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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20100430

Dossier : T-348-09

Référence : 2010 CF 477

Ottawa (Ontario), le 30 avril 2010

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

WRANGLER APPAREL CORP.

demanderesse

et

 

BIG ROCK BREWERY LIMITED PARTNERSHIP

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               La demanderesse, Wrangler Apparel Corporation (Wrangler), sollicite une ordonnance annulant la décision rendue par le registraire des marques de commerce relativement à la décision du 5 janvier 2009 par laquelle la Commission des oppositions des marques de commerce (la Commission) a rejeté l’opposition de la demanderesse à la demande no 1,232,130 visant la marque de commerce WRANGLER (la demande) déposée par la défenderesse, Big Rock Brewery Limited Partnership (Big Rock). Le présent appel est interjeté en vertu de l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, en sa version modifiée (la Loi), et des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106.

 

Le contexte factuel

 

[2]               Le 29 septembre 2004, la défenderesse a déposé la demande fondée sur l’emploi projeté de la marque de commerce WRANGLER au Canada en liaison avec des boissons alcoolisées brassées.

 

La procédure d’opposition

 

[3]               Le 11 juillet 2005, la demanderesse a déposé une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. Les trois principaux motifs de l’opposition se résument comme suit :

            1.         la marque n’est pas enregistrable selon l’alinéa 12(1)d) de la Loi parce qu’elle crée de la confusion avec une ou plusieurs des marques de commerce déposées de Wrangler;

            2.         Big Rock n’a pas le droit d’obtenir l’enregistrement de la marque suivant l’alinéa 16(3)c) de la Loi parce que cette marque crée de la confusion avec une ou plusieurs marques de commerce antérieurement employées par Wrangler;

            3.         la marque n’est pas distinctive de Big Rock au sens du paragraphe 38(2) de la Loi dans la mesure où elle ne distingue pas ou n’est pas apte à distinguer les marchandises de Big Rock des marchandises de tiers, notamment les marchandises de Wrangler.

 

[4]               Chaque motif d’opposition reposait essentiellement sur la question de la confusion entre l’emploi projeté du mot servant de marque WRANGLER par Big Rock et l’emploi par Wrangler, par l’intermédiaire de ses divers licenciés, de la marque déposée WRANGLER en liaison avec des vêtements.

 

[5]               Les deux parties ont produit une preuve par affidavit ainsi que des observations écrites et elles étaient toutes deux représentées devant la Commission.

 

La décision de la membre de la Commission

 

[6]               Comme les trois motifs d’opposition avaient trait à la confusion au sens de l’article 6 de la Loi, la membre de la Commission s’est livrée à une seule analyse en fonction de cet article. Elle a statué que l’allégation de confusion de Wrangler était la plus solide en regard du motif selon lequel la marque n’était pas enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi en raison de la confusion vraisemblable avec le mot de Wrangler servant de marque, à savoir WRANGLER.

 

L’analyse en fonction de l’article 6

 

[7]               La membre de la Commission a reconnu que le paragraphe 6(2) obligeait le registraire à tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5), soit : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises en cause; d) la nature du commerce et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

[8]               La membre de la Commission estimait que les facteurs a) et b) étaient à l’avantage de Wrangler, même si le mot anglais « WRANGLER » figure dans les dictionnaires et y est défini sommairement comme étant un cow-boy. Elle a tiré cette conclusion même si elle a reconnu que l’emploi par Wrangler du mot « WRANGLER » en liaison avec des vêtements western avait un caractère évocateur, pouvant tout simplement s’entendre du type de vêtements qu’un cow-boy porterait. De l’avis de la membre de la Commission, l’emploi de longue date par Wrangler du mot servant de marque et ses ventes considérables triomphaient de ces obstacles.

 

[9]               En ce qui concerne les facteurs c) et d), soit le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce, la membre de la Commission a conclu que Wrangler n’avait pas démontré que le marché du style de vie western et country au sein duquel les marques WRANGLER occupaient une place importante était étroitement associé à la bière. Elle a fait la déclaration suivante au sujet de la preuve produite par Wrangler à cet égard :

[…] Le seul fait que des brasseurs (tout comme une société de télécommunications telle que « Bell Canada » et des fabricants d’automobiles tels que « GMC », qui sont mentionnés dans le Calgary Stampede 2005 Exposure Report) puissent commanditer des rodéos en compagnie de l’Opposante ne suffit pas en soi à conclure que la bière (comme le téléphone et d’autres services de communications ainsi que les voitures) a un lien étroit avec le style de vie western et country. Suis-je censée connaître d’office le fait que le style de vie western et country a un lien étroit avec la bière? J’en doute. Outre qu’elle n’a pas produit de preuve à l’appui de ce point, l’Opposante n’a pas non plus fourni d’éléments de preuve (par exemple, un type de preuve par sondage, des études, etc.) démontrant que le consommateur établirait entre la marque bien connue de l’Opposante et les Marchandises de la Requérante une association mentale susceptible de l’induire en erreur sur la source des marchandises. La prétention de l’Opposante à cet égard semble reposer exclusivement sur la notoriété de sa marque WRANGLER, l’Opposante faisant valoir que cette notoriété en elle-même serait suffisante pour créer l’association visée. […]

 

 

[10]           La membre de la Commission pensait que le facteur e) était favorable à Wrangler parce que les marques de commerce en cause étaient identiques. Elle s’est ensuite penchée sur deux autres circonstances. D’abord, elle a pris en considération les 15 demandes ou enregistrements d’une marque de commerce visant le mot WRANGLER, employé seul ou de concert avec d’autres mots, dont Wrangler n’était pas propriétaire. Certains appartenaient à Chrysler LLC et visaient son produit JEEP WRANGLER. D’autres appartenaient à Goodyear Tire & Rubber Company et se rattachaient à une marque de pneus vendus. De même, la marque WRANGLER avait été utilisée par la United States Tobacco Company en liaison avec du tabac sans fumée et par une autre société en liaison avec un herbicide. La membre de la Commission a conclu que ce facteur avantageait Big Rock parce qu’il donnait à penser que Wrangler ne détenait pas le monopole d’utilisation du mot WRANGLER.

 

[11]           Deuxièmement, la membre de la Commission a tenu compte de la notoriété de la marque WRANGLER de Wrangler eu égard à l’argument de cette dernière selon lequel une marque célèbre transcende, dans une certaine mesure, les marchandises ou services avec lesquels elle est normalement associée. La membre de la Commission a toutefois souscrit à l’affirmation de Big Rock selon laquelle cette notoriété en l’espèce ne transcendait pas les articles vestimentaires, les articles chaussants et les accessoires :

[…] Compte tenu des pratiques de licence actuelles et de la diversification des activités de l’Opposante, jusqu’ici, envers les détaillants de vêtements et d’accessoires western, la Requérante soutient qu’il n’y a pas de probabilité qu’un consommateur pense que la Requérante est affiliée à l’Opposante ou que l’Opposante a accordé à la Requérante une licence de tiers l’autorisant à employer sa marque de commerce avec des boissons alcoolisées brassées. Je suis d’accord.

 

72     Je conclus que la marque de l’Opposante est devenue bien connue au Canada, mais cette notoriété est liée, comme je l’ai précédemment indiqué, aux vêtements, aux articles chaussants et aux accessoires. Comme le déclare le juge Binnie dans l’arrêt Veuve Clicquot [précité, au paragraphe 26], la question de savoir si l’aura d’une marque de commerce s’étend aux faits d’un cas particulier ne tient pas à une affirmation, mais à la preuve. Comme je l’ai indiqué ci-dessus, l’Opposante a décidé de ne produire aucun élément de preuve, quel qu’il soit, (preuve tirée d’un sondage, études, etc.) à l’appui de sa prétention que le consommateur effectuerait, entre la marque bien connue de l’Opposante et les Marchandises de la Requérante, une association mentale susceptible d’induire le consommateur en erreur sur la source des marchandises. Je conclus que la seule notoriété ne suffit pas pour qu’on puisse conclure à la probabilité raisonnable de confusion en l’espèce. La Requérante a en effet souligné qu’elle n’est pas tenue d’établir l’absence de toute possibilité de confusion, mais qu’elle doit établir l’absence de probabilité raisonnable de confusion. Je souhaite également ajouter que la présente procédure porte sur la probabilité de confusion, et non la « dépréciation de l’achalandage » de la marque de l’Opposante.

 

[12]           En fin de compte, la membre de la Commission a conclu que la requérante l’avait convaincue selon la prépondérance de la preuve que le consommateur moyen qui a un souvenir imparfait de la marque WRANGLER de Wrangler ne serait vraisemblablement pas susceptible de confondre la source des marchandises en voyant la marque.

 

Les nouveaux éléments de preuve produits par la demanderesse dans le cadre du présent appel

 

[13]           La demanderesse a produit plusieurs nouveaux éléments de preuve, notamment l’affidavit de George Weldon, directeur chargé des licences de VF Jeanswear; cette entreprise est le représentant des licences de Wrangler. Il a déclaré que VF Jeanswear s’était penchée sur la possibilité d’étendre la marque WRANGLER aux boissons alcoolisées. Il a produit une enquête sur l’intérêt des consommateurs relativement à une gamme de produits éventuels portant la marque WRANGLER, allant de la sauce BBQ jusqu’à de la literie, et notamment du whisky. Il précise ensuite que VF Jeanswear a octroyé à une société une licence d’utilisation de la marque WRANGLER pour vendre du whisky dans le sud des États‑Unis puis dans l’ensemble de ce pays. Cette société ne l’a pas fait encore, mais elle a l’intention de commencer à mettre le produit à l’essai cet automne.

 

[14]           En outre, la demanderesse a déposé l’affidavit de Ruth Corbin; Wrangler a retenu les services du cabinet spécialisé en recherches de Mme Corbin pour planifier, concevoir et mener un sondage téléphonique national auprès de buveurs de bière canadiens. Les données d’enquête étaient jointes à l’affidavit. Le principal résultat statistique du sondage, selon Ruth Corbin, était un nombre qui démontrait que [traduction] « parmi tous les participants qui connaissent les jeans WRANGLER, 29 % d’entre eux infèrent qu’il existe un lien commercial quelconque entre l’entreprise qui commercialise la bière WRANGLER et celle qui commercialise les jeans WRANGLER ».

 

La question en litige

 

[15]           La membre de la Commission croyait que même si les trois motifs d’opposition s’articulaient autour de la question de savoir si la marque projetée porterait à confusion, le premier motif de Wrangler, qui comparait la marque projetée directement avec sa propre marque, était le motif d’opposition le plus solide. En conséquence, la seule question à examiner dans le cadre du présent appel est de savoir si la demande d’une marque de commerce de la défenderesse, fondée sur l’emploi projeté de la marque de commerce WRANGLER au Canada en liaison avec des boissons alcoolisées brassées, devrait être rejetée parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée de Wrangler, à savoir WRANGLER.

 

Analyse et décision

 

La norme de contrôle et les  nouveaux éléments de preuve

 

[16]           La norme de contrôle applicable en appel d’une décision du registraire des marques de commerce en vertu de l’article 56 de la Loi est celle de la raisonnabilité (Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, [2006] 1 R.C.S. 772, 49 C.P.R. (4th) 321, paragraphe 40). Cependant, si de nouveaux éléments de preuve qui auraient influé de façon significative sur la décision du registraire sont produits en appel, la Cour doit tirer sa propre conclusion quant au bien-fondé de la décision. La Cour d’appel fédérale s’est penchée sur l’approche qu’il convient alors d’adopter dans l’arrêt Brasseries Molson c. John Labatt Ltée, [2000] 3 C.F. 145, 5 C.P.R. (4th) 180 :

[46]     Du fait qu’il offre l’opportunité de produire une nouvelle preuve, l’appel prévu à l’article 56 n’est pas une disposition d’appel habituelle par laquelle la cour saisie rend sa décision sur la base du dossier de la cour dont la décision fait l’objet de l’appel. Un appel régulier n’est pas interdit si aucune preuve additionnelle n’est produite, mais il n’y a aucune obligation de procéder ainsi. L’appel prévu n’est pas non plus un « procès de novo » au sens strict du terme. Ce terme renvoie habituellement à un procès qui requiert la création d’un tout nouveau dossier, comme s’il n’y avait pas eu de procès en première instance. Ainsi, dans un procès de novo, la cause doit être jugée uniquement sur la base du nouveau dossier et sans égard à la preuve présentée dans les procédures antérieures.

 

[…]

 

[48]     Un appel sous le régime l’article 56 implique, du moins en partie, une révision des conclusions du registraire. Du fait que les connaissances spécialisées du registraire sont reconnues, ses décisions méritent une certaine déférence. Dans l’affaire Benson & Hedges (Canada) Limited v. St. Regis Tobacco Corporation, [1969] R.C.S. 192, le juge Ritchie a déclaré ceci à la page 200 :

 

[traduction]

À mon avis la décision du registraire sur la question de savoir si une marque de commerce crée de la confusion doit être considérée comme étant d’un grand poids et la conclusion d’un fonctionnaire qui, au cours de son travail quotidien, doit rendre des décisions sur ce point et sur d’autres questions connexes en vertu de la Loi ne doit pas être rejetée à la légère, mais comme l’a déclaré le juge Thorson, alors président de la Cour de l’Échiquier, dans l’affaire Freed and Freed Limited c. The Registrar of Trade Marks et al, 14 C.P.R. 19 :

 

[...] le fait de se fonder sur la décision du registraire portant que deux marques se ressemblent au point de créer de la confusion ne doit pas aller jusqu’à décharger le juge qui entend l’appel de cette décision de l’obligation de trancher la question en tenant compte des circonstances de l’espèce.

 

[49]     Dans l’affaire McDonald’s Corp. c. Silcorp Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 207, à la p. 210, le juge Strayer (alors juge puîné), commentant cette citation du juge Ritchie, a expliqué que, bien que la Cour doive demeurer libre de revoir la décision du registraire, cette décision ne doit pas être rejetée à la légère.

 

[…]

 

[51]     Je pense que l’approche suivie dans les affaires Benson & Hedges et McDonald’s Corp. est conforme à la conception moderne de la norme de contrôle. Même s’il y a, dans la Loi sur les marques de commerce, une disposition portant spécifiquement sur la possibilité d’un appel à la Cour fédérale, les connaissances spécialisées du registraire sont reconnues comme devant faire l’objet d’une certaine déférence. Compte tenu de l’expertise du registraire, et en l’absence de preuve supplémentaire devant la Section de première instance, je considère que les décisions du registraire qui relèvent de son champ d’expertise, qu’elles soient fondées sur les faits, sur le droit ou qu’elles résultent de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, devraient être révisées suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter. Toutefois, lorsqu’une preuve additionnelle est déposée devant la Section de première instance et que cette preuve aurait pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l’exactitude de la décision du registraire.

 

 

[17]           La prochaine étape consiste donc à établir si les nouveaux éléments de preuve de Wrangler auraient influé de façon significative sur la décision du registraire.

 

[18]           La demanderesse soutient que les nouveaux éléments de preuve faisant état de sa diversification envisagée de produits et la preuve par sondage des buveurs de bière canadiens portent directement sur les motifs principaux pour lesquels la Commission a rendu une décision favorable à la défenderesse. En effet, la membre de la Commission a fait la déclaration suivante relativement aux facteurs c) et d) :

[…] Outre qu’elle n’a pas produit de preuve à l’appui de ce point, l’Opposante n’a pas non plus fourni d’éléments de preuve (par exemple, un type de preuve par sondage, des études, etc.) démontrant que le consommateur établirait entre la marque bien connue de l’Opposante et les Marchandises de la Requérante une association mentale susceptible de l’induire en erreur sur la source des marchandises.

 

                                                           [Non souligné dans l’original.]

 

 

[19]           Elle a ensuite fait la déclaration suivante à l’égard de la notoriété de la marque de Wrangler :

[…] l’Opposante a décidé de ne produire aucun élément de preuve, quel qu’il soit, (preuve tirée d’un sondage, études, etc.) à l’appui de sa prétention que le consommateur effectuerait, entre la marque bien connue de l’Opposante et les Marchandises de la Requérante, une association mentale susceptible d’induire le consommateur en erreur sur la source des marchandises.

 

                                                          [Non souligné dans l’original.]

 

 

[20]           La demanderesse a, semble-t-il, interprété cela comme étant une indication pour qu’elle recueille des données d’enquête. Toutefois, le simple fait de confier un mandat pour recueillir de telles données et leur cueillette ne garantit pas qu’elles seront acceptées ou qu’elles suffiront pour écarter la décision de la Commission.

 

[21]           Après avoir étudié le sondage de la demanderesse, je suis seulement convaincu que la membre de la Commission l’aurait pris en compte et qu’il aurait été important pour le prononcé de sa décision. Je ne suis pas convaincu que le sondage aurait changé la décision de la membre de la Commission.

 

[22]           J’estime que la preuve par sondage qui a été produite comporte plusieurs lacunes. La preuve par sondage en général a souvent été jugée inadmissible, comme la Cour suprême du Canada l’a signalé dans l’arrêt Mattel, précité :

43     Jusqu’à une époque relativement récente, la preuve par sondage d’opinion était régulièrement jugée inadmissible parce qu’elle vise à répondre au volet factuel de la question précise dont est saisie la Commission ou la cour (c.-à-d., celle de la probabilité de confusion) et que, de par sa nature, il s’agit de ouï-dire puisqu’elle consiste en une compilation des opinions émises par des répondants qu’il est impossible de contre-interroger (voir p. ex. Building Products Ltd. c. BP Canada Ltd. (1961), 36 C.P.R. 121 (C. de l’É.); Paulin Chambers Co. c. Rowntree Co. (1966), 51 C.P.R. 153 (C. de l’É.)). La pratique observée plus récemment consiste à admettre la preuve par sondage d’opinion présentée par un expert compétent, dans la mesure où ses conclusions sont pertinentes quant aux questions en litige et où le sondage a été bien conçu et effectué avec impartialité.

 

 

[23]           Je constate que le sondage en l’espèce a été réalisé par un expert compétent et qu’il est pertinent; je vais donc l’admettre. Je peux suppléer aux lacunes qui entachent selon moi la preuve par sondage en limitant le poids que je lui accorderai (Mattel, précité, paragraphe 49).

 

[24]           Le sondage en l’espèce (le sondage relatif à la bière WRANGLER) a été effectué de la façon suivante : une enquête a été menée auprès de 512 buveurs de bière canadiens choisis au hasard. La question suivante a été posée à 402 participants :

[traduction]

On pourrait bientôt vendre au Canada une bière de marque WRANGLER, écrit W-R-A-N-G-L-E-R. Quelle est la première chose qui vous vient à l’esprit lorsque vous entendez parler d’une bière de marque WRANGLER?

 

 

[25]           Les 110 autres participants ont constitué un groupe témoin; une question semblable leur a été posée en utilisant plutôt le nom CHEROKEE.

 

[26]           Les réponses à cette première question variaient, mais la réponse la plus courante, représentant 32 % des réponses, était les jeans Wrangler. D’autres questions ont alors été posées aux participants qui ont fait référence aux jeans Wrangler, et ils devaient préciser s’ils croyaient (i) qu’il n’existait aucun lien entre l’entreprise qui commercialisera la bière WRANGLER et celle qui commercialisera les jeans WRANGLER, (ii) que la bière serait commercialisée avec l’autorisation de l’entreprise qui commercialise les jeans, ou (iii) qu’il existait un lien commercial quelconque entre les deux entreprises. De ces personnes, 28,5 % croyaient qu’il n’y avait aucun lien; 18,7 % pensaient qu’il y avait une autorisation; 28,5 % estimaient qu’un lien commercial quelconque existait et 24,4 % n’avaient aucun avis à cet égard.

 

[27]           Dans son mémoire, la demanderesse expose ce qu’elle croit être le résultat fondamental :

[traduction]

[...] plus de 29 % des buveurs de bière au Canada considéreront vraisemblablement qu’il existe un lien commercial entre la bière WRANGLER et les jeans WRANGLER […]

 

 

[28]           À mon avis, ce n’est pas le cas. Dans l’hypothèse la plus optimiste, la demanderesse peut affirmer que 29 % des buveurs de bière canadiens qui ont d’abord pensé aux jeans Wrangler lorsqu’on leur a posé la première question considéreront vraisemblablement qu’il existe un lien commercial entre la bière WRANGLER et les jeans WRANGLER. Selon mes calculs non officiels, moins de 10 % des personnes qui n’étaient pas dans le groupe témoin ont ainsi répondu. Je pondérerais le sondage en conséquence.

 

[29]           J’accorderais en définitive très peu de poids au sondage de la demanderesse. Même si la membre de la Commission a fait allusion au défaut de la demanderesse de produire un tel sondage, elle était loin de déclarer qu’un sondage aurait fait pencher la balance en faveur de Wrangler.

 

[30]           J’accorderais aussi peu de poids à la preuve de la demanderesse selon laquelle elle a l’intention d’étendre ses activités sur le marché des boissons en octroyant une licence relative à sa marque WRANGLER à une société qui entend l’employer pour vendre du whisky. Cette preuve a, semble-t-il, été produite en réponse au commentaire suivant de la membre de la Commission :

[…] Compte tenu des pratiques de licence actuelles et de la diversification des activités de l’Opposante, jusqu’ici, envers les détaillants de vêtements et d’accessoires western, la Requérante soutient qu’il n’y a pas de probabilité qu’un consommateur pense que la Requérante est affiliée à l’Opposante ou que l’Opposante a accordé à la Requérante une licence de tiers l’autorisant à employer sa marque de commerce avec des boissons alcoolisées brassées. Je suis d’accord.

 

 

[31]           Aucun produit de ce genre n’est actuellement offert sur le marché canadien. Rien ne permettait d’affirmer que le consommateur canadien moyen associerait la bière de marque WRANGLER à Wrangler en raison de sa ressemblance à une marque de whisky qui n’existe pas encore au Canada. Il appert tout simplement de ces éléments de preuve que des Canadiens pourraient, à l’avenir, associer WRANGLER à des boissons alcoolisées, mais même cette prétention est de nature conjecturale. On pourrait soutenir que cette preuve n’est pas pertinente.

 

[32]           Néanmoins, même si je ne suis pas convaincu que les nouveaux éléments de preuve auraient modifié la décision de la Commission, je crois que la preuve par sondage, à tout le moins, était pertinente et importante. En conséquence, je vais examiner le dossier élargi et tirer ma propre conclusion quant au bien-fondé de la décision de la Commission.

 

Le fardeau de preuve

 

[33]           Dans le cadre d’une procédure d’opposition en matière de marque de commerce, il incombe à l’opposante de produire des éléments de preuve établissant de manière raisonnable l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition (voir John Labatt Ltd. c. Molson Co., [1990] A.C.F. no 533, 30 C.P.R. (3d) 293, pages 297 et 298). Lorsque l’opposante s’acquitte de ce fardeau de preuve, c’est alors au déposant qu’il incombe de démontrer que sa marque est enregistrable (Mattel, précité, paragraphe 54). En l’espèce, cela signifie qu’il incombe au déposant d’établir que sa marque ne crée pas de confusion.

 

[34]           À mon avis, le fardeau de preuve en cause comporte deux caractéristiques d’importance qui la distinguent d’autres fardeaux et qu’il importe de signaler. D’abord, bien qu’il incombe au déposant d’une marque d’établir qu’aucune confusion n’est susceptible de survenir, il ne lui revient pas de soulever, puis de démolir, toutes les sources possibles et imaginables de confusion. Comme la Cour suprême l’a signalé dans l’arrêt Mattel :

25     C’est à l’intimée qu’incombait pendant tout le processus le fardeau de prouver l’absence de probabilité, mais la Commission n’était tenue d’examiner que les sources possibles de confusion qu’elle estimait vraisemblables.

 

 

Il incombera souvent à l’opposante de soulever le spectre d’une source de confusion qu’elle estime être vraisemblable.

 

[35]           Deuxièmement, dans le même ordre d’idées, le fardeau de preuve ne constitue pas un seuil élevé, qui oblige toujours le déposant à produire une quantité appréciable d’éléments de preuve de qualité; son rôle est plutôt de briser l’égalité. Voici ce que la membre de la Commission a déclaré à cet égard :

L’imposition du fardeau de preuve à la Requérante signifie que s’il est impossible d’arriver à une conclusion définitive une fois l’ensemble de la preuve produite, il faut rendre une décision qui lui est défavorable [voir la décision John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.) et l’arrêt Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

 

 

[36]           Lorsqu’elle s’est penchée sur la probabilité de confusion, plus particulièrement sur le genre de marchandises, services ou entreprises respectifs et la nature du commerce (alinéas 6(5)c) et d)), la membre de la Commission a conclu que la preuve de Wrangler était insuffisante. Wrangler prétend que cette déclaration constituait une erreur de droit parce qu’aucun fardeau de preuve ne lui incombait. Je ne suis pas d’accord.

 

[37]           La déclaration a été prise hors contexte. La membre de la Commission n’imposait pas à Wrangler d’établir la confusion. Il appert de sa décision qu’elle a formulé le critère juridique pertinent en application du paragraphe 6(2) de la Loi avant d’analyser chaque facteur énoncé au paragraphe 6(5). Il n’existe aucune présomption en faveur de l’opposante à une marque de commerce lorsqu’il s’agit d’examiner chaque facteur particulier en vertu du paragraphe 6(5) et il était loisible à la membre de la Commission de conclure, après avoir analysé chaque facteur, quelle partie était avantagée par le facteur en cause. La membre de la Commission a tiré la conclusion suivante après avoir examiné chaque facteur :

Conclusion sur la probabilité de confusion

 

73     À la lumière des conclusions qui précèdent, je conclus que la Requérante m’a convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que le consommateur moyen qui a un souvenir imparfait de la marque WRANGLER de l’Opposante ne serait vraisemblablement pas susceptible de confondre la source des Marchandises en voyant la Marque. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) est rejeté.

 

 

[38]           Par son commentaire, la membre de la Commission exprimait simplement l’avis que la preuve et l’argumentation de Wrangler n’avaient pas suffi à la convaincre quant à l’assertion de Wrangler. Aucun fardeau indu n’a été imposé à Wrangler. La source de confusion avancée par Wrangler (à savoir que la notoriété de WRANGLER dans le domaine des vêtements s’étendait jusqu’aux boissons alcoolisées brassées, de telle sorte qu’il y aurait confusion) a simplement été rejetée.

 

La probabilité de confusion

 

[39]           La confusion est définie au paragraphe 6(2) de la Loi et elle survient si, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce (paragraphe 6(5)), l’acheteur éventuel est susceptible d’être amené à conclure à tort :

[…] que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

 

[40]           La probabilité de confusion doit être établie en tenant compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris les critères expressément énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi. La liste des circonstances n’est pas exhaustive et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte (Mattel, précité, paragraphe 54).

 

[41]           L’acheteur éventuel visé est décrit comme étant le consommateur occasionnel plutôt pressé (Mattel, précité, paragraphe 58). La question qu’il faut trancher est de savoir si ce consommateur mythique qui a un vague souvenir de la première marque, au vu de la marque de la deuxième entreprise, aura comme première impression que les marchandises avec lesquelles la seconde marque est employée sont en quelque façon associées à celles de la marque antérieure (United States Polo Assn. c. Polo Ralph Lauren Corp., [2000] A.C.F. no 1472, 9 C.P.R. (4th) 51 (C.A.F.), page 58).

 

[42]           Étant donné les circonstances de l’espèce liées aux alinéas 6(5)a) et b), soit le caractère inhérent distinctif des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues et la période pendant laquelle les marques ont été en usage, j’estime que la conclusion de la membre de la Commission est toujours la bonne. La membre de la Commission croyait que ces facteurs étaient à l’avantage de Wrangler. Même si elle pensait que le mot WRANGLER manquait de caractère distinctif inhérent parce qu’il avait déjà un sens donné, soit un cow-boy, elle a reconnu que la marque avait acquis un sens secondaire en raison de son emploi répandu depuis très longtemps. Bien que je lui accorde peu de poids, le sondage relatif à la bière WRANGLER démontrait qu’en entendant le mot WRANGLER, autant sinon plus de personnes pensent aux jeans plutôt qu’au sens littéral du mot. Big Rock pour sa part n’a jamais employé la marque.

 

[43]           La Cour suprême a fait la déclaration suivante dans l’arrêt Mattel, précité :

3     L’appelante explique que la conceptrice originale des poupées a emprunté à ses propres enfants le nom BARBIE et celui de son « âme sœur », Ken. Le nom des marchandises de l’appelante n’a pas comme tel un caractère distinctif inhérent. En fait, Barbie est le diminutif courant de Barbara. C’est aussi un nom de famille. Au cours des quatre dernières décennies, la commercialisation massive de la poupée et de ses accessoires a cependant conféré au nom BARBIE un sens secondaire très fort qui, lorsque le contexte s’y prête, l’associe aux poupées de l’appelante dans l’esprit du public.

 

[44]           Dans la même veine, même si le mot WRANGLER peut ne pas avoir un caractère distinctif inhérent, la commercialisation lui a permis d’acquérir un sens secondaire fort qui, dans les circonstances pertinentes, permet d’associer ce mot aux jeans et aux vêtements de Wrangler.

 

[45]           Étant donné les circonstances de l’espèce liées aux alinéas 6(5)c) et d), soit le genre de marchandises, services ou entreprises respectifs et la nature du commerce, je conclus que ces facteurs sont favorables à Big Rock.

 

[46]           À mon avis, les faits de l’espèce ressemblent beaucoup aux faits de l’affaire Mattel, précitée. Dans cette affaire, l’appelante possédait une marque de commerce de grande renommée, à savoir Barbie. Elle avait misé sur la notoriété du nom pour vendre une foule de produits autres que des poupées et des accessoires de poupées, y compris des produits d’hygiène, des aliments et des vélos. Elle n’avait toutefois pas employé le nom en liaison avec l’industrie de la restauration. Néanmoins, l’appelante a tenté d’interdire une petite chaîne de restaurants de Montréal d’employer le nom. L’appelante a tenté de démontrer que sa marque BARBIE était si bien connue qu’elle transcendait le marché des poupées et elle a mené un sondage pour établir qu’il y aurait confusion avec la chaîne de restaurants. La Commission (dont la décision a été confirmée devant toutes les instances, dont la Cour suprême) a reconnu que la marque était célèbre, mais elle ne pouvait pas reconnaître qu’il y aurait vraisemblablement de la confusion, notamment en raison de l’écart considérable dans la nature des marchandises et de la clientèle.

 

[47]           Le sondage relatif à la bière WRANGLER ne fait que confirmer que la marque est bien connue en liaison avec des jeans et des vêtements. Il n’aide pas vraiment la demanderesse à prouver son affirmation selon laquelle la marque a transcendé ce marché. Qui plus est, comme je l’ai indiqué précédemment, j’accorderais peu de poids au sondage en ce qui a trait à ses résultats concernant des buveurs de bière qui penseraient qu’il existe un lien commercial s’ils voyaient de la bière de marque WRANGLER.

 

[48]           La seule preuve produite par Wrangler devant la Commission quant à cette transcendance avait trait au fait que Wrangler parrainait des rodéos et d’autres événements liés au style de vie western en compagnie de brasseurs, de constructeurs d’automobiles ainsi que d’entreprises de télécommunications. La membre de la Commission n’était pas disposée à inférer de ce fait que la notoriété de la marque relativement à des vêtements était étroitement liée à la bière. Moi non plus.

 

[49]           Bien que Wrangler puisse vouloir miser sur sa marque de renom WRANGLER pour vendre de la bière et un éventail d’autres articles, le droit canadien en matière de marques de commerce ne lui frayera pas toujours la voie à l’égard de concurrents éventuels qui tentent d’utiliser un mot tiré de la langue anglaise sur lequel Wrangler n’exerce aucun monopole. Voici ce que la Cour suprême a déclaré à cet égard au paragraphe 4 de l’arrêt Mattel, précité :

[…] mais reste à savoir si l’appelante peut invoquer le droit des marques de commerce pour empêcher d’autres personnes d’utiliser un nom aussi courant que Barbie en liaison avec des services (par exemple, des restaurants) à ce point éloignés des produits qui sont à l’origine de la renommée de BARBIE.

 

 

[50]           Enfin, j’attribuerais un poids considérable aux autres circonstances où nombre d’autres personnes emploient la marque WRANGLER en liaison avec leurs marchandises non connexes sans créer de confusion.

 

[51]           De la même façon, une entreprise de vitres d’automobiles et une entreprise d’informatique d’envergure ayant la même dénomination sociale peuvent coexister sans confusion. En l’espèce, Big Rock a soulevé l’emploi que fait Chrysler du mot WRANGLER en liaison avec un véhicule, l’emploi qu’en fait Goodyear en liaison avec une marque de pneus et l’emploi qu’en fait une autre entreprise pour vendre du tabac sans fumée. La membre de la Commission a tiré la conclusion suivante à cet égard :

69     La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en dégager des conclusions sur l’état du marché et l’on ne peut tirer de conclusions sur l’état du marché que si l’on relève un grand nombre d’enregistrements pertinents [voir la décision Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432 (C.O.M.C.), la décision Welch Foods Inc. c. Del Monte Corp. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.) et l’arrêt Maximum Nutrition Ltd. c. Kellogg Salada Canada Inc. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]. En l’espèce, treize (13) enregistrements et une (1) demande admise sont inscrits au nom de six (6) propriétaires différents. Tout en convenant avec la Requérante que treize (13) enregistrements et une (1) demande admise soutiennent l’argument de la Requérante selon lequel l’Opposante n’a pas le monopole du mot WRANGLER, j’hésite à tirer des conclusions significatives sur l’état du marché du fait que ces treize (13) enregistrements et l’unique demande appartiennent à six (6) propriétaires différents seulement. Quoi qu’il en soit, je ne considère pas cette circonstance additionnelle comme nécessaire pour conclure en faveur de la Requérante.

 

 

[52]           J’estime que cette circonstance supplémentaire est assurément au bénéfice de Big Rock.

 

[53]           En ce qui a trait à la notoriété de Wrangler, celle-ci, je l’ai dit, ne transcende pas le marché des boissons alcoolisées. Je souscris à la conclusion de la membre de la Commission portant que la notoriété de Wrangler ne se rattache qu’aux jeans, mais que sa portée a peut-être été étendue pour s’appliquer de façon générale aux vêtements.

 

[54]           J’estime que la décision de la membre de la Commission était fondée. Je ne crois pas que le consommateur occasionnel plutôt pressé ayant un vague souvenir de la marque WRANGLER de Wrangler, au vu de la marque WRANGLER de Big Rock, aura comme première impression que la bière est en quelque façon associée aux vêtements de Wrangler. Par conséquent, l’appel doit être rejeté.

 

[55]           Comme la défenderesse n’a pas participé à l’appel, il n’y a aucune adjudication de dépens.


JUGEMENT

 

[56]           LA COUR ORDONNE :

            1.         L’appel de la demanderesse est rejeté.

            2.         Il n’y a aucune adjudication des dépens.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Jean‑François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.

 

 


ANNEXE

 

Dispositions législatives pertinentes

 

Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-1

 

4.(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

 

6.(1) Pour l’application de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l’emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionnés cause de la confusion avec la marque de commerce ou le nom commercial en dernier lieu mentionnés, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article.

 

2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[...]

 

(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

 

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

 

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

 

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

 

d) la nature du commerce;

 

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

 

12.(1) Sous réserve de l’article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l’un ou l’autre des cas suivants :

 

[…]

 

d) elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;

 

38.(1) Toute personne peut, dans le délai de deux mois à compter de l’annonce de la demande, et sur paiement du droit prescrit, produire au bureau du registraire une déclaration d’opposition.

 

 

(2) Cette opposition peut être fondée sur l’un des motifs suivants :

 

a) la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30;

 

 

b) la marque de commerce n’est pas enregistrable;

 

c) le requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement;

 

d) la marque de commerce n’est pas distinctive.

 

4.(1) A trade-mark is deemed to be used in association with wares if, at the time of the transfer of the property in or possession of the wares, in the normal course of trade, it is marked on the wares themselves or on the packages in which they are distributed or it is in any other manner so associated with the wares that notice of the association is then given to the person to whom the property or possession is transferred.

 

 

6.(1) For the purposes of this Act, a trade-mark or trade-name is confusing with another trade-mark or trade-name if the use of the first mentioned trade-mark or trade-name would cause confusion with the last mentioned trade-mark or trade-name in the manner and circumstances described in this section.

 

 

 

 

 

 

 

(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

 

 

 

 

 

. . .

 

(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

 

 

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

 

 

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

 

 

(c) the nature of the wares, services or business;

 

(d) the nature of the trade; and

 

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

 

 

12.(1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not

 

 

 

. . .

 

(d) confusing with a registered trade-mark;

 

 

38.(1) Within two months after the advertisement of an application for the registration of a trade-mark, any person may, on payment of the prescribed fee, file a statement of opposition with the Registrar.

 

(2) A statement of opposition may be based on any of the following grounds:

 

(a) that the application does not conform to the requirements of section 30;

 

(b) that the trade-mark is not registrable;

 

(c) that the applicant is not the person entitled to registration of the trade-mark; or

 

(d) that the trade-mark is not distinctive.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-348-09

 

INTITULÉ :                                       WRANGLER APPAREL CORP.

 

                                                            c.

 

                                                            BIG ROCK BREWERY LIMITED PARTNERSHIP

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 18 NOVEMBRE 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       LE 30 AVRIL 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Diane E. Cornish

 

POUR LA DEMANDERESSE

Aucune comparution

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Aucun avocat inscrit au dossier

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

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