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Cour fédérale

 

Federal Court


  

Date : 20100224

Dossier : IMM-272-09

Référence : 2010 CF 206

Ottawa (Ontario), le 24 février 2010

En présence de monsieur le juge Kelen

 

 

ENTRE :

KITTS WHITE,

représenté par sa tutrice à l’instance, Juline White

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA  

CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire visant une décision datée du 2 janvier 2009 par laquelle un agent d’immigration a rejeté la demande de résidence permanente présentée par le demandeur pour des motifs d’ordre humanitaire (la demande CH) en application de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).   

 

[2]               La décision à l’examen est la nouvelle décision, en date du 25 avril 2007, qui a été rendue sur la première demande CH du demandeur conformément à l’ordonnance de madame la juge Heneghan datée du 23 juillet 2008 et publiée dans White (Tuteur d’instance) c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 896.

 

FAITS

Le contexte

[3]               Âgé de trente-six (36) ans, le demandeur est citoyen de la Jamaïque. Il est arrivé au Canada à l’âge de sept ans le 21 décembre 1980 pour y rejoindre son père, et est devenu un résident permanent le 17 juillet 1985. Une mesure de renvoi a été prise contre le demandeur après qu’on l’eut reconnu coupable d’agression sexuelle grave en 1998. La Cour a rejeté sa demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR), tout comme sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision. Le demandeur a été déclaré dangereux pour le public.   

 

[4]               Le 25 avril 2007, un agent d’ERAR a rejeté la première demande CH du demandeur. À l’occasion du contrôle judiciaire, la juge Heneghan a exposé, aux paragraphes 2 à 4 de son jugement daté du 23 juillet 2008, la preuve sur laquelle repose la première demande CH du demandeur :   

[traduction]

2        Le demandeur est né en Jamaïque le 22 novembre 1973. Il est entré au Canada avec sa famille le 21 décembre 1980, et il vit au Canada depuis ce jour. À l’âge de 17 ans, le demandeur a été grièvement blessé dans un accident de la route alors qu’il était passager dans une voiture. Il a notamment subi un grave traumatisme cérébral et une blessure au bras gauche. Au moment de l’accident, le demandeur avait 17 ans et devait commencer ses études à l’Université York en tant qu’étudiant boursier.

 

3        Le demandeur a eu des changements importants de personnalité et de comportement à la suite des lésions cérébrales graves et permanentes. Ces changements ont été décrits en détail dans un résumé du dossier qu’a rédigé en 1997 le Dr R. Van Reeken, F.R.C.P.C., du Baycrest Centre for Geriatric Care, à  Toronto.

 

4        Entre 1993 et 1998, le demandeur a été reconnu coupable de plusieurs infractions criminelles, la plus grave de celles-ci étant une agression sexuelle grave dont il a été déclaré coupable en 1998. Il a été condamné à huit ans d’emprisonnement pour cette infraction en juin 1998.

[…]

 

16      […] Le demandeur était un résident permanent, mais étant donné sa déclaration de culpabilité en 1998, une mesure d’expulsion a été prise contre lui en février 1999. Cette déclaration de culpabilité découle d’un comportement qui est inextricablement lié à la diminution de la capacité cognitive du demandeur qui résulte de l’accident de voiture survenu en 1991. Le demandeur a purgé sa peine.

 

[5]               À la fin de sa peine de huit ans d’emprisonnement, le demandeur a été détenu dans un centre de surveillance de l’Immigration en attendant son renvoi, et il s’y trouve depuis ce temps. Sa seule source de revenu est un règlement d’assurance découlant de l’accident qui lui rapporte 6 000 $ par mois. Le même règlement prévoyait aussi le placement de fonds en fiducie pour l’achat d’une maison.  

 

[6]               La juge Heneghan a statué que la décision qui lui a été soumise était déraisonnable parce que l’agent s’est mépris sur la nature de la déficience du demandeur et n’a pas tenu compte des circonstances relatives aux liens familiaux du demandeur.    

 

[7]               Le demandeur a été avisé le 21 août 2008 qu’il pouvait déposer une deuxième demande CH, et on l’a convié à faire de nouvelles observations et à produire de nouveaux éléments de preuve.  

La décision à l’examen

[8]               La deuxième demande CH du demandeur a été rejetée le 2 janvier 2009. L’affaire a été examinée sous les rubriques suivantes de la décision CH :  

a.       Antécédents;

b.      Établissement;

c.       Liens familiaux;

d.      Considérations médicales;

e.       Risque en Jamaïque;

f.        Criminalité et danger pour le public.

 

 

[9]               Je vais souligner, sous chacune des rubriques, des extraits pertinents de la décision.

Antécédents

Il est arrivé au Canada durant son enfance et a grandi ici en compagnie de son père et de sa soeur, qui sont maintenant citoyens canadiens. Le demandeur s’est bien débrouillé – à la fois dans ses études et dans les sports – jusqu’à ce qu’il subisse, hélas, un grave accident de voiture en 1991 qui l’a laissé dans un coma pendant plus d’un mois. L’accident a continué à affecter le demandeur, tant sur le plan physique que sur celui du comportement, après qu’il eut repris conscience. Il a suivi une thérapie, mais il a commencé à éprouver des problèmes de comportement au point de commettre des actes criminels. À la suite d’une série de déclarations de culpabilité, dont la dernière, et la plus grave, vise une agression sexuelle grave, une mesure d’expulsion a été prise contre le demandeur, et il a perdu son statut de résident permanent au Canada […] Le demandeur reçoit des medicaments en détention – l’information la plus récente indique qu’en avril 2007, il en recevait neuf. Rien n’indique qu’il va à des séances de consultation ou suit une thérapie ou un traitement, car selon la lettre d’avril 2007, il est impossible de suivre une thérapie de groupe ou de réadaptation à l’établissement où est détenu le demandeur.  

 

Établissement

Le demandeur a vécu au Canada la majeure partie de sa vie […]

 

Liens familiaux

La famille immédiate du demandeur est entièrement composée de citoyens canadiens vivant au Canada. Le demandeur a soumis des lettres de membres de sa famille, dans lesquelles ceux-ci appuient sa demande CH et demandent qu’il soit autorisé à demeurer au Canada. On a fait valoir que le demandeur doit conserver ses liens familiaux pour rester dans le droit chemin et qu’il a besoin du soutien de sa famille. Je signale que le demandeur n’a pas vécu avec sa famille pendant plus de dix ans, vu qu’il est détenu depuis juin 1998. Entre l’accident de 1991 et son incarcération survenue en 1998, le demandeur vivait dans des établissements de traitement et des logements communautaires surveillés, et a aussi été hébergé par des membres de sa famille […]

 

Quant aux liens familiaux en Jamaïque, on affirme que le demandeur n’a pas de famille dans ce pays […]

 

À mon avis, le demandeur a des liens familiaux bien plus solides au Canada qu’en Jamaïque, où il n’a pas vécu depuis son enfance, mais je fais remarquer qu’il est détenu depuis dix ans, et il n’a pas vécu avec sa famille durant cette période. Il est soutenu que le demandeur communique tous les jours avec son père et presque chaque jour avec sa sœur, mais on ne sait pas comment le demandeur le fait, par exemple au téléphone ou au moyen de visites […] Je signale que le demandeur pourrait fort bien garder ce genre de contact avec sa famille à partir de la Jamaïque. En effet, compte tenu des paiements mensuels élevés de règlement qu’il reçoit, il aurait les moyens de payer les frais d’interurbain pour garder le contact par téléphone, ou même supporter de temps à autre les frais de visites de membres de sa famille. À cet égard, je souligne que le père et la sœur du demandeur sont des citoyens canadiens qui peuvent se rendre en Jamaïque, étant donné que ceux-ci n’ont pas mentionné qu’il serait déraisonnable ou impossible pour eux de faire de telles visites.

 

À mon avis, bien que les membres de la famille du demandeur se soucient de lui et qu’il se soucie d’eux, leurs liens ne sont pas étroits à un point tel que le renvoi du demandeur influerait sur leur vie quotidienne.

 

État de santé

À la suite d’un grave accident de la route, le demandeur s’est trouvé dans le coma durant un peu plus d’un mois, après quoi il a continué d’avoir des problèmes de santé en raison des lésions cérébrales qu’il a subies. C’est en raison de ces problèmes qu’il a participé à des programmes de réadaptation à différents établissements. On soutient que le demandeur ne recevrait pas des soins adéquats en Jamaïque.

[…]

 

Risque en Jamaïque

Il est soutenu que le demandeur risque d’être exposé au crime et à la violence en Jamaïque, et que ce risque est aggravé par sa déficience mentale. L’examen de ce risque du point de vue du préjudice qui pourrait être causé au demandeur n’établit pas que, si celui-ci retournait en Jamaïque dans les conditions actuelles, il éprouverait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives étant donné sa situation personnelle […]

 

Le crime et la violence posent problème pour la population jamaïquaine, mais tout le monde est aux prises avec ce problème répandu dans ce pays […]

 

Les conditions générales en Jamaïque laissent énormément à désirer au chapitre de la sécurité publique en raison du taux élevé de criminalité. Je n’estime pas que le risque général posé par les conditions dans le pays est tel que le demandeur éprouverait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives s’il était exposé à ces conditions.

 

Criminalité et danger pour le public

Il est soutenu que les changements de comportement découlant des lésions cérébrales subies par le demandeur à l’âge de 17 ans sont à l’origine de sa criminalité. J’accepte ce constat, étant donné l’absence de comportement violent ou criminel du demandeur avant les lésions et les antécédents criminels accumulés après l’accident. Bien qu’il s’agisse d’une autre conséquence regrettable de l’accident subi par le demandeur, on ne peut l’exonérer de ses crimes […]

 

Je signale que le demandeur a été incarcéré au cours des dix dernières années, purgeant une peine de huit ans d’emprisonnement pour agression sexuelle avec une arme. Il est depuis lors détenu dans un centre de surveillance de l’Immigration, parce qu’il est considéré comme un danger pour le public. Son avocat et sa famille ont échafaudé un plan pour obtenir sa mise en liberté. Ce plan prévoit que la communauté et la famille s’occupent sans interruption du demandeur, mais je fais remarquer que ce plan n’a pas encore été approuvé et que le demandeur reste en détention […]

 

 

 

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[10]      Le paragraphe 25(1) de la LIPR autorise le ministre à exempter un demandeur des obligations prévues par cette loi :  

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente

loi, et peut, de sa propre initiative ou sur demande d’un étranger se trouvant hors du

Canada, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables,

s’il estime que des circonstances

d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant

directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this

Act, and may, on the Minister’s own initiative or on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the

foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption

from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that

it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

[11]      Les articles 7 et 12 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11, garantit aux personnes les droits suivants :

7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale

[…]

12. Chacun a droit à la protection contre tous traitements ou peines cruels et inusités.

7. Everyone has the right to life, liberty and security of the person and the right not to be deprived thereof except in accordance with the principles of fundamental justice.

12. Everyone has the right not to be subjected to any cruel and unusual treatment or punishment.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[12]           Le demandeur soulève les questions suivantes :

1.      L’agent a-t-il commis une erreur de droit en se livrant à des conjectures et en ne tenant pas compte des facteurs pertinents et de la preuve?

 

2.      L’agent a-t-il commis une erreur de droit en appliquant le mauvais critère au risque auquel s’exposerait le demandeur en retournant dans son pays d’origine?

 

3.      La conclusion de l’agent est-elle déraisonnable?

 

4.      La décision de l’agent contrevient-elle aux articles 7 et 12 de la Charte canadienne des droits et libertés?

 

 

NORME DE CONTRÔLE

[13]      Dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, 372 N.R. 1, la Cour suprême du Canada a décrété au paragraphe 62 que la première étape de l’analyse relative à la norme de contrôle consiste à « vérifi[er] si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier » : Khosa c. Canada (MCI), 2009 CSC 12, le juge Binnie, au paragraphe 53.

 

[14]           La Cour d’appel fédérale a récemment statué dans Kisana c. Canada (MCI), 2009 CAF 189, le juge Nadon, au paragraphe 18, que la norme de contrôle applicable à la décision CH d’un agent est la décision raisonnable : voir aussi mes décisions Ramotar c. Canada (MCI), 2009 CF 362, aux paragraphes 9 à 11; Ebonka c. Canada (MCI), 2009 CF 80, aux paragraphes 16 et 17; Ruiz c. Canada (MCI), 2009 CF 1175, aux paragraphes 22 à 24.

 

[15]           Les points qui touchent la Charte canadienne des droits et libertés sont des questions de droit : Laranjo c. Canada (MCI), 2007 CF 1778, le juge en chef Lutfy, au paragraphe 12.

 

[16]           Lorsqu’elle contrôle la décision de l’agent en fonction de la norme de la décision raisonnable, la Cour se penche sur « la justification de la décision, […] la transparence et […] l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi [que] l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit »: Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, Khosa, précité, au paragraphe 59. 

 

ANALYSE

Le jugement de madame la juge Heneghan

[17]           Le jugement de la juge Heneghan daté du 23 juillet 2008 a annulé la première décision CH pour les motifs suivants :

1.      au paragraphe 14 :

[traduction]

Je suis convaincue que la décision ici en cause ne répond pas à la norme de la décision raisonnable. À mon avis, l’agent a négligé ou mal saisi la situation du demandeur, particulièrement la nature de sa déficience. Le demandeur souffre de graves lésions cérébrales, et non d’une maladie mentale.

 


2.      au paragraphe 16 :

 

[traduction]

À mon avis, l’agent n’a pas non plus tenu compte du fait que le demandeur n’a pas de famille immédiate en Jamaïque. Il a vécu plus longtemps au Canada qu’en Jamaïque.

 

 

3.      aussi au paragraphe 16 :

 

[traduction]

Le demandeur était un résident permanent, mais étant donné sa déclaration de culpabilité en 1998, une mesure d’expulsion a été prise contre lui en février 1999. Cette déclaration de culpabilité découle d’un comportement qui est inextricablement lié à la diminution de la capacité cognitive du demandeur qui résulte de l’accident de voiture survenu en 1991. Le demandeur a purgé sa peine.

 

4.      au paragraphe 19 :

 

[traduction]

L’agent en l’espèce a mal décrit la déficience du demandeur et a fait abstraction de la nature particulière de ses rapports familiaux.

 

Pour les motifs qui précèdent, la juge Heneghan a annulé la première décision CH et a renvoyé l’affaire à un autre agent pour nouvelle décision. La Cour est maintenant saisie du contrôle judiciaire de cette deuxième décision. 

 

La courtoisie judiciaire

[18]           La Cour doit faire preuve de retenue envers le jugement rendu le 23 juillet 2008 par la juge Heneghan dans la même affaire. Il y a lieu d’appliquer le principe de la courtoisie judiciaire, à moins que la Cour ait des raisons d’être en désaccord avec le jugement antérieur. La juge Heneghan a conclu que la première décision CH ne répondait à la norme de la décision raisonnable et que l’agent a fait abstraction de la preuve concernant la situation du demandeur, notamment la nature de sa déficience. En outre, l’agent n’a pas tenu compte des faits suivants : le demandeur n’a pas de famille immédiate en Jamaïque, il a vécu au Canada plus longtemps qu’en Jamaïque, il a seulement perdu son statut de résident permanent en raison d’une déclaration de culpabilité qui découle « d’un comportement qui est inextricablement lié à la diminution de [sa] capacité cognitive qui résulte de l’accident de voiture survenu en 1991. Le demandeur a purgé sa peine ».  

 

[19]           Dans l’affaire dont je suis saisi, le deuxième agent CH a aussi reconnu que le demandeur [traduction] « a subi, hélas, un grave accident de voiture en 1991 qui l’a laissé dans un coma pendant plus d’un mois. L’accident a continué à affecter le demandeur, tant sur le plan physique et sur celui du comportement, après qu’il eut repris conscience ». L’agent CH a reconnu que les problèmes de comportement du demandeur qui découlent du malheureux accident l’ont amené à commettre les actes criminels en question.  

 

[20]           J’arrive toutefois à la conclusion que la deuxième décision CH est aussi déraisonnable, et ce, pour le même motif qui a conduit la juge Heneghan à conclure que la première décision CH ne répondait pas à la norme de la décision raisonnable parce qu’elle n’attribue aucun poids à ce regrettable accident comme motif justifiant qu’un traitement humanitaire soit réservé au demandeur. Dans la même veine, la deuxième demande CH n’accorde aucun poids aux faits suivants : le demandeur a vécu au Canada durant la majeure partie de sa vie, il communique tous les jours avec son père et sa sœur au Canada et n’a pas de famille en Jamaïque. En outre, rien ne prouve que le demandeur pourrait obtenir une surveillance et des soins médicaux adéquats en Jamaïque, étant donné la déficience importante dont il souffre en raison de ses graves lésions cérébrales. Il y a aussi des raisons de craindre que le demandeur soit exposé à un risque particulièrement élevé de criminalité et de violence en Jamaïque parce qu’il est plus vulnérable que les membres du public en général. Je ne vois, dans la deuxième décision CH, aucune raison de ne pas faire mienne la conclusion de la juge Heneghan que la décision de rejeter la demande CH [traduction] « ne répond pas à la norme de la décision raisonnable ». La décision CH dont je suis saisi diffère de celle renvoyée à la juge Heneghan, mais les faits sont les mêmes pour ce qui est du caractère raisonnable. Vu ma conclusion, il n’est pas nécessaire d’étudier séparément les autres questions soulevées par le demandeur.

 

QUESTION À CERTIFIER

[21]           Les deux parties ont avisé la Cour que la présente affaire ne soulève pas de question grave de portée générale à certifier en vue d’un appel. La Cour est d’accord sur ce point.  


 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent CH est annulée, et l’affaire en l’espèce est renvoyée à un autre agent CH pour nouvelle décision conforme aux présents motifs de jugement.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        IMM-272-09

 

INTITULÉ :                                       KITTS WHITE, représenté par sa tutrice à l’instance, Juline White c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et

                                                            LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET

                                                            DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 16 février 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Kelen

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 24 février 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Barbara Jackman

 

POUR LE DEMANDEUR

Alexis Singer

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Barbara Jackman

Jackman & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDEURS

 

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