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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20100326

Dossier : T-1238-02

Référence : 2010 CF 218

ENTRE :

ESEMUEDE HENRY IDADA

demandeur

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT PUBLICS

(motifs du jugement confidentiels rendus le 24 février 2010)

 

 

LE JUGE ZINN

 

[1]               Le 3 mars 2002, l’avion du demandeur en provenance du Nigéria via Milan s’est posé au terminal 1 de l’aéroport international Pearson de Toronto. Il a dû passer à l’immigration et à la douane. Ce processus ne s’est pas avéré aussi anodin pour M. Idada que pour la plupart des milliers de voyageurs qui passent par l’aéroport chaque jour. Ses bagages et effets personnels ont été fouillés et il a été contraint de se soumettre à une fouille à nu et à une « fouille au petit coin » (loo search), comme l’appellent euphémiquement les autorités douanières. Au cours de son entrée au Canada, et pendant qu’il subissait ces fouilles, M. Idada prétend avoir subi un préjudice physique et émotionnel par suite des actes des agents des douanes, qui sont des employés de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC)[1].

 

L’action

[2]               M. Idada réclame des dommages‑intérêts à la défenderesse pour sa détention et sa fouille, qu’il prétend illégales, pour les voies de fait qu’il aurait subies et pour la diffamation verbale que lui auraient fait subir les agents des douanes.

 

[3]               Lors d’une conférence préparatoire, les parties ont convenu que cinq questions devaient être tranchées au cours de l’instruction de la présente action, questions que je reformule ainsi :

a.       la question de savoir si les agents des douanes avaient des motifs raisonnables pour détenir et fouiller la personne et les bagages de M. Idada le 3 mars 2002;

b.      la question de savoir si la fouille a été effectuée incorrectement;

c.       la question de savoir si, au cours de la fouille, les agents des douanes ont employé une force raisonnable;

d.      la question de savoir si le demandeur a subi un préjudice, une perte ou un dommage par suite de la fouille ou de la détention et, dans l’affirmative, l’étendue du préjudice et le montant de la perte ou du dommage;

e.       la question de savoir si la défenderesse a diffamé le demandeur et, dans l’affirmative, les dommages qui découlent de cette diffamation.

 

[4]               Au début du procès, l’avocat de M. Idada a fait savoir à la Cour que le demandeur ne donnait pas suite à sa réclamation de dommages‑intérêts pour diffamation parce que la personne à laquelle les propos diffamatoires allégués avaient été tenus, l’ex‑épouse de M. Idada, ne pouvait se présenter devant la Cour au Canada pour témoigner.

 

[5]               Par ordonnance datée du 8 octobre 2009, l’instruction de l’action a été scindée. Par conséquent, les présents motifs se limitent à la question de la responsabilité.

 

La crédibilité des témoins

[6]               Monsieur Idada a été la seule personne citée à témoigner par le demandeur. La partie défenderesse a cité les huit témoins suivants, tous des employés de l’ADRC : William Kelly, Dennis Chin‑Sang, Nick Kostovski, Dan Tangney, Ken Kirkpatrick, Mary Parente, Jerry Jesso et Paul Brady.

 

[7]               Il y avait des contradictions dans les témoignages concernant les événements clés qui se sont déroulés dans la zone douanière du terminal 1 le 3 mars 2002, et il est donc nécessaire de tirer une conclusion relative à la crédibilité. Mes conclusions à cet égard sont fondées sur le fait que j’ai entendu toute la preuve, la cohérence et la rationalité de la preuve et le comportement des témoins.

 

[8]               J’estime que M. Idada a été un témoin crédible. Il a fait de son mieux pour répondre aux questions qui lui étaient posées sous serment et n’a pas exagéré son témoignage. Il n’a pas cherché à minimiser les déclarations antérieures qu’il avait faites et qui contredisaient son témoignage au procès. Sa première lettre de plainte envoyée en 2002 à la défenderesse, relativement à la façon dont il avait été traité par ses agents des douanes, exagérait la conduite de ceux‑ci. Les contradictions entre son témoignage au procès et ses déclarations écrites antérieures n’étaient pas fondamentales à sa réclamation. La version quelque peu exagérée des événements présentée dans sa lettre de plainte s’explique par l’intensité de la situation et l’embarras profond qu’il a éprouvé du fait de devoir subir une fouille personnelle et d’avoir à acquiescer à la demande de fournir un échantillon de selles à des fins d’inspection.

 

[9]               Lors de son témoignage, l’agent Tangney s’est beaucoup appuyé sur des notes consignées le jour même dans son calepin. Ces notes provenaient d’autres notes qu’il avait prises sur du papier écolier à l’époque des événements, mais qu’il avait subséquemment détruites. J’accepte la proposition de l’avocat voulant que la Cour ne dispose d’aucun moyen de savoir si les notes originales contenaient des renseignements utiles au demandeur ou si les notes consignées dans le calepin ont été taillées sur mesure pour obtenir l’autorisation recherchée pour procéder à une fouille personnelle.

 

[10]           Bien que l’agent Tangney ait admis qu’il conservait peu de souvenirs des événements en dehors de ces notes, son témoignage au procès s’est révélé beaucoup plus détaillé que ses notes et, dans certains cas, incompatible avec celles‑ci. J’estime qu’il a fabriqué son témoignage au procès sur les événements clés pour minimiser sa propre conduite. J’ai également trouvé qu’il était évasif sur des points essentiels lors de son contre-interrogatoire. Par exemple, il a refusé de reconnaître que M. Idada avait éloigné sa main et sa serviette de l’agent Tangney lorsqu’il avait essayé de l’atteindre jusqu’à ce que la réponse qu’il avait donnée lors de son interrogatoire préalable lui soit lue.

 

[11]           J’estime que l’agent Kirkpatrick a été un témoin crédible dans l’ensemble; cependant, son témoignage au procès a parfois contredit les notes qu’il avait pris à l’époque des événements en cause, ou peu de temps après. Son témoignage au procès s’est souvent révélé plus utile pour justifier la conduite de l’agent Tangney que les notes qu’il a prises à l’époque. J’accepte sans hésitation les notes qu’il a prises à l’époque des événements; par contre, dans la mesure où son témoignage au procès contredisait ses notes ou n’était pas compatible avec celles‑ci, je rejette son témoignage au procès.

 

[12]           Comme dans la plupart des cas, la vérité quant aux événements qui se sont produits se trouve dans les récits fournis par les témoins; aucun témoignage n’est entièrement accepté. Voici les faits tels que je les ai constatés.

 

Les faits

[13]           M. Idada est né au Nigéria en 1959. Il a déménagé aux États‑Unis en 1989 et est devenu citoyen américain en 2002. Il vit à Boston, au Massachusetts.

 

[14]           Après son arrivée aux É.‑U., M. Idada a d’abord occupé plusieurs emplois allant de la sécurité au transport pour ensuite devenir propriétaire d’une [traduction] « entreprise de transport ». Lorsqu’on l’a questionné, au cours de l’interrogatoire principal et du contre‑interrogatoire, il a précisé que par « entreprise de transport », il entendait une entreprise de taxi, et a témoigné qu’il était propriétaire d’une entreprise de taxi et de limousines à Boston. L’agent Tangney a fait grand cas en 2002, et au procès, du fait que M. Idada a décrit son activité commerciale comme une entreprise de transport. À mon avis, les soupçons de l’agent Tangney n’étaient pas fondés. Premièrement, s’il est vrai qu’un Canadien ou un Américain de souche ne décrirait probablement pas un chauffeur de taxi indépendant comme quelqu’un qui exploite une entreprise de transport, M. Idada n’est natif d’aucun de ces pays; l’anglais est une langue qu’il a apprise. Deuxièmement, ce n’est ni faux ni trompeur de dire qu’un chauffeur de taxi à son compte exploite une entreprise de transport.

 

[15]           M. Idada a témoigné qu’en 2002, il procédait à l’expansion de son entreprise pour se lancer dans l’importation et l’exportation. Encore là, la défenderesse a fait grand cas du fait que son entreprise n’a été constituée en société que plus tard. M. Idada a expliqué que la constitution en société et l’obtention des permis d’exploitation nécessaires prennent du temps et qu’il avait d’abord exploité son entreprise d’importation et d’exportation sous la dénomination sociale de son entreprise de transport.

 

[16]           Au début de 2002, il a quitté Boston pour se rendre au Nigéria. Il est arrivé au Nigéria le 18 janvier 2002. Il avait expédié deux conteneurs de dindon congelé des É.‑U. au Nigéria et s’y rendait pour vendre la cargaison de dindon congelé. Il a témoigné qu’il en était alors au début de sa nouvelle entreprise d’importation et d’exportation et que cette transaction avait été couronnée de succès.

 

[17]           Il est demeuré au Nigéria jusqu’au 2 mars 2002, date à laquelle il est monté à bord d’un avion en provenance de Lagos, au Nigéria, à destination de Milan, en Italie, et de là, en direction de Toronto, au Canada. Comme il avait conclu son affaire au Nigéria, il a décidé de regagner l’Amérique du Nord. Bien qu’il soit allé de Boston au Nigéria avec un billet aller‑retour, il ne s’en est pas servi pour rentrer à Boston. Il avait décidé de revenir au Canada. Il affirme avoir agi ainsi parce qu’il avait entendu dire, pendant son séjour au Nigéria, qu’il y avait, au Canada, des produits de dindon moins chers que ceux qu’il avait achetés aux É.‑U. Son client nigérian lui avait montré des échantillons de dindon provenant du Canada et lui avait demandé de se renseigner sur l’entreprise et la possibilité d’expédier des dindons à partir du Canada.

 

[18]           Il a demandé au gérant de son entreprise au Nigéria, M. Solomon Worghiren, de lui acheter un billet d’avion pour Toronto. M. Idada a expliqué qu’il compte sur M. Worghiren pour vendre les produits qu’il expédie au Nigéria, lorsqu’il ne s’y rend pas lui‑même, et lui remettre l’argent. M. Idada a demandé à M. Worghiren d’acheter les billets nécessaires, ce qu’il a fait, au comptant. M. Idada a témoigné qu’à cette époque, au Nigéria, toutes les opérations financières, même celles qui étaient très dispendieuses, se réglaient comptant et que les cartes de crédit n’étaient pas utilisées. Son témoignage n’a pas été contredit.

 

[19]           Les restrictions quant aux vols internationaux en provenance du Nigéria exigeaient que les avions quittant le Nigéria atterrissent d’abord dans leur pays d’origine. M. Idada a donc pris un avion d’Al Italia à destination de Milan, en Italie, puis un avion d’Air Canada en partance pour Toronto.

 

[20]           M. Idada a candidement admis qu’en dehors du fait que son client nigérian lui avait montré des échantillons de dindon canadien, il n’avait effectué aucune recherche sur le marché du dindon canadien avant de se rendre au Canada. Il a témoigné que [traduction] « J’avais retenu le nom et j’ai pensé que si je venais ici, je serais en mesure de le googler, pour ensuite faire des téléphones, puis aller voir, comme je le fais aux É.‑U. ». Il prévoyait effectuer cette recherche sur Internet et faire ses téléphones d’une chambre d’hôtel à Toronto. Il n’avait pas réservé d’hôtel avant son arrivée à l’aéroport Pearson. Il s’agissait de son premier séjour au Canada.

 

[21]           Pendant qu’il était dans les airs, il a mangé et bu. Il affirme avoir pris deux repas durant le vol de Lagos à Milan, et deux autres repas et une collation durant le vol de Milan à Toronto.

 

[22]           Il est arrivé au Canada au terminal 1 le 3 mars 2002, à 14 h 30 environ. Comme la plupart des voyageurs, il a rencontré plusieurs agents d’immigration et des douanes pendant qu’il passait par le processus de contrôle. Il s’est trompé sur le nombre d’agents qu’il a rencontrés ce jour‑là, mais cela n’est pas déterminant. Il se souvenait cependant très bien de ses rapports avec les plus importants d’entre eux.

 

[23]           Chaque voyageur qui arrive à la ligne primaire des douanes doit présenter sa carte de déclaration douanière, son formulaire E311 et son passeport à l’agent des douanes. La ligne primaire est le premier contact que les voyageurs ont avec un agent des douanes lorsqu’ils arrivent au Canada. Si l’agent de la ligne primaire a des doutes sur un passager du point de vue de l’immigration, il peut envoyer le passager à la zone secondaire de l’immigration en faisant une marque sur le formulaire E311 du passager, faute de quoi il peut laisser entrer le passager au Canada. Si l’agent a des doutes du point de vue de la douane, il met sur le formulaire E311 une note indiquant aux agents d’envoyer le passager à la zone secondaire des douanes.

 

[24]           Après avoir franchi la ligne primaire des douanes, le voyageur arrive devant un agent au point d’entrée qui dirige les passagers vers le bon endroit. L’agent du point d’entrée regarde s’il y a une note sur le formulaire E311. S’il y en a une, le passager est dirigé vers l’immigration pour rencontrer un agent d’immigration. S’il n’y en a pas, le voyageur est dirigé vers la zone de réception des bagages pour prendre ses bagages.

 

[25]           S’il y a un renvoi à la ligne secondaire des douanes, l’agent de la ligne secondaire procédera probablement à une fouille des bagages du voyageur et pourra exiger, comme en l’espèce, que d’autres fouilles soient effectuées.

 

[26]           William Kelly était un agent des douanes étudiant travaillant à la ligne primaire des douanes de l’aéroport Pearson le 3 mars 2002. Il a témoigné qu’il n’avait aucun souvenir des rapports qu’il avait eus avec M. Idada le 3 mars 2002. On lui a montré un courriel qu’il a envoyé à Edna Soifer, le 24 mars 2002, à la suite de la plainte que M. Idada a adressée aux autorités douanières peu de temps après les événements qui ont donné lieu à la présente action. Ce courriel se lit ainsi :

[traduction] J’ai parcouru mon carnet et je n’ai rien noté au sujet du passager en question. Ce dont je me souviens n’est que pur rappel de mémoire.

 

De ce que je [sic] me souviens, M. Idada m’a remis un passeport américain et a affirmé s’être rendu au Nigéria pour visiter sa famille. Il a dit qu’il était en transit pour rentrer chez lui à Boston où il a affirmé être propriétaire d’une entreprise de taxi. Il m’a présenté une carte de l’entreprise de taxi. Je lui ai demandé comment il allait rentrer chez lui et il a dit qu’il ne le savait pas encore et qu’il espérait obtenir un vol pour Boston. Il a ensuite affirmé qu’il ne connaissait personne ici au Canada et ne savait pas où il allait loger dans l’intervalle.

 

C’est tout ce dont je peux me souvenir. J’espère que cela aidera.

 

[27]           L’agent Kelly n’a aucun souvenir de la façon dont il a marqué le formulaire E311 de M. Idada, que ce soit du point de vue de l’immigration ou de la douane, et la défenderesse n’a pas trouvé le formulaire. Après avoir quitté l’agent Kelly, M. Idada a placé son formulaire E311 dans son passeport.

 

[28]           L’agent Kelly n’a pas pris de notes sur sa rencontre avec le demandeur. Il a témoigné qu’il ne prenait des notes que lorsqu’il pensait que son interaction avec le voyageur pouvait avoir des suites. À titre d’exemple, il a dit que si le voyageur se conduisait de façon très hostile ou s’il soupçonnait fortement la personne de contrebande de stupéfiants, il prenait des notes.

 

[29]           Dennis Chin‑Sang travaillait comme agent d’immigration au terminal un le 3 mars 2002. Il a témoigné qu’il ne se souvenait pas d’avoir eu des échanges avec le demandeur. Lorsqu’on lui a montré le passeport de M. Idada, il a reconnu que la marque du timbre de l’immigration canadienne qu’il contenait, et qui admettait M. Idada au Canada le 3 mars 2002, avait été faite par son propre timbre et a aussi reconnu ses initiales sur la marque du timbre.

 

[30]           La marque du timbre contenait également la note « VH – 05MR2002 », qui signifiait, selon son témoignage, que la personne était en transit et autorisée à rester au Canada jusqu’au 5 mars 2002. Avec une telle autorisation, rien n’empêchait M. Idada de loger dans un hôtel au Canada jusqu’au 5 mars 2002.

 

[31]           M. Idada se souvient d’être d’abord passé par l’immigration où on lui a demandé pourquoi il venait au Canada et ce qu’il allait faire à Toronto. Il se souvient qu’il avait son manteau d’hiver, sa serviette et son portefeuille avec lui. La partie défenderesse a accordé beaucoup d’importance au portefeuille et, plus particulièrement, à la question de savoir s’il s’agissait d’un « portefeuille » ou d’un « étui double » (bi‑fold). M. Idada a utilisé le mot « portefeuille » ou « sac à main », et a témoigné qu’il contenait son passeport, ses cartes de crédit, ses cartes d’affaires et de l’argent. Je parlerai d’un portefeuille tout au long des présents motifs. Il a été produit en preuve au procès, et il s’agit d’un portefeuille pour hommes, typique de ceux que portent plusieurs hommes. Sa description n’est pas déterminante, et rien ne permet d’affirmer qu’il ne contenait pas exactement ce que M. Idada a dit qu’il contenait.

 

[32]           M. Idada affirme qu’il a été traité avec professionnalisme et n’a rien à redire au processus qu’il a expérimenté jusque‑là. Après être passé par l’immigration, il est allé prendre ses bagages et se souvient de s’être ensuite rangé dans une file et de s’être fait ordonner de passer par les douanes. Il a témoigné que l’agent des douanes lui avait posé sensiblement les mêmes questions que celles posées par l’agent d’immigration et qu’il avait donné [traduction] « une réponse presque identique ». Il s’agissait de l’agent des douanes Nick Kostovski.

 

[33]           L’agent Kostovski avait un certain souvenir des rapports qu’il avait eus avec M. Idada le 3 mars2002. Il n’a pas pris de notes sur leur interaction à cette époque, mais il a envoyé un courriel, le 23 mars 2002, dans le cadre de l’enquête concernant la plainte de M. Idada, dans lequel il décrivait son souvenir de leur interaction. Il s’est servi de ce document au procès pour se rafraîchir la mémoire.

 

[34]           Lorsque l’agent Kostovski a appelé M. Idada à son comptoir, il lui a demandé son formulaire E311 et son passeport, et peut‑être son billet d’avion. Il se tenait d’un côté du comptoir face à M. Idada. Il a demandé à M. Idada d’où il venait et celui‑ci lui a dit qu’il venait du Nigéria. Il a dû préciser car l’agent Kostovski savait qu’il n’y avait pas de vols directs vers Toronto à partir du Nigéria. M. Idada lui a dit qu’il avait pris un vol en provenance du Nigéria à destination de Milan, en Italie, puis un vol en direction du Canada.

 

[35]           L’agent Kostovski se souvient que le formulaire E311 indiquait que M. Idada avait été envoyé à la ligne secondaire des douanes par l’agent de la ligne primaire parce qu’il avait des doutes quant à l’exactitude de sa déclaration. Il a témoigné que [traduction] « le passeport [de M. Idada] était dans un portefeuille qui sortait de son manteau » et il s’est souvenu que ledit portefeuille contenait le passeport et d’autres documents. Il contenait également 1300 $US.

 

[36]           L’agent Kostovski affirme avoir demandé à M. Idada pourquoi il n’était pas rentré directement aux É.‑U., mais il ne se souvient pas de la réponse. Lorsqu’on lui a demandé ce que M. Idada avait fait lorsqu’il lui avait demandé son passeport, il a témoigné ceci :

[traduction] Il l’avait sorti [son portefeuille] de son manteau et il n’arrêtait pas de bouger comme s’il fouillait dedans, et cela prenait vraiment beaucoup de temps. Je lui ai dit quelque chose comme « Il me faut votre passeport ». Ensuite, j’ai fait ça, pendant qu’il le tenait, en lui disant, genre, « Donnez-moi donc ça, tout ça ».

 

Durant ce témoignage, lorsqu’il a dit [traduction] « [e]nsuite, j’ai fait ça », l’agent Kostovski a fait une démonstration de son geste ayant consisté à arracher le portefeuille à M. Idada. Comme M. Idada et l’agent Kostovski ont tous les deux fait cette démonstration pendant le procès, il est juste de dire que le portefeuille a été brusquement arraché des mains de M. Idada avec une certaine force par l’agent Kostovski. M. Idada a reproché à l’agent Kostovski d’avoir pris son portefeuille, et non seulement son passeport, ce à quoi l’agent Kostovski a répondu qu’il avait le droit de le renvoyer d’où il venait et de le fouiller.

 

[37]           Lors du contre‑interrogatoire, l’agent Kostovski a reconnu que c’est après qu’il eut arraché le portefeuille à M. Idada que celui‑ci a commencé à se fâcher et à parler fort, ce qui a [traduction] « agité » l’agent Kostovski. Bref, ils étaient tous les deux bruyants et agités. La différence est que M. Idada avait raison d’être agité, contrairement à l’agent Kostovski; il était à l’origine de l’agitation de M. Idada.

 

[38]           Le témoignage de l’agent Kostovski au procès diffère du courriel qu’il a écrit à la suite de la plainte de M. Idada. Il y affirme que M. Idada s’est agité quand on lui a demandé de remettre à des fins d’inspection son portefeuille contenant le passeport et les documents. À mon avis, l’agent Kostovski savait qu’il avait mal agi et essayait de minimiser ses actes aux yeux de ses supérieurs.

 

[39]           M. Idada a réagi avec colère au fait qu’on lui ait enlevé son portefeuille. Il s’est mis à parler fort. L’agent Kostovski a témoigné qu’il ne cessait de répéter qu’il était un citoyen américain et qu’il [traduction] « n’avait pas à faire ça » ce qui, lorsqu’on le lui a demandé, signifiait pour lui qu’il [traduction] « n’avait pas à me remettre son passeport. Je ne me rappelle pas exactement ce qu’il a dit, mais il est devenu agité, il s’est mis à parler fort et il m’a dit “Oh! Je ne suis pas obligé. Je suis Américain.” ». J’admets que M. Idada s’est mis à parler fort, et il peut très bien avoir dit qu’il était un citoyen américain. Je n’admets pas que par cela, il voulait dire qu’il n’avait pas à remettre son passeport à des fins d’inspection. Premièrement, il l’avait déjà remis à l’agent Kelly et à l’agent Chin‑Sang, sans aucun incident ni objection. Deuxièmement, il avait souvent voyagé et savait que l’examen du passeport faisait partie de la procédure habituelle pour entrer dans un pays étranger. Troisièmement, il essayait de remettre son passeport lorsque son portefeuille et son passeport lui ont été arrachés des mains.

 

[40]           J’estime que la mention de sa citoyenneté se rapportait probablement plus à la façon dont il était traité qu’à toute objection qu’il pouvait avoir à acquiescer à la demande de l’agent.

 

[41]           Je retiens le témoignage de M. Idada selon lequel l’agent Kostovski a ensuite dit qu’il n’avait pas le temps d’écouter ces [traduction] « absurdités » et demandé à M. Idada de faire un pas de côté, ce qu’il a fait, pendant que l’agent Kostovski conservait son portefeuille, son contenu et son passeport.

 

[42]           M. Idada s’est assis sur le banc derrière lui. Lorsque l’agent Tangney est entré dans la zone secondaire des douanes à 16 h, il a vu l’agent Kostovski et M. Idada en train d’avoir ce qu’il a décrit comme une [traduction] « dispute » au comptoir. Je retiens le témoignage du demandeur et de l’agent Tangney selon lequel l’agent Kostovski s’est approché de l’agent Tangney et lui a demandé de continuer l’inspection puisqu’il quittait son service. Je rejette le témoignage de l’agent Kostovski voulant que l’agent Tangney lui ait demandé s’il voulait qu’il s’occupe de M. Idada.

 

[43]           L’agent Tangney a pris le relais, et l’agent Kostovski n’a plus eu aucun rapport avec le demandeur puisque sa journée de travail était terminée. Tout ce que l’agent Tangney savait à ce moment‑là, c’était qu’il y avait eu une dispute entre M. Idada et l’agent Kostovski, mais il ne savait pas ce qui avait provoqué cette dispute, et ne l’a jamais demandé. S’il l’avait su, les événements qui allaient s’ensuivre se seraient peut‑être passés différemment.

 

[44]           M. Idada dit avoir été humilié par la conduite de l’agent Kostovski. Il s’est décrit comme un voyageur expérimenté qui comprenait et acceptait les procédures habituelles d’immigration et de douane, mais a dit s’être senti embarrassé par la façon dont il avait été traité et, plus particulièrement, par le fait qu’on lui ait dit qu’il pouvait être renvoyé d’où il venait. Lorsqu’on lui a demandé si cela l’avait vexé, il a candidement admis que oui.

 

[45]           L’agent Tangney s’est dirigé vers M. Idada et lui a dit de le suivre avec ses bagages, ce qu’il a fait. L’agent Tangney a ouvert ses sacs et sa serviette et les a fouillés de fond en comble. Dans le cadre de sa fouille, l’agent Tangney a retiré la doublure des coins de la serviette, lui causant du dommage. Contrairement à ce que l’on a prétendu, je ne crois pas qu’il ait causé du dommage aux bagages de M. Idada durant sa fouille. Si les bagages avaient été endommagés au point de ne plus pouvoir être refermés, il serait raisonnable de s’attendre à ce que M. Idada l’ait soulevé à l’époque. Il ne l’a pas fait. Je ne retiens pas non plus le témoignage de M. Idada voulant qu’on lui ait alors demandé d’enlever ses souliers, son manteau et sa ceinture. Une telle demande, à ce stade du processus, serait habituelle à l’extrême, et si elle avait eu lieu, Mme Parente l’aurait certainement relevé lorsqu’elle a parlé au demandeur.

 

[46]           M. Idada a témoigné que l’agent Tangney lui avait posé sensiblement les mêmes questions que celles qui lui avaient été posées précédemment, mais de façon plus approfondie. L’agent Tangney a présenté un témoignage beaucoup plus détaillé sur leur conversation.

 

[47]           L’agent Tangney se souvient que le billet d’avion indiquait qu’il avait été acheté au comptant la veille du départ et se rapportait à un vol en provenance du Nigéria à destination de Toronto via Milan. Il affirme avoir trouvé étrange qu’un voyageur d’affaires achète un billet au comptant. Il a aussi trouvé bizarre qu’il ait été acheté la veille du départ, car il s’agissait de la façon la plus onéreuse de prendre l’avion. Il a témoigné que les trafiquants de drogue voyagent souvent avec des billets payés comptant de manière à ce que l’on ne puisse pas les repérer.

 

[48]           Il a demandé à M. Idada pourquoi il se rendait à Toronto et celui‑ci lui a dit que c’était pour une affaire de dindon. Lorsqu’il lui a demandé de donner des détails, M. Idada lui a dit qu’il avait une entreprise qui exporte du dindon des É.‑U. au Nigéria et qu’il était à Toronto pour s’occuper de cette affaire. M. Idada lui a dit qu’il ne connaissait personne à Toronto, qu’il n’avait pas réservé d’hôtel mais allait en trouver un, qu’il n’avait pris aucune disposition pour rencontrer quelqu’un, mais qu’après s’être installé dans sa chambre, il irait sur Internet pour [traduction] « établir des contacts ou faire des recherches ». Il a dit qu’il était venu à Toronto parce que, au cours de son séjour au Nigéria, il s’était trouvé dans une grande chambre congélateur où il avait vu une boîte sur laquelle il était écrit [traduction] « Dindon de Toronto » et que, compte tenu de cela et du renseignement que lui avait fourni son client, il avait décidé de se rendre à Toronto.

 

[49]           L’agent Tangney a témoigné que, lorsqu’il avait demandé à M. Idada de décrire son entreprise à Boston, il l’avait [traduction] « décrite comme une très grande entreprise, avec plusieurs camions sur la route, et plusieurs – vous savez, plusieurs déplacements outre‑mer. Et il a laissé entendre que c’était une très grande entreprise ». Il a également affirmé que, lorsqu’il avait demandé à M. Idada ce qu’il entendait par « entreprise de transport », il lui avait dit qu’il avait plusieurs limousines sur la route. Je rejette ce témoignage. Il n’est pas compatible avec les notes que l’agent Tangney a transcrites dans son calepin le 3 mars 2002, et qui disaient ceci : [traduction] « Propriétaire d’une entreprise de taxi avec deux taxis ». Il n’y est aucunement question du fait d’avoir des camions sur la route ou « plusieurs limousines ». Je rejette également le témoignage de l’agent Tangney voulant que M. Idada ait laissé entendre que son entreprise d’exportation était très prospère. Encore là, les notes de l’agent indiquent que M. Idada lui a dit [traduction] « qu’il tent[ait] de démarrer une entreprise d’exportation de dindon des É.‑U. au Nigéria ».

 

[50]           M. Tangney a témoigné que M. Idada n’avait pas pu lui dire combien coûtait l’expédition d’un conteneur de Boston au Nigéria. Lorsqu’on l’a questionné sur la dimension des conteneurs qu’il utilisait et sur l’emploi de conteneurs réfrigérés, il a témoigné que M. Idada connaissait peu ou pas ces sujets. Même si c’était vrai, ce ne serait guère surprenant car M. Idada n’avait procédé qu’à une seule expédition à ce moment‑là; il n’était pas un exportateur expérimenté. Et puis, il n’est aucunement fait mention de ces questions dans ses notes.

 

[51]           L’agent Tangney a témoigné que, lorsqu’il lui avait posé des questions sur son entreprise, M. Idada était devenu agité et agressif dans ses réponses, lui demandant pourquoi on lui demandait toutes ces choses et affirmant qu’il était un citoyen américain. Il a décrit l’humeur de M. Idada comme très changeante. Quand on lui posait des questions sur son entreprise, il devenait agité et donnait des réponses vagues, mais quand on lui posait des questions générales sur son vol, il était calme. Lorsqu’il lui a demandé qui avait acheté le billet d’avion, M. Idada lui a dit que c’était son gérant au Nigéria. Lorsqu’il lui a demandé combien le billet avait coûté et pourquoi il avait été acheté la veille du départ, il a répondu qu’il ne le savait pas puisqu’il s’agissait d’une décision de son gérant.

 

[52]           L’agent Tangney a témoigné que, lorsqu’il lui avait demandé l’original de son billet d’avion pour le trajet Boston‑Nigéria, M. Idada lui avait dit qu’il ne l’avait pas. Lorsqu’il lui a demandé s’il s’agissait d’un billet simple ou aller‑retour, il affirme que M. Idada lui a dit qu’il ne le savait pas puisque c’était son gérant de Boston qui l’avait acheté. Lorsqu’il lui a demandé des renseignements sur le gérant de Boston, M. Idada n’a pas été en mesure d’en fournir.

 

[53]           L’agent Tangney a témoigné que M. Idada lui avait dit qu’il s’en retournerait à Boston en autobus ou en train, ce qu’il avait trouvé étrange de la part de quelqu’un qui se présentait comme un homme d’affaires prospère. Ce témoignage contredit ses propres notes du 3 mars 2002. Il a écrit ceci : [traduction] « Pendant le vol, le sujet a décidé qu’il s’ennuyait de ses enfants – a décidé de ne pas rester à Toronto et de prendre immédiatement un train ou un avion pour rentrer à Boston – se sent aussi malade (rhume) ».

 

[54]           L’agent Tangney a fouillé la serviette de M. Idada, mais n’y a rien trouvé [traduction] « se rapportant au motif qui avait amené M. Idada à venir au Canada en liaison avec son entreprise de dindon ». M. Idada lui a donné sa carte d’affaires, mais il a témoigné qu’il croyait qu’il s’était contenté de lui donner nom et adresse. Il écrit ceci dans ses notes : [traduction] « A une carte d’affaires pour cette entreprise [c.‑à‑d. l’entreprise d’exportation] mais n’a pas encore commencé ». Dans son courriel du 24 mars 2002, l’agent Kelly a écrit que, d’après son souvenir, M. Idada avait dit être propriétaire d’une entreprise de taxi et lui avait présenté une carte de l’entreprise de taxi. J’estime qu’il est plus probable que M. Idada ait fourni à l’agent Tangney une carte d’affaires se rapportant à son entreprise de taxi.

 

[55]           L’agent Tangney a témoigné avoir trouvé dans la serviette la partie retour du billet aller‑retour pour le trajet Boston‑Nigéria. C’est ce qui ressort des notes de l’agent Tangney, qui disent ceci : [traduction] « Billet de retour trouvé dans la serviette du sujet indique le 14 mars comme date de retour de Lagos à JFK. Le sujet a d’abord déclaré que son gérant de Boston avait acheté le billet. Il affirme maintenant l’avoir acheté lui‑même ». M. Idada a témoigné n’avoir jamais dit à l’agent Tangney qu’il avait un gérant à Boston. J’accepte sa version de cette partie de leur conversation. M. Idada n’avait tout simplement aucune raison de dire à l’agent qu’il avait un gérant à Boston. Il y a tout au plus eu un malentendu entre l’agent Tangney et M. Idada – ce dernier parlait fort probablement de son plus récent voyage en provenance du Nigéria alors que l’agent Tangney faisait référence au voyage précédent à destination du Nigéria.

 

[56]           L’agent Tangney a vidé la serviette et la valise et les a toutes les deux radiographiées mais n’a trouvé aucune contrebande.

 

[57]           L’agent Tangney a témoigné être allé voir l’agent Kelly pour lui demander pourquoi il avait envoyé M. Idada à la zone secondaire, et il affirme qu’on lui a dit trois choses : (1) que M. Idada avait dit que, pendant le vol à destination de Toronto, il avait changé d’idée quant au fait de rester à Toronto parce qu’il s’ennuyait de ses enfants et qu’il allait repartir pour Boston; (2) qu’il allait le faire immédiatement, en train ou en avion; et (3) que le billet à destination de Toronto était le seul billet qu’il avait pu obtenir. Ce témoignage ne concorde pas avec les notes de l’agent Tangney, qui disent ceci : [traduction] « Vérifié pourquoi auprès de l’agent Kelly de la ligne primaire, il dit avoir demandé au sujet pourquoi il venait au Canada. Le sujet a répondu que c’était le seul billet qu’il avait pu obtenir ». Dans son courriel du 24 mars 2002, l’agent Kelly n’indique pas qu’il s’agissait du seul billet qu’il avait pu obtenir; il a plutôt écrit que M. Idada lui avait dit qu’il était en transit vers Boston, qu’il espérait obtenir un vol pour Boston, qu’il ne connaissait personne au Canada et qu’il ne savait pas où il allait loger dans l’intervalle.

 

[58]           L’agent Tangney dit s’être ensuite adressé à l’agent d’immigration qui avait admis M. Idada, l’agent Chin-Sang, et lui avoir demandé ce qu’il se rappelait de leur conversation. Il a témoigné que l’agent d’immigration l’avait admis pour un motif ayant [traduction] « quelque chose à voir avec une affaire de dindon ». Rien dans le calepin de l’agent Tangney n’indique qu’il a parlé à l’agent Chin-Sang.

 

[59]           L’agent Tangney dit être ensuite retourné dans la zone secondaire où il a eu une autre conversation avec M. Idada au sujet de son épouse et de sa famille. Il a demandé à M. Idada quand il leur avait parlé pour la dernière fois et il lui a dit qu’il avait parlé à son épouse après avoir reçu son billet pour Toronto, c’est‑à‑dire la veille. L’agent Tangney dit avoir ensuite obtenu son numéro de téléphone à la maison et avoir téléphoné à Mme Idada à Boston. Il s’est présenté comme un agent des douanes qui appelait de Toronto, au Canada, et dit avoir indiqué qu’il s’agissait d’un appel de routine se rapportant à l’arrivée d’une personne au Canada. Il lui a demandé si elle pouvait lui dire pourquoi son mari était à Toronto. Il dit qu’elle a répondu qu’elle croyait que son mari était au Nigéria. Lorsqu’il lui a demandé comment M. Idada gagnait sa vie, elle a dit qu’il était chauffeur de taxi. Il a témoigné qu’elle avait ajouté qu’il n’exploitait aucune autre entreprise. Les notes de l’agent Tangney ne font aucunement allusion à cette conversation.

 

[60]           L’agent Tangney dit être ensuite revenu à M. Idada et lui avoir posé d’autres questions sur son « entreprise de dindon », y compris dans quelle mesure elle avait du succès. Il a demandé à M. Idada combien d’argent il pouvait faire et dit qu’il a répondu qu’il faisait environ 75 000 $ par année. L’agent Tangney dit s’être ensuite excusé et être revenu quelques minutes plus tard en déclarant faussement avoir appelé l’IRS, qui ne lui avait pas donné la même réponse que lui au sujet de son revenu. L’agent Tangney affirme que M. Idada lui a alors dit qu’il s’était en fait prévalu d’une perte de 7 000 $ l’année précédente. Encore là, ce n’est pas ce qui ressort des notes de l’agent Tangney, et je retiens le témoignage de M. Idada selon lequel une telle conversation concernant son revenu déclaré n’a jamais eu lieu, bien qu’il puisse fort bien y avoir eu une conversation au sujet de la production de déclarations de revenus.

 

[61]           L’agent Tangney a alors dit à M. Idada qu’il ne croyait pas son histoire et lui a demandé s’il avait quelque chose à lui dire, à ce stade, sur le véritable motif de son voyage au Canada. Il a témoigné que le demandeur avait maintenu son explication pour son voyage à Toronto. L’agent Tangney dit avoir ensuite exposé à M. Idada les préoccupations que soulevait son explication.

 

[62]           Il a dit qu’il était préoccupé par le fait que M. Idada avait modifié son histoire par rapport à ce qu’il avait dit à l’agent de la ligne primaire, qu’il avait conté une histoire différente à l’agent d’immigration, qu’il n’était pas en mesure de leur fournir un numéro leur permettant de joindre son gérant au Nigéria, qu’il lui avait dit qu’il n’avait pas connaissance du billet aller‑retour pour le trajet Boston‑Nigéria parce que son gérant de Boston l’avait acheté, alors qu’il affirmait maintenant l’avoir acheté lui‑même, et enfin, que son explication concernant l’entreprise de dindon semblait peu crédible. De plus, il a dit au demandeur que son épouse avait été appelée et qu’elle l’avait décrit comme un chauffeur de taxi et ne savait pas qu’il était à Toronto. L’agent Tangney affirme aussi avoir remarqué que M. Idada avait [traduction] « la bouche pâteuse » mais que, lorsqu’on lui avait offert un breuvage, il avait dit que ça allait. Quand on lui a posé la question, M. Idada a dit qu’il avait soif et faim, mais quand on lui a offert à manger, il a refusé. À ce moment‑là, l’agent Tangney a témoigné avoir dit au demandeur qu’il le soupçonnait d’avoir ingéré des stupéfiants ou de transporter des stupéfiants ou de la contrebande.

 

[63]           L’agent Tangney a témoigné avoir décidé d’obtenir une autorisation de la surintendante pour procéder à une fouille personnelle de M. Idada parce qu’il le soupçonnait d’avoir ingéré un stupéfiant. Il a témoigné que ses soupçons étaient fondés sur les observations suivantes :

                    i.                                                 M. Idada avait la bouche pâteuse, ce qui indique la soif, mais il a refusé de l’eau. Les gens qui ont ingéré des stupéfiants ne veulent ni boire ni manger parce que cela peut les faire aller à la toilette.

                   ii.                                                 M. Idada a dit à l’agent de la ligne primaire des choses qui différaient ou ont été omises lorsqu’il a parlé à l’agent Tangney. Plus précisément, a) il a dit à l’agent de la ligne primaire, mais pas à l’agent Tangney, que, s’il avait eu un motif de se rendre à Toronto, il avait changé d’idée pendant le vol, b) il a dit à l’agent de la ligne primaire que c’était le seul billet d’avion qu’il avait pu obtenir, ce qui, de l’avis de l’agent Tangney, était peu probable puisque le mois de mars ne tombait pas dans la haute saison des voyages, et c) il a dit à l’agent de la ligne primaire qu’il retournerait immédiatement à Boston mais a dit à l’agent Tangney qu’il allait rester au Canada pour explorer le secteur du dindon.

                 iii.                                                 Bien qu’il affirme ne pas avoir tenu compte de la dispute avec l’agent Kostovski, l’agent Tangney a constaté que son comportement était très changeant, et que, quand on lui posait des questions précises et directes, il devenait agité et se fâchait.

                 iv.                                                 Il n’a pas cessé de demander pourquoi on lui posait certaines questions et de dire qu’il était un citoyen américain, mais lorsqu’on lui a demandé en quoi cela était pertinent, il n’a pas pu répondre.

                  v.                                                Il s’est d’abord présenté comme un homme d’affaires prospère exploitant une entreprise très viable ayant plusieurs camions sur la route, mais a ensuite modifié son histoire pour dire qu’il s’agissait d’une entreprise en démarrage.

                 vi.                                                Le billet d’avion à destination du Canada avait été acheté comptant, ce qui est courant de la part des contrebandiers car ils ne peuvent ainsi être repérés.

               vii.                                                 Le billet avait été acheté la veille du départ, ce qui est courant chez les trafiquants de drogue car ils voyagent souvent à la dernière minute lorsque la drogue est disponible.

              viii.                                                 Le billet avait été acheté par un tiers, ce qui est également courant de la part des trafiquants de drogue qui affirment que quelqu’un d’autre a organisé le voyage pour eux, et le fait qu’il était impossible de joindre le gérant de M. Idada au Nigéria pour qu’il confirme son histoire.

                 ix.                                                 Le vol provenait du Nigéria, qui est un pays source pour les stupéfiants.

                  x.                                                 Il a d’abord affirmé que son billet pour le trajet Boston‑Nigéria avait été acheté par son gérant de Boston, mais s’est ensuite ravisé pour dire qu’il l’avait acheté lui‑même.

                 xi.                                                 Plutôt que d’utiliser son billet de retour, il avait acheté un nouveau billet pour le Canada.

               xii.                                                 Il a dit à l’agent Kelly qu’il était ce soir‑là en transit vers Boston, mais a dit à l’agent Tangney qu’il restait à Toronto pour faire des recherches sur le secteur du dindon.

              xiii.                                                 L’épouse de M. Idada a dit qu’elle ne savait pas qu’il était à Toronto, alors qu’il avait indiqué qu’ils s’étaient parlé la veille et qu’il lui avait fait savoir où il se trouvait et qu’il se rendait à Toronto.

             xiv.                                                 Son épouse a déclaré qu’il était chauffeur de taxi et n’avait pas d’autres intérêts commerciaux, alors qu’il avait indiqué être propriétaire d’une entreprise de transport florissante qui exploitait plusieurs limousines.

               xv.                                                 Il avait d’abord affirmé avoir fait 75 000 $ l’année précédente, mais après que l’agent Tangney eut prétendu avoir appelé l’IRS pour vérifier ce fait, il s’était ravisé pour dire qu’il s’était prévalu d’une perte.

             xvi.                                                Il ne disposait d’aucun document permettant d’établir l’existence de son entreprise.

            xvii.                                                 Il en savait si peu sur les frais liés à l’exportation de dindon que l’agent Tangney a estimé qu’il était invraisemblable qu’il soit venu à Toronto après avoir vu une caisse de morceaux de dindon au Nigéria et sans avoir établi de contacts dans la région de Toronto.

          xviii.                                                 Il a dit avoir mangé à bord de l’avion le même nombre de fois que celui qu’on apprend couramment à dire aux trafiquants de drogue pour donner à penser qu’il est peu probable qu’ils aient avalé de la drogue.

             xix.                                                 Il a dit être allé à la selle à bord de l’avion. On apprend souvent aux trafiquants de drogue à faire cette déclaration pour donner à penser qu’il est peu probable qu’ils aient avalé de la drogue.

 

[64]           L’agent Tangney a témoigné qu’après avoir noté [traduction] « quelques‑uns » de ces motifs dans son calepin, il était allé voir sa surintendante, Mary Parente, lui avait présenté ses arguments et lui avait demandé l’autorisation de procéder à une fouille personnelle, y compris une fouille au petit coin, de M. Idada.

 

[65]           L’agent Tangney a témoigné que la première note inscrite dans son calepin indique 15 h 58 comme heure à laquelle il a commencé ses discussions avec M. Idada. Son calepin indique également qu’il est allé voir Mme Parente à 17 h 20 et qu’après leur entretien, elle a approuvé la fouille et l’a indiqué en inscrivant ses initiales et la date dans son calepin. Le calepin indique « OK », l’heure inscrite est 17 h 20, et la date est précisée. Il ressort donc du dossier que l’entretien avec Mme Parente a duré, tout au plus, une minute.

 

[66]           On peut raisonnablement supposer que cette brève conversation n’a porté que sur les éléments notés dans le calepin, vu qu’il aurait été impossible d’aborder, au cours de l’entretien d’une minute, la totalité des 19 éléments que l’agent Tangney a mentionnés dans son témoignage au procès.

 

[67]           Mme Parente a témoigné n’avoir aucun souvenir précis de leur entretien préalable à l’approbation de la fouille à nu et au petit coin. Elle dit que sa façon de procéder implique habituellement un [traduction] « entretien assez long » avec l’agent et qu’il lui arrive de le renvoyer d’où il vient pour qu’il obtienne des précisions sur les motifs invoqués à l’appui de la demande de fouille. En contre‑interrogatoire, elle a dit n’approuver que 30 à 50 % des demandes de fouille que les agents lui demandent d’approuver. Comme elle l’a affirmé : [traduction] « Je pense qu’il doit exister des motifs raisonnables sérieux pour soumettre quelqu’un à une fouille. Ce n’est pas quelque chose que l’on prend à la légère. C’est une très grave – je considère que c’est une question très grave ». Elle a également témoigné qu’environ 80 % des fouilles personnelles ne permettent pas de trouver de la contrebande sur la personne fouillée.

 

[68]           Malgré son témoignage voulant qu’elle prenne très au sérieux les demandes visant à procéder à des fouilles personnelles et qu’elle approuve moins de la moitié de ces demandes, aucun élément de preuve n’établit que, dans la présente affaire, elle a fait preuve de la diligence qu’elle dit exercer habituellement. En fait, le très court laps de temps qu’elle a passé avec l’agent Tangney avant d’autoriser la fouille indique, en l’espèce, un manque de diligence de sa part.

 

[69]           Mme Parente corrobore le témoignage de M. Idada voulant que, à sa demande, il ait parlé à un superviseur avant d’être mis en détention. Dans sa note de service datée du 31 mars 2002, envoyée à la suite de la plainte, elle dit qu’elle a vu M. Idada assis sur le banc dans la zone secondaire [traduction] « en train de prendre des notes » et qu’il voulait voir un superviseur. Elle est allée le voir. Il lui a demandé son nom, qu’elle a refusé de lui révéler, mais elle lui a donné son numéro d’insigne. M. Idada lui a dit qu’il voulait parler à un avocat. Dans sa note de service, elle écrit ceci : [traduction] « Je l’ai informé qu’il n’était ni en détention ni en état d’arrestation à ce stade, et que si cela devait arriver, on lui offrirait de consulter un avocat ». En contre‑interrogatoire, elle a admis avoir été dans l’erreur, car les politiques de l’ADRC stipulent que le voyageur a le droit de consulter un avocat dès qu’il en fait la demande.

 

[70]           Après avoir approuvé la fouille personnelle de M. Idada, Mme Parente a confié à l’agent Kirkpatrick la tâche d’aider à cette fouille.  L’agent Tangney est revenu à M. Idada, qui était assis dans la zone des douanes, et lui a lu ses droits et mise en garde relatifs à la détention, tirés de son carnet douanier, de la façon suivante :

[traduction] Je vous mets en détention parce que vous êtes soupçonné d’avoir introduit ou tenté d’introduire en contrebande au Canada des marchandises dont l’importation est prohibée, contrôlée ou réglementée par ou en vertu de la Loi sur les douanes ou de toute loi fédérale.

 

J’ai des motifs raisonnables de croire que vous transportez des marchandises (ou de la drogue) sur vous ou près de vous, et je vous mets en détention pour les besoins d’une fouille personnelle, comme l’autorise l’article 98 de la Loi sur les douanes.

 

Comprenez‑vous le motif de la détention?

 

[M. Idada a indiqué qu’il comprenait les motifs de la détention.]

 

Vous n’êtes pas obligé de dire quoi que ce soit. Que vous parliez ou non, vous n’avez rien à espérer d’aucune promesse de faveur, ni rien à craindre d’aucune menace. Tout ce que vous direz pourra servir de preuve.

 

Vous avez le droit d’avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat.

 

Vous avez le droit d’obtenir gratuitement des conseils juridiques d’un avocat de garde. On peut joindre l’avocat de garde au 1-800-265-0451 durant les heures suivantes, 24 heures par jour, sept jours par semaine.

 

Vous avez le droit de demander des conseils gratuits dans le cadre du régime d’aide juridique de la province. Le numéro de téléphone de l’aide juridique dans la région est le 905-453-1723. Leur bureau est situé au 200 – 205 County Court Boulevard, dans la Ville de Brampton, et les heures d’ouverture sont de 8 h 30 à 16 h 30.

 

Avez-vous compris ce que je vous ai dit? Voulez-vous appeler un avocat maintenant?

 

[M. Idada a répondu « Oui, un qui est libre. »]

 

[71]           L’agent Tangney a décrit le comportement de M. Idada à la suite de la lecture de ces passages comme [traduction] « très, très calme ». L’agent Kirkpatrick s’est approché et a appris que M. Idada avait été mis en détention. L’agent Kirkpatrick a lu à M. Idada la mise en garde secondaire suivante :

[traduction] Si vous avez parlé à un agent de police ou à quiconque, ou si une telle personne vous a parlé au sujet de la présente affaire, je tiens à ce que vous compreniez clairement que cela ne doit pas vous inciter à faire une déclaration.

 

[72]           Après avoir lu les droits et mises en garde relatifs à la détention, l’agent Tangney dit avoir expliqué que M. Idada serait autorisé à appeler un avocat avant que l’on procède à la fouille. Il dit avoir expliqué qu’ils entreraient dans la salle de fouille et qu’il pourrait ensuite appeler un avocat. Il aurait expliqué qu’il aurait la possibilité d’avoir un entretien privé avec son avocat. Il dit avoir également informé M. Idada qu’il pouvait appeler le consulat américain s’il le voulait. Il a témoigné avoir expliqué que ces appels, une fois terminés, allaient être suivis d’une fouille personnelle, c’est‑à‑dire une fouille à nu, suivie d’une visite au petit coin des douanes, qui pourrait nécessiter jusqu’à trois selles pour convaincre les agents quant à la question de savoir s’il avait de la contrebande dans le corps. L’agent Tangney a témoigné que M. Idada avait semblé comprendre le processus qui lui était expliqué et affirme que M. Idada aurait aussi été fouillé avant d’entrer dans la salle de fouille.

 

[73]           M. Idada se souvient seulement qu’on lui ait dit qu’il aurait le droit d’appeler un avocat et le consulat américain avant que l’on procède à la fouille. J’estime que son souvenir est plus probable que celui rapporté par l’agent Tangney.

 

[74]           La salle de fouille mesure environ 8 pi x 8 pi et contient un banc de métal situé d’un côté à l’autre d’un mur à environ 18 po du plancher. Un téléphone est fixé au mur. On trouve aussi sur ce mur une affiche contenant les renseignements figurant à l’article 98 de la Loi sur les douanes. Le numéro de téléphone de l’aide juridique est également affiché. Cette salle a deux portes, l’une menant de la zone secondaire des douanes et l’autre menant au petit coin situé dans une salle de même dimension. Règle générale, la personne détenue entre dans la salle en premier suivie des agents. M. Idada a été décrit par les agents comme très calme et coopératif au moment d’entrer dans la salle. M. Idada est entré en premier en portant sa serviette dans sa main droite et son manteau sur l’autre bras.

 

[75]           Quand l’agent Tangney a réalisé que M. Idada avait sa serviette, il lui a demandé de la lui donner [traduction] « pour qu’il puisse la placer en dehors de la salle ». M. Idada a répondu qu’ils avaient déjà fouillé la serviette. L’agent Tangney a témoigné avoir répondu que, même s’ils l’avaient fouillée, les bagages ne pouvaient entrer dans la salle. En contre‑interrogatoire, on a demandé à l’agent Tangney pourquoi la serviette devait être retirée de la salle avant que M. Idada ait pu parler à un avocat. Il a répondu que c’était [traduction] « parce que je lui en ai donné instruction ». Lorsqu’on lui a demandé quel préjudice aurait pu résulter du fait de permettre à M. Idada de la garder pendant qu’il appelait son avocat, l’agent Tangney a répondu qu’elle [traduction] « aurait pu être utilisée comme une arme » et qu’il aurait pu l’ouvrir et détruire une partie de son contenu. L’agent Tangney a admis qu’il avait fouillé et radiographié la serviette et avait déjà examiné son contenu. On n’y avait rien trouvé dont la destruction aurait pu être préoccupante pour l’agent Tangney.

 

[76]           M. Idada se tenait au milieu de la salle devant l’agent Tangney, l’agent Kirkpatrick étant à côté d’eux. L’agent Tangney mesure 6 pi 2 po et pèse environ 210 à 220 livres, et M. Idada mesure 5 pi 10 po et pèse 290 livres.

 

[77]           L’agent Tangney a fourni le témoignage suivant sur les événements qui ont suivi :

[traduction]

Q.        Pouvez-vous me dire ce qui se passe ensuite?

R.         Nous avons commencé à nous lancer la balle. Je n’arrêtais pas de demander la serviette à M. Idada, juste de me la remettre. Il n’arrêtait pas de répondre que je l’avais déjà fouillée, ce à quoi je répondais « Je le sais », et lui donnais encore le même motif, les bagages ne peuvent entrer dans la salle. Ensuite, j’ai donné une option à M. Idada – vous savez, je lui ai dit que j’étais d’accord. Je l’avais déjà fouillée. Ce n’est pas grave. « D’accord. Vous la mettez en dehors de la salle. » Ça n’a pas fonctionné. Puis j’ai dit « D’accord. Pourquoi ne la mettez-vous pas dans le coin là‑bas? » Et la situation n’a fait que s’aggraver à partir de là, nous avons recommencé notre petit jeu, puis M. Idada est devenu plus agité.

Q.        Mais il refuse de vous donner la serviette (sic) à ce stade?

R.         C’est exact.

Q.        Grosso modo, combien de fois lui avez-vous demandé de vous remettre la serviette?

R.         Six, sept, huit fois, avec des scénarios différents, en commençant par « Je vais prendre la serviette. D’accord. Vous mettez la serviette dehors ». Pour ensuite finir par la lui enlever pour la mettre par terre.

Q.        Vous dit-il pourquoi il ne veut pas la mettre par terre?

R.         Il ne faisait que répéter que nous l’avions déjà fouillée.

Q.        Qu’avez-vous fait ensuite?

R.         Pendant que ce petit jeu progressait, à un moment donné, M. Idada – la serviette s’en est allée derrière son dos, dans sa main droite. Il la tenait comme pour l’éloigner de moi, pendant que nous continuions notre petit jeu. Et puis, il a levé la serviette au‑dessus de son épaule. Par crainte d’être agressé, d’être frappé avec la serviette, j’ai fait asseoir M. Idada sur le banc.

Q.        Vous êtes-vous senti menacé lorsque M. Idada a levé sa serviette?

R.         Oui.

 

[78]           En contre‑interrogatoire, l’agent Tangney a admis que le geste de M. Idada ayant consisté à changer la serviette de place constituait une réponse directe à sa tentative de l’atteindre :

[traduction]

Q.        Donc, ce n’était pas, d’après vous, ce n’était pas comme si vous tentiez de l’atteindre et que M. Idada retirait simplement sa main? En soulevant la serviette?

R.         La serviette s’en est allée en arrière, avec son bras derrière le dos , puis en haut.

Q.        Il essayait de vous empêcher de l’atteindre. Est-ce exact?

R.         Oui.

 

[79]           L’agent Tangney a placé son avant‑bras en travers de la poitrine de M. Idada et l’a poussé sur le banc derrière en position assise. Il dit que [traduction] « comme il continuait à se démener, j’ai décidé de le faire tomber par terre pour lui passer les menottes ». Il affirme que [traduction] « en raison de son poids, il a plutôt glissé du banc et est tombé par terre sur le dos ». Bien qu’il soit possible qu’il ait glissé du banc, la preuve indique que l’agent Tangney lui a fait une clé de poignet et l’a fait tomber par terre.

 

[80]           Il a demandé à l’agent Kirkpatrick de pousser le bouton d’alarme silencieux pour faire intervenir la police. L’agent Tangney a décrit M. Idada comme étant, à ce moment‑là, calme et coopératif. La police est arrivée en moins de trente secondes ou une minute car elle se trouvait dans le secteur. L’agent Tangney dit avoir lâché le poignet de M. Idada quand les deux policiers en uniforme sont arrivés.

 

[81]           L’agent Kirkpatrick a présenté le témoignage suivant. Lorsqu’on lui a demandé de décrire ce qui s’était passé après leur entrée dans la salle, il a dit ceci :

[traduction] Lorsque nous sommes entrés dans la salle de fouille, l’inspecteur Tangney a demandé à M. Idada de lui remettre la serviette qu’il avait dans la main. Le passager, M. Idada, a refusé de remettre la serviette. Il s’est fait demander à plusieurs reprises de remettre la serviette, et quand l’inspecteur Tangney a voulu lui enlever la serviette, M. Idada l’a soulevée dans les airs en direction de l’inspecteur Tangney. [Je souligne.]

 

[82]           Je préfère les témoignages de l’agent Kirkpatrick et de M. Idada à celui de l’agent Tangney. Je conclus que la seule instruction que l’agent Tangney a donnée à M. Idada a été de remettre sa serviette. Plus précisément, j’estime qu’il n’a pas donné à M. Idada les options qu’il a dit lui avoir données dans son témoignage principal.

 

[83]           L’agent Kirkpatrick a témoigné que, quand l’agent Tangney avait tendu la main pour lui enlever la serviette, M. Idada avait [traduction] « soulevé la serviette au‑dessus de sa tête, et vers l’arrière, le bras bien tendu ». Il a témoigné avoir pensé que M. Idada allait frapper l’agent Tangney avec la serviette, bien qu’il ait admis qu’il ne l’avait jamais avancée dans la direction de l’agent Tangney. Il a témoigné qu’après avoir été assis sur le banc, M. Idada était toujours dans un [traduction] « état de résistance », ce qui, a‑t‑il affirmé, signifiait qu’il [traduction] « ne voulait pas lâcher la serviette ». Il affirme que l’agent Tangney a ensuite saisi la main droite de M. Idada et a [traduction] « tiré » M. Idada sur le plancher.

 

[84]           En contre‑interrogatoire, l’avocat a porté à l’attention de l’agent Kirkpatrick le rapport écrit qu’il avait préparé le 20 mars 2003, à la suite de la plainte du demandeur. Plus précisément, il lui a soumis le passage suivant :

[traduction] M. Idada s’est ensuite fait demander, alors qu’il se trouvait dans la salle de fouille, de remettre à l’inspecteur Tangney la serviette qu’il avait dans la main. M. Idada a répété à plusieurs reprises qu’il ne donnerait pas la serviette à l’inspecteur Tangney. Quand l’inspecteur Tangney s’est approché de M. Idada pour récupérer la serviette, il l’a soulevée dans les airs en direction de l’inspecteur Tangney de façon imprudente.

 

 

L’agent Kirkpatrick a convenu avec l’avocat que son souvenir était plus frais en mars 2002 qu’au procès et que la déclaration qu’il avait rédigée à l’époque était exacte. En outre, il a reconnu que sa déclaration portant que la serviette avait été soulevée « de façon imprudente » n’équivalait pas à dire qu’elle avait été soulevée d’une façon menaçante.

 

[85]           Je tire la conclusion de fait que M. Idada a déplacé la serviette derrière son corps et l’a soulevée dans les airs pour tenter d’empêcher l’agent Tangney de l’atteindre. Il n’avait nullement l’intention de s’en servir comme arme, et je ne puis accepter le témoignage de l’agent Tangney voulant qu’il se soit senti menacé par ce geste.

 

[86]           Je rejette également le témoignage de l’agent Kirkpatrick au procès selon lequel il avait pensé que M. Idada allait frapper l’agent Tangney avec la serviette. S’il l’avait pensé, on aurait pu s’attendre à ce que cela figure dans ses notes relatives à cette journée, ou dans son rapport ultérieur. Cela ne figure dans aucun d’eux. J’estime que, à cet égard, l’agent Kirkpatrick a voulu apporter un témoignage en faveur de son collègue et justifier ses actes.

 

[87]           Bien que la salle soit petite et qu’ils se soient trouvés dans un espace très restreint, il est fort probable que si l’agent Tangney avait reculé sa main ou fait un pas en arrière, M. Idada aurait répondu de la même façon. Des éléments de preuve établissent que les agents des douanes sont formés pour recourir à des solutions de rechange au contact physique. En l’espèce, l’agent Tangney n’a eu recours à aucune de ces solutions. Il aurait au moins pu informer M. Idada que s’il ne lâchait pas la serviette, il pourrait être accusé d’entrave au travail d’un agent dans l’exercice de ses fonctions. Aucun élément de preuve crédible n’a expliqué pourquoi il fallait que M. Idada remette sa serviette avant d’avoir appelé un avocat et le consulat américain. J’accepte l’explication de M. Idada selon laquelle il voulait garder sa serviette avec lui parce qu’il craignait qu’on y place de la drogue ou quelque chose d’autre.

 

[88]           J’estime que l’agent Tangney a eu un contact physique avec M. Idada dans le seul but de lui enlever la serviette parce qu’il avait refusé d’obéir à l’ordre qui lui avait été donné de la remettre. J’estime également que, compte tenu de toutes les circonstances, l’ordre de remettre la serviette sans expliquer pourquoi il fallait le faire était déraisonnable. M. Idada a interprété cet ordre comme signifiant que la fouille à nu allait avoir lieu sans qu’il ait eu la possibilité de parler à un avocat ou à son consulat.

 

[89]           Quand la police est entrée, elle a été informée de ce qui s’était passé. M. Idada lui a dit qu’ils avaient convenu qu’il pourrait appeler un avocat et son consulat avant que la fouille à nu commence. Les policiers ont dit quelque chose comme [traduction] « faisons cela » et ont ensuite demandé à M. Idada s’il était prêt à coopérer et il a répondu que oui. Le témoignage de l’agent Tangney au procès étaye la position du demandeur voulant que ce qui l’avait inquiété depuis le début, c’était son droit de consulter un avocat avant que la fouille commence. L’agent Tangney a témoigné que [traduction] « M. Idada a exprimé [aux policiers] des inquiétudes quant à la raison pour laquelle il se trouvait dans cette salle, ce à quoi nous avons répondu. Je pense que cela avait quelque chose à voir avec un avocat ».

 

[90]           Les policiers sont partis, M. Idada s’est relevé pour s’asseoir sur le banc et un appel a été fait à un avocat de garde et au consulat américain. L’agent Tangney lui a lu les dispositions de l’article 98 de la Loi sur les douanes qui figuraient sur l’affiche murale, puis la fouille a commencé. Il vaut la peine de signaler que rien dans les notes prises par les agents ou dans leurs témoignages n’indique que la serviette, qui, au dire de l’agent Tangney, devait être retirée de la salle de fouille, ne l’ait en fait jamais été.

 

[91]           À 18 h 30, M. Idada a commencé à retirer ses vêtements et s’est fait demander de se pencher et d’écarter les fesses pour permettre aux agents de déceler des signes de la présence d’un bouchon anal ou de traces de vaseline indiquant que quelque chose avait été inséré dans son rectum. On n’a rien trouvé.

 

[92]           M. Idada s’est ensuite rhabillé et s’est fait demander de fournir un échantillon de selles. Les notes de l’agent Tangney indiquent qu’il a fourni le premier échantillon à 18 h 40. Il a fourni un deuxième échantillon à19 h, et un troisième à 19 h 42. Il y a lieu de signaler que, bien qu’une certaine intimité soit assurée, en ce que le voyageur n’est pas exposé à la vue de tous, ce dernier doit évacuer ces échantillons de selles en présence des agents.

 

[93]           Comme on n’a rien trouvé, M. Idada a été informé qu’il pouvait s’en aller.

 

[94]           M. Idada affirme qu’au cours de la fouille personnelle, les agents [traduction] « se sont mis à faire de mauvaises blagues ». Il se rappelle les avoir entendus dire qu’ils le mettraient bien dans l’appareil de radiographie, mais qu’il était trop gros. Il dit que c’était après qu’ils eurent ri de son pénis parce qu’il avait énormément rapetissé à cause de la température froide qui régnait dans la pièce.

 

[95]           L’agent Tangney a témoigné qu’au cours de la procédure de la fouille personnelle, il avait été question de l’appareil de radiographie. Il a témoigné ne pas savoir ce qui avait déclenché cette conversation, mais que M. Idada avait suggéré qu’on l’utilise sur lui, et que [traduction] « Ça nous a fait rire. Ça nous a tous fait rire. Vous savez, c’était – une personne pouvait passer dans un appareil de radiographie? »

 

[96]           Que la conversation sur l’appareil de radiographie ait été déclenchée par le demandeur ou l’un des agents, toute forme d’humour dans une telle situation, nettement humiliante, aurait dû être évitée. Les motifs des éclats de rire peuvent être mal interprétés par le voyageur, comme ce fut vraisemblablement le cas en l’espèce. Les politiques de l’ADRC le disent. Néanmoins, j’estime que les éclats de rire ne visaient pas à embarrasser davantage M. Idada ni à lui infliger des souffrances morales. Cela révèle tout au plus un manque de sensibilité de la part des agents.

 

[97]           Après que M. Idada eut quitté la zone des douanes, l’agent Tangney l’a regardé s’en aller. M. Idada dit avoir trouvé un élastique qu’il a pu enrouler autour de ses bagages, qui ne fermaient plus correctement. Il a essayé de prendre un avion à destination de Boston, mais s’est fait dire que le dernier vol avait décollé à 18 h 45. Il était alors 19 h ou 19 h 30. Il a loué une chambre pour la nuit au Fairmont Hotel et est rentré à Boston le lendemain matin.

 

Les autres éléments de preuve de la défenderesse

[98]           Paul Brady est le coordonnateur du Projet national sur le recours à la force de l’ASFC. Il a été cité par la défenderesse pour donner son opinion quant à savoir si la force employée par l’agent Tangney était conforme aux directives sur le recours à la force en vigueur à l’époque. Après la tenue d’un voir‑dire, j’ai conclu que la preuve d’opinion proposée ne satisfaisait pas au critère d’admissibilité. L’opinion du témoin devait être fondée sur les actes de procédure, les documents produits avant le procès et les interrogatoires préalables, et non sur la preuve effectivement présentée au procès. Le témoin n’avait pas assisté au procès. L’opinion d’un expert est admissible pour aider la Cour. En l’espèce, la Cour était au moins aussi bien placée, voire même, selon toute vraisemblance, mieux placée, du fait qu’elle avait entendu la preuve, que le témoin proposé pour tirer les conclusions qui s’imposaient quant à savoir si la force employée était raisonnable.

 

[99]           Le témoignage de M. Brady s’est donc limité aux éléments de preuve factuelle concernant les politiques sur le recours à la force pertinentes en vigueur à l’époque et la formation que M. Tangney a reçue avant l’événement en cause.

 

[100]       M. Brady a désigné et commenté la [traduction] « Politique sur le recours à la force par les agents des douanes » qui a été produite comme pièce. Selon la politique et le témoignage de M. Brady, [traduction] « le recours à une force raisonnable » par les agents dans l’exercice de leurs fonctions est justifié en vertu des articles 25 à 27, 34 et 37 du Code criminel, ainsi qu’en vertu de la Loi sur les douanes.

 

[101]       Il a décrit la formation que les agents des douanes reçoivent. Il a également décrit la technique des avantages et des options que les agents apprennent à utiliser et qui constitue une technique verbale visant à imposer l’obéissance aux voyageurs. Le témoin a souscrit à la proposition qui lui a été soumise selon laquelle le fait de se contenter de répéter un ordre à une personne obstinée ou récalcitrante n’exhorte vraisemblablement pas à l’obéissance; toutefois, si l’ordre est donné dans un contexte de [traduction] « faites ceci, sinon vous subirez telle conséquence », il est probable que la personne obéisse. Plus précisément, l’avocat du demandeur a demandé au témoin si les agents apprenaient à choisir l’option de dire aux voyageurs récalcitrants que s’ils n’obéissaient pas, ils pourraient être arrêtés. M. Brady a convenu qu’il s’agissait de l’une des options qui s’offraient aux agents. Il a également affirmé, cependant, que tout dépendait de l’urgence de la situation, et que si la personne était sur le point d’attaquer l’agent, toute discussion devait cesser et un contrôle physique devait être exercé.

 

[102]       Jerry Jesso est le chef des opérations de renseignement à l’ASFC, et ce, depuis 2005. Il est au service de la défenderesse depuis 1992. Il a été cité pour témoigner quant aux indicateurs utilisés par l’ADRC, pour expliquer les types et catégories d’indicateurs correspondant aux paramètres de la présente action et pour donner son opinion quant à la validité des indicateurs que l’agent Tangney a notés dans ses notes et dans ses rapports. Son témoignage a été entendu à huis clos.

 

[103]       Il a décrit les indicateurs comme des outils utilisés par les agents de première ligne qui, s’ils ne sont pas réfutés, peuvent laisser soupçonner qu’il existe peut‑être des motifs de procéder à un examen plus approfondi du voyageur. Les indicateurs sont utilisés par l’ADRC depuis le début des années 1970.

 

[104]       Il a témoigné que, bien que l’existence d’un seul indicateur puisse faire naître un soupçon raisonnable à l’égard d’un voyageur, il était plus courant de se trouver en présence de plusieurs indicateurs susceptibles d’éveiller le soupçon raisonnable. Il a expliqué qu’il existe deux catégories d’indicateurs : les indicateurs objectifs et les indicateurs subjectifs.

 

[105]       Les indicateurs objectifs comprennent le résultat d’un examen par un chien détecteur ou d’une radiographie. Il s’agit d’indicateurs qui sont reproductibles et ne dépendent d’aucune analyse faite par un agent. Il n’y avait aucun indicateur objectif dans le cas de M. Idada.

 

[106]       Il existe plusieurs catégories d’indicateurs subjectifs, dont le comportement verbal et non verbal, l’itinéraire, les indicateurs physiques, la documentation et les indicateurs situationnels.

 

[107]       [Omis]

 

 

[108]       [Omis]

 

 

[109]       [Omis]

 

 

 

[110]       M. Jesso a examiné chacun des 19 indicateurs qu’il a trouvés dans les documents produits par l’agent Tangney et a conclu [traduction] « que les indicateurs fournis par l’agent des douanes Tangney étaient valides et étayaient le niveau de fouille assuré ».

 

[111]       En contre‑interrogatoire, M. Jesso a reconnu que son opinion quant au caractère adéquat de la fouille personnelle effectuée par l’agent Tangney pourrait être différente si la Cour devait conclure à l’inexistence de certains des 19 indicateurs qu’il avait examinés. Il a également admis en toute candeur qu’en l’espèce il n’y avait pas d’indicateurs objectifs, qu’il ne s’agissait que d’indicateurs subjectifs.

 

[112]       Il a admis que la plupart des avaleurs de drogue qui se présentent à l’aéroport Pearson proviennent des Caraïbes, et que [traduction] « très peu d’entre eux » viennent du Nigéria, ce qui concordait avec le témoignage de l’agent Tangney selon lequel, dans ses 12 ans de service, il n’avait été confronté qu’à une [traduction] « poignée » de situations antérieures concernant le Nigéria.

 

[113]       Il a convenu avec l’avocat que pour soumettre un voyageur à une fouille à nu et à une fouille aux toilettes, il devait y avoir des [traduction] « indicateurs clairs » et de [traduction] « forts motifs ».

 

Analyse

            a)  La détention et la fouille

[114]       La question de savoir si la détention et la fouille de M. Idada étaient légales dépend de celle de savoir si elles étaient justifiées sur le plan juridique.

 

[115]       La Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.), confère le pouvoir légal de fouiller les personnes qui arrivent au Canada. L’article 98 de la Loi précise ce qui suit :

98. (1) S’il la soupçonne, pour des motifs raisonnables, de dissimuler sur elle ou près d’elle tout objet d’infraction, effective ou éventuelle, à la présente loi, tout objet permettant d’établir une pareille infraction ou toute marchandise d’importation ou d’exportation prohibée, contrôlée ou réglementée en vertu de la présente loi ou de toute autre loi fédérale, l’agent peut fouiller :

 

a) toute personne arrivée au Canada, dans un délai justifiable suivant son arrivée;

 

b) toute personne sur le point de sortir du Canada, à tout moment avant son départ;

 

c) toute personne qui a eu accès à une zone affectée aux personnes sur le point de sortir du Canada et qui quitte cette zone sans sortir du Canada, dans un délai justifiable après son départ de la zone.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(2) Dès que la personne qu’il va fouiller, en application du présent article, lui en fait la demande, l’agent la conduit devant l’agent principal du lieu de la fouille.

 

 

(3) L’agent principal, selon qu’il estime qu’il y a ou non des motifs raisonnables pour procéder à la fouille, fait fouiller ou relâcher la personne conduite devant lui en application du paragraphe (2).

 

 

(4) L’agent ne peut fouiller une personne de sexe opposé. Faute de collègue du même sexe que celle-ci sur le lieu de la fouille, il peut autoriser toute personne de ce sexe présentant les qualités voulues à y procéder.

 

98. (1) An officer may search

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) any person who has arrived in Canada, within a reasonable time after his arrival in Canada,

 

(b) any person who is about to leave Canada, at any time prior to his departure, or

 

(c) any person who has had access to an area designated for use by persons about to leave Canada and who leaves the area but does not leave Canada, within a reasonable time after he leaves the area,

 

if the officer suspects on reasonable grounds that the person has secreted on or about his person anything in respect of which this Act has been or might be contravened, anything that would afford evidence with respect to a contravention of this Act or any goods the importation or exportation of which is prohibited, controlled or regulated under this or any other Act of Parliament.

 

(2) An officer who is about to search a person under this section shall, on the request of that person, forthwith take him before the senior officer at the place where the search is to take place.

 

(3) A senior officer before whom a person is taken pursuant to subsection (2) shall, if he sees no reasonable grounds for the search, discharge the person or, if he believes otherwise, direct that the person be searched.

 

(4) No person shall be searched under this section by a person who is not of the same sex, and if there is no officer of the same sex at the place at which the search is to take place, an officer may authorize any suitable person of the same sex to perform the search.

 

 

[116]       L’article 98 de la Loi confère aux agents des douanes le pouvoir légal de fouiller une personne qui arrive au Canada s’ils la soupçonnent de transporter une substance contrôlée. La question de savoir s’il y avait des motifs raisonnables pour procéder à la fouille personnelle de M. Idada est une question de fait.

 

[117]       La défenderesse s’appuie sur l’opinion d’expert de Jerry Jesso, un employé de longue date de l’ASFC, pour dire qu’il existait suffisamment d’indicateurs pour justifier une fouille. Le demandeur se fonde sur les données historiques de l’ASFC pour affirmer que, lorsque le voyageur n’est pas sélectionné à la suite d’une découverte par un chien ou de tout autre renseignement objectif, la probabilité que la fouille donne un résultat positif, sur la base de l’application d’indicateurs, est mince. À mon avis, aucune de ces affirmations n’est exacte.

 

[118]       L’opinion de M. Jesso quant au caractère raisonnable de la fouille était fondée sur un certain nombre d’indicateurs qu’il croyait existants, mais qui, selon ce que j’ai conclu, n’existaient pas; son opinion, comme il l’a volontiers admis, aurait bien pu, de ce fait, être différente.

 

[119]       Contrairement à la position du demandeur, il ne s’agit pas d’un procès relatif au caractère raisonnable des indicateurs utilisés par les autorités douanières. Chaque cas doit être examiné en fonction de ses propres faits. Notre tâche consiste à examiner les faits constatés et à se demander si un agent des douanes raisonnable croirait, compte tenu de ces faits, que M. Idada pourrait être un trafiquant de drogue.

 

[120]       Il se peut fort bien que des faits suffisants pour justifier une fouille des bagages d’un voyageur ne le soient pas pour justifier une fouille de sa personne. Le caractère envahissant de la fouille projetée est un facteur pertinent. La Cour suprême du Canada l’a souligné dans l’arrêt R. c. Simmons, [1988] 2 R.C.S. 495, par. 49 à 51, une affaire régie par l’ancienne loi qui mettait en cause une voyageuse qu’on avait envoyée subir une inspection secondaire à son arrivée au Canada. L’agente avait conclu qu’une fouille était justifiée en se fondant sur le fait que le premier agent avait observé que la voyageuse était nerveuse, ainsi que sur la difficulté de la voyageuse à s’identifier et sur le renflement évident autour de sa taille. Une fouille à nu avait révélé la présence de stupéfiants enveloppés de bandages autour de sa taille. La Cour a conclu à la majorité que la fouille ne violait pas la Charte. Ils ont dit ceci :

J’accepte la proposition de la poursuite que les attentes raisonnables en matière de vie privée sont moindres aux douanes que dans la plupart des autres situations. En effet, les gens ne s’attendent pas à traverser les frontières internationales sans faire l’objet d’une vérification. Il est communément reconnu que les États souverains ont le droit de contrôler à la fois les personnes et les effets qui entrent dans leur territoire. On s’attend à ce que l’État joue ce rôle pour le bien‑être général de la nation. Or, s’il était incapable d’établir que tous ceux qui cherchent à traverser ses frontières ainsi que leurs effets peuvent légalement pénétrer dans son territoire, l’État ne pourrait pas remplir cette fonction éminemment importante. Conséquemment, les voyageurs qui cherchent à traverser des frontières internationales s’attendent parfaitement à faire l’objet d’un processus d’examen. Ce processus se caractérise par la production des pièces d’identité et des documents de voyage requis, et il implique une fouille qui commence par la déclaration de tous les effets apportés dans le pays concerné. L’examen des bagages et des personnes est un aspect accepté du processus de fouille lorsqu’il existe des motifs de soupçonner qu’une personne a fait une fausse déclaration et transporte avec elle des effets prohibés.

 

À mon sens, l’interrogatoire de routine auquel procèdent les agents des douanes, l’examen des bagages, la fouille par palpation et la nécessité de retirer en privé suffisamment de vêtements pour permettre l’examen des renflements corporels suspects, qui sont autorisés par les rédacteurs des art. 143 et 144 de la Loi sur les douanes, ne sont pas abusifs au sens de l’art. 8. En vertu de la Loi sur les douanes, les fouilles personnelles ne sont pas systématiques, elles sont effectuées seulement lorsque les agents des douanes ont raisonnablement lieu de supposer qu’une personne cache sur elle de la contrebande. La décision de procéder à une fouille peut faire l’objet d’une révision à la demande de la personne qui doit être fouillée. Bien qu’à certains égards les fouilles personnelles puissent être gênantes, elles sont effectuées en privé dans des pièces destinées à cette fin, par des agents du même sexe que la personne fouillée. Dans ces conditions, exiger d’une personne qu’elle retire des vêtements jusqu’à ce que la présence ou l’absence d’objets cachés puisse être établie, ce n’est pas attenter à son intégrité physique d’une façon qui puisse être considérée abusive au sens de l’art. 8 de la Charte.

 

 

[121]       Les juges majoritaires ont clairement précisé qu’ils ne se prononçaient pas sur la constitutionnalité des fouilles plus envahissantes appelées examen des cavités corporelles, qui « peuvent soulever des questions constitutionnelles entièrement différentes puisqu’il est évident que plus l’empiétement sur la vie privée est important, plus sa justification et le degré de protection constitutionnelle accordée doivent être importants » : Simmons, par. 27 et 28.

 

[122]       Dans R. c. Monney, [1999] 1 R.C.S. 652, une affaire portant sur la disposition actuelle sur les fouilles contenue dans l’article 98 de la Loi, on avait procédé à une fouille plus envahissante. L’agent avait eu des soupçons sur le voyageur parce qu’il avait payé son billet par chèque le jour du départ, qu’il avait transité par la Suisse en provenance d’un pays source pour les stupéfiants et qu’il avait d’abord nié s’être rendu au Ghana. On avait soumis le voyageur à une fouille au petit coin après l’avoir informé de son droit de consulter un avocat. Un échantillon d’urine avait été fourni après qu’il eut parlé à un avocat. Cet échantillon avait confirmé la présence d’héroïne. Le voyageur avait ensuite admis avoir ingéré de l’héroïne, et avait été accusé. Il avait été déclaré coupable, mais la Cour d’appel à la majorité avait statué que ses droits garantis par l’art. 8 de la Charte avaient été violés et que la preuve relative aux stupéfiants aurait dû être écartée.

 

[123]       La question dont la Cour suprême était saisie consistait à savoir si ce type de fouille était autorisé par l’article 98 de la Loi. Citant l’arrêt Simmons, la Cour a conclu à l’unanimité que la fouille était autorisée. Elle a statué que :

une « veille au haricot » passive n’a pas un caractère aussi envahissant que la fouille des orifices corporels ou que des actes médicaux tels l’administration d’émétiques. Dans ce sens, il ne faut pas confondre droit à l’intégrité physique et sentiments de pudeur, malgré la légitimité de ces sentiments. En conséquence, une « veille au haricot » passive présente une plus grande analogie avec la deuxième catégorie de fouilles -- la fouille à nu -- puisque le suspect est détenu et mis dans une situation embarrassante, mais n’est pas soumis contre son gré à l’application intentionnelle de la force : Monney, précité, au par. 47.

 

La Cour a également conclu que les indicateurs, dans cette affaire, étaient suffisants pour établir l’existence de motifs raisonnables pour procéder à la fouille.

 

[124]       Une décision plus récente, portant sur le même type de fouilles que celles subies par M. Idada, a été rendue par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire Kelly c. Palazzo, 2008 ONCA 82. Le demandeur était un voyageur revenant de la Jamaïque qui avait été choisi au hasard pour une inspection secondaire. L’agente des douanes avait déterminé qu’il y avait des motifs raisonnables pour procéder à une fouille plus envahissante compte tenu du fait que le voyageur revenait de la Jamaïque, qu’il était évasif et nerveux et qu’il avait fait du tapage en l’invectivant. Le voyageur avait été soumis à une fouille à nu et à une fouille au petit coin qui avaient toutes deux donné un résultat négatif. Le voyageur avait ensuite intenté une action dans laquelle il alléguait avoir été détenu et fouillé illégalement et avoir subi un profilage racial. La juge de première instance avait rejeté l’action, statuant qu’il y avait des motifs raisonnables pour procéder à la fouille, et que le demandeur n’avait pas prouvé qu’il avait subi un profilage racial.

 

[125]       La Cour a rejeté l’appel, statuant qu’il y avait des motifs raisonnables pour justifier une fouille. La Cour d’appel a fait les commentaires suivants au sujet de la constitutionnalité des fouilles :

[traduction] 53 Dans l’arrêt Simmons, précité, la Cour suprême a statué que les personnes qui étaient soumises à un interrogatoire de routine à la frontière, à une fouille de leurs bagages, et même à une fouille personnelle peu envahissante n’étaient pas détenues au sens de l’art. 10 de la Charte. La Cour a aussi statué que ces activités de routine ne portaient atteinte à aucun droit à une attente raisonnable en matière de vie privée garanti par l’art. 8. Suivant l’arrêt Simmons et les décisions rendues dans sa foulée, M. Kelly n’était pas détenu au sens de l’art. 10 de la Charte lorsqu’il a été interrogé la première fois par l’agente Demchyshyn, ni lorsqu’on l’a dirigé vers la zone secondaire où il a été interrogé davantage, ses bagages et son portefeuille fouillés et ses bijoux radiographiés à la recherche de résidus de drogue. Ces activités n’allaient pas non plus à l’encontre des attentes raisonnables de M. Kelly en matière de vie privée. Par conséquent, ces actes ne pouvaient violer l’art. 8 de la Charte.

 

54 Même les fouilles plus envahissantes menées à la frontière, comme les fouilles à nu et les « fouilles au petit coin », qui, elles, font jouer les art. 8 et 10 de la Charte, se justifient selon une norme moins stricte que la norme normalement applicable des motifs raisonnables et probables : Simmons, précité, p. 320-21; Monney, précité, par. 34-37. Ces fouilles plus envahissantes sont menées en vertu de l’art. 98 de la Loi sur les douanes, la disposition invoquée par l’agente Demchyshyn.

L’agent peut ordonner une fouille s’il a des soupçons raisonnables qu’une personne a sur elle ou près d’elle de la contrebande comme des drogues illicites. La norme des soupçons raisonnables ressemble à la norme applicable en matière de détention aux fins d’enquête. Elle allie un soupçon de nature subjective à l’exigence objective voulant que le soupçon soit raisonnable compte tenu de l’ensemble des circonstances : voir R. c. Mann (2004), 185 C.C.C. (3d) 308, p. 320-23 (C.S.C.).

[Je souligne.]

 

[126]       La Cour doit donc déterminer si l’agent Tangney avait des soupçons raisonnables que M. Idada avait de la contrebande sur lui ou près de lui. À mon avis, les faits suivants, considérés cumulativement, justifient raisonnablement de tels soupçons :

           i.          M. Idada arrivait d’un pays qui était un pays source pour les stupéfiants.

         ii.          Son entrée aux É.-U. via le Canada risquerait moins de faire soupçonner aux autorités américaines qu’il passait en contrebande de la drogue provenant du Nigéria.

        iii.          Son explication quant à savoir pourquoi il s’était rendu au Canada plutôt que de rentrer directement à Boston était très inhabituelle. Il ne savait rien sur le marché du dindon canadien, ne connaissait aucun producteur de dindon, n’avait réservé aucun endroit où loger et disait vouloir y faire des recherches qui pouvaient très bien se faire de Boston.

       iv.          Le billet d’avion avait été acheté au comptant la veille du départ.

         v.          Il disait avoir bu et mangé à bord de l’avion.

       vi.          Il semblait avoir soif et avait la bouche pâteuse, mais avait refusé de la nourriture et de l’eau quand on lui en avait offert.

 

[127]       Bien que l’on puisse fournir une explication à l’égard de chacun de ces faits, comme l’a fait l’avocat au procès, ces explications n’avaient pas été soumises à l’agent Tangney. J’estime que la détention et les fouilles subséquentes de M. Idada étaient raisonnables et justifiées selon les dispositions de la Loi sur les douanes.

 

            b)  Les actes de l’agent Kostovski

[128]       Le délit de voies de fait est un délit intentionnel. Dans une action pour voies de fait, le demandeur a gain de cause s’il établit que le défendeur a directement fait du mal à sa personne, et que le défendeur n’est pas en mesure de prouver que l’acte a été posé involontairement ou non intentionnellement ou d’une manière donnant ouverture à quelque autre défense affirmative.

 

[129]       Dans le délit de voies de fait, il doit y avoir un contact préjudiciable ou nocif avec le corps d’une autre personne. Il n’est pas nécessaire que ce contact soit direct, mais un contact quotidien ne peut donner lieu à une responsabilité délictuelle; le contact doit aller au‑delà de ce que l’on s’attend normalement à pouvoir tolérer dans la vie quotidienne. L’exigence d’un contact « préjudiciable ou nocif » ne signifie pas que l’acte doit entraîner des blessures ou qu’il doit être nocif sur le plan moral.

 

[130]       L’acte de l’agent Kostovski ayant consisté à prendre le portefeuille de M. Idada équivalait effectivement à l’infliction d’une force à M. Idada, même si cette force a été déployée indirectement à travers le portefeuille. L’emploi de la force par l’agent était intentionnel. Il reste à savoir si l’emploi de la force était illégal au sens de la définition donnée aux voies de fait, ou, autrement dit, si le comportement serait généralement perçu comme inacceptable par une personne raisonnable.

 

[131]       Je suis d’avis que le comportement de l’agent Kostovski serait perçu comme nocif par une personne raisonnable. Après avoir demandé qu’on lui remette des documents, l’agent doit donner à la personne interrogée le temps d’acquiescer à cette demande. Le fait d’être mis à l’écart pour un interrogatoire secondaire, dans un aéroport étranger, constitue sans aucun doute une expérience pour le moins stressante. Il est normal, lorsqu’on se fait poser des questions par une personne en autorité, de répondre lentement; peut-être même davantage lorsque l’anglais n’est pas la première langue du voyageur. Il ne faut pas s’attendre à ce que les voyageurs acquiescent à la demande d’un agent à la vitesse de l’éclair. Ce qui compte, c’est de savoir si le voyageur a acquiescé à la demande de remettre les documents. En l’espèce, M. Idada était en train d’acquiescer à la demande; il avait sorti son portefeuille, qui contenait son passeport, de sa poche et était en train de fouiller dedans pour trouver son passeport. Avant que M. Idada ait eu le temps de retirer le passeport et de le remettre, l’agent Kostovski lui a arraché le portefeuille des mains. Cet acte équivalait à l’infliction intentionnelle d’une force.

 

[132]       On n’a pas sérieusement fait valoir que l’agent Kostovski n’avait d’autre choix que d’arracher le portefeuille à M. Idada. Il disposait de plusieurs solutions de rechange, y compris celle de lui demander de se mettre à l’écart le temps de le produire. Si l’agent a le droit de demander et d’examiner le passeport d’un voyageur, il n’a pas le droit de lui arracher dans les circonstances ayant existé le 3 mars 2002. Il ressort de la façon dont M. Idada a été traité que certains agents pensent effectivement pouvoir agir sans conséquence. S’il va sans dire que la Loi sur les douanes ne leur donne pas carte blanche, je pense qu’un rappel s’impose. J’estime que la défenderesse ne peut opposer aucun moyen de défense aux voies de fait commises par l’agent Kostovski à l’endroit de M. Idada.

 

            c)  Les actes de l’agent Tangney

[133]       Les actes de l’agent Tangney ayant consisté à plaquer son bras sur M. Idada, à le faire asseoir sur le banc puis à le faire tomber par terre en lui faisant une clé de poignet équivalaient clairement à des inflictions de force. Il ne reste plus qu’à savoir si l’agent Tangney peut invoquer le moyen de défense de la justification légale.

 

[134]       Le seul moyen de défense sérieux invoqué à l’égard de ces actes s’est résumé à dire qu’il s’était senti menacé par les gestes de M. Idada. La Loi sur les douanes autorise bel et bien l’emploi d’une force raisonnable dans les cas où les agents se sentent menacés et où il n’existe aucune autre solution de rechange moins vigoureuse. Cependant, j’ai conclu que l’affirmation de crainte de l’agent Tangney n’était pas crédible. L’agent Tangney réagissait au refus de M. Idada d’acquiescer à sa demande de lui remettre la serviette, et non à la crainte d’être attaqué comme on l’a allégué. M. Idada essayait d’empêcher l’agent Tangney de lui arracher la serviette des mains, et il ne la soulevait pas d’une façon menaçante. L’agent Tangney disposait de plusieurs autres options si son but était d’enlever la serviette à M. Idada. La force employée n’était ni justifiée ni raisonnable. J’estime que la défenderesse ne peut opposer aucun moyen de défense aux voies de fait commises par l’agent Tangney à l’endroit de M. Idada.

 

Conclusion

[135]       M. Idada a droit à des dommages-intérêts pour les voies de fait commises par les agents Kostovski et Tangney. En tous autres égards, son action est rejetée. M. Idada ayant eu en grande partie gain de cause, il a droit à ses dépens.

 

[136]       Si les parties n’arrivent pas à s’entendre sur le montant de dommages-intérêts qu’il convient d’accorder pour ces délits dans un délai de 30 jours, elles devront en informer l’administrateur judiciaire de la Cour, qui fixera une date pour la poursuite du procès sur la question des dommages-intérêts.

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

Toronto (Ontario)

Le 26 mars 2010

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Diane Provencher, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1238-02

 

INTITULÉ :                                       ESEMUEDE HENRY IDADA c.

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

                                                                                                                                                           

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :             Le 30 novembre 2009; les 1, 2, 3, 4 et 7 décembre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

PUBLICS :                                         LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 26 mars 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

John W. Bruggeman

POUR LE DEMANDEUR

 

P. Tamara Sugunasiri

Shahana Kar

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

KOSTYNIUK & BRUGGEMAN

Avocats

Mississauga (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

 

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 



[1] Au moment de l’incident ayant mené à la présente action, les agents des douanes étaient des employés de l’Agence des douanes et du revenu du Canada. Les tâches de ces agents ont par la suite été transférées à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), qui a été créée le 12 décembre 2003. En raison de ce transfert, certains éléments de preuve désignent l’agence sous le nom d’ASFC et les agents concernés sous le nom d’agents de l’ASFC. Qu’elle soit désignée sous le nom d’ADRC ou d’ASFC, il s’agit de l’autorité douanière canadienne et de ses agents.

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