins une infraction dans le cas où les autres conditions seraient remplies.

 

744     L’arrêt de la Cour suprême du Canada Aetna Insurance Co. et autres c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 731, (1977), 75 D.L.R. (3d) 332 (Aetna), ne contredit pas cette thèse. Le juge Roland Ritchie y déclarait au nom de la majorité (à la page 748) que la charge pesant sur le ministère public était de prouver « que cette conspiration, coalition, concertation ou entente, si elle était mise à exécution, préviendrait ou diminuerait indûment la concurrence » [souligné dans l’original].

 

745     La question n’est pas de savoir si le complot a eu cet effet dans les faits, mais seulement s’il l’aurait. Le comportement postérieur à l’entente n’est pas pertinent aux fins d’établir s’il y a eu infraction et ne peut donc l’être pour ce qui concerne les délais de prescription prévus au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence.

 

746     Le juge en chef Bora Laskin formule ce principe de manière peut‑être plus vigoureuse dans ses motifs dissidents, à la page 739 de l’arrêt Aetna :

 

[Le juge de première instance] a affirmé qu’afin de déterminer si l’infraction dont les appelantes étaient accusées avait été commise, il lui fallait déterminer [traduction] « si, oui ou non, il y a eu une quelconque diminution indue de la concurrence ». Ceci ne tient pas compte du fait qu’il s’agit d’une accusation de complot. Il n’est pas nécessaire qu’il soit prouvé que la concurrence a été en fait indûment diminuée pour qu’il y ait infraction. À supposer même (quoique le juge de première instance ne le dise nulle part) que la preuve d’une diminution réelle de la concurrence puisse venir renforcer la conclusion qu’il y a eu un complot à cette fin et que celui‑ci visait une diminution indue, l’absence d’une telle preuve de diminution réelle de la concurrence, sans parler d’une diminution indue, ne résout pas la question à l’encontre de la prétention du ministère public.

 

[Non souligné dans l’original, page 739.]

 

747     Donc, aux fins de détermination du délai de prescription applicable sous le régime du paragraphe 36(4), la Cour n’a pas à tenir compte des effets du complot supposé. La Cour suprême de la Colombie‑Britannique a récemment appliqué ce principe dans No. 1 Collision Repair & Painting (1982) Ltd. c. Insurance Corporation of British Columbia (1998), 4 C.C.L.I. (3d) 135, 78 A.C.W.S. (3d) 834, où le juge Alexander Henderson écrivait ce qui suit : [traduction] « On doit réclamer les dommages‑intérêts prévus à l’article 45 de la Loi sur la concurrence dans les deux ans qui suivent la date du comportement en question : Loi sur la concurrence, précitée, sous‑alinéa 36(4)a)(i). Or le complot supposé dans la présente espèce avait pris fin le 1er avril 1993. »

 

 

[26]           Les conclusions de la juge Gauthier portant sur la distinction cruciale à faire entre le complot et ses effets semblent confirmées par les décisions d’autres cours. Voir par exemple R c Howard Smith Paper Mills Ltd, [1957] RCS 403, page 427; R c Northern Electric Co, [1955] 3 DLR 449, page 452; et R c Aetna Insurance Co, [1978] 1 RCS 731, pages 740‑741, 748.

 

[27]           Pour répondre à ces déclarations de la Cour, la demanderesse expose trois raisons pour lesquelles le délai de prescription fixé par le paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence ne fait pas en l’espèce obstacle à ses réclamations fondées sur le paragraphe 36(1).

 

La possibilité de découvrir le préjudice subi

 

[28]           Premièrement, la demanderesse dit que le paragraphe 36(4) est subordonné à une règle générale de la possibilité de découvrir le dommage, et que, avant de recevoir les copies des conventions d’acquisition en cause en l’espèce, il lui était impossible de savoir qu’elle avait un recours en vertu du paragraphe 36(1), ou de connaître l’étendue de son éventuel préjudice. Elle invoque divers précédents où était entrée en jeu la règle de la possibilité de découvrir le dommage. Or, aucun de ces précédents n’éclaire beaucoup point de savoir si cette règle est applicable au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence. Je n’ai du reste connaissance d’aucun précédent faisant état d’une « règle générale de la possibilité de découvrir le dommage » qui devrait être appliquée dans tous les cas. En fait, les précédents pertinents montrent qu’une application de la règle en question est une affaire d’interprétation des lois. C’est ce que l’on peut lire dans un arrêt de la Cour d’appel du Manitoba, Fehr c Jacob (1993), 14 CCLT (2d) 200, à la page 206 :

[traduction] À mon avis, la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage n’est rien de plus qu’une règle d’interprétation. Dans tous les cas où une loi indique que l’action en justice doit être intentée dans un certain délai après un événement donné, il faut interpréter les termes de cette loi. Lorsque ce délai court à partir du « moment où naît la cause d’action » ou de tout autre événement qui peut être interprété comme ne survenant qu’au moment où la victime prend connaissance du dommage, c’est la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage qui s’applique. Toutefois, si le délai court à compter de la date d’un événement qui survient clairement, et sans égard à la connaissance qu’en a la victime, cette règle ne peut prolonger le délai fixé par le législateur.

 

 

[29]           Ce raisonnement de la Cour d’appel du Manitoba a été explicitement suivi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Peixeiro c Haberman, [1997] 3 RCS 549, au paragraphe 37, et dans l’arrêt Ryan c Moore, [2005] 2 RCS 53, aux paragraphes 23, 24 et 31. Il a aussi été entériné par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt Waschkowski c Hopkinson Estate (2000), 184 DLR (4th) 281, [2000] OJ No 471, aux paragraphes 6 à 8.

 

[30]           Dans l’arrêt Ryan, précité, la Cour suprême du Canada avait les observations suivantes à faire sur la question :

23. Bien qu’elle ait été qualifiée, par le passé, de « règle générale » (Central Trust, p. 224; Peixeiro c. Haberman, [1997] 3 R.C.S. 549, par. 36), la règle de la possibilité de découvrir le dommage ne doit pas être appliquée systématiquement sans une évaluation complète des intérêts opposés (Peixeiro, par. 34). Cette règle est un outil d’interprétation des lois qui établissent des délais de prescription. Je partage l’opinion de la Cour d’appel du Manitoba lorsqu’elle écrit :

 

[traduction]  À mon avis, la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage n’est rien de plus qu’une règle d’interprétation. Dans tous les cas où une loi indique que l’action en justice doit être intentée dans un certain délai après un événement donné, il faut interpréter les termes de cette loi. Lorsque ce délai court à partir du « moment où naît la cause d’action » ou de tout autre événement qui peut être interprété comme ne survenant qu’au moment où la victime prend connaissance du dommage, c’est la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage qui s’applique. Toutefois, si le délai court à compter de la date d’un événement qui survient clairement, et sans égard à la connaissance qu’en a la victime, cette règle ne peut prolonger le délai fixé par le législateur. [Je souligne.]

 

(Fehr c. Jacob (1993), 14 C.C.L.T (2d) 200, p. 206)

 

Voir également les arrêts Peixeiro, par. 37, et Snow c. Kashyap, (1995), 125 Nfld. & P.E.I.R. 182 (C.A.T.‑N.).

 

24. Par conséquent, la Cour d’appel de Terre‑Neuve‑et‑Labrador a raison de dire que la règle s’applique [traduction] « généralement » lorsque la loi lie le point de départ du délai de prescription à la naissance de la cause d’action.  Il n’est pas permis, en droit, de recourir à la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage dans les cas où la loi applicable lie expressément le délai de prescription à un événement déterminé qui n’a rien à voir avec le moment où la partie lésée en prend connaissance ou avec le fondement de la cause d’action (voir Mew, p. 55).

 

[…]

 

31.     À mon avis, l’affaire la plus utile à notre Cour en l’espèce est celle qui est à l’origine de l’arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario Waschkowski c. Hopkinson Estate, (2000), 47 O.R. (3d) 370. La cour devait décider si la règle de la possibilité de découvrir le dommage pouvait être appliquée au par. 38(3) de la Loi sur les fiduciaires, L.R.O. 1990, ch. T.23, la disposition législative ontarienne qui prévoit qu’une action délictuelle peut être intentée par ou contre la succession d’une personne décédée et qui limite le délai dans lequel ces actions peuvent être intentées. La juge Abella (maintenant juge de notre Cour) a conclu, au par. 16, que la règle de la possibilité de découvrir le dommage ne s’appliquait pas à cette disposition puisque, dans une action délictuelle, l’état des connaissances d’une personne lésée ou celui qu’on lui attribue n’a aucune pertinence en cas de décès. Elle a expliqué ceci, aux par. 8‑9 :

 

[traduction] Aux termes du par. 38(3) de la Loi sur les fiduciaires, le délai de prescription court à compter d’un décès.  Contrairement aux affaires dans lesquelles le délai de prescription peut, en raison de sa formulation, avoir pour point de départ, par exemple, la date « où les dommages ont été subis » (Peixeiro) ou le moment où la cause d’action a pris naissance (Kamloops), aucune élasticité temporelle n’est possible lorsque la date de décès est l’élément décisif. Peu importe le moment où le préjudice a été causé ou est devenu une faute ouvrant droit à une action, le par. 38(3) de la Loi sur les fiduciaires empêche qu’il donne lieu à une action en justice, à moins que cette action ne soit intentée dans les deux ans suivant le décès de l’auteur de la faute ou de la personne lésée.

 

Les considérations de politique générale qui sous‑tendent ce délai précis ne sont pas difficiles à comprendre. L’effet juridique draconien de la common law était que le décès écartait toute possibilité de réparation pour une conduite négligente. Par contre, il était avantageux de régler les questions de succession de manière définitive. Le compromis législatif à l’art. 38 de la Loi sur les fiduciaires consistait à ouvrir une brèche de deux ans afin de donner accès à une réparation pendant un temps limité, sans placer indéfiniment une succession dans une situation de vulnérabilité financière. [Je souligne.]

 

Voir aussi Canadian Red Cross Society (Re), [2003] O.J. No. 5669 (QL) (C.A.), et Edwards c. Law Society of Upper Canada (No. 1), (2000), 48 O.R. (3d) 321 (C.A.).

 

[31]           Je pense qu’il est dès lors évident qu’il n’y a pas, comme le voudrait la demanderesse, une application générale de la règle de la possibilité de découvrir le dommage, qu’il s’agit toujours d’une question d’interprétation des lois et qu’« il n’est pas permis, en droit, de recourir à la règle prétorienne de la possibilité de découvrir le dommage dans les cas où la loi applicable lie expressément le délai de prescription à un événement déterminé qui n’a rien à voir avec le moment où la partie lésée en prend connaissance ou avec le fondement de la cause d’action » (arrêt Ryan, précité, au paragraphe 24).

 

[32]           À partir de ces principes, on voit clairement pourquoi, dans la décision Laboratoires Servier, précitée, la juge Snider s’était fondée sur l’arrêt Fehr, précité, pour conclure que le délai de prescription du paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence commençait à courir à une date précise indépendante de la connaissance et que le principe de la possibilité de découvrir le dommage ne s’appliquait pas.

 

[33]           Pour ces motifs donc, je crois devoir conclure que la demanderesse ne peut invoquer le principe en question pour fonder une prorogation du délai de prescription dans la présente affaire. En outre, même si le principe était appliqué en l’espèce, il m’apparaît clair, au vu de la preuve produite, que le recours de la demanderesse aux termes du paragraphe 36(4) serait quand même prescrit.

 

[34]           Essentiellement, la demanderesse fait valoir qu’elle n’était pas en mesure d’introduire son action fondée sur le paragraphe 36(1) avant d’avoir accès aux documents et/ou au contenu des conventions d’acquisition, car elle devait connaître le genre de difficultés et de dommage qui étaient en cause.

 

[35]           Cette affirmation m’échappe étant donné que la demanderesse a engagé son action le 15 août 2008, avant que ne lui soient communiqués les documents et avant qu’elle n’entreprenne le processus de communication préalable. La demanderesse était donc tout à fait en mesure de déposer un recours en vertu du paragraphe 36(1) sans avoir en main les conventions, montrant de la sorte que, même si elle n’avait pas connaissance des documents ni de leur contenu, ni de ce qui pourrait ressortir du processus de communication préalable, cela ne l’empêchait nullement de déposer un recours aux termes du paragraphe 36(1).

 

[36]           La position adoptée par la demanderesse dans la présente requête est également contredite par la mise en demeure du 10 avril 2006, rédigée par ses avocats, où l’on explique ce que l’on sait des activités de la défenderesse et où l’on menace d’engager [traduction] « des poursuites judiciaires immédiates contre DSI Canada et contre chacun de ses administrateurs personnellement devant la Cour fédérale du Canada pour contrefaçon de brevet et de marque de commerce ainsi que pour violation de la Loi sur la concurrence ».

 

[37]           Le contre‑interrogatoire de M. Hedrick, mené pour le compte de la demanderesse, montre aussi que la demanderesse avait déjà connaissance des trois conventions, ce qui, combiné à la lettre du 10 avril 2006, donne à penser que la demanderesse était au courant de l’existence des conventions et des conséquences qu’elles pouvaient avoir pour elle. Elle a voulu se dispenser d’une action en justice et exploré de possibles accords de licence, mais, manifestement, elle avait pleinement pris conscience le 10 avril 2006 de ce qu’elle considérait comme une violation de la Loi sur la concurrence de la part des défendeurs, et elle menaçait d’en référer à la justice.

 

[38]           Au vu de la preuve, je suis convaincu que, même si la règle de la possibilité de découvrir le dommage était applicable au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence, le recours de la demanderesse aux termes du paragraphe 36(1) serait quand même prescrit.

 

Action continue

 

[39]           Deuxièmement, la demanderesse tente d’esquiver l’application du paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence en soutenant que la défenderesse a fait naître une cause d’action continue, ou a commis une infraction continue, c’est‑à‑dire que le « comportement » dont il est question au paragraphe 36(4) est permanent, de sorte que la défense de prescription ne saurait s’appliquer. Plus précisément, la demanderesse soutient que les conventions d’acquisition envisagent divers types d’actes qui se maintiennent dans la durée (conventions de non‑concurrence, par exemple) de sorte que le comportement fautif se poursuit et fait obstacle à la prescription.

 

[40]           Je ne crois pas que ce raisonnement soit conciliable avec l’analyse faite par la juge Snider dans la décision Servier, précitée, ni avec les recommandations formulées par la juge Gauthier dans la décision Eli Lilly, précitée, où l’on peut lire, au paragraphe 745, que « le comportement postérieur à l’entente n’est pas pertinent aux fins d’établir s’il y a eu infraction et ne peut donc l’être pour ce qui concerne les délais de prescription prévus au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence ».

 

[41]           La jurisprudence montre qu’une infraction continue requiert une succession ou une répétition d’infractions distinctes de même caractère ou de même genre. Voir la décision Province of Manitoba c Manitoba Human Rights Commission, Galbraith and Lylyk, [1983] MJ No 413 (CBR), aux paragraphes 40 à 42; conf par [1983] MJ No 223 (CA Man) : MR volume 6, onglet 25; R c Rutherford, [1990] OJ No 136 (CA Ont) : MR volume 7, onglet 37; et R c Pickles, [2004] OJ No 662 (CA Ont) : MR volume 7, onglet 36.

 

[42]           En l’espèce, nous n’avons pas affaire à une succession ou une répétition de l’infraction visée au paragraphe 45(1) de la Loi sur la concurrence. L’allégation porte sur une infraction unique, qui se produit au moment où les ententes sont conclues et dont les suites ou conséquences sont continues. Le fait que les conventions d’acquisition puissent contenir des éléments divers tels que des conventions de non‑concurrence ne change rien à ce constat fondamental. L’ensemble des éléments constitue l’infraction prévue au paragraphe 45(1), comme le reconnaissent les propres précisions communiquées par la demanderesse.

 

[43]           Comme le montrent les précédents, ce ne sont pas les suites continues d’un complot, d’un accord ou d’un arrangement qui ouvrent droit à un recours en vertu du paragraphe 36(1) de la Loi sur la concurrence. Le délai de prescription prévu par le paragraphe 36(4) repose sur un « comportement » – c’est‑à‑dire dans le cas présent le complot ou l’entente – et non sur ses suites.

 

[44]           Même si la juge Gauthier a admis, dans la décision Eli Lilly, précitée, qu’un comportement contraire à la partie VI de la Loi sur la concurrence pourrait « prendre la forme d’un incident isolé ou être de nature permanente », selon l’infraction dont il s’agit, cela ne change pas la distinction à faire entre l’infraction (le « comportement » aux fins du paragraphe 36(4)) et ses suites ou conséquences, et c’est l’infraction dans le cas présent qui constitue le point de départ du délai de prescription. Une infraction continue aux termes de la partie VI de la Loi sur la concurrence nécessiterait des actes permanents constituant par eux‑mêmes une infraction aux termes de la partie VI, et l’on n’a pas la preuve de tels actes dans la présente affaire.

 

[45]           En l’espèce, l’infraction alléguée prévue par l’article 45 était complète à la date de la conclusion de la convention ou des conventions d’acquisition en question, et les suites permanentes qu’elles ont pu avoir ne prorogent pas le délai de prescription fixé par le paragraphe 36(4). Comme la défenderesse le fait observer, si la cause d’action dont parle le paragraphe 36(1) persistait aussi longtemps que les suites et conséquences du comportement prohibé par l’article 45 de la Loi sur la concurrence, le délai de prescription prévu par le paragraphe 36(4) serait illusoire.

 

Préjudice continu

 

[46]           Troisièmement, la demanderesse tente de se soustraire aux conséquences du délai de prescription établi par le paragraphe 36(4) en disant que ce délai se poursuit aussi longtemps que la demanderesse subit un préjudice par suite du comportement reproché. Aucun précédent intéressant les circonstances de la présente affaire n’est invoqué à l’appui de cet argument et, selon moi, c’est une proposition qui va directement à l’encontre des principes et précédents discutés précédemment.

 

Conclusions

 

[47]           À mon avis donc, la défenderesse a établi la pertinence d’un jugement sommaire pour ce qui concerne la réclamation de la demanderesse fondée sur les paragraphes 36(1) et 45(1) de la Loi sur la concurrence visant les pertes et dommages subis. Aucune véritable question litigieuse n’est soulevée parce que le délai de prescription applicable en vertu du paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence a expiré avant que l’action ne soit engagée le 15 août 2008.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.                  La réclamation de la demanderesse visant l’obtention d’une réparation pour les pertes et dommages subis sur le fondement du paragraphe 36(1) de la Loi sur la concurrence est rejetée;

2.                  Les parties pourront s’adresser à la Cour sur la question des dépens. Elles devront le faire dans un premier temps par écrit.

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T‑1270‑08

 

INTITULÉ :                                      GARFORD PTY LTD.

 

                                                                                                                           demanderesse

                                                            ‑   et   ‑

 

                                                            DYWIDAG SYSTEMS INTERNATIONAL et autres

 

                                                                                                                           défendeurs

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :          Les 7 et 8 septembre 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            MONSIEUR LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 6 octobre 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

P. Bradley Limpert                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Christina Cupone Settimi

 

Heather E.A. Watts                                                                POUR LES DÉFENDEURS

Robert J.C. Deane

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Cameron MacKendrick LLP                                                  POUR LA DEMANDERESSE

Droit de la propriété intellectuelle

Toronto (Ontario)

 

Deeth Williams Wall LLP                                                       POUR LES DÉFENDEURS

Avocats

Toronto (Ontario)

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