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Cour fédérale

Federal Court


Date : 20100430

Dossier : IMM-2567-09

Référence : 2010 CF 476

Ottawa (Ontario), le 30 avril 2010

En présence de monsieur le juge O'Reilly

 

 

ENTRE :

FEIFEI FENG

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

I.        Aperçu

 

[1]               Mme Feifei Feng est entrée au Canada en provenance de la Chine en 2002 en tant qu’étudiante. Elle est retournée en Chine en 2004 et s’est mariée, puis est revenue au Canada quelques mois plus tard avec son mari. Elle a appris que sa mère avait commencé à pratiquer le Falun Gong, en Chine, à la suite de son divorce d’avec le père le Mme Feng. Une amie de la famille a rendu visite à Mme Feng à Toronto en 2006 et a ramené avec elle, de la part de Mme Feng, de la documentation sur le Falun Gong à l’intention de la mère de Mme Feng. En 2007, Mme Feng a constaté que sa mère avait été arrêtée en raison de sa participation aux activités du Falun Gong. Le Bureau de la sécurité publique (BSP) s’est aperçu que Mme Feng avait envoyé une partie de la documentation. Maintenant, selon les affirmations de Mme Feng, il veut l’arrêter si elle retourne en Chine.

 

[2]               Mme Feng a expliqué sa situation à un tribunal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié dans sa demande d’asile au Canada. Elle a aussi fait part de ses préoccupations à l’endroit de son enfant, qui, à son avis, ne détiendrait aucun droit en Chine si Mme Feng devait y retourner. La Commission a jugé qu’elle n’était pas un témoin crédible.

 

[3]               Mme Feng soutient que les conclusions tirées par la Commission étaient déraisonnables et me demande d’ordonner à un autre tribunal de réexaminer sa demande d’asile. Toutefois, je ne vois aucune raison d'annuler la décision de la Commission et je dois, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[4]               La seule question est de savoir si la décision de la Commission était raisonnable.

 

II.     Analyse

 

(1)   La décision de la Commission

 

[5]               La Commission a conclu que Mme Feng n’avait pas réellement envoyé de la documentation sur le Falun Gong à sa mère. Selon son témoignage, Mme Feng a inséré les documents dans une boîte-cadeau, qu’elle a par la suite emballée et confiée à l’amie de sa mère. Elle savait que les inspections à l’aéroport étaient peu rigoureuses et avait la certitude que les documents ne seraient pas découverts lors du retour en Chine de l’amie de sa mère. Elle a omis de lui mentionner le contenu de la boîte parce qu’elle pensait que cette dernière refuserait d’être impliquée dans l’importation de documents de contrebande.

 

[6]               La Commission a jugé peu vraisemblable que Mme Feng, une jeune femme éduquée et intelligente, fasse courir de graves risques à sa mère et l’amie de sa mère à cause de sa conduite. De plus, la peine qu’elle s’est donnée pour dissimuler les documents dans une boîte-cadeau contredit son affirmation que les autorités ne les trouveraient probablement pas. Mme Feng avait imprimé de la documentation à partir d’Internet et en a remis une copie à la Commission, qui a cependant remarqué que la documentation dont elle a été saisie avait été imprimée seulement huit jours avant l’audience et ne pouvait pas, en conséquence, servir à prouver ce que Mme Feng aurait fait parvenir à sa mère deux ans plus tôt.

 

[7]               La Commission a également constaté que le BSP n’était pas, dans les faits, à sa recherche. Mme Feng avait affirmé que le BSP la cherchait partout, chez elle et chez des amis et parents. Toutefois, dans son exposé circonstancié, Mme Feng avait simplement déclaré : [Traduction] « le BSP me cherchait », sans mentionner de lieu en particulier. La Commission a tiré une conclusion défavorable de cette divergence et s’est aussi demandé pourquoi le BSP chercherait Mme Feng en Chine, étant donné qu’elle avait quitté le pays avec un permis de sortie. La Commission a conclu que les autorités savaient sans doute qu’elle se trouvait à l’étranger.

 

[8]               De plus, la Commission a estimé que Mme Feng avait délibérément omis de dire aux autorités de l’Immigration où elle se trouvait, sachant qu’elle vivait au Canada sans statut. La Commission a tiré une conclusion défavorable de son intention de tromper les autorités.

 

[9]               Bien que Mme Feng n’ait pas exprimé ses préoccupations à l’endroit de son enfant dans sa demande d’asile, la Commission a évalué le bien-fondé de celles-ci. Elle a conclu, en se fondant sur la preuve documentaire, que les inquiétudes de Mme Feng auraient pu être valables si elle et son mari avaient contrevenu à la politique de l’enfant unique en Chine, mais ce n’était pas le cas. Rien n’indiquait que Mme Feng ou son enfant subiraient des conséquences fâcheuses s’ils retournaient en Chine.

 

(2)   La décision de la Commission était-elle raisonnable?

 

[10]           Mme Feng soutient que les conclusions de la Commission n’étaient pas étayées par la preuve. De plus, elle laisse entendre que la Commission a tiré des conclusions gratuites en ce qui a trait à son absence de statut au Canada. Ce point n’était pas pertinent pour sa demande d’asile.

 

[11]           Après avoir examiné le dossier, je ne peux pas être d’accord avec l’affirmation de Mme Feng que les conclusions de la Commission n’étaient pas appuyées par la preuve. Sa conclusion que Mme Feng n’a pas envoyé de documentation à sa mère était fondée sur le témoignage de Mme Feng. La conclusion de la Commission que ses explications étaient peu plausibles découle de son témoignage au sujet de ses intentions et actes en ce qui a trait à la documentation sur le Falun Gong. Cette conclusion n’était pas déraisonnable compte tenu de la preuve. En outre, pour ce qui est de la valeur probante des documents imprimés soumis à la Commission, je ne constate aucune erreur dans l’observation de la Commission que ces documents ne peuvent pas corroborer la description par Mme Feng des documents qu’elle a envoyés, ou leur envoi.

 

[12]           En ce qui concerne la conclusion que le BSP n’était pas à sa recherche, encore une fois, la Commission a fondé sa conclusion sur les omissions dans l’exposé circonstancié de Mme Feng, dans sa déposition orale et dans la preuve documentaire. Je ne peux pas convenir que la conclusion de la Commission n’était pas étayée par la preuve.

 

[13]           Quant à l’analyse par la Commission de son statut d’immigration, je conviens avec Mme Feng que cette question n’était pas particulièrement pertinente pour sa demande d’asile. Toutefois, la crédibilité générale de Mme Feng était un élément fondamental sur lequel la Commission devait se prononcer et, pour cette raison, je ne peux pas lui reprocher d’avoir tenu compte de son témoignage au sujet de son statut d’immigration même s’il était, à proprement parler, accessoire à sa demande.

 

[14]           Par conséquent, je ne peux pas conclure que la décision de la Commission était déraisonnable.

 

III.   Conclusion et décision

 

[15]           Les conclusions de la Commission appartiennent aux issues possibles acceptables au regard des faits et du droit et c’est pourquoi je conclus qu’elles étaient raisonnables. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Les parties n'ont pas soumis de question de portée générale pour certification et aucune n'est énoncée.

 

 


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  la demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.                  aucune question de portée générale n'est énoncée.

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2567-09

 

INTITULÉ :                                       FEIFEI FENG

                                                            c.

                                                            Le ministRE de la citoyenneté

                                                            et de l’immigration

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ont.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 2 février 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET

JUGEMENT :                                    Le juge O’Reilly

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 30 avril 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Leonard Borenstein

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Bradley Bechard

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Leonard H. Borenstein

Avocat

Toronto (Ont.)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ont.)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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