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Cour fédérale

Federal Court


 

Date : 20100513

Dossier : IMM-920-09

Référence : 2010 CF 517

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE NON-RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 13 mai 2010

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

MICHAEL KORNAS

 

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.        Aperçu

[1]               M. Michael Kornas est un citoyen de la Pologne qui est arrivé au Canada en 2003. Il était légalement séparé de son épouse, qui est demeurée en Pologne avec leurs deux enfants. Au Canada, M. Kornas a rencontré Mme Marilyn Khan et s’est engagé dans une relation avec elle. Celle-ci était veuve depuis le décès de son mari dans un accident de voiture. M. Kornas a finalement divorcé de sa femme et, en 2008, il a épousé Mme Khan. Cette dernière désirait parrainer M. Kornas à l’égard de sa demande de résidence permanente au Canada. Cependant en 2009, une agente de l’immigration a conclu que les époux n’avaient pas montré qu’ils vivaient réellement ensemble, une exigence prévue à l’article 124 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (voir en annexe).

 

[2]               M. Kornas soutient que l’agente a commis une erreur en omettant de prendre en compte des éléments de preuve qui étaient pertinents quant à la question de savoir s’ils vivaient ensemble et en soulignant que les éléments de preuve n’étaient pas pertinents. Je conclus que le désaccord de M. Kornas avec l’agente vise réellement le poids à attribuer aux éléments de preuve, une question qui relève exclusivement du pouvoir discrétionnaire de l’agente. En conséquence, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

II.     Analyse

 

 

(1)   La décision de l’agente

 

 

[3]               L’agente s’est entretenue à la fois avec M. Kornas et Mme Khan. Elle a également examiné les éléments de preuve documentaire fournis par les époux. Elle a appris que le couple a acheté un condominium ensemble en 2007, mais Mme Khan a dit qu’elle n’a pas emménagé avec M. Kornas avant 2008, après leur mariage. De plus, Mme Khan a affirmé qu’elle continuait d’habiter avec son fils à sa résidence précédente (dont elle est toujours propriétaire) lorsque M. Kornas travaille tard. Au cours de l’entrevue, elle a dit mon fils [traduction] « vit avec moi » dans cette maison, mais elle a ajouté qu’elle vivait avec M. Kornas [traduction] « la plupart du temps ».

 

[4]               L’agente a appelé Mme Khan à deux reprises en composant le numéro de téléphone résidentiel qu’elle avait fourni. Personne n’a répondu. Lorsque l’agente a posé une question à Mme Khan à ce sujet, celle-ci a expliqué qu’elle était à l’hôpital pour subir des examens. L’agente a tenté de corroborer cette explication, mais le personnel de l’hôpital ne pouvait confirmer la présence de Mme Khan aux dates en question, pas plus que Mme Khan ne pouvait fournir de confirmation écrite de ses rendez-vous.

 

[5]               L’agente a également mentionné que Mme Khan continuait d’indiquer l’adresse de sa résidence précédente comme étant son adresse actuelle sur son permis de conduire, la facture de son téléphone cellulaire et les documents relatifs à l’hypothèque du condominium qu’elle a acheté avec M. Kornas.

 

[6]               Compte tenu de ces éléments de preuve, l’agente a conclu qu’elle n’était pas convaincue que les époux vivient ensemble.

 

(2)   Questions préliminaires – Le présumé faux affidavit de Mme Khan

 

[7]               Dans un affidavit daté du 24 avril 2009, Mme Khan a déclaré qu’aucune ligne téléphonique n’était branchée au condominium qu’elle partageait avec M. Kornas. Ils utilisaient plutôt tous deux des téléphones cellulaires. Toutefois, parmi les éléments de preuve documentaire dont l’agente était saisie se trouvait une facture pour un téléphone dans le condominium. Mme Khan a déposé un affidavit supplémentaire dans lequel elle explique que le téléphone faisait partie d’un bouquet de services conclu avec le câblodistributeur et qu’il était rarement utilisé. Les factures montraient néanmoins plusieurs frais d’appels interurbains découlant de l’utilisation de ce téléphone.

 

[8]               Le ministre soutient que la présente demande de contrôle judiciaire peut être rejetée au motif qu’elle est fondée, du moins en partie, sur un faux affidavit. À mon avis, il n’est pas nécessaire de traiter de cette question, car la demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée de toute manière. Par conséquent, je présumerai, pour les besoins de l’espèce, que Mme Khan a commis une erreur de bonne foi et a tenté en toute bonne foi de la corriger.

 

(3)   Les erreurs alléguées de l’agente

 

[9]               M. Kornas soutient que l’agente a omis de prendre en compte l’ensemble de la preuve indiquant que lui et Mme Khan vivaient ensemble. Une partie des éléments de preuve qu’ils ont présentés étaient les suivants :

 

            •           des cartes de crédit conjointes;

•           la propriété conjointe du condominium;

            •           la responsabilité conjointe des frais liés au condominium;

            •           des achats conjoints pour meubler le condominium;

•           des documents montrant que M. Kornas et Mme Khan partageaient la même adresse au condominium;

•           des éléments de preuve selon lesquels les enfants de M. Kornas avaient séjourné au condominium au cours d’une visite au Canada.

 

[10]           Par ailleurs, M. Kornas fait valoir que l’agente a indûment insisté sur les éléments de preuve suivants :

 

•           Mme Khan n’a pas répondu au numéro de téléphone qu’elle avait fourni et n’a pas expliqué ses absences de manière suffisante;

•           Mme Khan a continué d’indiquer l’adresse de sa résidence précédente comme étant son adresse actuelle sur plusieurs documents.

 

(4)   La décision de l’agente était-elle raisonnable?

 

[11]           Je ne peux conclure que la décision de l’agente était déraisonnable. Il y avait des éléments de preuve étayant la prétention des époux selon laquelle ils vivaient ensemble, mais il y avait également des éléments de preuve contraires.

 

[12]           Je comprends la préoccupation de M. Kornas à propos des appels téléphoniques de l’agente. Celle-ci téléphonait à Mme Khan à son ancienne résidence, non au condominium. Par conséquent, pris isolément, le fait que Mme Khan n’était pas présente pour répondre aux appels aurait pu appuyer l’argument selon lequel elle vivait au condominium, non à son ancienne résidence. Par ailleurs, Mme Khan a confirmé dans une correspondance avec l’agente qu’elle continuait d’utiliser le téléphone résidentiel à son ancienne résidence et d’y récupérer les messages téléphoniques. De plus, l’agente a demandé à Mme Khan des preuves concernant ses rendez-vous médicaux pour les jours où elle a affirmé qu’elle était à l’hôpital, mais elle n’a pas été en mesure d’en fournir. Son explication pour ne pas avoir répondu au téléphone ne pouvait donc pas être corroborée. En outre, l’interprétation la plus anodine des affidavits contradictoires de Mme Khan indique qu’elle ne savait pas qu’il y avait un téléphone au condominium, ce qui ne renforce pas la prétention de M. Kornas selon laquelle ils vivaient ensemble à cet endroit.

 

[13]           Enfin, il était loisible à l’agente de s’appuyer sur le fait que Mme Khan a continué d’utiliser l’adresse de sa résidence précédente comme son adresse actuelle sur un certain nombre de documents. Elle a modifié l’adresse sur son permis de conduire, mais uniquement après son entrevue avec l’agente qui a soulevé une préoccupation à ce sujet. Je ne relève aucune erreur dans le traitement de ces éléments de preuve par l’agente.

 

[14]           En conséquence, dans l’ensemble, je ne peux conclure que la décision de l’agente était déraisonnable puisqu’elle appartenait aux issues possibles acceptables au regard des faits et du droit.

 

III.   Conclusion et dispositif

 

[15]           La conclusion de l’agente selon laquelle M. Kornas et Mme Khan ne vivaient pas ensemble était fondée sur les éléments de preuve qu’on lui avait présentés, dont au moins quelques-uns étaient contradictoires. En conséquence, je ne peux conclure que cette conclusion était déraisonnable. Elle représentait une issue possible acceptable au regard des faits et du droit applicable. En conséquence, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune question de portée générale n’a été proposée par les parties aux fins de certification, et aucune n’est énoncée.


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, LL.B., B.A. Trad.
Annexe A

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

 

  124. Fait partie de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada l’étranger qui remplit les conditions suivantes :

a) il est l’époux ou le conjoint de fait d’un répondant et vit avec ce répondant au Canada;

b) il détient le statut de résident temporaire au Canada;

c) une demande de parrainage a été déposée à son égard.

Immigration and Refugee Protection Regulations, SOR/2002-227

 

  124. A foreign national is a member of the spouse or common-law partner in Canada class if they

(a) are the spouse or common-law partner of a sponsor and cohabit with that sponsor in Canada;

(b) have temporary resident status in Canada; and

(c) are the subject of a sponsorship application.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-920-09

 

INTITULÉ :                                       KORNAS c. MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 3 février 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’REILLY

 

DATE des motifs :                      Le 13 mai 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Raj Napal

 

POUR LE DEMANDEUR

 

David Cranton

 

                              POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

NAPAL LAW OFFICE

Brampton (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

                               POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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