Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                      

 

Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court

 


Date : 20100805

Dossier : IMM-6146-09

Référence : 2010 CF 805

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

En présence de madame la juge Bédard

 

ENTRE :

GYAN KAUR

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour statue sur une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), en vue d’obtenir le contrôle judiciaire d’une décision en date du 5 novembre 2009 par laquelle un agent d’immigration a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée au Canada par la demanderesse.

 

L’HISTORIQUE

[2]               Âgée de 74 ans, la demanderesse est une citoyenne de l’Inde. Elle a été une femme au foyer toute sa vie. Elle est arrivée au Canada en 2001, après le décès de son mari. Elle a quatre enfants qui se trouvent tous présentement au Canada et dont deux ont obtenu le droit d’asile et sont devenus des citoyens canadiens. Les deux autres enfants demeurent illégalement au Canada étant donné que leur demande d’asile a été refusée.

 

[3]               En février 2002, la demanderesse a demandé l’asile au motif qu’elle craignait d’être persécutée en raison de sa nationalité sikhe. Sa demande a été refusée en janvier 2004. Le 1er septembre 2004, la demanderesse a soumis une première demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, qui a été actualisée en octobre 2007, et qui était fondée sur les risques et les difficultés auxquels elle serait exposée si elle devait retourner en Inde. Elle affirmait craindre d’être persécutée en raison de sa nationalité sikhe et elle invoquait les difficultés qu’elle subirait si elle devait être séparée de sa famille advenant le cas où elle devrait quitter le Canada.

 

[4]               Le 9 janvier 2008, l’agent chargé de l’examen des risques avant renvoi (ERAR) a conclu que les considérations d’ordre humanitaire invoquées par la demanderesse ne justifiaient pas de la dispenser, pour des motifs d’ordre humanitaire, de l’obligation d’obtenir un visa de résident permanent avant de venir au Canada. Une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision a été rejetée par la Cour fédérale le 21 mai 2008 (IMM-689-08).

 

[5]               Le 18 septembre 2009, la demanderesse a présenté au Canada une deuxième demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. C’est cette demande qui est à l’origine de la décision présentement à l’examen.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE

[6]               La demanderesse a été déboutée le 5 novembre 2009 de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Dans sa décision, l’agent d’immigration a conclu que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle s’était suffisamment intégrée dans la collectivité et qu’elle ne subirait pas de difficultés inusitées, excessives ou injustifiées si elle devait demander en Inde un visa de résidence permanente.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[7]               La demanderesse allègue que l’agent a commis trois erreurs susceptibles de révision :

a)      Ses conclusions et ses déductions ne sont pas étayées par la preuve et ne reposent que sur des spéculations.

 

b)      Il n’a pas tenu compte de la situation personnelle de la demanderesse et a par conséquent rendu sa décision sans tenir compte de ces éléments de preuve.

 

c)      Il n’a pas suffisamment motivé sa décision.

 

[8]               Le défendeur soutient que l’appréciation que l’agent a faite de la preuve était raisonnable et ajoute que l’agent a bel et bien tenu compte de la situation personnelle de la demanderesse malgré le fait qu’il ne mentionne pas chacun des éléments de preuve dans sa décision. 

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[9]               Il est de jurisprudence constante que la norme de contrôle applicable à une décision relative à une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire est la norme de la décision raisonnable (Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9; Kisana (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189).

 

[10]           La même norme s’applique à l’appréciation que l’auteur de la décision fait de la preuve (Dunsmuir; Ndam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 513; Martinez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 798). La cour ne doit pas réévaluer la preuve ou les facteurs examinés par l’auteur de la décision ou remplacer l’appréciation qu’il a faite de la preuve par la sienne à moins que l’auteur de la décision ait commis des erreurs grossières ou tiré des conclusions de fait abusives (Banque Royale du Canada c. Wu, 2010 CAF 144). Le rôle qui incombe à la Cour lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable est énoncé dans l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47 :

La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité.  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

 

[11]           Bien que l’omission de l’auteur de la décision d’analyser des éléments de preuve pertinents donne à penser qu’il a tiré une conclusion de fait erronée, son défaut de mentionner et d’aborder des éléments de preuve pertinents ou de traiter des principaux points en litige est également susceptible de révéler le caractère insuffisant des motifs exposés (Malveda c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 447). La question de la suffisance des motifs soulève une question d’équité procédurale et la décision est, à cet égard, elle est assujettie à la norme de la décision correcte (Adu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 565; Thomas c. Canada, 2007 CF 838; Canada (Procureur général) c. Fetherston, [2005] A.C.F. no 544).

 

L’ANALYSE

[12]           Après avoir examiné la décision de l’agent d’immigration et les éléments dont il disposait, j’estime qu’il a omis de tenir compte de la situation personnelle de la demanderesse et qu’il a par conséquent rendu sa décision sans égard à la preuve. L’agent n’a par ailleurs pas suffisamment motivé sa décision.

 

[13]           En vertu de l’article 25 de la Loi, le ministre a le pouvoir discrétionnaire d’accorder une dispense à un étranger dans des circonstances exceptionnelles.

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un

étranger se trouvant au Canada qui est interdit

de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger; il peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.

25. (1) The Minister must, on request of a

foreign national in Canada who is inadmissible

or who does not meet the requirements of this

Act, and may, on request of a foreign national

outside Canada, examine the circumstances

concerning the foreign national and may grant

the foreign national permanent resident status

or an exemption from any applicable criteria or

obligations of this Act if the Minister is of the

opinion that it is justified by humanitarian and

compassionate considerations relating to the

foreign national, taking into account the best

interests of a child directly affected.

 

[14]              Lorsqu’il est saisi d’une demande d’établissement fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée au Canada en vertu de l’article 25, l’agent d’immigration doit se conformer aux lignes directrices ministérielles applicables, en l’occurrence le Guide l’immigration IP5 – Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire, un guide établi par le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration du Canada qui fournit des lignes directrices sur ce qu’il faut entendre par motifs d’ordre humanitaire. Voici ce qu’on y trouve, au paragraphe 5.1 :

5.1 Motifs d’ordre humanitaire

Il incombe au demandeur de prouver au décideur que son cas particulier est tel que la difficulté de devoir obtenir un visa de résident permanent de l’extérieur du Canada serait

(i)      soit inhabituelle et injustifiée;

(ii)    soit excessive.

Le demandeur peut exposer les faits qu’il juge pertinents, quels qu’ils soient.

5.1 Humanitarian and Compassionate Grounds

Applicants bear the onus of satisfying the decision-maker that their personal circumstances are such that the hardship of having to obtain a permanent resident visa from outside of Canada would be:         

(i)    unusual and undeserved or

(ii) disproportionate.

Applicants may present whatever facts they believe are relevant.   

 

 

[15]              Le Guide IP5 définit ensuite ce qu’il faut entendre par difficulté « inhabituelle et injustifiée » et « difficulté excessive ». Il précise, aux paragraphes 6.7 et 6.8 :

6.7 Difficulté inhabituelle et injustifiée

On appelle difficulté inhabituelle et injustifée :

• la difficulté (de devoir demander un visa de résident permanent hors du Canada) à laquelle le demandeur s’exposerait serait, dans la plupart des cas, inhabituelle ou, en d’autres termes, une difficulté non prévue à la Loi ou à son Règlement; et

• la difficulté (de devoir demander un visa de résident hors du Canada) à laquelle le demandeur s’exposerait serait, dans la pluparts des cas, le résultat de circonstances échappant au contrôle de cette personne.

6.8 Difficultés démesurées

Des motifs d’ordre humanitaire peuvent exister dans des cas n’étant pas considérés comme « inusités ou injustifiés », mais dont la difficulté (de présenter une demande de visa de résident permanent à l’extérieur de Canada) aurait des répercussions disproportionnées pour le demandeur, compte tenu des circonstances qui lui sont propres.

 

6.7 Unusual and undeserved hardship

Unusual and undeserved hardship is:

•    the hardship (of having to apply for a permanent resident visa from outside of Canada) that the applicant would have to face should be, in most cases, unusual, in other words, a hardship not anticipated by the Act or Regulations; and

•    the hardship (of having to apply for a permanent resident visa from outside of Canada) that the applicant would face should be, in most cases, the result of circumstances beyond the person’s control

6.8    Disproportionate hardship

Humanitarian and compassionate grounds may exist in cases that would not meet the "unusual and undeserved" criteria but where the hardship (of having to apply for a permanent resident visa from outside of Canada) would have a disproportionate impact on the applicant due to their personal circumstances

[16]              La demanderesse fonde sa demande sur les liens familiaux qu’elle possède au Canada, sur son absence de liens familiaux en Inde et sur les difficultés qu’elle subirait si elle devait retourner en Inde compte tenu de sa situation personnelle. La demanderesse a exposé de la manière suivante les particularités de sa situation personnelle :

 

  1. Elle est une femme âgée de 73 ans (maintenant 74 ans);
  2. Elle est incapable de subvenir à ses besoins en Inde : son mari est mort en 2001; elle n’a aucune expérience de travail et a très peu d’instruction; sa situation financière est précaire; elle n’a pas de maison en Inde et elle n’a plus de famille en Inde;
  3. Le système de soins pour les personnes âgées est sous‑développé en Inde et elle ne recevrait pas les soins et le soutien financier nécessaires;
  4. Ses quatre enfants vivent au Canada. Ils cohabitent tous les cinq dans le même appartement où ils s’entraident;
  5. Sa fille a présenté en 2007 une demande de parrainage qui est toujours à l’examen.

 

[17]              L’agent a abordé de façon très succincte la question des difficultés :

 

[traduction]

Je ne crois pas que cette personne subirait des inconvénients inhabituels, injustifiés ou excessifs si elle devait présenter sa demande de résidence permanente à l’extérieur du Canada ainsi que le prévoit la Loi sur l’immigration canadienne. Les difficultés auxquelles elle serait exposée découlent directement de son désir de demeurer illégalement au Canada sans les documents appropriés; c’est aussi simple que cela […]

 

 

[18]              L’agent ne s’est fondé que sur une seule considération pour tirer sa conclusion au sujet des difficultés : les difficultés auxquelles la demanderesse pourrait être exposée sont la conséquence de ses propres gestes. Il n’a pas abordé la question de savoir si les difficultés en question auraient « des répercussions disproportionnées pour [la demanderesse], compte tenu des circonstances qui lui sont propres ». Je suis d’avis que l’agent n’a pas tenu compte des circonstances qui étaient propres à la demanderesse et qui constituaient un élément essentiel de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. L’agent d’immigration a toute latitude pour décider de la valeur à accorder aux circonstances personnelles soulevées par le demandeur, mais il ne peut ignorer la situation personnelle du demandeur.   

 

[19]           Bien que l’agent soit présumé avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve dont il disposait et bien qu’il ne soit pas nécessaire qu’il mentionne chacun des éléments de preuve dans ses motifs (Florea c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 598 (C.A.F.), sa décision ne peut être confirmée s’il ignore des éléments de preuve pertinents (Litke c. Canada (Ressources humaines et Développement social), 2008 CAF 366. Dans le jugement Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 1425, au paragraphe 17, le juge Evans souligne que « plus la preuve qui n’a pas été mentionnée expressément ni analysée dans les motifs de l’organisme est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que l’organisme a tiré une conclusion de fait erronée sans tenir compte des éléments dont il [disposait] ».

 

[20]           Dans la partie de sa décision consacrée à l’analyse, l’agent cite certaines des circonstances propres à la demanderesse que celle-ci avait invoquées à l’appui de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, mais il ne les aborde pas lorsqu’il examine la question des difficultés. Dans un arrêt très récent, la Cour d’appel fédérale a réaffirmé l’obligation qu’a l’agent d’examiner les circonstances personnelles évoquées dans une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire :

 

[28]                  Au début de ses motifs, l’agente déclare qu’elle a examiné la demande CH des appelants [traduction] « suivant le critère des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives », (décision CH, idem). Il est acquis aux débats qu’il s’agit du critère applicable.

 

[…]

 

[30]                  L’agente ne s’est jamais penchée sur la question essentielle soulevée par la demande CH, celle de savoir si M. Hinzman ferait face à des difficultés excessives s’il retournait aux États‑Unis indépendamment de l’existence d’une loi d’application générale et de la protection de l’État et malgré les autres conclusions tirées par l’agente sur la différence de traitement et les garanties d’une procédure régulière [la question essentielle] (voir les arguments formulés par l’avocat au soutien de la demande CH, dossier d’appel, volume 1, aux pages 125 et suivantes).

 

[37]                  Les politiques et lignes de conduite judiciaires élaborées par le ministre en ce qui concerne le traitement des demandes visant à obtenir la permission de demeurer au Canada pour des raisons d’ordre humanitaire prévoient clairement que, lorsqu’ils examinent une demande, les agents doivent « indiquer que tous les facteurs ont été analysés et expliquer le poids attribué à chacun et pourquoi » avant de procéder « à une évaluation comparée des circonstances d’ordre humanitaire favorables mentionnées et des faits qui jouent en défaveur de l’octroi d’une dispense » (Guide sur le traitement des demandes présentées au Canada, chapitre 5, Demande présentée au Canada par des immigrants pour des motifs d’ordre humanitaire, Appendice B).

 

[…]

 

[40]         […]  l’agente CH devait tenir compte de l’ensemble de la situation des appelants, et notamment des convictions et motivations de M. Hinzman, avant de décider s’il existait des raisons suffisantes pour rendre une décision CH favorable (idem, chapitre 5, section 11.3). Or, l’agente ne l’a pas fait. (Hinzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CAF 177)

 

[21]               Dans le cas qui nous occupe, l’agent a commis la même erreur que celle que l’agent d’ERAR avait commise dans l’affaire Hinzman, précitée, et, en omettant de tenir compte de la situation personnelle de la demanderesse, il a rendu sa décision en ne tenant pas compte d’éléments de preuve qui constituaient un aspect essentiel de la demande.

[22]              Ce qui m’amène à la question du caractère suffisant des motifs. Je suis d’avis que l’agent n’a pas suffisamment motivé sa décision.

 

[23]              En omettant d’examiner les circonstances personnelles invoquées par la demanderesse, l’agent a placé cette dernière dans une situation où elle ignore pourquoi l’agent n’a pas accepté les circonstances personnelles qu’elle invoque ou les raisons pour lesquelles il ne leur a accordé aucun poids. Les motifs de l’agent ne satisfont pas à la norme énoncée par la Cour suprême dans les arrêts Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817 et R. c. Sheppard, [2002] 1 R.C.S. 869.

 

[24]              Dans l’arrêt Via Rail Canada Inc. c. Office national des transports (C.A.), [2000] A.C.F. no 1685, la Cour d’appel fédérale propose des pistes utiles au sujet du concept des motifs suffisants et souligne que les motifs doivent traiter des principaux points en litige et permettre de suivre le fil du raisonnement de l’auteur de la décision 

21        L’obligation de motiver une décision n’est remplie que lorsque les motifs fournis sont suffisants. Ce qui constitue des motifs suffisants est une question qui doit être tranchée en fonction des circonstances de chaque espèce. Toutefois, en règle générale, des motifs sont suffisants lorsqu’ils remplissent les fonctions pour lesquelles l’obligation de motiver a été imposée. Pour reprendre les termes utilisés par mon collègue le juge d’appel Evans [traduction] : «[t]oute tentative pour formuler une norme permettant d’établir le caractère suffisant auquel doit satisfaire un tribunal afin de s’acquitter de son obligation de motiver sa décision doit en fin de compte traduire les fins visées par l’obligation de motiver la décision».

22        On ne s’acquitte pas de l’obligation de donner des motifs suffisants en énonçant simplement les observations et les éléments de preuve présentés par les parties, puis en formulant une conclusion. Le décideur doit plutôt exposer ses conclusions de fait et les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ses conclusions. Les motifs doivent traiter des principaux points en litige. Il faut y retrouver le raisonnement suivi par le décideur et l’examen des facteurs pertinents.

 

[25]           En l’espèce, l’agent d’immigration a omis de traiter des principaux points en litige et sa décision ne peut donc pas être confirmée.  

 

[26]           Un dernier commentaire. Les principales circonstances personnelles invoquées à l’appui de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire avaient déjà été soulevées par la demanderesse dans sa première demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, qui avait été rejetée par l’agent d’ERAR le 9 janvier  2008. Cette décision est exposée clairement et l’agent d’ERAR y traite de chacun des facteurs cités par la demanderesse et explique le poids qu’il accorde à chacun d’entre eux. La décision faisant l’objet du présent contrôle ne fait pas mention de la première décision relative aux motifs d’ordre humanitaire, sauf pour souligner qu’il s’agissait de la deuxième demande présentée par la demanderesse et que la première demande avait été rejetée. Je n’ai pas à décider si la deuxième demande aurait dû être rejetée au motif que la demanderesse y invoquait des éléments qui avaient déjà été examinés, mais il est indubitable que la décision faisant l’objet du présent contrôle comporte des erreurs qui n’ont pas été commises par l’agent d’ERAR qui a examiné la première demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

  

[27]           Comme la certification d’aucune question n’a été proposée en vertu de l’alinéa 74d) de la the Loi, aucune question ne sera donc certifiée.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.      La décision de l’agent d’immigration est annulée;

2.      L’affaire est renvoyée à Citoyenneté et Immigration Canada pour être tranchée par un autre agent d’immigration;

3.         Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

                                                                                                      « Marie-Josée Bédard »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6146-09

 

INTITULÉ :                                       GYAN KAUR

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 22 juillet 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LA JUGE BÉDARD

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 5 août 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Andrea Snizynsky

 

POUR LA DEMANDERESSE

Thi My Dung Tran

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Andrea Snizynsky

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.