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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20100621

Dossier : T-1327-05

Référence : 2010 CF 669

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 21 juin 2010

En présence de Me Roger R. Lafrenière

  Protonotaire

 

ENTRE :

WENZEL DOWNHOLE TOOLS LTD.

et WILLIAM WENZEL

demandeurs

 

et

 

NATIONAL-OILWELL CANADA LTD.,

NATIONAL OILWELL NOVA SCOTIA COMPANY,

NATIONAL OILWELL VARCO, INC.,

DRECO ENERGY SERVICES LTD.,

VECTOR OIL TOOL LTD. et FREDERICK W. PHEASEY

 

défendeurs

 

ET ENTRE :

NATIONAL-OILWELL CANADA LTD.,

NATIONAL OILWELL NOVA SCOTIA COMPANY,

DRECO ENERGY SERVICES LTD.,

VECTOR OIL TOOL LTD. et FREDERICK W. PHEASEY

 

demandeurs reconventionnels

 

et

 

WENZEL DOWNHOLE TOOLS LTD.

et WILLIAM WENZEL

 

défendeurs reconventionnels

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]  Après la tenue d’une conférence préparatoire avec les parties, mais avant que l’administrateur judiciaire puisse fixer les dates de l’instruction, les défendeurs ont présenté une requête en rejet sommaire de la demande pour un motif d’évidence et d’antériorité du brevet des demandeurs.

 

[2]  La question sous-tendant cette requête est de déterminer si la Cour devrait s’abstenir d’ordonner une séance spéciale pour entendre la requête de jugement sommaire des défendeurs à la lumière des observations présentées par les défendeurs à la conférence préparatoire, argumentation selon laquelle la question d’évidence et d’antériorité devrait être tranchée au moment de l’instruction.

 

Les faits

[3]  L’instance principale repose sur une action en contrefaçon de brevet. Le demandeur William Wenzel allègue qu’il est l’inventeur du brevet canadien no 2 206 630 (brevet 630). La demanderesse Wenzel Downhole Tools Ltd. affirme être titulaire du brevet 630 par cession. Les défendeurs nient que William Wenzel soit le véritable inventeur de l'objet de la demande relative au brevet 630. Les défendeurs ont également produit une demande reconventionnelle selon laquelle le brevet 630 est invalide pour cause d’évidence, d’antériorité ainsi que d’absence d’inventivité et d’utilité.

 

[4]  L’instance est à gestion spéciale depuis la clôture des actes de procédure en 2006 et a fait l’objet de nombreuses requêtes et ordonnances interlocutoires.

[5]  Les demandeurs ont signifié et déposé une demande de conférence préparatoire le 4 mai 2009 avec leur mémoire de conférence préparatoire, conformément à l'article 258 des Règles des Cours fédérales (les Règles). Les défendeurs ont déposé leur mémoire relatif à la conférence préparatoire le 11 juin 2009. Le mémoire des défendeurs énumère onze brevets et autres documents qui, selon eux, constituent des exemples d’antériorité, y compris le brevet américain no 1 643 338, déposé le 16 mars 1921 (Halvorsen).

 

[6]  Une conférence préparatoire a eu lieu avec les représentants des parties et leurs avocats à la Cour fédérale, à Edmonton (Alberta), le 17 juillet 2009. Les sujets abordés figurent dans les procès-verbaux détaillés rédigés par les parties et déposés le 16 septembre 2009.

 

[7]  La conférence préparatoire a commencé par un examen des requêtes prévues par les parties avant l’instruction. L’avocat des demandeurs a indiqué qu’il attendait des réponses à des questions écrites adressées à l’avocat des défendeurs et que ces réponses pourraient mener à une requête en nouvel interrogatoire préalable ou un autre recours. Les défendeurs ont reçu la directive de fournir leurs réponses d’ici le 30 septembre 2009. Les demandeurs pourraient alors prendre une décision quant au dépôt d’une requête.

 

[8]  L’avocat des défendeurs a indiqué que ceux-ci pourraient vouloir déposer une requête en vertu de l’article 237(4) afin de poursuivre un interrogatoire interrompu de Douglas Wenzel, le cédant du brevet 630. Après que l’avocat des demandeurs eut soulevé une objection concernant le caractère tardif de la demande, les défendeurs ont reçu la directive de déposer toute requête nécessaire pour exiger que Douglas Wenzel comparaisse de nouveau d’ici le 30 septembre 2009 afin de terminer son interrogatoire.

 

[9]  Les avocats des parties n’ont pas fait mention d’autres requêtes dont ils prévoyaient le dépôt avant l’instruction.

 

[10]  Après que les avocats eurent confirmé qu’il ne convenait pas en l’espèce de disjoindre les questions de responsabilité et de dommages, les questions en litige à déterminer en instruction et la détermination des témoins à être appelés par les parties ont été analysées en profondeur. Les demandeurs et des défendeurs ont convenu que la question de l’invalidité du brevet 630 pour cause d’évidence et antériorité devait être tranchée à l’instruction.

 

[11]  À la conclusion de la conférence préparatoire, les parties ont été informées que l’affaire serait soumise à l’administrateur judiciaire, qui fixerait les dates d’une instruction de 30 jours devant juge à Edmonton.

 

[12]  Une ordonnance résultant de la conférence préparatoire a été signée le 13 octobre 2009. L’ordonnance permet aux demandeurs de présenter une requête en nouvel interrogatoire préalable et permet aux défendeurs de présenter une requête au sujet de l’interrogatoire de Douglas Wenzel. L’ordonnance ne fait pas mention de quelque autre requête.

 

[13]  Le 14 décembre 2009, sans avis ou autorisation de la Cour, les défendeurs ont signifié et déposé une requête en rejet sommaire de l’action intentée par les demandeurs. Les défendeurs affirment dans leur avis de requête que l’objet que définissent les revendications dans le brevet 630 a été divulgué avant la date de la revendication dans le brevet par d’autres personnes que l’inventeur identifié, en l’occurrence dans l’exemple d’antériorité Halvorsen. Les arguments d’un rejet sommaire sont que le brevet 630 était évident ou anticipé par Halvorsen et, qu’à ce titre, le brevet 630 est invalide.

 

Position des parties

[14]  Les demandeurs soutiennent que les défendeurs devraient être liés par les observations suivantes qu’ils ont présentées à la conférence préparatoire : a) l’antériorité et l’évidence sont des questions qui devraient être tranchées lors de l’instruction; b) la seule requête anticipée des défendeurs avait trait à l’interrogatoire de Douglas Wenzel; c) en l’espèce, il ne convient pas de disjoindre les questions de responsabilité et de dommages. Les demandeurs soutiennent que la requête en jugement sommaire des défendeurs devrait être rejetée, car elle est incompatible avec la position adoptée par les défendeurs à la conférence préparatoire.

 

[15]  Les défendeurs affirment qu’à aucun moment durant la conférence préparatoire il a été convenu que les requêtes prévues à ce moment fermaient définitivement la porte au dépôt de toute autre requête par la suite. Ils font remarquer que rien dans les Règles des Cours fédérales citées par les demandeurs à propos des conférences préparatoires n’exige ni même ne mentionne que le mémoire de conférence préparatoire d’une partie doit décrire toutes les requêtes prévues ou possibles, ou que toutes les requêtes prévues ou possibles doivent faire l’objet d’une discussion ou être soulevées à la conférence préparatoire.

 

[16]  Les défendeurs soutiennent que les implications ou impressions de toute nature éventuellement imaginées par les demandeurs à partir du mémoire ou des déclarations des défendeurs à la conférence préparatoire ne devraient pas empêcher les défendeurs de déposer une requête en rejet sommaire en bonne et due forme, requête qui pourrait ultimement mettre fin au litige ainsi que faire épargner temps et argent aux parties et à la Cour.

 

[17]  Les défendeurs soutiennent aussi qu’ils sont tout à fait en droit de déposer une requête en jugement sommaire étant donné que la requête en question est soumise avant la détermination des dates de l’instruction. Leurs arguments se fondent sur le libellé du paragraphe 1 de l’article 213 des Règles, qui se lit comme suit :

 

213. (1) A party may bring a motion for summary judgment or summary trial on all or some of the issues raised in the pleadings at any time after the defendant has filed a defence but before the time and place for trial have been fixed.

213. (1) Une partie peut présenter une requête en jugement sommaire ou en procès sommaire à l’égard de toutes ou d’une partie des questions que soulèvent les actes de procédure. Le cas échéant, elle la présente après le dépôt de la défense du défendeur et avant que les heure, date et lieu de l’instruction soient fixés.

 

Analyse

[18]  Apparemment, les défendeurs voient la conférence préparatoire comme une étape sans conséquence et sans obligation dans l’instance. Ils se trompent.

 

[19]  La conférence préparatoire permet à la Cour de vérifier attentivement avec les parties si l’instruction est complète, si des discussions visant un règlement ont eu lieu et si les questions à examiner durant l’instruction et les témoins à être appelés par les parties ont été considérés et déterminés comme il se doit. Lorsque la Cour est d’avis que les parties sont prêtes pour l’instruction ou qu’un échéancier clair a été établi pour l’exécution des tâches restantes, les dates d’instruction peuvent être fixées.

 

[20]  Si les parties n’étaient pas bien préparées ou qu’elles étaient uniquement tenues d’exprimer leurs intentions du moment durant la conférence préparatoire, la pertinence de la principale finalité de celle-ci serait minée. Bien que les conférences préparatoires ont généralement lieu à l’extérieur de la salle d’audience, elles n’en sont pas moins des audiences. Dans les circonstances, il n’est que juste, et même nécessaire, d’exiger des parties qu’elles s’en tiennent aux observations ou aux ententes faites à la Cour.

 

[21]  Les défendeurs prétendent que rien ne justifie que les demandeurs contestent le droit des défendeurs de déposer leur requête en rejet sommaire en vertu de l’article 213 des règles. Cependant, la question litigieuse de cette requête n’est pas de savoir si une fin de non-recevoir est opposée à la volonté des défendeurs de la déposer en vertu du paragraphe 213 (1) des règles.

 

[22]  Hormis les observations formulées par les défendeurs à la conférence préparatoire, rien n’empêchait ceux-ci, d’un point de vue procédural, de demander un rejet sommaire avant la fixation des dates d’instruction. Toutefois, la Cour ne doit pas consentir à ce qui revient à une ingérence des défendeurs dans la capacité de la Cour à fixer efficacement et rapidement les dates de l’instance.

 

[23]  S’il est permis aux défendeurs de déposer leur demande de jugement sommaire, l’action sera soit rejetée soit maintenue. Que l’action soit rejetée sommairement ou non, le temps, les ressources et l’argent consacrés par les parties et la Cour pour préparer la conférence préparatoire et y participer auront été gaspillés. Dans un cas comme dans l’autre, un appel est possible, ce qui retarderait l’instruction des procédures, dont le début est prévu pour septembre 2011.

 

[24]  La requête en jugement sommaire des défendeurs n’est pas fondée sur de nouveaux faits découverts après la conférence préparatoire. En fait, l’avocat des défendeurs reconnaît que c’est seulement après la conférence préparatoire que l’idée d’une requête en rejet sommaire a été soulevée et explorée. Je ne crois pas qu’en soi, le fait de changer d’avis justifie qu’on revienne sur les observations présentées à la Cour. En l’absence de faits nouveaux ou de circonstances impérieuses depuis la conférence préparatoire, les défendeurs doivent être liés au fait qu’ils ont reconnu que l’antériorité et l’évidence sont des questions à trancher à l’instruction et qu’une décision distincte en ce qui concerne les questions de responsabilité n’est pas appropriée dans cette affaire.

 

[25]  Étant substantiellement d’accord avec les observations écrites des demandeurs, je conclus que leur requête doit être accueillie en partie. La requête en jugement sommaire des défendeurs doit être soumise au juge d’instruction pour qu’une décision soit prise lors d’une conférence de gestion de l'instruction quant à la pertinence d’entendre la question avant l’instruction ou à tout autre moment. À la conclusion de l’audience, les avocats des parties ont convenu que les dépens de la requête des demandeurs suivent l’issue de la cause, quel qu’en soit le dispositif. Une ordonnance en ce sens est donc prise.


 

ORDONNANCE

 

  LA COUR ORDONNE :

 

1.  que la requête en jugement sommaire des défendeurs soit renvoyée au juge d’instruction pour directives.

 

2.  que les dépens de la requête des demandeurs suivent l’issue de la cause.

 

 

« Roger R. Lafrenière »

Protonotaire

 


 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :  T-1327-05

 

INTITULÉ :  WENZEL DOWNHOLE TOOLS LTD. ET AL. c.

  NATIONAL-OILWELL CANADA LTD. ET AL.

 

 

 

REQUÊTE ENTENDUE PAR TÉLÉCONFÉRENCE LE 2 JUIN 2010 DE VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE) ET EDMONTON (ALBERTA)

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

ET ORDONNANCE :  LAFRENIÈRE P.

 

 

DATE DES MOTIFS ET DE L’ORDONNANCE :  Le 21 juin 2010

 

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Grant S. Dunlop

 

POUR LES DEMANDEURS

Kevin P. Feehan, c.r.

Dennis R. Schmidt

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ogilvie LLP

Edmonton (Alberta)

 

POUR LES DEMANDEURS

Fraser Milner Casgrain LLP

Edmonton (Alberta)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

 

 

 

 

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