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Cour fédérale

Federal Court

 

Date : 20100223

Dossier : IMM-4542-09

Référence : 2010 CF 212

Vancouver (Colombie-Britannique), le 23 février 2010

En présence de monsieur le juge Simon Noël

 

 

ENTRE :

KANCHAN SINGH

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en application de l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), à l’encontre d’une décision datée du 8 juillet 2009 par laquelle une agente des visas a rejeté la demande du demandeur visant à obtenir un permis de travail de deux ans.


I. Les faits

[2]               Le demandeur, M. Kanchan Singh, est un citoyen de la République de l’Inde né en 1980. Il est marié et père de trois enfants.

 

[3]               Le 6 avril 2009, le demandeur a présenté une première demande de permis de travail temporaire, qui a été rejetée au motif qu’il n’avait pas démontré qu’il avait des liens suffisants avec l’Inde, qu’il était assez bien établi dans ce pays, et qu’il quitterait le Canada à la fin de son séjour autorisé.

 

[4]               Le demandeur a de nouveau demandé un permis de travail de deux ans, cette fois en juin 2009. L’agente a rejeté la demande par lettre datée du 8 juillet 2009. Encore une fois, selon l’agente, le demandeur n’a pas démontré qu’il était assez bien établi en Inde ou que ses liens avec ce pays étaient suffisamment solides.  

 

[5]               Le demandeur a déposé, le 11 septembre 2009, une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’égard de la décision de l’agente du 8 juillet 2009. La juge Heneghan a accordé l’autorisation de contrôle judiciaire le 10 décembre suivant.

 

II. Points en litige

[6]               Le demandeur soulève les points suivants :

a.       L’agente des visas a-t-elle manqué à son obligation d’équité procédurale en ne fournissant aucun motif à l’appui du refus et en n’informant pas le demandeur de ses réserves avant de prendre la décision?

b.      La décision de l’agente des visas était-elle raisonnable?

 

III. Analyse

A. Norme de contrôle

[7]               La jurisprudence a démontré que la décision d’un agent des visas de rejeter une demande de permis de travail temporaire est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable  (voir Choi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 577, aux paragraphes 10 à 12). Comme l’a dit le juge de Montigny au paragraphe 24 de la décision Baylon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 938, « [p]ar conséquent, la Cour doit s’en remettre à la décision de l’agent des visas si elle est justifiée, si elle résulte d’un processus transparent et intelligible, et si elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard de l’ensemble de la preuve : Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47 ». La décision d’un agent des visas est de nature discrétionnaire et commande donc une grande retenue.

 

[8]               Lorsqu’une question d’équité procédurale se pose, la norme de contrôle applicable est la décision correcte (voir Barnash c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 842, au paragraphe 21).

 

B. Équité procédurale

[9]               Le demandeur soulève deux questions en matière d’équité procédurale. Premièrement, il dit que l’agente n’a donné aucun motif à l’appui de son refus de la demande. Deuxièmement, il fait valoir que l’agente ne l’a pas avisé d’une quelconque réserve qu’elle avait concernant sa demande. 

 

[10]           Le demandeur a reçu la lettre de décision en date du 8 juillet 2009, ainsi que les notes versées par l’agente au STIDI. Par conséquent, ces motifs sont suffisants, car ils avisent le demandeur du critère prévu par la loi auquel il n’a pas répondu, ainsi que de la manière dont l’agente est parvenue à sa décision (voir Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 315, au paragraphe 24). Dans les notes qu’elle a versées au STIDI, l’agente affirme sans équivoque en quoi le demandeur n’a pas réussi à établir son intention de quitter le Canada à l’expiration de son permis de travail temporaire. Les notes montrent aussi qu’elle a tenu compte des documents accompagnant la demande de M. Singh.

 

[11]           Quant au deuxième argument du demandeur, c’est à lui qu’il incombe, et non à l’agente, de produire toute la preuve pertinente pour avoir gain de cause. « Il incombe au demandeur de déposer une demande accompagnée de tout document justificatif pertinent. L’agent des visas n’a aucune obligation de s’efforcer de parfaire une demande incomplète. » (Tahir c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. 1354) L’agente n’était pas tenue d’aviser le demandeur du manque de documents fournis à l’appui de sa cause.

 

[12]           En l’espèce, l’agente n’a pas manqué à son obligation d’équité procédurale envers le demandeur.

 

C. La décision de l’agente est raisonnable

[13]           Le demandeur fait valoir que la décision de l’agente était déraisonnable, celle-ci ayant fait abstraction de la preuve dont elle disposait. Comme je l’ai mentionné au paragraphe 7 ci‑dessus, la norme de contrôle applicable à la décision de l’agente est la décision raisonnable. Ce qu’il importe de souligner dans les situations où la norme de la décision raisonnable s’applique, c’est qu’« [i]l peut exister plus d’une issue raisonnable » (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59). La cour qui contrôle une décision en fonction de la norme de la décision raisonnable « [se concentre sur] l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, au paragraphe 47). Pour les motifs exposés ci-après, la Cour estime que la décision de l’agente était raisonnable.

 

[14]           Pour demander un permis de travail temporaire, le demandeur doit établir qu’il répond à toutes les exigences énoncées à la partie 11 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement). L’alinéa 200(1)b) prévoit que :

Permis de travail

200. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis de travail à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

(…)

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

Work permits

200. (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a work permit to a foreign national if, following an examination, it is established that

(…)

(b) the foreign national will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

 

 

 

[15]           Après avoir étudié la demande de permis de travail temporaire présentée par le demandeur, l’agente devait déterminer si celui-ci quitterait le Canada à l’expiration de son visa. Pour ce faire, elle a passé en revue les nouveaux renseignements fournis. L’agente a fait remarquer que le demandeur n’avait produit aucune preuve de compétence en anglais lui permettant de comprendre le travail et de connaître ses droits à titre de travailleur temporaire au Canada. De plus, il n’a pas fourni de documents, comme il devait le faire, pour indiquer le revenu qu’il touche en Inde. L’agente a aussi signalé qu’étant donné les avantages socio-économiques au Canada et le fait qu’il était marié et père de trois enfants susceptibles d’être parrainés, il avait peu de raisons de retourner en Inde à la fin de sa période d’emploi au Canada. Il était aussi indiqué que rien ne corroborait sa documentation concernant ses éléments d’actif en Inde. Dans l’ensemble, l’agente n’était pas convaincue que le demandeur avait démontré qu’il avait un haut niveau d’établissement en Inde et qu’il avait donné le véritable motif de son voyage au Canada.

 

[16]           Il s’agit d’une décision raisonnable, et la Cour n’interviendra pas.

 

[17]           La Cour a demandé aux avocats s’ils proposeraient la certification d’une question, et les deux ont dit non.

 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1)         la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2)         aucune question ne sera certifiée.

 

 

« Simon Nöel »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4542-09

 

INTITULÉ :                                       KANCHAN SINGH c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (C.-B.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 23 février 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Noël

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 23 février 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Mir Huculak

POUR LE DEMANDEUR

 

Jennifer Dagsvik

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Mir Huculak

Avocat

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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