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Cour fédérale

 

Federal Court


 

                                                                                                                                 Date : 20100412

Dossier : T-1031-09

Référence : 2010 CF 389

Ottawa (Ontario), le 12 avril 2010

En présence de Monsieur le juge de Montigny

 

ENTRE :

RACQUEL ANGELLA LINDSAY

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de la décision de l’arbitre Renaud Paquet datée du 25 mai 2009. Elle avait porté trois griefs devant l’arbitre. Dans les deux premiers, elle contestait la décision de son employeur, l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), aujourd’hui partie de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), de lui imposer une suspension d’une journée, et elle alléguait des vices de forme dans la procédure disciplinaire utilisée par l’employeur. Dans le troisième grief, elle contestait la décision de son employeur de mettre fin à son emploi. L’arbitre a fait droit en partie au premier grief et a rejeté les deux autres. La demanderesse conteste aujourd’hui uniquement la décision de l’arbitre se rapportant à son congédiement.

 

[2]               Après examen du dossier et des conclusions orales et écrites des parties, je suis arrivé à la conclusion que la décision de l’arbitre est raisonnable compte tenu des faits qui lui ont été soumis. La conclusion de l’arbitre selon laquelle il n’avait pas compétence parce que la décision de congédier la demanderesse n’était pas liée à des motifs disciplinaires est essentiellement une conclusion de fait, qui appelle donc de la part de la Cour une retenue considérable.

 

I.          Contexte

[3]               La demanderesse était inspectrice des douanes à la Division des opérations commerciales de l’aéroport international Pearson, à Toronto (Ontario). Elle avait été embauchée à titre temporaire le 4 mai 1998, puis avait été nommée pour une durée indéterminée le 1er avril 1999.

 

[4]               Un mois plus tard, une difficulté a surgi entre la demanderesse et la direction de la Division des opérations commerciales à propos de la longueur de la jupe réglementaire portée par la demanderesse, et à propos de son refus de porter une jupe qui soit acceptable selon l’appréciation de la direction. À la suite de cet incident, une suspension d’une journée a été imposée à la demanderesse à titre de mesure disciplinaire.

 

[5]               Le 21 mai 1999, à la suite de ses deux griefs se rapportant à cette suspension, la demanderesse a souhaité être mutée car elle se sentait harcelée dans le poste qu’elle occupait. Le même jour, la direction a accepté de l’affecter à une autre aérogare jusqu’à ce que soient connues les conclusions de l’enquête sur les plaintes. La demanderesse a sollicité et obtenu une autre affectation, le 16 juin 1999, aux opérations passagers des Douanes, à l’aéroport international Pearson.

 

[6]               Un an plus tard, le 17 mai 2000, la demanderesse a écrit à son employeur pour obtenir un congé rémunéré ou une réduction substantielle de ses heures normales de travail. Dans cette lettre, elle précisait que sa demande visait à [traduction] « faciliter des arrangements en cours en vue d’études postsecondaires » et [traduction] « eu égard au  climat auquel avait donné lieu la plainte de harcèlement ». Après quelques échanges entre l’employeur, la demanderesse et le délégué syndical destinés à clarifier la requête de la demanderesse, il est devenu clair que ce que voulait la demanderesse, ce n’était pas une réduction de ses heures normales de travail, mais plutôt un congé rémunéré jusqu’à la fin de l’enquête.

 

[7]               Le 20 juin 2000, M. Sheridan, le directeur de la Section des opérations passagers des Douanes, a écrit à la demanderesse pour lui dire qu’il ne pouvait pas lui accorder un congé rémunéré durant une période aussi longue. Cependant, il lui offrait d’autres solutions de rechange : un congé sans solde pour raisons personnelles, d’une durée maximale d’un an, un détachement à la Division du courrier international, ou un autre détachement dans un bureau de l’Agence des douanes et du revenu du Canada de la région du Grand Toronto. Il l’a aussi invitée à consulter un médecin afin d’obtenir une attestation médicale si elle se sentait stressée, ce qui la rendrait admissible à un congé de maladie avec certificat médical.

 

[8]               Le 21 juin 2000, la demanderesse a écrit à M. Sheridan pour lui redire qu’elle voulait un congé rémunéré, et elle annexait à sa lettre trois formules de demande de congé couvrant la période du 22 juin 2000 au 2 juillet 2000. Elle écrivait ceci : [traduction] « pour mon propre bien, je dois me soustraire à cette atmosphère malsaine qui me cause un malaise intense » dans le milieu de travail. Elle ajoutait qu’elle n’était pas disposée à retourner au travail dans un tel climat. Elle écrivait dans sa lettre qu’elle n’avait pas pour l’instant de plan pédagogique précis. Elle ne disait rien des trois solutions de rechange évoquées par M. Sheridan, encore qu’il semble qu’elle a écrit cette lettre peu de temps avant de recevoir la lettre de M. Sheridan du 20 juin 2000. La demanderesse a répondu à cette dernière lettre le 29 juin 2000, en déplorant de devoir consacrer beaucoup de son temps à échanger des lettres et des arguments avec l’employeur. Elle ne s’exprimait pas sur les diverses solutions de rechange qui lui étaient offertes par M. Sheridan.

 

[9]               Dans une lettre du 8 juillet 2000, la demanderesse écrivait qu’elle ne voulait pas d’un congé sans solde, et elle joignait à sa lettre huit formules de demande de congé couvrant la période du 10 juillet au 9 septembre 2000. Les formules n’indiquaient pas le genre de congé souhaité.

 

[10]           Le 18 juillet 2000, M. Sheridan a écrit à la demanderesse pour lui redire que les choix qui s’offraient à elle étaient soit un congé sans solde pour raisons personnelles ou un congé de maladie avec certificat médical, soit une affectation dans un autre bureau de l’ADRC. M. Sheridan priait la demanderesse d’indiquer son choix à son superviseur d’ici au 4 août 2000. Il l’informait aussi qu’elle ne serait pas pénalisée pour le temps qu’elle devait consacrer aux entrevues avec les enquêteurs à propos de sa plainte de harcèlement et qu’elle serait, durant ces entrevues, réputée en service aux fins de la rémunération.

 

[11]           La demanderesse a écrit à M. Sheridan le 14 août 2000 sans lui indiquer son choix, mais en lui demandant des détails et des éclaircissements sur toutes les solutions de rechange possibles en matière de congé et d’emploi au sein de l’ADRC et en le priant une nouvelle fois de lui accorder un congé rémunéré. Plus précisément, elle voulait en savoir davantage sur la procédure et la politique régissant les congés d’études, et voulait savoir si l’employeur était disposé à répondre à ses besoins en lui accordant un congé rémunéré et, dans l’affirmative, de quelle durée.

 

[12]           M. Sheridan a répondu à la demanderesse le 25 août 2000. Il lui donnait des explications sur la politique d’apprentissage permanent et sur les crédits de congé et les demandes de congé, ainsi que d’autres explications d’ordre général. Il lui offrait encore une fois de l’autoriser à prendre un congé pour raisons personnelles d’une durée de trois mois ou d’un an, ou un congé de maladie avec certificat médical, ou de l’affecter ailleurs. Il écrivait aussi qu’il n’était pas disposé à autoriser un congé rémunéré fondé sur d’autres raisons que celles prévues par la convention collective. Il la priait de lui faire connaître son choix et de lui dire les endroits où elle souhaiterait être affectée pour le cas où elle choisirait cette option.

 

[13]           La demanderesse a écrit à M. Sheridan le 6 septembre 2000 pour lui dire qu’elle n’était pas satisfaite des éclaircissements fournis, parce qu’ils ne répondaient pas à la majorité de ses préoccupations et parce qu’elle était encore incertaine des choix qui s’offraient à elle. Elle l’informait aussi de son intention d’entreprendre un doctorat en économie qui commençait le lendemain, et elle demandait une avance de 5 000 $ comme frais d’études. Elle indiquait qu’un congé d’études avec rémunération serait la meilleure solution.

 

[14]           Le 5 octobre 2000, M. Sheridan a écrit à la demanderesse pour lui dire qu’il était troublé par sa décision de s’inscrire à un programme d’études d’une durée de quatre ans sans d’abord obtenir une approbation de congé. Il expliquait aussi que ses demandes de congé et d’avances sur frais d’études étaient loin de respecter les politiques de l’ADRC en la matière. À titre de mesure provisoire, M. Sheridan approuvait rétroactivement comme « autre congé sans rémunération » son absence non autorisée de juin à septembre, et cela afin de régulariser son statut, mais il l’informait que cette situation ne pouvait pas s’éterniser. Il lui offrait à nouveau les mêmes trois solutions de rechange antérieures et la priait de lui communiquer son choix avant le 27 octobre 2000. Finalement, il l’avertissait que, à défaut pour elle de faire connaître son choix, elle serait considérée comme absente sans autorisation, ce qui pouvait entraîner une mesure disciplinaire.

 

[15]           Le 27 octobre 2000, la demanderesse a répondu à M. Sheridan sans évoquer les possibilités offertes. Elle lui posait une série de questions et lui faisait part de son mécontentement et ses craintes devant la menace de mesures disciplinaires et l’absence de réponses à ses questions.

 

[16]           Le 30 novembre 2000, M. Sheridan a écrit à la demanderesse en lui disant qu’elle n’avait encore fait aucun choix parmi les formules de congé et les possibilités d’affectation qui s’offraient à elle. Cependant, il l’informait qu’il était disposé à autoriser un congé d’études non rémunéré, uniquement pour l’année universitaire en cours (de l’automne 2000 au printemps 2001), mais il soulignait que toute demande ultérieure de congé d’études serait vraisemblablement refusée. Il priait aussi la demanderesse, qui vivait à l’époque à Ottawa, de lui dire si elle préférait que l’on communique désormais avec elle à une adresse plus actuelle que son adresse de Mississauga.

 

[17]           Sur ce dernier point, la demanderesse a écrit ce qui suit à M. Sheridan le 28 février 2009 : [traduction] « la plupart de ma correspondance est envoyée à mon adresse permanente à Mississauga […]. Vu l’importance de la correspondance reçue de l’ADRC, cette solution de rechange semblait préférable. Cependant, je suis disposée à donner mon adresse d’Ottawa pour la correspondance, étant entendu que cette adresse est provisoire ».

 

[18]           Le 19 juin 2001, M. Sheridan a écrit à la demanderesse pour lui dire qu’elle devait retourner au travail. Il lui accordait une certaine liberté quant à la date de son retour au travail, et il l’invitait à communiquer avec lui par téléphone pour fixer une date de retour qui soit mutuellement acceptable. Il précisait aussi qu’il ne voyait aucune raison pour que la date de retour soit postérieure à la semaine du 23 juillet 2001. Finalement, M. Sheridan informait la demanderesse que, si elle ne répondait pas d’ici à la semaine du 16 juillet, ou si elle ne se déclarait pas disposée à revenir au travail à l’intérieur d’un délai acceptable pour la direction, il la considérerait absente sans congé approuvé. M. Sheridan informait la demanderesse que cela pourrait conduire la direction à prendre des mesures de congédiement, conformément aux pouvoirs que lui conférait la Loi sur l’Agence des douanes et du revenu du Canada, L.C. 1999, ch. 17 (la Loi sur l’ADRC).

 

[19]           Au bout d’un mois, et quelques jours seulement avant la date à laquelle elle devait retourner au travail, la demanderesse faisait savoir à M. Sheridan que, si elle avait quitté son travail, ce n’était pas parce qu’elle voulait faire des études de doctorat à temps plein dans une autre ville, mais plutôt en raison d’un [traduction] « harcèlement intolérable » dans le milieu de travail. Elle ajoutait qu’elle préférait rester en congé et qu’elle souhaitait qu’un plan de retour au travail lui soit proposé.

 

[20]           Le 31 août 2001, M. Sheridan a écrit à la demanderesse pour lui expliquer qu’aucun congé d’études additionnel n’était possible pour le programme qu’elle avait entrepris. Il lui rappelait aussi qu’elle n’avait pas démontré la moindre intention de retourner au travail, qu’elle n’était plus en congé approuvé et qu’elle devait se présenter au travail. Il l’informait que, si elle continuait de faire fi de ses obligations, il entreprendrait une procédure de congédiement pour motifs non disciplinaires, en application de l’article 51 de la Loi sur l’ADRC, qu’il joignait à la lettre. M. Sheridan donnait aussi à la demanderesse le numéro de téléphone où elle pouvait le joindre directement, pour qu’elle lui fasse part de ses intentions au plus tard le 24 septembre 2001.

 

[21]           La demanderesse a attendu le dernier jour de l’échéance fixée par M. Sheridan et, au lieu de préciser ses intentions, elle lui a de nouveau fait part de la crainte qu’elle avait de retourner dans un milieu de travail malsain et le priait de la renseigner davantage sur la possibilité pour elle d’obtenir des affectations à d’autres bureaux de l’ADRC, ainsi que sur les autres genres de congés qu’il serait disposé à accepter.

 

[22]           Le 7 novembre 2001, M. Sheridan a écrit à la demanderesse pour l’informer que sa lettre du 24 septembre ne laissait pas voir qu’elle était disposée à revenir au travail. Il lui répondait aussi que l’offre faite en 2000 d’un congé sans rémunération pour raisons personnelles n’était plus une solution de rechange acceptable pour l’employeur. Il terminait sa lettre par le paragraphe suivant :

[traduction] Je vous demande donc encore une fois de communiquer avec moi au plus tard le 23 novembre 2001 pour me dire ce que sont vos intentions. J’espère que je vous ai clairement fait connaître ma position selon laquelle vous devez revenir immédiatement au travail. Si vous n’êtes pas disposée à prendre cet engagement, alors je n’aurai d’autre choix que de mettre fin à votre emploi pour raisons non disciplinaires, en vertu de l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence des douanes et du revenu du Canada. Conformément à votre demande, l’intégralité de cette Loi est jointe pour référence.

 

 

 

[23]           La demanderesse n’a jamais répondu à la lettre du 7 novembre 2001. Le 12 décembre 2001, Mme Hébert, directrice régionale, a écrit à la demanderesse pour l’informer qu’il était mis fin à son emploi en application de l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’ADRC. La décision était fondée sur le fait que la demanderesse s’était absentée du travail sans autorisation pendant une période de plusieurs mois, n’avait pas signifié son intention de revenir au travail et ne s’était pas engagée à revenir au travail d’ici au 23 novembre 2001, comme le lui avait demandé M. Sheridan dans sa lettre du 7 novembre 2001.

 

[24]           La demanderesse a témoigné devant l’arbitre que, même si son père avait accusé réception le 14 novembre de la lettre du 7 novembre envoyée à l’adresse de Mississauga, elle n’avait eu connaissance de la lettre, et ne l’avait ouverte, que le 12 décembre 2001. Elle a aussi témoigné qu’elle avait reçu la lettre de congédiement le 14 décembre 2001. En contre-interrogatoire, elle a néanmoins admis qu’elle n’avait pas tenté de communiquer avec M. Sheridan après avoir reçu la lettre du 7 novembre et avant de recevoir la lettre de congédiement, ni même après la réception de la lettre de congédiement le 14 décembre 2001.

 

[25]           À la suite du congédiement, l’enquête portant sur la plainte de harcèlement déposée par la demanderesse s’est achevée, et la plainte a été déclarée sans fondement.

 

[26]           Mme Hébert et M. Sheridan ont témoigné devant l’arbitre que tout le personnel était requis sur le lieu de travail à la suite des événements du 11 septembre 2001. Mme Hébert a aussi témoigné que c’est elle qui avait le pouvoir de congédier un employé et non M. Sheridan. Elle a aussi témoigné que, si la demanderesse avait téléphoné le 13 décembre 2001, ou plus tard, pour leur faire savoir qu’elle n’avait reçu que le 12 décembre la lettre du 7 novembre et qu’elle était disposée à revenir au travail, alors elle aurait pu revoir sa décision.

 

II.         La décision contestée

[27]           L’arbitre a rejeté le grief déposé par la demanderesse contre son congédiement, au motif qu’il n’était pas compétent pour entendre le grief selon l’article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P-35, parce que le congédiement n’était pas fondé sur des motifs disciplinaires. Après examen détaillé des faits et de la correspondance échangée entre la demanderesse et son employeur, il écrivait ce qui suit :

[traduction]

[91] Je souscris à l’argument de l’employeur selon lequel il n’a pas imposé de mesures disciplinaires à la plaignante, mais l’a plutôt congédiée pour des raisons administratives. Plusieurs fois l’employeur a dit à la plaignante qu’il lui fallait demander un congé ou bien retourner au travail. Elle ne s’est pas conformée aux directives légitimes de l’employeur. À l’automne 2001, les possibilités de congé n’étaient plus offertes, et la plaignante a été priée de revenir au travail. Elle a été informée des conséquences d’un non-retour au travail. Elle ne s’est pas présentée au travail et elle a été congédiée. La plaignante a témoigné qu’elle ne voulait pas abandonner son poste, mais en réalité c’est ce qu’elle a fait.

 

 

 

[28]           L’arbitre a douté de la sincérité de la demanderesse lorsqu’elle affirmait qu’elle n’avait reçu que le 12 décembre 2001 la lettre du 7 novembre. Mais même si l’on devait admettre l’affirmation de la demanderesse, l’employeur avait quand même le droit de la congédier. En fait, puisqu’elle avait été avertie en août et septembre 2001 de la possibilité d’un congédiement, il est raisonnable de penser que la demanderesse aurait dû vérifier son courrier en novembre et décembre 2001, sachant qu’elle était en congé non autorisé. En outre, l’arbitre a estimé que le fait pour la demanderesse de ne pas avoir communiqué avec son employeur après le 12 décembre 2001 était un autre indice de son refus de retourner au travail.

 

[29]           L’arbitre a aussi relevé qu’une partie intégrante de la relation d’emploi et du contrat d’emploi est l’obligation pour l’employé de se présenter au travail. Puisqu’un employeur a le droit de compter que l’employé se présentera au travail, l’employé doit obtenir une autorisation préalable avant de s’absenter du travail. Une telle autorisation est accordée selon les règles fixées dans la convention collective. Puisqu’il ne s’agit pas ici d’un cas où l’employée justifiait de raisons impérieuses qui la dispensaient de solliciter une autorisation de congé, l’employeur avait le droit de la congédier pour une raison administrative, à savoir le fait qu’elle ne s’était pas présentée au travail.

 

[30]           Passant à l’argument selon lequel le congédiement était de nature disciplinaire, l’arbitre ajoutait ce qui suit :

[traduction]

[94] La preuve présentée par la plaignante ne m’a nullement convaincu que son congédiement était de nature disciplinaire. La plaignante se sentait harcelée à la Division des opérations commerciales. Elle a déposé une plainte, et l’employeur l’a affectée à un autre poste. Après 11 mois dans son nouveau poste, la plaignante a trouvé qu’elle travaillait dans un climat malsain. Aucune preuve n’a été produite au soutien de cette affirmation. Par la suite, la plaignante a décidé, sans avoir l’approbation préalable de l’employeur, de déserter son lieu de travail. L’employeur a accepté de répondre à ses besoins jusqu’à l’automne 2001. À cette date, il est devenu évident que l’employeur n’allait plus tolérer que la plaignante prenne un congé non autorisé. Il n’y a rien d’abusif, de fallacieux ou de disciplinaire dans la position de l’employeur.

 

 

 

[31]           Finalement, l’arbitre exprimait l’avis qu’il n’était pas nécessaire pour l’employeur de prouver que la plaignante voulait abandonner son poste pour conclure qu’elle avait en fait abandonné son poste. Un employeur peut conclure qu’un employé a abandonné son poste lorsqu’il s’est absenté du travail sans autorisation dans des circonstances qui dépendent de la volonté de l’employé. C’était le cas ici. Par conséquent, l’arbitre a jugé qu’il n’était pas compétent puisque le congédiement de la demanderesse était fondé sur une raison administrative qui n’avait rien à voir avec la discipline.

 

III.       Les points litigieux

[32]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève deux points seulement :

a.       Quelle est la norme de contrôle?

b.      L’arbitre a-t-il commis une erreur en affirmant qu’il n’était pas compétent pour statuer sur le grief parce que le congédiement était de nature administrative?

 

IV.       L’analyse

A.         La norme de contrôle

[33]           Il y a dans la jurisprudence une certaine confusion sur la norme de contrôle applicable à la conclusion d’un arbitre relative à sa compétence lorsque cette conclusion s’appuie sur la nature du congédiement dans le contexte de l’article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P-35 (l’ancienne Loi). Il est vrai que cette loi a été remplacée par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la nouvelle Loi), en conséquence de la promulgation de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, entrée en vigueur le 1er avril 2005. L’article 61 de la nouvelle Loi dispose que les griefs déposés en application de l’ancienne Loi qui n’ont pas reçu une solution définitive avant l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi seront traités selon l’ancienne Loi.

 

[34]           Le paragraphe 92(1) de l’ancienne Loi était ainsi rédigé :

 

92. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un employé peut renvoyer à l’arbitrage tout grief portant sur

a)  l’interprétation ou l’application, à son endroit, d’une disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale,

 

b) dans le cas d’un fonctionnaire d’un ministère ou secteur de l’administration publique fédérale spécifié à la partie I de l’annexe I ou désigné par décret pris au titre du paragraphe (4),)

(i) soit une mesure disciplinaire - entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire,

(ii) soit un licenciement ou une rétrogradation visé aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques, or

 

c) dans les autres cas, une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la suspension ou une sanction pécuniaire

92. (1) Where an employee has presented a grievance, up to and including the final level in the grievance process, with respect to

 

(a) the interpretation or application in respect of the employee of a provision of a collective agreement or an arbitral award,

 

(b) in the case of an employee in a department or other portion of the public service of Canada specified in Part I of Schedule I or designated pursuant to subsection (4)

(i) disciplinary action resulting in suspension or a financial penalty, or

(ii) termination of employment or demotion pursuant to paragraph 11(2)(f) or (g) of the Financial Administration Act, or

 

(c) in the case of an employee not described in paragraph (b), disciplinary action resulting in termination of employment, suspension or a financial penalty,

 

and the grievance has not been dealt with to the satisfaction of the employee, the employee may, subject to subsection (2), refer the grievance to adjudication.

 

[35]           L’ADRC n’est pas un employeur décrit dans l’alinéa 92(1)b) de l’ancienne Loi. L’arbitre n’avait donc pas compétence pour statuer sur le grief de la demanderesse puisque ce grief ne résultait pas d’une mesure disciplinaire. Il est donc nécessaire de se demander si la décision de l’employeur équivalait à une mesure disciplinaire déguisée ou si elle était véritablement un congédiement pour raisons non disciplinaires, comme le prétend l’ADRC.

 

[36]           Je reconnais avec le défendeur que ce qui est en cause dans la présente demande de contrôle judiciaire n’est pas une pure question de compétence, mais plutôt une conclusion de fait qui finalement débouche sur une conclusion relative à la compétence. Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] A.C.S. n° 9, au paragraphe 59, la Cour suprême soulignait que la « compétence » s’entend au sens strict, et que « […] une véritable question de compétence se pose lorsque le tribunal administratif doit déterminer expressément si les pouvoirs dont le législateur l’a investi l’autorisent à trancher une question ». La question qui se pose dans la présente affaire est de savoir si l’arbitre a commis une erreur dans sa conclusion concernant la présence ou l’absence d’une intention disciplinaire derrière le congédiement de la demanderesse. Une fois tirée cette conclusion, il n’y a plus guère de désaccord sur la deuxième question, la pure question de compétence, c’est-à-dire le point de savoir si c’est le genre de mesure qui relève du champ de l’alinéa 92(1)c) de l’ancienne Loi.

 

[37]           On peut trouver des indications dans un arrêt de la Cour d’appel fédérale, Association professionnelle des agents du Service extérieur c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 162, [2003] A.C.F. n° 483. Dans cette affaire, il s’agissait de savoir si les candidats qui avaient terminé avec succès le Programme de perfectionnement du Service extérieur étaient des fonctionnaires pendant qu’ils recevaient une formation linguistique, et donc de savoir s’ils devaient être inclus dans l’unité de négociation représentée par l’Association professionnelle des agents du Service extérieur. Après une analyse relative à la norme de contrôle, la Cour d’appel fédérale a estimé que c’était là une question mixte de droit et de fait, que la Commission des relations de travail dans la fonction publique se devait de trancher compte tenu de sa spécialisation. Comme l’écrivait la Cour d’appel au paragraphe 10 :

[…] Si j’utilise l’approche pragmatique et fonctionnelle, il me semble que le législateur voulait créer un tribunal spécialisé s’occupant du cas des personnes qui travaillaient dans le cadre d’un contrat de louage de services conclu avec le gouvernement, lequel était chargé d’appliquer les dispositions techniques uniques en leur genre de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique en vue de déterminer qui devrait être membre des unités de négociation et quelles devraient être ces unités ainsi qu’en vue d’exercer une certaine supervision sur les conventions collectives dans le milieu distinct de la fonction publique. Il me semble que le législateur aurait voulu que la Commission soit clairement autorisée à décider que certaines personnes rémunérées par le gouvernement devraient être considérées comme des fonctionnaires aux fins de la négociation collective alors que d’autres ne devraient pas l’être.

 

 

 

[38]           Le même raisonnement s’applique ici. La question que devait trancher l’arbitre peut sans aucun doute être qualifiée de « question de compétence » au sens large du terme, étant donné qu’il devait dire s’il avait le pouvoir de prendre la décision, mais la véritable pomme de discorde était de savoir s’il s’agissait d’un congédiement disciplinaire déguisé. Cette interrogation était à l’évidence largement tributaire des faits, et elle doit donc engager la norme de la décision raisonnable.

 

[39]           Ma conclusion est confirmée par la décision à laquelle est arrivée ma collègue la juge Danielle Tremblay-Lamer dans l’affaire Archambault c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CF 183, [2005] A.C.F. n° 229, décision confirmée : 2006 CAF 63, [2006] A.C.F. n° 207. Le point soulevé dans ce précédent était exactement le même que celui qui est soulevé dans la présente demande de contrôle judiciaire. Malgré l’absence d’une clause privative (contrairement à la nouvelle Loi, où une clause privative a été insérée dans l’article 233 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la LRTFP), la juge Tremblay-Lamer s’exprimait ainsi :

[15] En effet, la nature de la mesure prise par l’employeur à l’encontre de l’employé relève de l’expertise et de l’expérience reconnues des personnes désignées à titre d’arbitres. La question de savoir si l’employeur a agi de bonne foi en mettant fin à la relation de travail pour des raisons d’emploi ou s’il l’a plutôt licencié à titre de mesure disciplinaire sous le couvert de raisons d’emploi est une question qui relève carrément de la compétence dont l’arbitre est investi en vertu de la loi. Même si, en bout de ligne, la question est de nature juridictionnelle, elle repose sur cette recherche approfondie des faits quant aux intentions et à la conduite manifeste de l’employeur.

 

[16] En termes simples, la compétence fondée sur l’alinéa 92(1)c) de la LRTFP dépend de la question de savoir si le renvoi de l’employé découlait d’une mesure disciplinaire. Il s’agit uniquement d’une conclusion de fait de sorte que la norme de contrôle applicable est à mon avis celle de la décision manifestement déraisonnable.

 

 

 

[40]           Je suis donc d’avis que le point que l’arbitre devait décider et qui est contesté dans la présente demande de contrôle judiciaire était d’abord et avant tout une question mixte de droit et de fait et qu’il doit donc être revu d’après la norme de la décision raisonnable. La conclusion de l’arbitre sur le litige factuel entre les parties avait une incidence sur la compétence de l’arbitre, mais cela ne permet pas de dire qu’elle n’entrait pas dans sa spécialisation et qu’elle doit par conséquent être revue d’après la norme de la décision correcte. En tant que spécialiste des relations de travail, l’arbitre était évidemment qualifié pour dire si la mesure prise par l’employeur équivalait à une mesure disciplinaire : voir l’arrêt Tobin c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 254, [2009] A.C.F. n° 968, paragraphe 40. Il importe peu toutefois que la norme applicable soit celle de la décision correcte ou celle de la décision raisonnable puisque selon moi l’arbitre a rendu la décision qui s’imposait, et la Cour ne devrait donc pas intervenir.

 

B.         L’arbitre a-t-il commis une erreur en affirmant qu’il n’était pas compétent pour statuer sur le grief parce que le congédiement était de nature administrative?

[41]           La demanderesse a prétendu que l’employeur avait toujours souhaité la congédier pour des raisons disciplinaires et que M. Sheridan n’agissait pas de bonne foi. Elle a fait valoir que l’employeur avait tenté de se débarrasser d’elle en organisant les horaires de travail, en instaurant un milieu de travail malsain, en exigeant inutilement un permis de conduire et en lui reprochant son insubordination, pour finalement parvenir à ses fins en se fondant sur l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’ADRC. Elle a aussi prétendu qu’une mesure disciplinaire déguisée pouvait être déduite de la déclaration de M. Sheridan selon laquelle l’échéance abrégée de retour au travail, signifiée dans la lettre du 7 novembre 2001, visait à faire ressortir la gravité de la situation.

 

[42]           La demanderesse a aussi invoqué la « Politique ministérielle sur la discipline et les procédures disciplinaires », où il est écrit que l’absence non autorisée, l’insubordination, y compris le refus d’exécuter le travail assigné, sont des infractions disciplinaires.

 

[43]           Selon la demanderesse, l’employeur s’est servi du dialogue engagé à propos d’une autre affectation comme prétexte pour mettre fin à son emploi d’une manière qui constituait une mesure disciplinaire déguisée. Elle a fait valoir que, en ne lui communiquant pas, comme elle le souhaitait, toutes les possibilités d’affectation, l’employeur a démontré qu’il avait des intentions secrètes.

 

[44]           À l’audience tenue devant l’arbitre, la demanderesse a insisté sur le fait que l’employeur ne lui avait jamais donné d’instructions précises de retour au travail, puisque l’heure, la date et l’endroit n’étaient pas précisés d’une manière détaillée. En fait, elle croit que M. Sheridan n’a pas respecté son obligation d’agir de bonne foi, car il ne l’a pas informée de ce que l’on exigeait d’elle, et ne lui a jamais expliqué ce qu’étaient les autres solutions de rechange. Comme preuve additionnelle de la mauvaise foi de l’employeur, elle a aussi mentionné que Mme Hébert avait contredit M. Sheridan en affirmant que l’ADRC ne pouvait plus se permettre de se passer de ses employés après les événements du 11 septembre 2001, alors que M. Sheridan disait qu’il pouvait l’affecter à la division de la fiscalité.

 

[45]           Après examen attentif du dossier que l’arbitre avait devant lui, je suis d’avis que ce dossier permet amplement de conclure que le congédiement était de nature non disciplinaire. L’arbitre a passé en revue tous les faits pertinents et le contexte entourant les griefs de la demanderesse, avant de conclure que son congédiement n’était pas de nature disciplinaire. Il a parcouru la correspondance échangée entre la demanderesse et son employeur. Il a relevé que l’employeur avait accordé à la demanderesse un congé autorisé durant plus d’un an, dont une partie rétroactivement, afin de répondre à ses besoins. En juin 2001, à la fin du long congé autorisé, l’employeur avait prié la demanderesse de revenir au travail, lui avait fixé une échéance pour ce faire et l’avait informée d’un éventuel congédiement pour raisons non disciplinaires. Constatant que la demanderesse ne songeait pas à revenir au travail, l’employeur l’a priée à nouveau en août 2001 de communiquer ses intentions avant une certaine date, ce qu’elle n’a pas fait. Une autre lettre la priant de s’engager à revenir au travail lui fut envoyée en novembre 2001, lettre qui la priait de prendre cet engagement avant une autre date limite. La demanderesse a prétendu n’avoir reçu cette lettre que le 12 décembre 2001. Cependant, même après le 12 décembre 2001, elle n’a jamais tenté de communiquer avec son employeur pour lui dire qu’elle était prête à revenir au travail. Par ailleurs, l’employeur lui a constamment mentionné les solutions de rechange qui s’offraient à elle, en la priant de dire sa préférence et en mettant tout en œuvre pour répondre à ses besoins. Il me semble d’ailleurs que l’employeur a fait des pieds et des mains durant une période considérable pour tenter de répondre aux besoins de la demanderesse, alors même que celle-ci n’était à l’évidence pas prête à s’engager à revenir au travail. Compte tenu de la preuve qu’il avait devant lui, l’arbitre était certainement fondé à dire que le congédiement était de nature non disciplinaire.

 

[46]           En fait, lorsqu’on analyse la jurisprudence récente de la Cour, il est clair que la décision de l’arbitre était non seulement raisonnable, mais également correcte, car le dossier ne renferme rien qui permette de dire que l’employeur entendait appliquer une mesure disciplinaire en congédiant la demanderesse. Après tout, c’est à la demanderesse qu’il appartient d’établir l’existence d’une « mesure disciplinaire déguisée » : voir Peters c. Conseil du Trésor (Ministre des Affaires indiennes et du Nord), 2007 CRTFP 7, paragraphe 309; Stevenson c. Agence du revenu du Canada, 2009 CRTFP 89, paragraphe 18.

 

[47]           L’arbitre s’est référé à la décision Weiten c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accise), (1995) 28 Décisions de la CRTFP 9, [1995] C.P.S.S.R.B. no 68, une affaire semblable, où l’employeur affirmait qu’un employé avait abandonné son poste après avoir négligé de retourner au travail ou de communiquer avec lui. Par ailleurs, l’arbitre a souligné à juste titre le fait qu’une partie essentielle du contrat d’emploi requiert de l’employé qu’il accomplisse son travail. Si l’employé ne se montre pas disposé à accomplir son travail, alors l’employeur est fondé à mettre fin au contrat d’emploi. Sur ce fondement, l’arbitre pouvait, d’après les faits, arriver à la conclusion que la demanderesse ne souhaitait pas retourner au travail.

 

[48]           Dans leur ouvrage Canadian Labour Arbitration (4e édition, Canada Law Book), Donald J.M. Brown, c.r. et David M. Beatty résumaient avec à propos l’état du droit sur ce qui constitue une mesure disciplinaire :

[traduction]

Afin de déterminer si un employé a fait ou non l’objet d’une mesure disciplinaire, les arbitres examinent à la fois l’objet et l’effet de la mesure prise par l’employeur. La caractéristique essentielle de la mesure disciplinaire est une intention de corriger la mauvaise conduite d’un employé en le punissant d’une certaine façon. Une confirmation de l’employeur déclarant qu’il n’avait pas l’intention d’imposer une mesure disciplinaire suffit souvent, mais pas toujours, à régler la question.

 

Lorsque la conduite d’un employé est non coupable et/ou que l’objectif de l’employeur n’est pas de punir, toute mesure qui est prise sera généralement qualifiée de non disciplinaire. S’appuyant sur cette définition, des arbitres ont déterminé que les suspensions qui exigent qu’un employé reste hors du travail en raison d’un problème de santé ou en attendant le règlement d’accusations criminelles ne sont pas des sanctions disciplinaires. […]

 

Canadian Labour Arbitration (4e édition), paragraphe 7-4210. Voir aussi : Canada (Procureur général) c. Frazee, 2007 CF 1176, [2007] A.C.F. n° 1548, paragraphe 19; Canada (Procureur général) c. Basra, 2008 CF 606, [2008] A.C.F. n° 777, paragraphe 17.

 

 

 

[49]           Ayant conclu que le congédiement était de nature non disciplinaire, l’arbitre a eu raison de dire qu’il n’était pas compétent pour statuer sur le renvoi à l’arbitrage. La demanderesse n’a pas établi que l’intention de l’employeur était de la punir pour mauvaise conduite. Au contraire, la preuve démontre que l’employeur a tenté sincèrement de faire en sorte qu’il soit possible pour elle de retourner au travail, et il l’a avertie plusieurs fois avant de mettre fin à son emploi pour raisons administratives. Tout au long de leur correspondance, à partir de la première fois où elle a sollicité un congé en mai 2000, jusqu’à son congédiement en décembre 2001, la demanderesse n’a pas démontré une seule fois qu’elle était prête à retourner au travail, pas même sous condition, que ce soit dans une nouvelle affectation ou selon quelque autre arrangement. Quant à son argument selon lequel l’employeur aurait dû lui indiquer une date et une heure pour son retour au travail, je crois que cet argument est tout simplement déloyal. L’employeur a fait preuve de souplesse et a tenté de répondre à ses besoins du mieux qu’il le pouvait; un employeur ne saurait être puni d’agir raisonnablement.

 

[50]           Il importe de faire observer cependant que l’ADRC dispose d’un processus distinct pour l’arbitrage des congédiements non disciplinaires, processus appelé Examen par un tiers indépendant. Si la demanderesse avait souhaité que l’affaire soit examinée par un tiers indépendant, c’était là un recours qu’elle pouvait exercer, plutôt qu’un arbitrage selon l’article 92 de la LRTFP. Il est très regrettable qu’elle n’ait pas choisi cette voie de recours si elle pensait que le processus qui a conduit à son congédiement était entaché d’irrégularités de procédure.

 

[51]           Pour tous ces motifs, je suis d’avis que la présente demande de contrôle judiciaire est totalement dépourvue de fondement et qu’elle doit être rejetée, avec dépens.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

  1. la demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens;
  2. l’intitulé est modifié, le défendeur n’étant plus l’Agence des services frontaliers du Canada, mais le procureur général du Canada, conformément aux paragraphes 303(1) et (2) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106.

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1031-09

 

INTITULÉ :                                       Racquel Angella Lindsay

                                                            c.

                                                            LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU

                                                            CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 9 MARS 2010

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE 

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE de MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS

ET DE L’ORDONNANCE :             LE 12 AVRIL 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Racquel Angella Lindsay

 

DEMANDERESSE

Richard Fader

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Racquel Angella Lindsay

7456, chemin Catalpa

Mississauga (Ontario)

L4T 2T3

 

DEMANDERESSE

Myles Kirvan, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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