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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20100921

Dossier : IMM-6669-09

Référence : 2010 CF 945

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 21 septembre 2010

En présence de madame la juge Heneghan

 

ENTRE :

SHPETIM LUSHNJANI

demandeur

 

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Monsieur Shpetim Lushnjani (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision du 9 décembre 2009 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié au sens de la Convention ou celle de personne à protéger, au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 (la Loi).

[2]               Le demandeur, un citoyen de l’Albanie, a présenté une demande d’asile au motif qu’il est une personne à protéger. Il prétend être menacé par des membres de sa famille, en particulier ses frères, du fait de sa situation personnelle. Le demandeur a entretenu une relation amoureuse avec sa nièce, la fille d’une de ses sœurs aînées, et il a eu un enfant avec elle.

 

[3]               Le demandeur allègue que ses frères l’ont attaqué à la fin du mois de mars 2006 dans la maison de sa mère à Elbasan. À cette époque, son fils avait environ 5 ans et vivait avec sa mère à Durres, à environ 85 km d’Elbasan. Craignant pour sa vie, le demandeur s’est rendu dans un orphelinat à Durres dans l’espoir d’y trouver un refuge pour son fils, mais on n’a pas voulu accueillir le garçon. Le demandeur a donc amené sa nièce et son fils à la Croix-Rouge albanaise à Tirana, capitale de l’Albanie, située entre Durres et Elbasan.

 

[4]               Le demandeur est retourné à Elbasan, où il est demeuré chez un ami pendant près de trois mois. Avec l’aide d’un passeur, il s’est ensuite enfui en Italie. Il est arrivé dans ce pays le 7 juillet 2006, mais il n’a pas demandé l’asile, car un de ses frères vivait en Italie et le demandeur craignait qu’il ne le trouve et ne lui fasse du mal.

 

[5]               Environ trois mois après son arrivée en Italie, le demandeur a obtenu un faux passeport italien. Muni de celui-ci, il est entré au Canada le 12 octobre 2006 et a présenté une demande d’asile à titre de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger. La Commission a rejeté la demande au motif que le demandeur n’était pas crédible. Selon la Commission, le demandeur n’a pas réussi à établir qu’il avait des frères et sœurs en Albanie, exception faite d’une sœur dont il a pu prouver l’existence. La Commission a conclu que le fait que le demandeur n’ait pas présenté de demande d’asile en Italie témoignait d’un manque de crédibilité et que son comportement révélait l’absence d’une crainte subjective de retourner en Albanie. De plus, la Commission a conclu que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État en Albanie.

 

[6]               La norme de contrôle applicable à la décision de la Commission est celle de la décision raisonnable; voir Dunsmuir c New Brunswick, [2008] 1 RCS 190. Cette norme s’applique aux conclusions de fait de la Commission qui mettent essentiellement en jeu des questions mixtes de fait et de droit. Le demandeur n’a fait mention d’aucune erreur de droit ou question d’équité procédurale.

 

[7]               À mon avis, compte tenu du dossier, du témoignage du demandeur à l’audience et des motifs de la décision, la demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

 

[8]               La Commission a tiré des conclusions contradictoires qui minent sa conclusion ultime selon laquelle le demandeur n’est pas un réfugié au sens de la Convention ou une personne à protéger.

 

[9]               La principale conclusion de la Commission est que le demandeur n’a pas de frères. L’existence des frères est un élément essentiel à l’allégation du demandeur selon laquelle il sera blessé, voire tué, s’il retourne en Albanie.

 

[10]           Par contre, la Commission s’est fondée sur l’existence d’un frère en Italie pour rejeter l’explication du demandeur concernant le fait qu’il n’a pas présenté de demande d’asile dans ce pays.

 

[11]           L’évaluation négative quant à la crédibilité du demandeur est le point central de la décision défavorable de la Commission. La conclusion au regard de la crédibilité ne satisfait pas à la norme de la raisonnabilité, compte tenu du dossier dont disposait la Commission.

 

[12]           En conclusion, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour que celui-ci statue à nouveau sur l’affaire. Il n’y a aucune question à certifier.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l’affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour que celui-ci statue à nouveau sur l’affaire. Il n’y a aucune question à certifier.

 

« E. Heneghan »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Stéphanie Champagne


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6669-09

 

INTITULÉ :                                      SHPETIM LUSHNJANI c

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 15 septembre 2010

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LA JUGE HENEGHAN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 21 septembre 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Patrick Roche

 

POUR LE DEMANDEUR

Ada Mok

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Patrick Roche

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

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