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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20100902

Dossier : IMM-981-10

Référence : 2010 CF 869

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 2 septembre 2010

En présence de madame la juge Tremblay-Lamer

 

 

ENTRE :

RODICA ZMEU

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée par Rodica Zmeu (la demanderesse) en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), visant le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission), datée du 28 juin 2010, dans laquelle il a été conclu que la demanderesse n’est pas une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger.

 

[2]               La demanderesse est une citoyenne de la Moldavie. Elle craint d’être persécutée par un ex‑ami de cœur qui, selon le récit de la demanderesse, l’a agressée physiquement et l’a harcelée.

 

[3]               La Commission a conclu qu’« [a]ucun élément ne prouve » que les menaces et la violence de l’ex‑ami de cœur de la demanderesse ont déjà « équiva[lu] à de la persécution ». Bien que la Commission n’eût pas douté que les incidents déclarés par la demanderesse ont bien eu lieu, elle a noté qu’avant de venir au Canada « [elle] a quitté la [Moldavie] à trois reprises et y est retournée chaque fois », y compris à partir des États‑Unis. La Commission était d’avis que ces retours « indiquent un manque de crainte fondée de persécution et que ce comportement ne correspond pas à celui d’une personne éprouvant une crainte de la sorte ».

 

[4]               De plus, la demanderesse « a omis de prouver, à l’aide d’éléments clairs et convaincants, que les autorités moldoves ne pourraient ou ne voudraient pas la protéger si elle retournait là-bas ». La seule fois où elle a demandé la protection des policiers, ils sont intervenus. La Commission a examiné une lettre du Moldovan Office of Lawyers dans laquelle il était écrit que, conformément aux lois de Moldavie, une personne souffrant de maladie mentale, comme c’est le cas pour l’ex‑ami de cœur de la demanderesse, ne peut pas être poursuivi, mais la Commission a noté qu’aucun pays ne pouvait garantir à ses citoyens une protection parfaite. La Commission était d’avis que la protection que les autorités moldoves pouvaient offrir à la demanderesse serait adéquate.

 

[5]               Premièrement, la demanderesse soutient que [traduction] « la Commission n’a pas du tout expliqué » sa conclusion au sujet du fait que le comportement de l’ex‑ami de cœur ne constituait pas de la persécution.

 

[6]               Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, à 734, 103 D.L.R. (4th) 1, la Cour suprême a accepté la définition de « persécution » comme étant la « violation soutenue ou systémique des droits fondamentaux de la personne démontrant l'absence de protection de l'État ». Comme je l’ai expliqué dans la décision Liang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 450, au paragraphe 19, « la question de savoir ce qui constitue de la persécution donne lieu à une analyse de nombreux facteurs, y compris la répétition, la gravité et la nature des incidents reprochés ».

 

[7]               À mon avis, les motifs de la Commission montrent clairement qu’elle n’était pas d’avis que la gravité des incidents impliquant l’ex‑ami de cœur de la demanderesse était telle qu’il s’agissait de « persécution ». Bien que les motifs de la Commission ne fussent pas parfaits, ils sont transparents et intelligibles et, par conséquent, adéquats.

 

[8]               Deuxièmement, la demanderesse soutient que la Commission a commis une erreur en concluant qu’elle n’avait pas de crainte de persécution en Moldavie puisqu’elle est retournée trois fois dans ce pays après avoir effectué des voyages à l’étranger, dont un long séjour aux États‑Unis. Selon la demanderesse, [traduction] « tant que la source de danger et de crainte est présente et que [la demanderesse] craint le danger [la raison pour laquelle elle a finalement quitté le pays], il n’est pas raisonnable de conclure que le seul fait que [la demanderesse] soit retournée en Moldavie soit une indication d’un manque de crainte ». Une fois de plus, je suis d’avis que la Commission pouvait raisonnablement mettre en doute la crédibilité de la demanderesse au sujet de sa crainte subjective en raison du fait qu’elle est retournée en Moldavie malgré la présence dans ce pays du persécuteur présumé. Les conclusions de la Commission n’ont été ni tirées de façon « abusive ou arbitraire », ni tirées « sans tenir compte des éléments » dont elle disposait.

 

[9]               Finalement, la demanderesse soutient que la Commission a commis une erreur en concluant que l’État de Moldavie pouvait la protéger. Selon elle, les autorités ne pouvaient pas lui donner un niveau raisonnable de protection parce que, comme elles ne pouvaient pas garder son ex‑ami de cœur en détention, elles n’avaient pas le pouvoir de l’empêcher de la persécuter.

 

[10]           À mon avis, la décision de la Commission n’est pas déraisonnable. Compte tenu du fait que les policiers ont aidé la demanderesse la seule fois où elle a demandé leur aide, la Commission pouvait conclure que la protection de l’État, même si elle est peut-être imparfaite, était raisonnablement disponible. La demanderesse laisse en fait entendre que la seule façon dont la Moldavie pourrait lui offrir une protection adéquate serait de placer son ex‑ami de cœur en détention indéfiniment. À mon avis, il ne s’agit pas d’un argument défendable. Il est très malheureux que la demanderesse puisse avoir à vivre avec un harceleur obsessif, mais la seule preuve au dossier montre que s’il la menace réellement, il est fort probable que les policiers interviendront.

 

[11]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire de la décision est rejetée.

 

 

 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-981-10

 

INTITULÉ :                                       RODICA ZMEU

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 2 septembre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              La juge Tremblay-Lamer

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 2 septembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Rezaur Rahman                                                                        POUR LA DEMANDERESSE

 

Korinda McLaine                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                               

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Rezaur Rahman Law Office                                                      POUR LA DEMANDERESSE

Ottawa (Ontario)

                                                                                               

Myles J. Kirvan                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

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