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Federal Court

 

Cour fédérale

 


Date : 20100216

Dossier : T-894-07

Référence : 2010 CF 156

Toronto (Ontario), le 16 février 2010

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HUGHES

 

ENTRE :

NOVOPHARM LIMITED

demanderesse

 

 

et

 

 

 

MINISTRE DE LA SANTÉ

et PFIZER CANADA INC.

défendeurs

 

 

 

ORDONNANCE RELATIVE AUX DÉPENS ET MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

[1]               La présente instance porte sur une demande présentée par Novopharm Limited en vertu des articles 18 et 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, pour obtenir diverses déclarations concernant la conduite des fonctionnaires du défendeur, le ministre de la Santé, dans l’application de certaines dispositions du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, modifié (le Règlement AC). Brièvement, l’affaire fait suite aux tentatives de Novopharm pour obtenir un avis de conformité du ministre en vue de la distribution, au Canada, d’une version générique d’un médicament de Pfizer, et à certaines questions entourant l’inscription par Pfizer d’un brevet, le brevet 201, sous le régime du Règlement AC, pendant que des instances sont en cours devant la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale relativement à d’autres brevets inscrits à l’égard de ce médicament.

 

[2]               La présence instance a été introduite par Novopharm en 2007 contre le ministre de la Santé seulement. Par ordonnance du protonotaire, Pfizer a été ajoutée à titre de partie devant être constituée défenderesse. Chacune des trois parties a soumis une preuve par affidavits et a procédé à des contre-interrogatoires sur les affidavits des autres parties. La nature des réparations sollicitées par Novopharm a changé au cours de l’instance. Le protonotaire a radié l’une des conclusions recherchées. Par ailleurs, Novopharm a elle-même volontairement apporté d’autres modifications aux réparations demandées. Finalement, à l’audience, l’avocat de Novopharm a concédé que la réparation sollicitée par sa cliente était celle énoncée dans le dernier paragraphe de fond de son exposé des arguments.

 

[3]               L’affaire a été soumise à la procédure de gestion des instances. Au moins quatre conférences téléphoniques ont été tenues dans le cadre de la gestion de l’instance en 2008 et 2009. La date d’audience a été fixée plusieurs mois à l’avance. L’audience a eu lieu à Toronto les 25 et 26 janvier 2010, et j’ai pris l’affaire en délibéré. Tard dans l’après-midi du vendredi 29 janvier 2010, l’avocat de Novopharm a communiqué avec le greffe de la Cour pour avertir que Novopharm déposerait un Avis de désistement sous réserve d’une entente avec Pfizer et le ministre de la Santé quant aux dépens. Le lundi 1er février 2010, Novopharm a effectivement déposé un Avis de désistement. Apparemment, une entente sur les dépens avait été conclue avec le ministre de la Santé. Par contre, aucune entente n’a été conclue avec Pfizer, d’où la nécessité de la présente ordonnance. Pour rendre cette ordonnance, j’ai tenu compte de l’ensemble du dossier en l’espèce ainsi que des lettres transmises respectivement par les avocats de Novopharm et de Pfizer relativement aux dépens.  

 

[4]               L’article 402 des Règles des Cours fédérales prévoit que lorsqu’une demande fait l’objet d’un désistement, la partie contre laquelle la demande a été engagée a droit aux dépens sans délai. La règle ne précise pas le niveau des dépens auxquels la partie a droit. Il appartient à la Cour de décider du niveau des dépens qu’il convient d’accorder, suivant les dispositions de l’article 400 et notamment du paragraphe 400(3) des Règles.

 

[5]               Les parties sont toujours encouragées à résoudre les questions en litige portées devant la Cour. Plusieurs occasions de règlement leur sont offertes, notamment la gestion de l’instance comme en l’espèce, et la médiation présidée par la Cour. Toutefois, dans tous les cas, il revient avant tout aux parties elles-mêmes et à leurs avocats d’apprécier le bien-fondé d’une cause et de tenter de parvenir à une résolution du litige. C’est le cas plus particulièrement lorsque les parties, comme en la présente instance, sont bien informées et ont l’habitude du processus judiciaire, et que leurs avocats sont versés dans le domaine en cause et dans la conduite des litiges. La Cour peut proposer aux parties de régler, mais les parties ont le dernier mot.

 

[6]               Je suis convaincu, après avoir étudié le dossier en profondeur avant l’audience et entendu l’avocat de Novopharm durant l’audience, que Novopharm n’était pas certaine de la réparation qu’elle souhaitait obtenir ni des raisons pour lesquelles elle sollicitait cette réparation. J’ai eu la nette impression que Novopharm et son avocat procédaient à de nombreux ajustements de dernière minute. Je remarque que dans la lettre du 10 février 2010 transmise à la Cour par l’avocat de Novopharm, ce dernier déclare :

[traduction]

[…]  au terme des plaidoiries des parties, [Novopharm] a estimé qu’il vaudrait mieux que les questions donnant lieu à un précédent […] soient tranchées dans le cadre d’une autre affaire présentant un litige actuel évident, sans risque d’éventuelles complications en matière de justiciabilité […]

 

 

[7]               Je ne puis accepter que Novopharm ou son avocat ne se soient aperçus de la possible inutilité de leur cause qu’après la fin des plaidoiries. Ils ont eu amplement l’occasion, à mesure que l’instance évoluait et après que toute la preuve a été déposée, plusieurs mois avant l’audience, d’évaluer la solidité de la cause et l’inutilité d’obtenir jugement.

 

[8]               La Cour, après avoir fixé la date d’audition d’une affaire, donne au juge à qui l’affaire est confiée le temps nécessaire pour étudier le dossier en vue de l’audience. Après l’audience, du temps est alloué au juge pour la rédaction des motifs. Lorsque, dans une cause comme celle qui nous occupe, il y a désistement de la demande après l’audience, le temps investi pour étudier le dossier, pour entendre l’affaire et pour préparer les motifs est perdu à jamais. Chacun a le droit d’être entendu devant les tribunaux, mais ce droit ne permet pas de priver d’autres personnes qui cherchent aussi à être entendues du temps que la Cour aurait pu consacrer à leur affaire. En l’espèce, Novopharm et son avocat auraient dû examiner le bien-fondé de la demande bien avant l’audience, non après sa conclusion. Malheureusement, si ce n’est de formuler des commentaires comme ceux qui précèdent, la Cour ne dispose actuellement d’aucun moyen d’imposer réparation pour la perte de ressources judiciaires qu’elle aurait pu consacrer plus utilement à une autre affaire.  

 

[9]               Toutefois, les Règles, qui prévoient l’adjudication de dépens, permettent ainsi à une partie qui a perdu du temps et investi inutilement argent et ressources, d’obtenir réparation. Pfizer est une partie légitime à l’instance. Je ne vois rien, dans le comportement de Pfizer en l’espèce, qui puisse porter atteinte à son droit aux dépens ou qui justifie l’adjudication de dépens moindres, ainsi que l’a laissé entendre l’avocat de Novopharm dans sa correspondance avec la Cour. J’ai examiné les mémoires de dépens proposés par Pfizer, y compris ses observations portant que les honoraires facturés à la cliente, Pfizer, excluant les débours, approchent ou dépassent même les 100 000 $. Le thème récurrent, dans les échanges entre le tribunal, le barreau et la collectivité des clients, est que les honoraires d’avocats, en l’occurrence pour représenter un seul de deux défendeurs dans le cadre d’une audience de deux jours, y compris la préparation des affidavits, des contre‑interrogatoires et des observations écrites, tendent à dépasser largement les moyens de quiconque ne compte pas parmi les gens très riches.  

 

[10]           Après avoir examiné les divers mémoires de frais et débours proposés par Pfizer, qui ont été établis en fonction d’une série d’hypothèses différentes, j’estime que les débours de 29 854,60 $ réclamés par Pfizer sont justifiés et admissibles. Je suis d’avis que, dans les circonstances de l’espèce, Pfizer a droit à l’une des options qu’elle a proposées, à savoir les honoraires taxés suivant la colonne IV jusqu’au stade des contre-interrogatoires inclusivement, et suivant l’échelon supérieur de la colonne V pour la préparation de l’audience et la présence à l’audience. Il convient d’ajouter la TPS de 5 % à ces honoraires, pour un total de 33 572,18 $. La somme des honoraires, de la TPS et des débours admissibles est donc 63 426,78 $.

 


ORDONNANCE

 

            POUR LES MOTIFS exposés :

 

LA COUR ORDONNE :

 

 

1.         Pfizer a droit de recouvrer de Novopharm, dans la présente instance, ses frais et débours au montant de 63 426,78 $, payables sans délai et calculés comme suit :

 

a)                  les frais accordés s’élèvent à

            33 572,18 $, somme qui inclut

            la TPS de 5 %;

 

b)                  les débours accordés s’élèvent

            à 29 854,60 $.

 

2.         Aucuns dépens additionnels ne sont accordés relativement au litige concernant les dépens.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T-894-07

 

INTITULÉ :                                                   NOVOPHARM LIMITED c.

                                                                        MINISTRE DE LA SANTÉ et

                                                                        PFIZER CANADA INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :                         Les 25 et 26 janvier 2010

 

ORDONNANCE RELATIVE

AUX DÉPENS ET MOTIFS

DE L’ORDONNANCE :                               LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 16 février 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Tim Gilbert

Nathaniel Lipkus

Emily Kettel

 

POUR LA DEMANDERESSE

Andrew Bernstein

Emily Kirkpatrick

 

David Cowie

 

POUR LA DÉFENDERESSE

PFIZER CANADA INC.

 

POUR LE DÉFENDEUR

MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gilbert’s LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Tory’s LLP

Toronto (Ontario)

 

John H. Sim, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

PFIZER CANADA INC.

 

POUR LE DÉFENDEUR

MINISTRE DE LA SANTÉ

 

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