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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20090723

Dossier : IMM-4443-08

Référence : 2009 CF 750

Montréal (Québec), le 23 juillet 2009

En présence de monsieur le juge Beaudry

 

 

ENTRE :

ADAN DARIO RESENDIZ BELLO

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), à l’encontre d’une décision datée du 14 septembre 2008 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a établi que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la Loi.

Question en litige

 

[2]               La seule question à trancher en l’espèce est de savoir si la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle dans son appréciation de la crédibilité du demandeur.

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

[4]               Le demandeur est un citoyen du Mexique âgé de 31 ans qui prétend craindre avec raison d’être persécuté par le commandant Rafael Villalobos, Miguel Angel Cervantes Islas et Hector Javier Cervantes, des individus qui seraient impliqués dans le trafic de drogues.

 

[5]               Le demandeur pratique les arts martiaux et il les enseignait à de jeunes contrevenants pour mettre fin à leur toxicomanie et à leurs habitudes criminelles.  

 

[6]               Le demandeur a appris que certains de ses élèves étaient mêlés à des bandes de trafiquants de drogues dirigées par le commandant Rafael Villalobos avec le concours de Miguel Angel et de Javier Cervantes. Le demandeur a aussi constaté que quelques-uns de ses élèves s’absentaient de ses cours alors que d’autres se montraient violents.  

 

[7]               Certains des élèves qui ont été réinsérés dans la société ne voulaient plus travailler pour Villalobos, et on a dit au demandeur que les résidents du quartier avaient signalé auparavant la situation aux autorités, mais en vain. Le demandeur a avisé son supérieur des agissements de ses élèves, et son supérieur lui a conseillé de se débarrasser des indésirables.   

 

[8]               Le demandeur a déposé une plainte contre Rafael Villalobos et Hector Javier Cervantes le 27 mai 2006. À la suite de cela, le demandeur a été enlevé, battu et menace de mort le 4 juillet 2006. Le demandeur a ensuite présenté une plainte et, craignant pour sa vie, il a quitté Querétaro le 6 juillet suivant pour se cacher à 500 kilomètres de là, à Poza Rica, dans l’État de Veracruz, où il est resté durant 11 semaines. Le demandeur a allégué que les agents de la police du District fédéral étaient vraisemblablement en mesure de recueillir de l’information à son sujet parce qu’il avait déjà habité une fois avec sa grand-mère à Poza Rica.

 

[9]               Le demandeur a quitté le Mexique à destination du Canada le 16 octobre 2006, et il a demandé le statut de réfugié le 23 octobre 2006. La cause du demandeur a été entendue le 15 janvier et le 6 mai 2008.

 

Décision attaquée

 

[10]           La Commission a conclu que le demandeur n’était pas crédible et que sa demande d’asile ne reposait sur aucun fondement digne de foi.

 

[11]           Le demandeur a affirmé qu’un de ses élèves travaillait pour quelqu’un que l’on appelait le commandant Villalobos. Quand la Commission a demandé au demandeur ce que faisait Villalobos, il a répondu qu’au dire d’un de ses élèves, Villalobos est un commandant. Le demandeur ne savait  lui-même rien au sujet de cet individu, et la Commission a relevé qu’il était incapable de présenter un élément de preuve quelconque montrant que Villalobos existe réellement.

 

[12]           Le demandeur a déposé un article du journal Diario de Querétaro en date du 7 novembre 2006, soit avant qu’il ne signe son formulaire de renseignements personnels (FRP) le 27 décembre 2006. L’article fait état de l’arrestation de Miguel Angel Cervantes Islas et d’Hector Javier Cervantes, le deuxième étant au service de la police judiciaire du District fédéral du procureur général.

 

[13]           Par la voie d’une demande d’information présentée à sa section de recherches des renseignements précis, à Ottawa, la Commission a appris que l’article avait bel et bien été publié par le journal le 7 novembre 2006. La Commission a évoqué la possibilité que le demandeur ait utilisé, dans son récit, l’incident dont il est fait mention dans l’article, mais le demandeur a rejeté cette théorie et juré qu’un ami de son père lui avait envoyé l’article en question par Internet en septembre 2007.

 

[14]           La plainte du demandeur, déposée le 4 juillet 2006 dans la ville de Querétaro, relate les incidents qu’il a vécus et nomme les deux personnes mentionnées dans l’article et son FRP. Comme la plainte a été déposée avant que l’article ne soit publié, et le FRP du demandeur, qui date de décembre 2006, contient ces renseignements même s’il dit n’avoir reçu l’article qu’en septembre 2007, cette séquence des événements devrait amener la Commission à prêter foi au récit du demandeur.  

 

[15]           Lorsqu’elle a sollicité de l’information sur l’article de journal, la Commission a aussi demandé des renseignements pour vérifier l’existence de la plainte portée à la police. On a communiqué avec le procureur général de l’État de Querétaro pour vérifier ces renseignements, à savoir le nom du procureur public, l’infraction commise et le nom du plaignant figurant dans la plainte. Toutefois, l’information transmise par le demandeur à la Commission ne correspondait pas à celle inscrite dans le système informatique du bureau du procureur général.

 

[16]           Lorsque le demandeur a été appelé de nouveau à comparaître le 6 mai 2008, on lui a montré la demande d’information. Le demandeur a dit qu’il avait signé la plainte et demandé à sa mère de se présenter au bureau du procureur général pour en obtenir une copie et la lui envoyer; la copie dont disposait la Commission était la copie qu’il avait reçue. La Commission a dit au demandeur que sa mère lui avait envoyé un faux document et que la plainte adressée à la police concorde avec des parties de l’article de journal ainsi que le récit du demandeur. Vu ce faux document, la Commission n’a accordé aucune crédibilité au demandeur et a conclu que le récit de celui-ci n’était pas digne de foi. La Commission est donc arrivée à la conclusion que le paragraphe 107(2) de la Loi s’appliquait, et elle a rejeté la demande d’asile du demandeur.

 


Disposition législative applicable

 

[17]           Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 :

107. (2) Si elle estime, en cas de rejet, qu’il n’a été présenté aucun élément de preuve crédible ou digne de foi sur lequel elle aurait pu fonder une décision favorable, la section doit faire état dans sa décision de l’absence de minimum de fondement de la demande.

107. (2) If the Refugee Protection Division is of the opinion, in rejecting a claim, that there was no credible or trustworthy evidence on which it could have made a favourable decision, it shall state in its reasons for the decision that there is no credible basis for the claim.

 

Analyse

Norme de contrôle

 

[18]           Avant l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, la norme de contrôle applicable dans des circonstances semblables était la décision manifestement déraisonnable. C’est maintenant la décision raisonnable qui s’applique.

 

Analyse

 

[19]           La question en l’espèce ne consiste pas à savoir si la Cour serait parvenue à une conclusion différente. La Cour doit décider si la Commission a fondé sa décision sur la preuve qui lui a été présentée. La Cour ne peut intervenir que si on a démontré l’existence d’une erreur susceptible de contrôle.

 

[20]           On ne saurait accepter l’argument du demandeur qu’il n’était pas prêt à être confronté à la pièce A-3 (note faisant suite au Formulaire d’obtention de renseignements, page 32, dossier du tribunal) parce que ce document avait été envoyé à son consultant. Ce dernier a confirmé avoir reçu le document en question. Le demandeur a été confronté au document à une audience subséquente, mais il n’a pas demandé un ajournement par l’entremise de son représentant.    

 

[21]           En outre, les prétendues erreurs de rédaction dans la pièce A-3 ne sont pas déterminantes. L’intervention de la Cour n’est donc pas justifiée.

 

[22]           Les informations que le demandeur a pu fournir à la Commission relativement à ses persécuteurs ou à sa situation se limitent à l’article de journal et aux renseignements obtenus auprès de ses élèves. Le demandeur manque de connaissances concernant les renseignements de base sur lesquels repose sa demande d’asile, et il n’a pas non plus été en mesure de présenter des documents à l’appui de cette demande. Il n’était donc pas déraisonnable pour la Commission de douter de la crédibilité du demandeur.

 

[23]           En l’espèce, la Cour est d’avis que la décision de la Commission contient tous les éléments nécessaires pour être raisonnable.

 

[24]           Les parties n’ont proposé aucune question à des fins de certification, et il n’y en a aucune en l’espèce.


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

 

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4443-08

 

INTITULÉ :                                       ADAN DARIO RESENDIZ BELLO

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 21 juillet 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            Le juge Beaudry

 

DATE DEST MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 23 juillet 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Cristina Marinelli

 

POUR LE DEMANDEUR

Yael Lévy

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Cristina Marinelli

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

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