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Date : 20091126

Dossier : T‑927‑09

Référence : 2009 CF 1212

Ottawa (Ontario), le 26 novembre 2009

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ZINN

 

 

ENTRE :

LA CHEF BEVERLY BELLEGARDE

demanderesse

et

 

ALMA POITRAS, LEO DESNOMIE,

LAMBERT STONECHILD, INEZ DEITER,

GLORIA DEITER, ELAINE PINAY,

ELWOOD OSCAR PINAY, DELMA POITRAS,

FREDA EVELYN DESNOMIE, GREGORY BRASS,

AVEN ROSS, EVELYN POITRAS,

MARTINE DESNOMIE, HOWARD DESNOMIE,

ENOCH POITRAS ET GERALD DESNOMIE

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Dans mon exposé des motifs du jugement que j’ai prononcé le 30 septembre 2009 dans la présente affaire, j’ai accueilli la demande de la demanderesse et annulé la décision d’un conseil des anciens qui la démettait de ses fonctions et lui interdisait d’exercer des fonctions publiques pendant une période de dix ans. J’ai indiqué que la demanderesse avait droit à ses dépens et j’avais espéré que les parties pourraient s’entendre sur le montant de ces dépens. Compte tenu de la division qui règne entre certains membres de la Première nation de Peepeekisis, comme l’attestent les faits exposés dans mes motifs du jugement, j’ai fait preuve d’un grand optimisme en pensant qu’il serait possible d’en venir à une entente. Encore une fois, je dois noter qu’il y a des individus au sein de la Première nation dont les positions et les actions continuent de nuire, financièrement et à d’autres égards, aux intérêts de la Première nation. Faute d’une entente, je demeure saisi de la présente affaire pour ce qui est de la question des dépens. Les parties ont présenté leurs observations. Voici les motifs de l’ordonnance prononcée ci‑après relativement aux dépens.

[2]               La demanderesse réclame l’ensemble des dépens avocat‑client, payables par la Première nation de Peepeekisis, ainsi que les dépens relatifs à la présentation des observations qu’elle a formulées au sujet des dépens.

[3]               Sur réception des observations de la demanderesse concernant les dépens et d’une lettre indiquant que les défendeurs avaient retenu les services d’un autre avocat, la Cour a donné une directive afin qu’on signifie au conseil de bande de la Première nation la requête de la demanderesse visant à faire condamner la Première nation aux dépens relatifs à la présente demande. La Cour a également indiqué que la Première nation avait le droit de déposer des observations faisant valoir sa position. Aucune observation n’a été reçue de la part de la Première nation.

[4]               La demanderesse a déposé un mémoire de dépens avocat‑client faisant état de frais s’élevant à 106 780 $ et de dépenses se chiffrant à 7 750,62 $, soit un total de 114 530,62 $. Les défendeurs n’ont présenté aucune objection ou contestation relativement aux montants ou aux éléments inclus dans ce mémoire de dépens. Cependant, ils s’opposent à ce que l’adjudication des dépens se fasse selon la formule avocat‑client et à ce que la Première nation soit tenue de les payer.

[5]               Les défendeurs ont déposé les affidavits de Howard Mark Desnomie, d’Enoch Joseph Poitras et d’Evelyn Rose Poitras, trois des défendeurs désignés. Leur forme est essentiellement la même. Dans ces affidavits, ils formulent des allégations concernant la conduite de la demanderesse – lesquelles auraient en partie servi à justifier la décision de demander la destitution de la demanderesse. La conduite de la demanderesse pendant qu’elle exerçait ses fonctions n’a aucune pertinence, et n’en a jamais eu, pour la présente demande. Ces allégations sont inappropriées, et la Cour ne leur accorde aucun poids et aucune considération.

[6]               Les souscripteurs d’affidavit attestent tous qu’ [traduction] « une réunion de la bande a eu lieu à l’école de Peepeekisis le 26 septembre 2009, et la bande a adopté une motion, avec effet rétroactif, prévoyant que la bande ne payerait pas les frais juridiques engagés par les défendeurs dans le dossier T‑929‑09 de la Cour fédérale ». L’adoption d’une telle motion indique nécessairement que la Première nation avait remboursé ou devait rembourser les frais juridiques des défendeurs.

[7]               La demanderesse a déposé un affidavit dans lequel elle atteste que les grands livres généraux de la Première nation font état de trois paiements effectués au cabinet d’avocats qui représentait les défendeurs dans le cadre de la présente affaire; ces paiements auraient eu lieu le 6 juin 2009, le 13 juillet 2009 et le 20 août 2009; ils s’élèveraient à 37 916,04 $. Elle atteste également que le 15 septembre 2009, un paiement a été effectué à la défenderesse Evelyn Poitras au montant de 9 500 $ et que rien ne justifiait de lui verser une telle somme à même ce compte. De plus, elle déclare avoir appris que le cabinet d’avocats des défendeurs recevrait le solde de ses frais juridiques après l’élection du chef en décembre 2009. Elle ne précise pas la source de ces renseignements et la Cour ne leur accorde aucun poids.

[8]               De l’avis de la Cour, il est clair que la Première nation a payé au moins une partie des frais juridiques engagés par les défendeurs dans le cadre de la présente instance. Le caractère exécutoire de la motion rétroactive invoquée par les défendeurs est douteux. Il aurait été très facile pour un ou plusieurs des défendeurs de signer un affidavit attestant qu’ils sont ou seront personnellement responsables de leurs frais juridiques. Rien de tel n’a été déposé, et la Cour en tire une inférence négative. Bref, la Cour est convaincue que la Première nation a payé et, selon toute probabilité, continuera de payer les frais juridiques des défendeurs, selon la formule avocat‑client. Il n’existe aucune raison de principe selon laquelle la Première nation ne devrait pas payer les dépens de la demanderesse selon la même formule.

[9]               Contrairement à ce que prétendent les défendeurs, la Cour a compétence pour accorder les dépens à l’encontre d’un tiers en vertu du paragraphe 400(1) des Règles de la Cour fédérale : voir Lower Similkameen Indian Band c. Allison (1995), 99 F.T.R. 305; Re Bodnarchuk, [1995] 3 C.F. 300; et Barbosa c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1987), 4 Imm. L.R. (2d) 81 (C.A.F.).

[10]           Les décisions visées par le contrôle judiciaire en l’espèce sont les décisions d’un groupe qui disait agir à titre de conseil des anciens dans le meilleur intérêt de la Première nation. Dans de telles circonstances, il convient que la Première nation soit responsable des dépens lorsque la Cour annule ces décisions. De plus, les défendeurs réclamaient les dépens pour le cas où ils auraient gain de cause. Puisqu’on sait maintenant que la Première nation payait les frais juridiques des défendeurs, on peut présumer que la Première nation aurait été la bénéficiaire d’une telle ordonnance, et non les défendeurs à titre personnel. Cela confirme que la Première nation est la partie responsable appropriée en ce qui a trait aux dépens.

[11]           Si la Première nation ne verse pas à la demanderesse les dépens adjugés par la présente ordonnance, la demanderesse pourra, à sa discrétion, poursuivre l’ensemble ou une partie des défendeurs à titre personnel.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

  1. la demanderesse a droit à ses dépens selon la formule avocat‑client relativement à la demande et à ce qui touche la présente ordonnance d’adjudication des dépens, soit un total de 116 000 $;

 

  1. les dépens de la demanderesse sont payables par la Première nation de Peepeekisis et les membres de son conseil de bande doivent prendre toutes les mesures requises pour veiller à ce que ce paiement soit acquitté dans les meilleurs délais;

 

3.      advenant le cas où la Première nation de Peepeekisis ne paie pas l’intégralité des dépens adjugés par la présente ordonnance, les défendeurs sont solidairement responsables de tout montant qui demeure impayé.

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑927‑09

 

INTITULÉ :                                                   CHEF BEVERLY BELLEGARDE c.

                                                                        ALMA POITRAS ET AL.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             REGINA (SASKATCHEWAN)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 20 AOÛT 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 26 NOVEMBRE 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jeffrey R.W. Rath

L. Nathalie Whyte

 

POUR LA DEMANDERESSE

Christopher N. H. Butz

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

RATH & COMPANY

Avocats

Priddis (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE

MERCHANT LAW GROUP LLP

Avocats

Regina (Saskatchewan)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

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