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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20100615

Dossier : T-1888-08

Référence : 2010 CF 641

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 15 juin 2010

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

LOUISE LEBLANC

demanderesse

et

 

MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES

ET DU DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES

 

intimé

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un membre désigné de la Commission d’appel des pensions (la Commission), datée du 29 octobre 2008, rejetant la demande de prorogation de délai et d’autorisation d’interjeter appel d’une décision du tribunal de révision du Régime de pensions du Canada (RPC) présentée par la demanderesse neuf mois après l’expiration du délai de prescription.

 

[2]               La demanderesse demande que l’affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué ou à un autre membre de la Commission pour nouvelle décision.

 

Contexte

 

[3]               La demanderesse avait présenté sans succès plusieurs demandes en vue d’obtenir des prestations d’invalidité du RPC parce qu’elle souffrait de maux de dos, de dépression, de fatigue chronique et de fibromyalgie. En 2006, le ministre, par l’intermédiaire de représentants du RPC, a à nouveau rejeté sa demande au motif que ses problèmes de santé n’étaient pas graves au point de l’empêcher de travailler. Un tribunal de révision a entendu l’appel de la demanderesse en avril 2007. Il a examiné la preuve médicale ainsi que le témoignage de la demanderesse avant de conclure qu’elle n’était pas invalide au sens du RPC. La décision et les motifs du tribunal ont été transmis à la demanderesse le 14 juin 2007.

 

[4]               La demanderesse avait, suivant le paragraphe 83(1) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8 (la Loi), 90 jours – ou jusqu’au 12 septembre 2007 – pour interjeter appel de la décision du tribunal de révision devant la Commission. Le 20 juillet 2007, le registraire de la Commission a reçu une lettre indiquant que la demanderesse souhaitait en appeler. Le registraire a ensuite informé le représentant de la demanderesse des conditions applicables à une demande d’autorisation d’interjeter appel par lettre datée du 2 août 2007. Ni la demanderesse ni son représentant ne se sont manifestés avant le 10 juillet 2008.

 

[5]               C’est dans ce contexte que neuf mois après l’expiration du délai prévu pour présenter une demande d’autorisation d’interjeter appel, le registraire a informé le représentant de la demanderesse qu’il serait nécessaire que ladite demande d’autorisation fasse l’objet d’une demande de prorogation de délai distincte. Le représentant de la demanderesse a informé le registraire que le retard était dû au fait que la demanderesse était tombée malade, mais le registraire l’a informé qu’une demande de prorogation, établissant qu’il était satisfait aux quatre critères énoncés dans Canada (Ministre du Développement des Ressources Humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 883, [2005] A.C.F. no 1106, au paragraphe 9, devait être présentée en application de l’article 5 des Règles de procédure de la Commission d’appel des pensions (prestations). Voici les quatre critères en question :

1. il y a eu intention constante de poursuivre la demande ou l’appel;

 

2. la cause est défendable;

 

3. une explication raisonnable justifie le retard;

 

4. la prorogation de délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

 

 

[6]               La réponse du représentant de la demanderesse, datée du 21 août 2008, fournissait des explications pour chacun des quatre critères énoncés dans Gattellaro. Dans sa décision rejetant la demande de prorogation de délai, le membre désigné de la Commission a conclu que bien que la demanderesse ait démontré avoir toujours eu l’intention d’interjeter appel et fourni une explication raisonnable justifiant le retard (critères 1 et 3), elle n’avait pas établi que la cause était défendable. De plus, la Commission n’était pas convaincue qu’une prorogation de délai ne causerait aucun préjudice au ministre.

 

La question en litige

 

[7]               La question en litige est la suivante :

            La décision du membre désigné était-elle raisonnable?

 

Les observations écrites de la demanderesse

 

[8]               La conclusion de la Commission selon laquelle la cause n’était pas défendable était déraisonnable. La demanderesse a soumis plusieurs nouveaux documents médicaux à l’appui de sa demande d’autorisation d’interjeter appel. Les documents indiquent que son état de santé s’est détérioré. La demanderesse devrait seulement avoir à démontrer qu’un argument peut être avancé, et non qu’il sera accepté.

 

[9]               La Commission a conclu que le ministre pourrait subir un préjudice parce que la mémoire des témoins risquait de s’estomper après neuf mois et parce qu’il importe de maintenir le caractère définitif des procédures prévues par le RPC. La demanderesse fait valoir que la Commission a le pouvoir d’évaluer dans quelle mesure les témoins ont souvenir des faits pertinents et que ce facteur n’aurait pas dû être pris en compte dans le contexte de la demande de prorogation. La demanderesse fait en outre valoir qu’un retard de neuf mois n’est pas excessif. Par ailleurs, seuls la demanderesse et des professionnels de la santé, qui peuvent se rafraîchir la mémoire en consultant leurs notes, seraient appelés à témoigner.

 

Les observations écrites du défendeur

 

[10]           La loi ne restreint aucunement le pouvoir discrétionnaire du président, du vice-président ou du membre désigné de la Commission d’accueillir une demande de prorogation de délai. La conclusion de la Commission était raisonnable compte tenu de la preuve dont disposait le membre désigné.

 

[11]           La cause n’était pas défendable. Pour qu’une cause soit défendable, elle doit avoir des chances de succès sur le plus juridique ou en raison de faits pertinents. Une cause défendable dans le contexte d’une demande de prestations d’invalidité suppose que le décideur examine le critère énoncé à l’alinéa 42(2)a) de la Loi en matière d’invalidité. Cette disposition exige que la demanderesse démontre qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée touchant sa capacité d’occuper un emploi véritablement rémunérateur. Pour y arriver, elle doit s’appuyer sur une preuve médicale et établir que des efforts ont été déployés pour se trouver un emploi. Or, les rapports médicaux soumis par la demanderesse ne disent rien sur son état de santé à la date pertinente, à savoir décembre 2004, ainsi qu’à l’égard des traitements qu’elle aurait reçus et des efforts qu’elle aurait déployés pour se trouver un emploi. Le membre désigné pouvait en vertu de son vaste pouvoir discrétionnaire conclure que la cause de la demanderesse n’était pas défendable.

 

[12]           Le préjudice causé au ministre est un facteur pertinent. La possibilité que la mémoire des témoins s’estompe est un facteur pertinent. De plus, l’intérêt de maintenir le caractère définitif des décisions de la Commission et la certitude juridique constituent d’autres facteurs pertinents. La Commission n’a commis aucune erreur susceptible de révision en concluant que le ministre pourrait subir un préjudice dans les circonstances.

 

Analyse et décision

 

Le cadre législatif

 

[13]           Le délai de 90 jours pour interjeter appel devant la Commission est prévu au paragraphe 83(1) de la Loi.

 

[14]           Les Règles de procédure de la Commission d’appel des pensions (prestations), C.R.C., ch. 390 (les Règles de procédure de la CAP) prévoit quels sont les documents devant être soumis à l’appui d’une demande d’autorisation d’interjeter appel et d’une demande de prorogation du délai imparti pour demander cette autorisation :

4. L’appel de la décision d’un tribunal de révision est interjeté par la signification au président ou au vice-président d’une demande d’autorisation d’interjeter appel, conforme en substance à l’annexe I, qui indique :

 

a) la date de la décision du tribunal de révision, le nom de l’endroit où cette décision a été rendue et la date à laquelle la décision a été transmise à l’appelant;

 

b) le nom et prénom ainsi que l’adresse postale complète de l’appelant;

 

c) le cas échéant, le nom et l’adresse postale complète d’un mandataire ou d’un représentant auquel des documents peuvent être signifiés;

 

d) les motifs invoqués pour obtenir l’autorisation d’interjeter appel; et

 

e) un exposé des faits allégués, y compris tout renvoi aux dispositions législatives et constitutionnelles, les motifs que l’appelant entend invoquer ainsi que les preuves documentaires qu’il entend présenter à l’appui de l’appel.

 

5. La demande de prorogation du délai imparti pour demander l’autorisation d’interjeter appel de la décision d’un tribunal de révision est signifiée au président ou au vice-président et contient les renseignements visés aux alinéas 4a) à e) et un exposé des motifs sur lesquels elle est fondée.

 

 

Norme de contrôle judiciaire

 

[15]           Notre Cour a par le passé statué, et les parties en conviennent, que la norme de contrôle applicable à la décision d’un membre désigné de la Commission relative à une demande de prorogation de délai est celle de la décision raisonnable (voir Handa c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 223, [2008] A.C.F. no 1137, aux paragraphes 10 à 12).

 

[16]           Dans Dunsmuir c. New Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, [2008] A.C.S. no 9 (QL), au paragraphe 47, la Cour suprême du Canada précise que le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, mais aussi à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables.

 

Nature de la décision

 

[17]           La Loi ne restreint aucunement le pourvoir discrétionnaire que le paragraphe 83(1) confère au président, au vice‑président et au membre désigné de la Commission de proroger le délai prescrit pour interjeter appel (voir Handa précité, paragraphe 11).

 

[18]           Dans Gattellaro précité, au paragraphe  4, la juge Snider explique qu’une décision rendue en application du paragraphe 83(1) est hautement discrétionnaire. Au paragraphe 7, elle ajoute ce qui suit :

7.  La volonté du législateur exprimée au paragraphe 83(1) du RPC est de limiter le délai d’appel à 90 jours. Bien qu’un membre désigné puisse proroger le délai au-delà de 90 jours, il faut présumer que la prorogation n’est pas un droit. [...]

 

 

[19]           Malgré la nature hautement discrétionnaire de la décision relative à la prorogation, qui accorde un avantage et n’établit pas un droit, il faut, suivant la jurisprudence, prendre en considération et évaluer les critères suivants, à savoir déterminer si la partie demanderesse a établi :

1. qu’elle avait l’intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;

 

2. que la cause est défendable;

 

3. que le retard a été raisonnablement expliqué;

 

4. que la prorogation de délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

 

[Gattellaro précité, paragraphe 9.]

 

 

 

[20]        Les critères énoncés dans la décision Gattellaro sont des considérations impératives devant être appliquées pour veiller à ce que les décideurs n’exercent pas leur pouvoir discrétionnaire de manière arbitraire. Toutefois, ces critères ne constituent pas un test juridique conférant le droit à une prorogation de délai. Il suffit que le décideur les examine avant de tirer sa propre conclusion. Dans certains cas, le décideur peut estimer qu’un critère, ou même un critère additionnel l’emporte sur tous les autres. Cela relèverait de son pouvoir discrétionnaire.

 

[21]        Il ressort de la jurisprudence que notre Cour en est venue à considérer que les critères de la décision Gattellaro constitue un test juridique, auquel toute demande de prorogation de délai est assujettie (voir Belo-Alves c. Canada (Ministre du Développement social), 2009 CF 413, [2009] A.C.F. no 523 (QL) et Canada c. Small, 2007 CF 678, [2007] A.C.F. no 915 (QL), paragraphe 22). En toute déférence, je ne suis pas d’accord. Les décisions rendues en application du paragraphe 83(1) relèvent du régime administratif et non du régime judiciaire, et elles sont rendues dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire absolu que la Loi confère à la Commission (voir Handa précité). L’application d’un test juridique transformerait, contrairement à l’intention du législateur, une décision fondée sur un pouvoir discrétionnaire non structuré en une décision mixte de droit et de fait.

 

[22]        Je reconnais néanmoins que la Commission a considéré les critères énoncés dans la décision Gattellaro. En exigeant que les demandes de prorogation de délai comportent des observations portant sur chacun de ces critères, la Commission s’engage à les prendre en compte pour décider du bien-fondé de ces demandes.

 

[23]        En l’espèce, après avoir reçu les observations exigées, la Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas établi que sa cause était défendable ni démontré qu’une prorogation ne causerait aucun préjudice au ministre, et sa décision de rejeter la demande repose sur ces critères. Je vais maintenant les examiner.

 

L’existence d’une cause défendable

 

[24]        La Cour d’appel fédérale a statué que pour qu’une demande de prorogation de délai constitue une cause défendable il faut que le demandeur démontre qu’il a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique (voir Canada (Ministre du Développement et des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, [2007] A.C.F. no 37 (QL), paragraphe 37).

 

[25]        Dans Callihoo c. Canada (Procureur général), [2000] F.C.J. No. 612 (QL), au paragraphe 22, le juge MacKay dit ce qui suit :

En l’absence d’une nouvelle preuve importante qui n’aurait pas été examinée par le tribunal de révision, une demande d’autorisation a des chances sérieuses d’être accueillie lorsque le décideur conclut qu’il en ressort une question ou une erreur de droit, appréciée en vertu de la norme de la décision correcte, ou une erreur de fait importante commise de façon déraisonnable ou arbitraire à la lumière de la preuve. Le décideur en l’espèce a conclu qu’il ne ressortait aucune erreur de la demande d’autorisation. La décision portant sur la demande d’autorisation ne contient aucune erreur qui justifierait l’intervention de la Cour.

 

Ainsi, une des façons d’établir que la cause est défendable est de présenter une nouvelle preuve importante, n’ayant pas été soumise au tribunal de révision.

 

[26]        Trois nouveaux rapports médicaux, dont ne disposait pas le tribunal de révision, ont été déposés devant la Commission.

 

[27]        Dans Belo-Alves c. Canada (Ministre du Développement social), [2009] A.C.F. no 523, le juge Campbell dit ce qui suit au paragraphe 11 :

Quant à la question relative à la cause défendable, l’argument soulevé devant la Commission par le conseil de Mme Belo-Alves comporte deux volets : un argument fondé sur la preuve selon lequel il y a des éléments de preuve nouveaux dans les documents médicaux produits par Mme Belo-Alves (Affidavit de Kathleen Gates, 12 août 2008, Vol. 1, p. 76, au paragraphe 15); et un argument juridique voulant qu’un mauvais critère ait été appliqué aux faits nouveaux dans la décision TR-2 (Affidavit de Kathleen Gates, 12 août 2008, Vol. 1, pages 77 à 79, paragraphes 19 à 26). Quant au point fondé sur la preuve, que pouvait-elle dire de plus, et qu’était-il nécessaire de dire de plus pour satisfaire à ce critère? À mon avis, il n’est pas possible d’évaluer la qualité d’une telle preuve à l’égard d’une demande de prorogation de délai; j’estime qu’il suffit de démontrer qu’il existe un argument avec des éléments de preuve à l’appui pour satisfaire à ce facteur particulier, ce que Mme Belo-Alves a fait. En ce qui concerne l’argument juridique, selon moi, il a des chances raisonnables d’être accepté. Par conséquent, je conclus que la conclusion quant à la preuve selon laquelle il n’y a « rien » au dossier pour répondre à ce facteur est injustifiée.

 

 

 

 

[28]        Le rapport du Dr W. J. Reynolds daté du 3 avril 2008 indique notamment ceci :

[traduction] Elle a dû cesser de travailler en 2003 à cause de la gravité de ses symptômes (c’est‑à‑dire l’intensité de sa douleur et de sa fatigue ainsi que ses problèmes de concentration). Elle habite dans une maison à un étage, mais a de la difficulté à effectuer ses tâches domestiques à cause de la gravité de ses symptômes, qui se sont graduellement intensifiés au cours des dernières années.

 

L’examen général de cette femme de 45 ans ne révèle rien de très remarquable. Sa tension artérielle est de 140/95. Elle présente une légère arthrose généralisée des petites articulations des mains. Tous ses points de fibromyalgie sont douloureux. Sa force de préhension est à 30 % de la normale, ce qui concorde avec l’intensité de sa douleur.

 

Je suis d’accord avec le diagnostic de fibromyalgie. Mme Leblanc a vécu des expériences qui ont pu créer des conditions favorables à l’apparition de symptômes plus graves et plus intenses. Ses symptômes sont graves, tout comme son incapacité bien sûr.

 

 

[29]        Voici ce qu’indique le rapport du Dr Reynolds daté du 21 avril 2008 :

[traduction] Mme Leblanc a été vue en consultation le 3 avril 2008. Elle souffre de fibromyalgie depuis 1985 environ. Ses activités au travail et des incidents ont accentué sa douleur.

 

Elle souffre de douleurs généralisées caractéristiques et de douleur myofasciale grave lorsqu’elle effectue des tâches répétitives et  demeure dans la même position pendant longtemps. S’ajoute à cela le sommeil non réparateur caractéristique de cette affection, qui entraîne une grande fatigue et des problèmes de concentration. Tous ses points de fibromyalgie sont douloureux.

 

Mme Leblanc est incapable de travailler depuis 2003 à cause de l’intensité de sa douleur et de sa fatigue et à cause de ses problèmes de concentration. Elle a une incapacité majeure.

 

 

[30]        On peut notamment lire ce qui suit dans le rapport du Dr Reynolds daté du 17 mai 2008 :

[traduction] Comme vous le savez, elle est atteinte de fibromyalgie et les symptômes de cette maladie ont débuté en 1985 environ. Elle avait des douleurs au genou depuis l’enfance. Enfant, elle a eu des accidents (elle est tombée sur la glace à une occasion et s’est cogné la tête). Elle a vécu avec sa douleur au genou jusqu’à ce qu’elle se généralise en 1985. Elle a exercé différents métiers à partir de l’âge de 16 ans, mais a dû cesser de travailler en 2003 parce que ses symptômes s’aggravaient, plus particulièrement sa douleur, sa fatigue et ses problèmes de concentration. Elle a une capacité limitée d’effectuer des tâches répétitives, de rester assise longtemps et d’effectuer des tâches debout pendant une longue période.

 

 

[31]        Selon moi, il ne fait pas de doute que cette nouvelle preuve médicale étaye suffisamment la thèse de l’existence d’une cause défendable. La Commission ne pouvait raisonnablement en venir à la conclusion que rien ne permettait de conclure en ce sens. La décision du membre ne comporte aucun motif, même élémentaire, visant à expliquer pourquoi les nouveaux documents médicaux mis en preuve ne permettaient pas d’envisager que la demanderesse puisse avoir gain de cause.

 

Préjudice causé au ministre

 

[32]        La Commission a conclu que le fait qu’il se soit écoulé neuf mois avant la présentation de la demande nuirait à la préparation de la défense du ministre. La Commission était d’avis que la mémoire des témoins se serait estompée et qu’ils auraient plus de difficulté à se rappeler des faits. Le caractère définitif des procédures relatives au RPC était aussi une considération importante pour la Commission. Je tiens toutefois à souligner qu’en l’espèce on pouvait s’attendre à ce que la demanderesse et ses experts médicaux soient les seuls témoins. À mon avis, un retard de neuf mois n’est pas de nature à altérer la mémoire de la demanderesse et de ses experts médicaux, une personne étant selon moi bien en mesure de se souvenir de son état de santé. Pour ce qui est des experts médicaux, ils s’appuieraient sur des notes et des rapports. La conclusion de la Commission selon laquelle le ministre subirait un préjudice ne constitue pas une issue possible acceptable et elle était déraisonnable.

 

[33]        Vu ma conclusion, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué ou à un autre membre de la Commission pour nouvelle décision.

 

[34]        La demanderesse a droit aux dépens liés à la présente demande.

JUGEMENT

 

[35]        LA COUR ORDONNE :

         1.            La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué ou à un autre membre de la Commission pour nouvelle décision.

         2.            La demanderesse a droit aux dépens liés à la présente demande.

 

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 

 


ANNEXE

 

Les dispositions légales pertinentes

 

Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8

 

83.(1) La personne qui se croit lésée par une décision du tribunal de révision rendue en application de l’article 82 — autre qu’une décision portant sur l’appel prévu au paragraphe 28(1) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse — ou du paragraphe 84(2), ou, sous réserve des règlements, quiconque de sa part, de même que le ministre, peuvent présenter, soit dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour où la décision du tribunal de révision est transmise à la personne ou au ministre, soit dans tel délai plus long qu’autorise le président ou le vice-président de la Commission d’appel des pensions avant ou après l’expiration de ces quatre-vingt-dix jours, une demande écrite au président ou au vice-président de la Commission d’appel des pensions, afin d’obtenir la permission d’interjeter un appel de la décision du tribunal de révision auprès de la Commission.

 

83.(1) A party or, subject to the regulations, any person on behalf thereof, or le ministre, if dissatisfied with a decision of a Review Tribunal made under section 82, other than a decision made in respect of an appeal referred to in subsection 28(1) of the Old Age Security Act, or under subsection 84(2), may, within ninety days after the day on which that decision was communicated to the party or Minister, or within such longer period as the Chairman or Vice-Chairman of the Pension Appeals Board may either before or after the expiration of those ninety days allow, apply in writing to the Chairman or Vice-Chairman for leave to appeal that decision to the Pension Appeals Board.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1888-08

 

INTITULÉ :                                       LOUISE LEBLANC

 

                                                            - et -

 

                                                            MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES

                                                            ET DU DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 18 JANVIER 2010

                       

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 15 JUIN 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Patrick J. Poupore

 

POUR LA DEMANDERESSE

Nicole Butcher

 

POUR L’INTIMÉ

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Wallbridge Wallbridge

Sudbury (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

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