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Cour fédérale

 

Federal Court


 


Date : 20100429

Dossiers : IMM-1105-09

 IMM-1107-09

Référence : 2010 CF 471

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 29 avril 2010

En présence de madame la juge Mactavish

 

ENTRE :

ALI FARKHONDEHFALL

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Ali Farkhondehfall sollicite le contrôle judiciaire de deux décisions rendues par la même agente d’immigration. Dans la première décision, celle-ci a conclu que M. Farkhondehfall était interdit de territoire au Canada car il y avait des motifs raisonnables de croire qu’il avait été membre d’une organisation qui s’était livrée à des actes terroristes. Dans la seconde, elle a rejeté sa demande de résidence permanente parce qu’il était interdit de territoire.

 

[2]               M. Farkhondehfall allègue que le défaut de l’agente de lui fournir un document qui a joué un rôle crucial dans son analyse signifie qu’il a été privé de son droit à l’équité procédurale dans l’évaluation de son admissibilité au Canada. L’agente a également commis une erreur, dit-il, en analysant la question de l’appartenance et en concluant qu’il y avait un lien entre une organisation dont M. Farkhondehfall avait admis avoir été membre - la Société des étudiants iraniens musulmans (SEIM) - et la Mujahedeen-e-Khalq (MEK), une organisation qui figure sur la liste des entités associées au terrorisme que tient Sécurité publique Canada.

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que l’agente n’a pas commis les erreurs alléguées et, en conséquence, les demandes de contrôle judiciaire seront rejetées.

 

L’historique des procédures judiciaires

[4]               M. Farkhondehfall est citoyen iranien. Il est arrivé au Canada en 1991 et a obtenu l’asile peu après. Il a ensuite présenté une demande de résidence permanente, et celle-ci a été approuvée en principe en juin 1993.

 

[5]               M. Farkhondehfall a pris part à des entretiens avec des représentants du Service canadien du renseignement de sécurité le 17 juillet et le 29 novembre 1994. Il a aussi été interrogé par un agent d’immigration le 11 décembre 1998, et de nouveau le 14 décembre 2001. Cet agent a par la suite conclu qu’il était interdit de territoire au Canada en vertu de la division 19(1)f)(iii)(B) de la Loi sur l’immigration de 1976. M. Farkhondehfall a ensuite demandé l’exception ministérielle prévue au paragraphe 34(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR). Cette demande a été refusée, tout comme sa demande de résidence permanente.

 

[6]               M. Farkhondehfall a demandé que l’on soumette à un contrôle judiciaire le double refus de sa demande de résidence permanente et de sa demande d’exception ministérielle. Ses deux demandes de contrôle judiciaire ont été accueillies en fin de compte sur consentement, et les affaires ont été renvoyées au ministre ainsi qu’à une agente d’immigration en vue de nouvelles décisions. C’est sur ces décisions-là que portent les présentes demandes de contrôle judiciaire.

 

[7]               La Cour n’est actuellement pas saisie de la question de l’exception ministérielle. Après l’infirmation de la première décision rendue par le ministre en vertu du paragraphe 34(2), la demande d’exception ministérielle de M. Farkhondehfall a été refusée une seconde fois par le ministre, et la Cour a refusé de donner l’autorisation de soumettre cette seconde décision à un contrôle judiciaire.

 

Les instances engagées en vertu de l’article 87

[8]               Après le début des demandes de contrôle judiciaire les plus récentes de M. Farkhondehfall, le ministre a présenté une demande d’interdiction de divulgation de certains passages du dossier certifié du tribunal, conformément aux dispositions de l’article 87 de la LIPR. Selon le ministre, la divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d’autrui.

 

[9]               En réponse à la demande du ministre, M. Farkhondehfall a déposé une requête sollicitant la nomination d’un avocat spécial pour protéger ses intérêts dans chacune des instances engagées en vertu de l’article 87. J’ai décidé par la suite que l’équité et la justice naturelle n’exigeaient pas la prise d’une telle mesure pour protéger les intérêts de M. Farkhondehfall dans l’une ou l’autre des deux demandes.

 

[10]           En arrivant à cette conclusion, j’ai fait remarquer que les passages expurgés des dossiers relatifs à ces instances étaient minimes et que M. Farkhondehfall avait eu accès à la très grande majorité des renseignements qui y figuraient : voir Farkhondehfall c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1064.

 

[11]           J’ai été convaincue par ailleurs que M. Farkhondehfall avait été mis parfaitement au courant de la substance des renseignements sur lesquels s’était fondée l’agente d’immigration en concluant qu’il était interdit de territoire au Canada, ainsi qu’en rejetant sa demande de résidence permanente. J’ai aussi fait remarquer qu’une bonne part des renseignements sur lesquels l’agente s’était fondée à l’appui de la conclusion d’interdiction de territoire avaient été obtenus de M. Farkhondehfall lui-même au cours de ses entretiens avec les autorités canadiennes.

 

[12]           La demande d’interdiction de divulgation du ministre a par la suite été accueillie, en partie. J’ai été toutefois convaincue que le fait de divulguer certains passages du dossier certifié du tribunal à M. Farkhondehfall ne porterait atteinte ni à la sécurité nationale, ni à la sécurité d’autrui.

 

[13]           Même si une quantité restreinte de renseignements n’a toujours pas été divulguée à M. Farkhondehfall, ma décision sur le bien-fondé de la présente demande a été prise sans tenir compte des renseignements expurgés. La présente affaire a été tranchée sur le seul fondement du dossier public.

 

Le cadre législatif dans lequel s’inscrit la décision

[14]           Avant d’examiner les arguments que M. Farkhondehfall a invoqués, il est utile d’examiner tout d’abord le cadre législatif qui régit les conclusions d’interdiction de territoire semblables à celle dont il est question ici.

 

[15]           En l’espèce, la conclusion d’interdiction de territoire a été tirée en vertu des dispositions de l’alinéa 34(1)f) de la LIPR, dont les passages applicables sont les suivants :

34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants  :

 

[…]

 

f) être membre d'une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle est, a été ou sera l'auteur d'un acte visé aux alinéas a), b) ou c).

34. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

 

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b) or (c).

 

[16]           Lorsqu’il tire une conclusion en vertu du paragraphe 34(1) de la Loi, un agent d’immigration est également guidé par l’article 33 de la LIPR, dont le texte est le suivant :

33. Interprétation. - Les faits — actes ou omissions — mentionnés aux articles 34 à 37 sont, sauf disposition contraire, appréciés sur la base de motifs raisonnables de croire qu’ils sont survenus, surviennent ou peuvent survenir.

33. Rules of interpretation.The facts that constitute inadmissibility under sections 34 to 37 include facts arising from omissions and, unless otherwise provided, include facts for which there are reasonable grounds to believe that they have occurred, are occurring or may occur.

 

Y a-t-il eu déni du droit à l’équité procédurale dans l’évaluation de l’admissibilité de M. Farkhondehfall?

[17]           M. Farkhondehfall prétend avoir été privé de son droit à l’équité procédurale dans cette affaire parce que l’agente ne lui a pas fourni une copie du document qui, dit-il, a joué un rôle crucial dans la conclusion de cette agente selon laquelle la SEIM fait partie de la MEK, ou sert de façade à cette organisation.

 

[18]           La décision de l’agente renvoie à un document de 2002 du Département d’État des États‑Unis intitulé Patterns of Global Terrorism, dans lequel la SEIM est qualifiée de [traduction] « organisation de façade [pour la MEK] qui sert à recueillir des fonds de soutien ». Selon M. Farkhondehfall, ce document ne faisait pas partie de la série de documents que l’agente d’immigration lui a fournie à titre d’informations de base avant un entretien qui allait avoir lieu en janvier 2009. Il ajoute qu’il n’a été mis au courant de l’existence de ce document qu’au moment où il a reçu la décision de l’agente et que, pour lui, cela était inéquitable.

 

[19]           J’ai deux raisons de conclure que M. Farkhondehfall n’a pas été traité de manière inéquitable à cet égard. Tout d’abord, il est bien établi dans la jurisprudence que, hormis quelques exceptions restreintes, l’équité n’exige pas que l’on communique des documents émanant de sources publiques telles que le Département d’État des États-Unis : voir Mancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 3 C.F. 461, 161 D.L.R. (4th) 488 (C.A.F.). Patterns of Global Terrorism est un rapport annuel publié par le Département d’État des États-Unis, et il peut être facilement consulté sur le site Web du Département.

 

[20]           Deuxièmement, et ceci est plus important, M. Farkhondehfall a été mis au courant de l’existence du rapport Patterns of Global Terrorism et de son contenu par l’intermédiaire des documents que le défendeur lui a fournis avant qu’une décision soit prise en rapport avec la question de son admissibilité au Canada.

 

[21]           C’est-à-dire que l’on a fourni à M. Farkhondehfall un document américain différent, soit un « CRS Report for Congress » intitulé Foreign Terrorist Organizations. Ce document décrit un certain nombre d’organisations différentes, dont la MEK. Il y est indiqué que la SEIM est un autre nom pour la MEK et, à l’appui de cette prétention, il est fait expressément référence au rapport Patterns of Global Terrorism de 2002. Un second document figurant dans la série de documents relie lui aussi la SEIM et la MEK.

 

[22]           Le document intitulé Foreign Terrorist Organizations mentionne ensuite que la MEK se sert d’organisations de façade pour solliciter des contributions auprès d’expatriés iraniens et d’autres personnes. Là encore, le rapport Patterns of Global Terrorism est cité à l’appui de cette prétention.

 

[23]           Je ne suis donc pas convaincue que l’on a privé M. Farkhondehfall de son droit à l’équité procédurale dans la présente affaire car je suis persuadée qu’il était – ou aurait dû être - au courant de l’existence du document en litige. Je suis également persuadée qu’on lui a donné une possibilité raisonnable de présenter entièrement et équitablement ses arguments à l’agente. En conséquence, on peut aisément faire une distinction entre la présente affaire et la décision rendue dans Kablawi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 283.

 

L’agente a-t-elle commis une erreur en concluant que M. Farkhondehfall était membre de la MEK?

[24]           Le second argument de M. Farkhondehfall est que l’agente a commis une erreur en concluant qu’il était membre de la MEK. Cela oblige à examiner à la fois la conclusion de l’agente au sujet du lien entre la SEIM et la MEK et la nature et l’ampleur du rôle joué par M. Farkhondehfall au sein de chaque organisation.

 

[25]           Les deux parties conviennent selon moi que la conclusion de l’agente à propos de la question de l’appartenance est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable. Comme c’est une question mixte de fait et de droit qui est en litige, je conviens que la norme appropriée est la décision raisonnable : Poshteh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 85, [2005] A.C.F. no 381.

 

[26]           Quant au lien entre la SEIM et la MEK, il s’agit d’une question de fait. Il ressort de la jurisprudence que la question de savoir si une organisation est l’une de celles décrites au paragraphe 34(1) de la LIPR est elle aussi susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable : voir, par exemple, Omer c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 478, 157 A.C.W.S. (3d) 601 et Jalil c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 246, 52 Imm. L.R. (3d) 256.

 

[27]           La Cour, quand elle contrôle une décision en fonction de la norme de la décision raisonnable, doit tenir compte de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité du processus décisionnel et déterminer si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : voir Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47, et Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, au paragraphe 59.

 

[28]           Pour décider si une décision est raisonnable ou pas, le tribunal de contrôle doit porter attention aux motifs que présente le décideur, ou à ceux qui auraient pu être présentés à l’appui d’une décision. Dans la mesure où un tribunal administratif ne peut pas expliquer en détail certains aspects de sa décision, le tribunal de contrôle peut consulter les preuves auxquelles a fait référence le tribunal administratif en vue d’étoffer ses motifs : voir Alliance de la fonction publique du Canada c. Société canadienne des postes et Commission canadienne des droits de la personne, 2010 CAF 56, le juge d’appel Evans, s’exprimant en dissidence, mais non sur ce point, au paragraphe 164.

 

[29]           Pour conclure que M. Farkhondehfall était interdit de territoire au Canada, l’agente d’immigration devait déterminer qu’il était, ou avait été, membre d’une organisation pour laquelle il y avait des motifs raisonnables de croire qu’elle était, avait été ou serait l’auteur d’actes terroristes. Il y a dans cette conclusion trois aspects qu’il est nécessaire de commenter : le concept de l’« appartenance », la norme des « motifs raisonnables de croire » et la définition du « terrorisme ».

 

[30]           En ce qui concerne le critère de l’appartenance, il est évident qu’il n’est pas nécessaire d’être membre réel ou officiel d’une organisation – il faut plutôt interpréter ce terme de manière large : voir Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 2 C.F. 642. En outre, il y aura toujours quelques facteurs qui étayent une conclusion d’appartenance, et d’autres le contraire : voir Poshteh, au paragraphe 36.

 

[31]           La Cour suprême du Canada a décrit la norme de preuve des « motifs raisonnables de croire » dans l’arrêt Mugesera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CSC 40, [2005] 2 R.C.S. 100; il s’agit d’une norme qui « exig[e] davantage qu’un simple soupçon, mais rest[e] moins stricte que la prépondérance des probabilités applicable en matière civile ». La Cour suprême a ensuite conclu qu’il existe des motifs raisonnables dans les cas où « [l]a croyance doit […] posséder un fondement objectif reposant sur des renseignements concluants et dignes de foi » : au paragraphe 114.

 

[32]           Quant à la définition du terrorisme, l’agente a adopté la définition qui en est donnée dans l’arrêt Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, [2002] 1 R.C.S. 3, au paragraphe 96, où la Cour suprême du Canada décrit le terrorisme en ces termes :

Tout […] acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque.

 

[33]           M. Farkhondehfall reconnaît que le mot « membre », utilisé à l’alinéa 34(1)f) de la Loi, doit être interprété de manière large et libérale : voir Poshteh, aux paragraphes 27 et 28. Il dit néanmoins qu’il doit quand même y avoir quelque chose qui le relie à la MEK. À cet égard, il soutient qu’il y a une différence entre le fait d’être un simple partisan des visées politiques d’une organisation, et celui d’en être membre.

 

[34]           Toutefois, il ressort clairement d’un examen du dossier qu’il s’y trouvait de nombreuses preuves pour étayer la conclusion de l’agente selon laquelle M. Farkhondehfall était membre de la MEK. Il est évident aussi qu’une bonne part des preuves liant M. Farkhondehfall à la MEK et à la SEIM avaient été fournies par ce dernier lui-même au cours des entretiens qu’il avait eus avec les autorités canadiennes au fil des ans.

 

[35]           Dans sa demande de résidence permanente de 1991, M. Farkhondehfall a déclaré qu’il avait été partisan des [traduction] « Mujahedeen-Tehran » entre 1978 et 1981. Je crois que tous s’accordent pour dire que les « Mujahedeen-Tehran » désignent la MEK. Dans sa demande de résidence permanente, M. Farkhondehfall a ajouté ensuite qu’il avait été membre d’une organisation qu’il a plus tard confirmé être la SEIM en Inde entre 1981 et 1985, et qu’il avait soutenu cette organisation entre 1985 et 1990.

 

[36]           C’est au cours de ses divers entretiens que de sérieuses contradictions et incohérences commencent à ressortir dans le récit de M. Farkhondehfall. Par exemple, dans le premier entretien qu’il a eu avec le SCRS, il a reconnu avoir reçu une offre d’emploi de la MEK à Toronto, mais il a dit l’avoir refusée. Dans un second entretien avec le SCRS, il a nié avoir jamais reçu une telle offre, disant que sa réponse antérieure était attribuable à un [traduction] « malentendu ».

 

[37]           Les doutes quant à la crédibilité de M. Farkhondehfall ont été alimentés par sa prétention selon laquelle, même s’il avait assisté à des manifestations et à des réunions de la MEK à Toronto, et même s’il s’était présenté de temps à autre à ses bureaux (chose qu’il a plus tard niée), il ne connaissait aucun membre de la MEK à Toronto.

 

[38]           Par dessus tout, M. Farkhondehfall a admis au SCRS qu’il avait soutenu la MEK en Iran en prenant part à des manifestations, qui, dans certains cas, avaient été violentes. Son engagement auprès de la MEK en Iran avait consisté aussi à assister à des réunions, à vendre des livres et à faire des contributions pécuniaires.

 

[39]           Il ressort également du dossier que M. Farkhondehfall a indiqué que son engagement auprès de la MEK s’était poursuivi pendant son séjour en Inde, parce qu’il était membre de la SEIM. Il a donc lui-même reconnu le lien entre les deux organisations, lien qu’atteste également la preuve documentaire.

 

[40]           M. Farkhondehfall a aussi admis que, en raison de son engagement auprès de la SEIM, il avait pris part à des manifestations qui avaient tourné à la violence, mais il a nié avoir lui-même participé à des activités violentes. Il reconnaît aussi avoir vendu des journaux pour la SEIM afin d’appuyer la résistance au régime iranien, ainsi qu’avoir rendu visite à des politiciens favorables à la cause de la MEK.

 

[41]           Il convient de souligner que M. Farkhondehfall a plus tard désavoué un grand nombre de ses déclarations antérieures, imputant une fois de plus à des [traduction] « malentendus » les incohérences relevées dans la description de la nature et de l’ampleur de son engagement auprès de la MEK et de la SEIM.

 

[42]           Le dossier montre aussi que M. Farkhondehfall a continué d’entretenir des liens avec la MEK au Canada. Comme il a été dit plus tôt, il a reconnu à diverses reprises avoir reçu une offre d’emploi de la MEK à Toronto, avoir pris part à des manifestations et à des réunions de la MEK ainsi que s’être présenté de temps à autre aux bureaux de cette organisation. Il a également reconnu avoir rencontré des copartisans de la MEK à Toronto pour regarder des bandes vidéo favorables à la cause de l’organisation.

 

[43]           M. Farkhondehfall a également dit aux autorités canadiennes qu’il [traduction] « aime la MEK et la SEIM ». Il a soutenu aussi que ni l’une ni l’autre de ces organisations ne se livrent au terrorisme ou à la violence, mais qu’elles essaient plutôt d’apporter des changements politiques par des moyens pacifiques. Il a toutefois reconnu plus tôt que la MEK avait eu recours à des moyens violents pour atteindre des fins politiques.

 

[44]           Les observations de M. Farkhondehfall ont porté principalement sur le manque présumé de preuves reliant la SEIM à des activités terroristes. Tout en faisant remarquer que la MEK a été [traduction] « radiée de la liste » des entités terroristes dans plusieurs pays occidentaux, je ne crois pas que M. Farkhondehfall conteste le fait que la MEK soit une organisation terroriste au sens de l’alinéa 34(1)f) de la LIPR.

 

[45]           Pour juger que M. Farkhondehfall est interdit de territoire au Canada, l’agente d’immigration devait conclure qu’il était ou avait été membre d’une organisation dont il y avait des motifs raisonnables de croire qu’elle était, avait été ou serait l’auteur d’actes terroristes.

 

[46]           L’agente a passé en revue le dossier et elle est arrivée à la conclusion que M. Farkhondehfall tombait sous le coup des dispositions d’exclusion de l’alinéa 34(1)f) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Au vu des éléments de preuve analysés plus tôt, je suis persuadée qu’il s’agit là d’une conclusion qu’il lui était raisonnablement loisible de tirer sur la foi du dossier qu’elle avait en main. En conséquence, les demandes de contrôle judiciaire sont rejetées.

 

Certification

[47]           Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé une question à certifier, et il ne s’en pose aucune en l’espèce.


JUGEMENT

 

            LA COUR ORDONNE :

 

            1.         Les présentes demandes de contrôle judiciaire sont rejetées;

 

            2.         Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

 

« Anne Mactavish »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Claude Leclerc, LL.B

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1105-09 et IMM-1107-09

 

 

INTITULÉ :                                       ALI FARKHONDEHFALL c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 13 avril 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE MACTAVISH

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 29 avril 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Krassina Kostadinov

 

POUR LE DEMANDEUR

Laden Shahrooz

Ada Mok

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman & Aaaociates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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