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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20091216

Dossier : T-546-09

Référence : 2009 CF 1277

Ottawa (Ontario), le 16 décembre 2009

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SIMPSON

 

ENTRE :

SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PERCEPTION DE LA COPIE PRIVÉE (SCPCP)

demanderesse

 

 

 

et

 

 

DATA MEDIA PRODUCTS INC.

défenderesse

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La Société canadienne de perception de la copie privée (SCPCP) a introduit la présente demande contre Data Media Products Inc. (la défenderesse) en vertu du sous-alinéa 34(4)c)(i) et de l’article 88 de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42 (la Loi), en vue de recouvrer des redevances impayées, des coûts de vérification, des intérêts et une pénalité prévue par la loi. La défenderesse n’a déposé aucun document et elle n’était pas représentée à l’audition de la demande.

 

[2]               La défenderesse importe et vend des supports audio vierges. Des redevances doivent être payées sur la vente ou toute autre forme d’aliénation de ces supports, suivant un taux établi dans un tarif homologué par la Commission du droit d’auteur du Canada. Les tarifs applicables en l’espèce sont le Tarif pour la copie privée, 2005-2007 et le Tarif pour la copie privée, 2008-2009 (les Tarifs). Les redevances applicables sont de 0,21 $ pour chaque unité de support audio vierge vendue en 2007 ou 2008, et de 0,29 $ pour chaque unité vendue en 2009.

 

[3]               La SCPCP a commandé une vérification des registres de la défenderesse (la vérification) pour la période s’étendant du 1er mars 2007 au 29 février 2008 (la période de vérification). La vérification a révélé que la défenderesse avait déclaré en moins environ 18 % de ses ventes de supports audio vierges et n’avait donc pas payé toutes ses redevances. Devant le défaut de la défenderesse de donner suite aux demandes répétées de paiement, la SCPCP a introduit la présente demande le 6 avril 2009.

 

SIGNIFICATION

 

[4]               Le paragraphe 130(1) des Règles sur les Cours fédérales, DORS/98-106, permet d’effectuer la signification d’un document à une personne morale selon le mode prévu par les règles d’une cour supérieure de la province où la signification est effectuée. Dans le cas qui nous occupe, cette province est l’Ontario. Le paragraphe 16.03(6) des Règles de procédure civile de l’Ontario, R.R.O. 1990, Règl. 194, prévoit que si le siège social ou le principal établissement d’une personne morale ne se trouve pas à la dernière adresse figurant dans les dossiers du ministère de la Consommation et du Commerce, la signification peut s’effectuer en envoyant par la poste une copie du document à la personne morale à cette adresse.

 

[5]               J’ai pu constater que la dernière adresse de la défenderesse inscrite dans le Profil de la société en Ontario, au ministère des Services gouvernementaux (qui a remplacé le ministère de la Consommation et du Commerce), est le 959 Gana Court, à Mississauga (Ontario). Je suis également convaincue, d’après la preuve de l’enquêteur de la demanderesse, que le principal établissement de la défenderesse ne se trouve pas à cette adresse et que la SCPCP a envoyé par la poste à cette adresse une copie de l’avis de demande. Pour ces motifs, j’ai conclu que la défenderesse a reçu signification conformément aux règles de l’Ontario.

 

LES REDEVANCES ET L’INTÉRÊT SUR LES REDEVANCES

 

[6]               Il convient de noter qu’en vertu du paragraphe 82(1) de la Loi, la redevance est payable sur la vente ou toute autre forme d’aliénation des supports audio vierges. De ce fait, la SCPCP doit établir que des ventes ou autres formes d’aliénation ont eu lieu pour justifier l’imposition de redevances.

 

[7]               Les redevances impayées portent intérêt conformément à l’article 12 des Tarifs. L’intérêt commence à courir le jour de la vente ou de l’aliénation des supports audio vierges. L’intérêt est calculé quotidiennement à un taux de un pour cent au-dessus du taux officiel d’escompte publié par la Banque du Canada en vigueur le dernier jour du mois précédent. L’intérêt n’est pas composé. 

 

[8]               En tout temps pertinent, le taux officiel d’escompte publié par la Banque du Canada a été de 0,5 %. Le taux d’intérêt applicable aux redevances impayées est donc de 1,5 %.

 

[9]               Par conséquent, pour calculer l’intérêt, j’ai calculé la redevance payable sur chacune des ventes non déclarées de supports audio vierges de la défenderesse et j’ai multiplié cette redevance par 1,5 %, puis ai divisé le résultat par 365 pour déterminer l’intérêt quotidien; enfin, j’ai multiplié le montant obtenu par le nombre de jours écoulés entre la date de la vente et la date de la présente ordonnance, soit le 16 décembre 2009.

 

[10]           Une question se pose au sujet du calcul de l’intérêt dans les cas où la preuve indique que des ventes ou autres formes d’aliénation ont eu lieu au cours d’une certaine période, sans qu’on puisse toutefois en déterminer les dates précises. Le protonotaire Lafrenière a adopté une méthode particulière de calcul dans Société canadienne de perception de la copie privée c. Pacific Royal Enterprises Ltd. et al., dans une ordonnance rendue le 6 mars 2009. Dans sa décision, il a statué que l’intérêt devrait être calculé en répartissant également au prorata les redevances impayées sur la période visée et en calculant l’intérêt sur les redevances ainsi réparties. On m’a demandé d’utiliser cette méthodologie. Cependant, je ne suis pas convaincue que la répartition au prorata est la bonne approche. Selon moi, le paragraphe 82(1) de la Loi énonce clairement que la redevance est payable seulement « sur la vente ou toute autre forme d’aliénation » de supports audio vierges au Canada. Dans les circonstances de la présente instance, la seule date à laquelle il est indéniable que tous les supports avaient été vendus est le dernier jour de la période visée. En conséquence, j’ai conclu, à l’alinéa 11(2)(ii) et au paragraphe 11(3), que l’intérêt doit être calculé à partir de cette date.

 

[11]           La demanderesse réclame des redevances et l’intérêt applicable sur les quantités suivantes de supports audio vierges :

1.      28 615 unités. Ces unités ont été vendues au cours de la période de vérification, et les dates de ventes précisées durant la vérification peuvent être utilisées pour calculer l’intérêt. La redevance applicable est de 0,21 $ par unité. Par conséquent, les redevances et l’intérêt applicable seront accordés pour ces supports.

2.      51 245 unités. Il s’agit de supports audio vierges qui se trouvaient dans les stocks de la défenderesse à la fin de la période de vérification. Ce nombre doit être réparti dans les trois catégories suivantes :

                                                               i.      10 600 unités, qui ont été vendues en 2008 après la période de vérification. Les dates des ventes pour le calcul de l’intérêt sont connues, et la redevance applicable est de 0,21 $ par unité. Les redevances et l’intérêt seront accordés pour ces supports.

                                                             ii.      11 775 unités, qui ont été vendues en 2008 après la période de vérification. La redevance applicable est de 0,21 $ par unité. Toutefois, les dates précises des ventes, pour le calcul de l’intérêt, ne sont pas connues. Selon la preuve, ces supports peuvent avoir été vendus à tout moment entre la fin de la période de vérification et la fin de 2008. Par conséquent, les redevances y applicables seront accordées, mais l’intérêt sera calculé comme si les ventes avaient été réalisées le 31 décembre 2008.

                                                            iii.      28 870 unités, à l’égard desquelles la preuve ne permet pas de justifier l’imposition d’une redevance. Aucune redevance n’est accordée pour ces unités.

3.      310 unités. Celles-ci se trouvaient également dans les stocks de la défenderesse à la fin de la période de vérification. Elles ont été vendues en 2009, et la redevance applicable est de 0,29 $ par unité. Toutefois, nous ne disposons pas des dates précises des ventes pour le calcul de l’intérêt. Selon la preuve, ces supports peuvent avoir été vendus à tout moment entre le 1er février 2009 et le 21 avril 2009. Par conséquent, les redevances applicables pour ces supports seront accordées, mais l’intérêt sera calculé comme si les ventes avaient été effectuées le 21 avril 2009. 

 

COÛTS DE LA VÉRIFICATION ET INTÉRÊT SUR CES COÛTS

 

[12]           Le paragraphe 9(3) des Tarifs prévoit que la SCPCP peut recouvrer d’un vendeur de supports audio vierges les coûts raisonnables de la vérification, si la vérification révèle que le vendeur a sous-estimé les sommes à verser à la SCPCP de plus de 10 %. Or, la vérification a révélé que la défenderesse a sous-estimé les sommes dues à la SCPCP d’environ 18 %. En conséquence, les coûts de la vérification seront accordés à la SCPCP.

 

[13]           Les coûts de vérification non acquittés portent intérêt conformément à l’article 12 des Tarifs. L’intérêt est calculé de la même façon que l’intérêt sur les redevances impayées. Le taux d’intérêt est de 1,5 %, et l’intérêt commence à courir le jour où les coûts de la vérification sont dus à la SCPCP. Selon le paragraphe 9(3) des Tarifs, les coûts de vérification doivent être payés dans les 30 jours suivant la date à laquelle le paiement est demandé.

 

[14]           La SCPCP a demandé le paiement de 6 309,61 $ pour les coûts de vérification le 2 juillet 2008, de sorte que l’intérêt sur cette somme a commencé à courir le 2 août 2008.

 

[15]           Par lettre en date du 2 septembre 2008, la SCPCP a prévenu la défenderesse que si elle ne payait pas les redevances dues, les intérêts et les coûts de vérification de 6 309,61 $ au plus tard le 17 septembre 2008, la SCPCP exigerait la totalité des coûts de la vérification, qui s’élèvent à 9 846,23 $. Toutefois, le dossier indique que la SCPCP n’a pas écrit par la suite pour exiger la totalité des coûts. La SCPCP fait valoir, et j’accepte cette proposition, que le dépôt de la présente demande, le 6 avril 2009, a constitué une sommation de payer la totalité des coûts de vérification. Par conséquent, la totalité des coûts de vérification, soit 9 846,23 $, sera accordée à la SCPCP, mais l’intérêt sera alloué comme suit : 

(i)      sur 6 309,61 $ pour la période du 2 août 2008 au 6 mai 2009;

(ii)    sur 9 846,23 $ pour la période du 6 mai 2009 à la date de la présente ordonnance.

 

PÉNALITÉ

 

[16]           La demanderesse réclame l’imposition d’une pénalité légale équivalant au quintuple du montant des redevances impayées, ce qui représente la pénalité maximale permise par le paragraphe 88(2) de la Loi.

 

[17]           À la lumière des facteurs énumérés au paragraphe 88(4) de la Loi, je ne suis pas convaincue que la pénalité maximale est justifiée en l’espèce. Néanmoins, compte tenu de l’importance des ventes non déclarées par la défenderesse et de la nécessité de créer un effet dissuasif, une pénalité égale au double du montant des redevances impayées sera imposée. 

 

DÉPENS

 

[18]           Des dépens de litige de 2 000 $ seront adjugés.  

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que :

1.         la défenderesse paye à la SCPCP :

 

            a) des redevances impayées de 10 797,80 $;

 

b) l’intérêt sur les redevances impayées, qui s’élève à 268,29 $ en date du 16 décembre 2009;

 

            c) les coûts de vérification de la SCPCP, soit 9 846,23 $;

 

            d) l’intérêt sur les coûts de la vérification, qui s’élève à 162,47 $ en date du 16 décembre 2009,

 

            ainsi que le prescrivent la Loi et les Tarifs;

 

 

2.         la défenderesse paye à la SCPCP une pénalité de 21 595,60 $ en application du paragraphe 88(2) de la Loi, soit une pénalité égale à deux fois le montant des redevances impayées que doit verser la défenderesse conformément à l’alinéa 1a) ci-dessus;

 

3.         la défenderesse se conforme aux exigences relatives à la présentation d’états de compte et à l’échéancier des paiements et de la présentation d’états de compte décrits à l’alinéa 82(1)b) de la Loi et aux Tarifs, aussi longtemps que la défenderesse continuera d’être un fabricant ou un importateur assujetti aux dispositions de la partie VIII de la Loi et aux dispositions des Tarifs;

 

4.         la défenderesse paye sans délai à la SCPCP les dépens de la présente demande, adjugés à 2 000 $. Ce montant comprend toutes les taxes sur les produits et services qui sont applicables.

 

 

Sandra J. Simpson

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T-546-09

 

INTITULÉ :                                                   SOCIÉTÉ CANADIENNE DE PERCEPTION DE LA COPIE PRIVÉE (SCPCP)

 

                                                                        et

 

                                                                        DATA MEDIA PRODUCTS INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 2 décembre 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LA JUGE SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 16 décembre 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jessica Caplan

416-216-2971

 

POUR LA DEMANDERESSE

AUCUNE COMPARUTION

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ogilvy Renault, s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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