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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20100902

Dossier : IMM-6543-09

Référence : 2010 CF 874

Toronto (Ontario), le 2 septembre 2010

En présence de monsieur le juge Hughes

 

 

ENTRE :

HUGO REYNA FLORES

KARLA MARIA VAZQUEZ MONTIEL

ET FRIDA YOSELIN REYNA VAZQUEZ (MINEURE)

demandeurs

 

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Les demandeurs sont un homme, son épouse et un enfant mineur, tous citoyens mexicains. Leur demande d’asile a été rejetée le 4 décembre 2009 par une décision d’un commissaire de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Un contrôle judiciaire de cette décision est demandé par les demandeurs. Pour les raisons suivantes, je rejette cette demande, et il n’y a aucune question à certifier.

[2]               Le demandeur principal est le mari Hugo Reyna Flores. Au Mexique, il travaillait comme journaliste pour une chaîne de télévision, la Televisa. Il travaillait toujours derrière la caméra. Le gros de son travail avait trait à des programmes dans le cadre desquels M. Ramirez, journaliste devant la caméra, travaillait comme journaliste enquêteur. Parmi les éléments de preuve non contestéé, il y a les événements suivants :

-         vers le mois de février 2007, Ramirez a commencé à faire enquête sur des liens entre des trafiquants de stupéfiants et les autorités gouvernementales;

-         vers le début du mois d’avril 2007, Ramirez a reçu, par téléphone, des menaces de mort;

-          le 6 avril 2007, Ramirez a été assassiné;

-         le 9 mai 2007, l’avocat mexicain du demandeur principal a demandé à la Cour supérieure de justice du Mexique de protéger ce dernier dans le cadre d’un programme de protection des témoins. Le 23 mai 2007, cette demande a été rejetée au motif qu’elle n’était pas fondée;

-         le 24 mai 2007, le demandeur principal a été agressé et son épouse a été violée par deux personnes non identifiées;

-         le 12 juin 2007, les demandeurs sont entrés au Canada et ont demandé l’asile.

 

[3]               Les éléments de preuve controversés comprennent l’affirmation du demandeur selon laquelle il travaillait étroitement avec M. Ramirez, et par conséquent, a commencé à recevoir des appels de menaces. Le demandeur principal prétend que, après l’assassinat de M. Ramirez, il est allé demander à la police de le protéger. La police lui a dit que, s’il désignait deux personnes qui étaient alors en détention comme ayant participé à l’assassinat, les choses seraient plus simples pour lui et on lui accorderait probablement de la protection. Le mobile des deux assaillants/violeurs n’est pas clair, le demandeur principal soutient que les personnes impliquées dans l’assassinat de Ramirez voulaient lui transmettre un message. Le demandeur a soutenu qu’en tant que journaliste, lui et son épouse étaient particulièrement exposés à la persécution et qu’il n’y avait pas de protection de l’État adéquate.   

 

[4]               Le commissaire a exposé, en 88 paragraphes, les motifs détaillés du rejet de la demande. Le commissaire a estimé que le témoignage controversé soumis par le demandeur principal n’était pas crédible et n’était pas vraiment corroboré. Le commissaire a conclu, au paragraphe 75, qu’un examen attentif des éléments de preuve a mené à la conclusion que M. Ramirez avait été tué d’un coup de feu, mais qu’il n’y avait aucune preuve convaincante qu’une autre personne que M. Ramirez était menacée. Au paragraphe 55, le commissaire a résumé ses conclusions selon lesquelles le demandeur principal a créé une histoire à partir d’une série de faits afin de donner du poids, par embellissement, à la demande d’asile. Quant à l’agression et au viol, le commissaire a conclu, au paragraphe 83, que les demandeurs avaient attendu seulement quelques jours après l’événement pour s’enfuir au Canada sans donner à la police l’occasion de s’occuper de l’affaire.

 

[5]               L’avocat des demandeurs a soutenu que la décision devrait être annulée pour :

-         partialité;

-         conclusions erronées quant à la crédibilité;

-         conclusion erronée quant à l’absence de protection de l’État.

 

[6]               Concernant la partialité, on prétend que le commissaire a estimé à tout moment que le témoignage du demandeur principal manquait de crédibilité, et a estimé que de nombreux points importants n’étaient pas corroborés. On prétend que, avant l’audience, le commissaire avait réfléchi à chaque fondement possible du refus de la demande.

 

[7]               Je ne trouve aucun fondement à l’argument de partialité. Le seul fondement soulevé est la conclusion constante selon laquelle le témoignage du demandeur principal n’était pas crédible et manquait de corroboration. Il est dans les fonctions du commissaire de déterminer si un témoignage est crédible si certains arguments sont corroborés. Le simple fait que plusieurs de ces conclusions soient défavorables à un demandeur ne peut, en soi, mener à une conclusion de partialité. Ce motif n’est pas fondé.

 

[8]               Le deuxième motif soulevé par l’avocat du demandeur vise les conclusions de manque de crédibilité et de manque de corroboration. Selon les arguments de l’avocat, si la crédibilité était en cause, on devrait confronter le demandeur directement aux éléments de preuve manquant de crédibilité et lui demander de donner une explication. Quant à la corroboration, il a soutenu que depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi en 2001, la corroboration n’est pas nécessaire.

 

[9]               Quant à la première question soulevée, la confrontation du demandeur à son témoignage, j’ai examiné le dossier du tribunal, notamment la transcription de l’audience. J’estime qu’on a donné au demandeur amplement l’occasion d’expliquer son témoignage, et que le commissaire lui a posé des questions sur les points importants de son témoignage afin de lui permettre de s’expliquer. Quant à la corroboration, l’avocat des demandeurs a soutenu que, particulièrement depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi en 2001, la corroboration n’est pas essentielle. Cependant, lorsqu’il y a des doutes sur les éléments de preuve soumis, la Commission peut demander une corroboration ou de tenir compte d’un manque de corroboration dans le cadre de l’évaluation de la crédibilité. J’estime que la Commission n’a commis aucune erreur susceptible de révision dans son appréciation de la preuve, et que les conclusions qu’elle a tirées étaient raisonnables.

 

[10]           Troisièmement, en ce qui concerne la protection de l’État, les motifs de la commission démontrent que le commissaire n’a pas commis d’erreur quant au droit applicable à la question du caractère adéquat de la protection de l’État. Selon l’avocat du demandeur, le commissaire n’a pas suffisamment tenu compte de la vulnérabilité particulière des journalistes au Mexique, et plus particulièrement de la vulnérabilité du demandeur principal. Toutefois, le commissaire a estimé que les prétentions du demandeur principal quant à sa vulnérabilité personnelle à titre de journaliste étaient exagérées et n’étaient pas crédibles. J’estime que la décision du commissaire quant à la protection de l’État était correcte en droit, et que ses conclusions concernant le statut personnel du demandeur principal étaient raisonnables.

 

[11]           J’estime que rien ne justifie l’annulation de la décision faisant l’objet du présent contrôle. Aucun avocat n’a demandé la certification d’une question, et je ne vois aucune raison de le faire.

 

 

JUGEMENT

 

Pour les motifs qui précèdent :

 

LA PRÉSENTE COUR ORDONNE :

1.      la demande est rejetée;

2.      il n’y a aucune question à certifier;

3.      aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Claude Leclerc, LL.B.

 



COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6543-09

                                                           

 

 

INTITULÉ :                                       HUGO REYNA FLORES ET COLL. c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 2 septembre 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT               LE JUGE HUGHES

ET JUGEMENT :                             

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 2 septembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Alesha Green                                                                            POUR LES DEMANDEURS

 

Alexis Singer                                                                            POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS :

 

Green, Willard                                                    

Avocat                                                                                     POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

 

Myles J. Kirvan                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

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