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Cour fédérale

 

Federal Court


Date :  20100514

Dossier :  IMM-5447-09

Référence :  2010 CF 513

Ottawa (Ontario), le 14 mai 2010

En présence de monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

BAYARD NDAM

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) à l'encontre de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (le tribunal) rendue le 28 août 2009, selon laquelle le demandeur n’est pas un réfugié au sens de la Convention tel que défini à l'article 96 de la Loi, ni une personne à protéger selon l'article 97 de la Loi.

 

[2]               Le demandeur est un citoyen du Cameroun qui allègue qu’il sera persécuté s'il est retourné dans son pays dû à ses activités politiques.

 

[3]               Le tribunal rejette sa demande au motif qu’il n’est pas crédible.

 

[4]               Lorsqu'il s'agit de l'évaluation et de l'appréciation de la preuve par le tribunal, la norme de contrôle applicable est celle de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190; Uppal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2009] A.C.F. no 557 (C.F) (QL)). Les conclusions du tribunal quant à la crédibilité d'un demandeur d'asile bénéficient de la déférence de la Cour (Dunsmuir, aux paragraphes 55, 57, 62 et 64; Lin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 698, [2008] A.C.F. no 888 (QL) au paragraphe 11).

 

[5]               En révision, la Cour tient compte de la justification, la transparence et l'intelligibilité du processus décisionnel, ainsi que l'appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47).

 

[6]               Il est bien établi que le tribunal est le mieux placé pour apprécier la crédibilité d’un demandeur et qu’il est présumé avoir considéré toute la preuve avant de rendre sa décision. Il lui appartient aussi de juger de la raisonnabilité des explications fournies par le demandeur sur les éléments essentiels de sa demande. 

 

[7]               Dans la cause sous étude, la Cour considère que le tribunal s'est attardé à une analyse microscopique de la preuve en refusant l'asile au demandeur.

 

[8]               Quelques exemples suffisent pour que le présent dossier soit réexaminé par un autre décideur.

 

[9]               Concernant la détention du demandeur du 5 au 11 janvier 2000, le tribunal tire une inférence négative du fait que le demandeur a déclaré une première fois ne pas se souvenir du nom de la prison où il a été détenu. Questionné à nouveau, il a répondu que c’était Yaoundé. Il a rajouté que c'était la prison du poste de police de l’arrondissement de « Mboa ». Confronté avec le bulletin de levée d’écrou émis par la prison centrale de Yaoundé, il a déclaré qu’il a fait des recherches et c’est la prison centrale qui émet les bulletins de levée d’écrou et c'est pourquoi il croyait que c'était Yaoundé. Le tribunal n'a pas accepté cette réponse et a reproché au demandeur son hésitation concernant le nom de la prison où il aurait été maltraité pendant six jours.

 

[10]           La Cour ne croit pas que l'explication du demandeur est déraisonnable et ne comprend pas pourquoi le tribunal a tiré une inférence négative à ce sujet.

 

[11]           Aussi, le tribunal dit ne pas croire le demandeur lorsqu'il aurait signé le bulletin de levée d’écrou sans le lire. Le demandeur a témoigné qu’à l’époque il n’avait que 17 ans et qu’il ne comprenait pas le concept de conditions. Il a ajouté qu’il se souciait plus de sa vie et qu’il cherchait juste à sortir de prison (copie certifiée du dossier du tribunal, pages 276 et 278).  Cette explication est tout à fait raisonnable étant donné qu'on l’avait maltraité pendant six jours.

 

[12]           Par la suite, le tribunal ne donne aucune force probante à un certificat médical daté du 14 janvier 2000. Il ne croit pas que le demandeur ait eu des soins à l'hôpital tel qu'il le prétend car il ne connaît pas le nom de l'hôpital où il avait été soigné et qu'il n'a pas assez donné de détails concernant les soins qu'il aurait reçus.

 

[13]           Pourtant, le certificat médical indique bien que le demandeur aurait été examiné et il y aurait eu des suivis du 11 janvier au 14 janvier 2000. La Cour considère que le tribunal s'est attardé à des détails périphériques et non essentiels à la demande d'asile.

 

[14]           Aucune question certifiée n’a été proposée. Ce dossier n’en contient aucune.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie. Le dossier est retourné pour reconsidération par un autre tribunal nouvellement constitué. Aucune question n'est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 


ANNEXE

 

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5447-09

 

INTITULÉ :                                       BAYARD NADAM

                                                            et LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 11 mai 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 14 mai 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Joseph Di Donato

 

POUR LE DEMANDEUR

Sylviane Roy

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Joseph Di Donato

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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