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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date :  20100430

 

Référence : 2010 CF 481

 

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 30 avril 2010

 

 

EN PRÉSENCE DE MADAME LA PROTONOTAIRE MIREILLE TABIB

 

 

                                                                                                                             Dossier : T‑644‑09

 

ENTRE :

 

APOTEX INC.

 

demanderesse

et

 

 

SANOFI-AVENTIS

 

défenderesse

 

 

 

                                                                                                                             Dossier : T‑933‑09

 

ENTRE :

 

SANOFI-AVENTIS ET

BRISTOL-MYERS SQUIBB SANOFI

PHARMACEUTICALS HOLDINGS PARTNERSHIP

 

demanderesses

et

 

 

APOTEX INC.,

APOTEX PHARMACHEM INC. ET

SIGNA SA de CV

 

défenderesses


MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Conformément à l’Avis aux parties et à la communauté juridique en date du 1er mai 2009, portant sur la rationalisation des causes complexes, il a été réservé cinq semaines à compter du 18 avril 2011 pour l’instruction des présentes actions réunies. Afin de faire en sorte que ce calendrier soit respecté et que l’instruction se fasse dans le délai prévu, la Cour a soulevé, au cours de conférences antérieures de gestion de l’instance, la question de savoir s’il devrait être fixé une date après laquelle la signification d’affidavits supplémentaires de documents serait subordonnée au consentement de la partie adverse ou à sa propre autorisation. La Cour a ainsi prescrit formellement aux parties, par ordonnance en date du 18 février 2010, de se préparer à discuter cette question dans le cadre d’une conférence téléphonique de gestion de l’instance prévue pour le 5 mars 2010 et tenue à cette date.

 

[2]               Les avocats de Sanofi se sont empressés de souscrire à cette mesure. Apotex, par contre, a soutenu qu’elle n’était pas nécessaire, au motif que toute question relative à l’admissibilité en preuve d’éléments communiqués tardivement pouvait et devait être décidée à l’instruction.

 

[3]               J’ai déjà examiné, dans les motifs d’une autre ordonnance rendue dans la présente affaire (Apotex Inc. c. Sanofi Aventis, 2010 CF 77), la nécessité pour les parties de se conformer non seulement à la lettre de l’obligation que prévoit l’article 226 des Règles des Cours fédérales de corriger sans délai les inexactitudes ou les insuffisances de leurs affidavits de documents, mais aussi à l’esprit et à l’objet de cette obligation, en réexaminant lesdits affidavits de manière continue pour s’assurer qu’ils sont exacts et complets.

 

[16]      Enfin, il faut aussi se rappeler que si les Règles permettent à la partie qui a produit un affidavit de documents inexact ou incomplet de corriger la situation en signifiant un affidavit supplémentaire de documents, elles disposent aussi que cette partie doit le faire sans délai. Cette exigence est encore plus importante dans les actions soumises à l’initiative de rationalisation, puisque leurs calendriers serrés ne laissent guère de marge pour rouvrir la phase de la communication préalable dans le cas où l’existence de nouveaux documents serait révélée. Lorsque, par une demande informelle ou une requête en production de documents supplémentaires, l’attention d’une partie se trouve attirée sur une catégorie ou une source déterminées de documents, ou sur une question factuelle donnée, dont elle n’avait pas examiné la pertinence éventuelle, son obligation de réviser son affidavit de documents afin d’en corriger toute inexactitude ou insuffisance se trouve déclenchée, et l’exécution de cette obligation doit donner lieu à la production de l’affidavit supplémentaire de documents que commande la révision, sans délai et sans que la Cour ait à l’ordonner expressément.

 

[4]               Le même raisonnement s’applique tout autant à l’obligation permanente de corriger ou de compléter les réponses données en interrogatoire préalable que prévoit l’article 245 des Règles.

 

[5]               Les Règles disposent que les documents non cités dans les affidavits de documents et les renseignements qu’on a refusé de communiquer en interrogatoire préalable ne peuvent être invoqués en preuve à l’instruction, à moins que certaines conditions ne soient remplies ou que la Cour ne l’autorise. Les dispositions en question se trouvent au paragraphe 232(1) et à l’article 248 desdites Règles :

 

« 232. (1) À moins que la Cour n’en ordonne autrement ou que les parties n’aient renoncé à leur droit d’obtenir communication des documents, un document ne peut être invoqué en preuve que dans l’un des cas suivants :

·  a) il est mentionné dans l’affidavit de documents de la partie et, selon celui-ci, aucun privilège de non-divulgation n’est revendiqué;

·  b) il a été produit par l’une des parties ou par une personne interrogée pour le compte de celle-ci pour examen, pendant ou après les interrogatoires préalables;

·  c) il a été produit par un témoin qui, de l’avis de la Cour, n’est pas sous le contrôle de la partie. »

 

« 248. La partie soumise à un interrogatoire préalable, ou la personne interrogée pour son compte, qui a refusé de répondre à une question légitime au motif que les renseignements demandés sont protégés par un privilège de non-divulgation ou pour tout autre motif, et qui n’y a pas répondu par la suite, ne peut donner ces renseignements à l’instruction à moins d’obtenir l’autorisation de la Cour. »

“232. (1) Unless the Court orders otherwise or discovery of documents has been waived by the parties, no document shall be used in evidence unless it has been

(a) disclosed on a party’s affidavit of documents as a document for which no privilege has been claimed;

(b) produced for inspection by a party, or a person examined on behalf of one of the parties, on or subsequent to examinations for discovery; or

(c) produced by a witness who is not, in the opinion of the Court, under control of the party.”

 

 

 

“248. Where a party examined for discovery, or a person examined for discovery on behalf of a party, has refused, on the ground of privilege or for any other reason, to answer a proper question and has not subsequently answered the question, the party may not introduce the information sought by the question at trial without leave of the Court.”

 

[6]               Il est évident que ces dispositions ont pour objet d’éviter que l’une ou l’autre des parties ne soit lésée par la communication tardive de documents ou de renseignements et d’interdire le recours aux « pièges » pendant l’instruction. Or une partie pourrait tout aussi efficacement piéger son adversaire en lui signifiant un affidavit supplémentaire de documents ou des réponses supplémentaires à un interrogatoire préalable quelques jours, quelques semaines ou même quelques mois avant l’instruction, sans qu’il dispose de suffisamment de temps pour préparer une réponse adaptée à ces nouveaux éléments.

 

[7]               Il n’est tout simplement pas satisfaisant de mettre la partie qui reçoit les documents ou les réponses supplémentaires dans l’alternative de former une requête en décision sur l’admissibilité en preuve – laquelle, si elle est déposée sous le régime de l’alinéa 220(1)b), met en jeu une lourde procédure à deux étapes – ou d’essayer de régler le problème par une objection à la preuve en cours d’instruction. En outre, étant donné que la justice entre les parties exige qu’on n’autorise la production d’éléments de preuve à l’instruction que sous réserve de nouveaux interrogatoires préalables ou de rapports d’expert supplémentaires, il est évident qu’en laissant le juge du fond trancher ces questions, on va tout droit vers l’ajournement de l’instruction, tandis que la décision desdites questions avant l’instruction par le juge responsable de la gestion de l’instance pourrait permettre d’appliquer des mesures de redressement en temps voulu et d’éviter un ajournement.

 

[8]               Le besoin se fait sentir, à mon sens, d’un mécanisme procédural qui permettrait de prononcer avant l’instruction, sur la base d’un dossier suffisant et dans des délais acceptables, des décisions ou des mesures correctives concernant les différends qui peuvent s’élever sur l’observation par les parties des dispositions applicables. J’estime donc qu’il convient de fixer une date après laquelle la signification d’affidavits supplémentaires de documents, ou la production de documents ou de renseignements supplémentaires en réponse aux interrogatoires préalables, ne seraient possibles, sous le régime des articles 232 et 248 des Règles, que sous réserve du consentement de la partie adverse ou de l’autorisation de la Cour. De cette manière, pour le cas où l’une ou l’autre des parties ne remplirait pas son obligation de réexamen continu des éléments communiqués à la partie adverse, il y aura une date limite pour le réexamen complet, après quoi il faudra justifier le caractère tardif de la communication, et l’on pourra prendre en compte, ou réparer si c’est possible, tout préjudice ainsi causé à la partie adverse. Cette règle aura aussi pour avantage d’inciter les parties à définir et à faire décider le plus tôt possible les questions d’admissibilité liées à la communication tardive, ce qui fera gagner du temps à l’instruction et permettra peut-être d’éviter les ajournements.

 

[9]               Dans la présente espèce, il conviendrait que cette date limite coïncide à peu près avec la date où le dernier contre-rapport d’expert doit être signifié et déposé. En effet, on devrait alors avoir renoncé, le cas échéant, au privilège de non-divulgation revendiqué pour les documents invoqués par les experts qu’on prévoit de citer à l’instruction, et on devrait par conséquent avoir déplacé  ces documents de l’annexe II à l’annexe I de l’affidavit de documents. En outre, chacune des parties aura alors une idée aussi complète qu’il lui sera vraisemblablement possible de se faire avant le début de l’instruction des questions en litige et de la position de son adversaire sur celles‑ci. Si l’on ajoute à cela la conception de la base juridique de l’affaire et la stratégie de procès qu’elles devraient en principe avoir élaborées et affinées au cours des diverses étapes de la communication préalable, les parties devraient alors se trouver en mesure de savoir très précisément quels documents et renseignements elles voudront invoquer à l’instruction et d’évaluer en toute connaissance de cause, le cas échéant, les conséquences des insuffisances ou des inexactitudes de leurs communications. Il y aurait donc lieu de s’attendre à ce qu’il ne leur reste plus rien ou presque à communiquer après cette date. Le fait de soumettre les parties à un mécanisme les obligeant à expliquer pourquoi les éléments communiqués après cette date devraient être admissibles en preuve à l’instruction, ou leur permettant de faire valoir à quelles conditions leur admissibilité devrait être subordonnée ne paraît ni injuste ni excessivement onéreux.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  Les affidavits supplémentaires de documents signifiés après le 15 décembre 2010 et les corrections ou additions aux réponses aux interrogatoires préalables communiquées après le 15 janvier 2010 ne pourront être invoqués en preuve sous le régime du paragraphe 232(1) et de l’article 248 des Règles des Cours fédérales que si l’une ou l’autre des conditions suivantes est remplie :

 

a)          la partie adverse y consent;

 

b)        l’autorisation en a été donnée à l’issue d’une requête formée sans délai devant le juge responsable de l’instance.

 

2.                  L’instruction de la présente affaire commencera à 9 h 30 du matin le 18 avril 2011. Elle durera 25 jours et sera menée, en français et en anglais, en un lieu à déterminer soit par voie de requête, soit à la conférence préalable à l’instruction.

 

 

 

« Mireille Tabib »

Protonotaire

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T‑644‑09

 

INTITULÉ :                                       APOTEX INC. c. SANOFI‑AVENTIS

 

DOSSIER :                                        T‑933‑09

 

INTITULÉ :                                       SANOFI AVENTIS et BRISTOL‑MYERS SQUIBB

SANOFI PHARMACEUTICALS HOLDINGS

PARTNERSHIP c. APOTEX INC., APOTEX            PHARMACHEM INC. et SIGNA SA de CV

 

LIEU DE L’AUDIENCE                  

(téléconférence) :                               Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE                

(téléconférence) :                               Le 5 mars 2010

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :  LA PROTONOTAIRE TABIB

 

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 30 avril 2010

 

 

COMPARUTIONS                                                                          

 

Nando De Luca

Sandon Shogilev

 

POUR APOTEX INC.

Anthony Creber

Cristin Wagner

 

POUR SANOFI‑AVENTIS

.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Goodmans, s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR APOTEX INC.

Gowling Lafleur Henderson, s.r.l.

Ottawa (Ontario)

POUR SANOFI AVENTIS

.

 

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