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Cour fédérale

 

Federal Court

 


 

Date : 20091028

Dossier : T-157-09

Référence : 2009 CF 1104

Ottawa (Ontario), le 28 octobre 2009

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

 

demandeur

 

et

 

 

 

FALLAN DAVIS

 

défenderesse

 

et

 

 

 

COMMISSION CANADIENNE

DES DROITS DE LA PERSONNE

 

intervenante

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               C’est par une froide journée de novembre, en 2005, que la situation a dégénéré au poste frontalier canadien de l’île Cornwall (Ontario). Elle a dégénéré à un point tel que les gardes‑frontières ont quitté leur poste et que le pont international de la voie maritime vers l’État de New York a été fermé. À un point tel que Teiohontathe Fallan Davis, une jeune femme Mohawk qui habite dans la réserve d’Akwesasne située sur l’île, a déposé une plainte à la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission), dans laquelle elle soutenait que divers agents de l’Agence des services frontaliers du Canada avaient fait preuve de discrimination envers elle. La Commission a nommé un enquêteur, a accepté son rapport final et a renvoyé l’affaire au Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal). L’audience devrait débuter le mois prochain.

 

[2]               Le procureur général, au nom de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), a demandé le contrôle judiciaire de la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal. Il soutient que l’enquête n’était ni neutre, ni complète, comme la loi l’exige. Plus précisément, il soutient que la Commission a complètement laissé de côté les critiques détaillées que l’ASFC a formulées en ce qui concerne le rapport d’enquête. De plus, il a par la suite été révélé que dans une des ébauches du rapport, l’enquêteur avait recommandé que la plainte de Mme Davis soit rejetée.

 

[3]               Bien que le procureur général soulève des questions de fond et bien que les allégations selon lesquelles plusieurs agents de l’ASFC en devoir ce jour‑là sont racistes peuvent avoir de graves répercussions et doivent être prises au sérieux, je conclus que les obligations qu’avait la Commission envers l’ASFC en matière d’équité procédurale ont été respectées, que l’enquête a été suffisamment approfondie et que compte tenu de toutes les circonstances, la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal n’était pas déraisonnable.

 

LES FAITS

[4]               La communauté mohawk située sur l’île Cornwall (Ontario), s’étend aussi aux îles à proximité immédiate et sur la rive sud du fleuve St-Laurent au Québec et dans l’État de New York. La communauté fait plutôt fi de la frontière entre le Canada et les États-Unis. Les résidents d’Akwesasne qui achètent des effets personnels aux États-Unis et les ramènent à Cornwall doivent les déclarer aux agents des douanes, mais ils n’ont pas à payer les droits de douane.

 

Le 18 novembre 2005

[5]               Le matin du 18 novembre 2005, Mme Davis revenait de l’État de New York dans son vieux véhicule utilitaire sport (VUS) noir.

 

[6]               Selon son témoignage, elle s’est engagée dans la voie réservée aux résidents d’Akwesasne, mais un agent des douanes lui a bloqué le chemin et lui a indiqué de se rendre dans l’enceinte réservée au transport commercial. Bien qu’elle lui ait demandé pourquoi, il ne lui a pas donné d’explication. Lorsqu’elle est entrée dans l’enceinte, elle a remarqué un camion de transport qui se trouvait sous ce qui semblait être un appareil de radiographie sur lequel se trouvait une affiche où on pouvait lire [traduction] « danger, radiation ». La situation l’inquiétait parce qu’il ne s’agissait pas de l’endroit normal où les inspections secondaires détaillées des voitures étaient effectuées. On lui a dit de sortir du véhicule, qui a été soumis à la radiographie et a ensuite été démonté partiellement. Elle a utilisé son téléphone cellulaire pour appeler sa grand-mère, en paniquant. Il faisait froid, on ne lui a pas permis d’aller s’abriter et on lui a dit de se taire. Un certain nombre d’agents étaient présents. L’un d’entre eux a fait des remarques du genre [traduction] « vous êtes définitivement coupable de quelque chose [...] transportez-vous des cigarettes de contrebande? » La situation s’est aggravée. Mme Davis a dit à l’agent qu’il se trouvait sans autorisation sur son territoire, et il a répondu [traduction] « nous sommes sur le territoire des douanes canadiennes », ce qu’elle a contesté. Il lui a répondu [traduction] « vous savez ce que notre société pense de votre peuple ».

 

[7]               Tous comptes faits, après qu’on lui eut refusé de s’abriter et qu’elle soit restée au froid pendant 45 minutes, sans compter qu’elle n’était pas habillée chaudement, les agents n’ont trouvé que quelques vêtements et des jouets pour ses enfants qu’elle avait achetés ce matin là dans un centre d’achats à Massena (New York). Lorsqu’on lui a demandé pourquoi elle ne les avait pas déclarés, elle a répondu qu’on ne lui avait pas donné la chance de déclarer quoi que ce soit.

 

[8]               Par la suite, un conflit a éclaté au sujet de la question de savoir si elle devait payer des droits de douane parce qu’elle n’avait pas déclaré ses achats.

 

[9]               L’ASFC a une version différente des événements.

 

[10]           Par hasard, un Système d’inspection des véhicules et du fret (VACIS) était opérationnel au poste frontalier ce jour‑là. En plus d’examiner les véhicules commerciaux qui pouvaient être utilisés pour transporter des marchandises de contrebande, l’ASFC avait été avisée qu’un compartiment secret avait été ajouté à un VUS noir. C’est pourquoi le véhicule de Mme Davis avait été inspecté, tout comme au moins un autre VUS. Il n’y avait rien de louche au fait qu’on lui ait indiqué de se rendre dans la zone réservée au transport commercial. Le VACIS est un gros appareil et il était logique qu’il soit placé dans cette enceinte.

 

[11]           Mme Davis avait été méprisante et refusait de coopérer avec les agents, qui étaient tous des hommes. Elle a utilisé un langage extrêmement obscène et a qualifié de douteuses leur orientation sexuelle et la taille de diverses parties de leur anatomie. Bien que les esprits s’emportent naturellement, on l’a toujours traitée avec respect et aucun commentaire discriminatoire n’a été proféré.

 

[12]           En raison de son statut, Mme Davis n’a pas à payer de droits de douane pour ses effets personnels, mais elle a l’obligation de les déclarer. Les agents lui ont finalement accordé le bénéfice du doute que, dans les circonstances, elle n’avait pas eu l’occasion de faire de déclaration, et ils ne lui ont pas imposé de droits de douane.

 

[13]           Peu importe qui a lancé la première pierre, tous s’accordent pour dire que Mme Davis était extrêmement bouleversée. Une autre agente des douanes a remarqué Mme Davis et lui a donné les numéros d’insigne des agents en question [traduction] « au cas où elle voudrait porter plainte » et l’agente a plus tard dit à l’enquêteur de la Commission que le comportement de Mme Davis était normal, compte tenu des remarques racistes proférées par les divers agents de l’ASFC au poste frontalier de l’île Cornwall.

 

[14]           En raison de l’appel que Mme Davis a fait à partir de son cellulaire, un certain nombre de véhicules remplis de membres de la communauté ont commencé à se rassembler autour du poste frontalier. Elle a aussi menacé d’appeler les guerriers mohawks. Craignant pour leur sécurité, les agents ont quitté et ont fermé la frontière.

 

Loi canadienne sur les droits de la personne

[15]            La Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP) vise à donner effet, pour ce qui est des domaines relevant du fédéral, au principe suivant lequel tous les individus doivent pouvoir s’épanouir indépendamment des considérations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe ou d’autres facteurs. Plus précisément, l’article 5 établit que constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, pour le fournisseur de services ou d’installations, de défavoriser un individu à l’occasion de leur fourniture.

 

[16]           Sur réception d’une plainte, la Commission peut effectuer un certain nombre d’actions. Conformément à l’article 41 et suivants de la LCDP, la Commission peut refuser de traiter une plainte si, par exemple, la plainte pourrait avantageusement être instruite selon des procédures prévues par une autre loi fédérale, elle n’est pas de sa compétence (c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’une question qui relève du fédéral), elle est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi ou elle a été déposée après l’expiration d’un délai d’un an après le dernier des faits sur lesquels elle est fondée.

 

[17]           En l’espèce, la plainte officielle a été déposée un an et une semaine après l’incident. Cependant, la Commission a le pouvoir de proroger le délai, ce qu’elle a fait puisque Mme Davis avait déposé une plainte moins officielle au cours de l’année. L’ASFC ne conteste pas cette décision.

 

[18]           Il n’y a aucune autre commission à qui Mme Davis aurait pu porter plainte, comme ce pourrait être le cas si les agents en question avaient été des membres de la Gendarmerie royale du Canada ou de la police militaire en devoir policier.

 

[19]           La Commission peut proposer la médiation, ce qu’elle a fait en l’espèce. Malheureusement, et je le dis sciemment, Mme Davis a refusé. Il n’est pas clair si l’ASFC a eu l’occasion de refuser. Certainement, elle n’a pas demandé la médiation.

 

[20]           La Commission a alors nommé son propre enquêteur. La LCDP prévoit qu’à la fin de l’enquête, après avoir examiné le rapport, la Commission peut soit renvoyer la plainte au Tribunal ou la rejeter si elle est « […] convaincue […] que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié », selon le cas.

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[21]           La décision de la Commission de rejeter une plainte ou de la renvoyer au Tribunal doit être contrôlée selon la norme de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190). Cela signifie que la Cour doit faire preuve de déférence envers la Commission, même si elle aurait pu rendre une décision différente. Cependant, cette déférence est conditionnelle au fait que la Commission et son enquêteur doivent avoir respecté les principes de la justice naturelle, soit l’équité procédurale en l’espèce. L’enquête devait être approfondie, ce qui signifie que l’ASFC doit avoir eu l’occasion raisonnable de présenter ses commentaires sur l’affaire et la Commission doit avoir fait preuve de neutralité, c’est-à-dire qu’elle ne devait pas être affecté par la partialité. Dans le cas de l’équité procédurale, la Cour n’a pas à faire preuve de déférence envers la Commission. En effet, la Cour se soustrairait à son devoir si elle faisait preuve de déférence. Voir, par exemple, la décision de Monsieur le juge Nadon, alors juge de la Cour fédérale, dans l’affaire Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574.

 

L’ENQUÊTE INTERNE DE L’ASFC

[22]           Dès la réception de la plainte officielle de Mme Davis, la Commission a envoyé une copie de la plainte à l’ASFC et lui a demandé de présenter ses commentaires. L’ASFC avait déjà tenu sa propre enquête. Elle a présenté des commentaires détaillés au sujet de la plainte de Mme Davis et a aussi fourni à l’enquêteur de la Commission une copie de ses propres conclusions. Je traiterai d’abord de l’enquête de l’ASFC.

 

[23]           Le rapport de l’ASFC établit que l’équipe du VACIS n’était présente à la frontière de Cornwall que de temps en temps. Il avait été décidé que les camions et les VUS seraient inspectés. Les automobiles étaient comprises en raison d’une radiographie précédente que l’équipe du VACIS avait effectuée sur un VUS à la demande de la GRC, qui avait révélé un compartiment secret.

 

[24]           Le VUS de Mme Davis était le premier à être sélectionné pour l’inspection. Bien que les détails au sujet de l’autre véhicule qui a subi une radiographie ne sont pas inscrits dans le rapport, et bien qu’il y ait eu une certaine confusion entre les agents à savoir si le véhicule portait une plaque d’immatriculation du Vermont ou de la Virginie, l’ASFC a fourni à l’enquêteur de la Commission le nom du conducteur de l’autre véhicule, qui portait une plaque d’immatriculation du Vermont.

 

[25]           Mme David traverse la frontière un certain nombre de fois par jour et utilise la voie réservée pour les résidents d’Akwesasne. L’incident a été décrit comme suit :

[traduction]

La radiographie et l’examen qui a suivi du véhicule de Mme Davis ainsi que son interaction avec les agents de l’ASFC se sont rapidement détériorés, au point où on a déclaré que Mme Davis avait censément été d’humeur belliqueuse et avait manqué de respect envers les employés, puis était finalement devenue bouleversée. L’examen a révélé la présence d’articles non déclarés d’une valeur de 200 $. Cependant, le surintendant du travail par poste a communiqué avec le douanier en chef et lui a accordé les avantages du Décret de remise visant les résidents d’Akwesasne et lui a permis de quitter le poste sans payer de droits de douane ni de taxes.

 

Les membres de l’équipe du VACIS et certains des employés de la frontière de Cornwall ont eu peur lorsqu’ils ont cru que leur sécurité personnelle était menacée en raison de la présence et des actions continues de Mme Davis, d’un journaliste et de la grand-mère de Mme Davis. L’équipe du VACIS a donc demandé que la police les escorte hors de l’île, et les employés du poste ont déposé un avis de refus de travailler.

 

 

[26]           Par la suite, les rapports ont été examinés et on a demandé aux agents visés, ainsi qu’à Mme Davis, de présenter leurs déclarations. Cependant, il y a certains signes d’avertissement. [traduction] « La majeure partie des employés ont fait preuve de coopération et de bonne volonté [...] » [Non souligné dans l’original.] Il était regrettable que les membres de l’équipe du VACIS n’aient pas eu droit à une séance d’information officielle de la part de la gestion du poste frontalier de Cornwall sur les relations avec la communauté locale ou sur les points sensibles de la communauté et que les renseignements qu’ils ont reçus des agents locaux du poste [traduction] « [...] pouvaient être teintées des croyances personnelles des agents ». Le rapport a conclu que, comme il n’y avait pas eu de séances de sensibilisation aux différences de culture depuis un certain temps, il serait utile de remettre en place ces séances afin d’éliminer, ou du moins de limiter, de futurs incidents de ce genre.

 

[27]           Cependant, le rapport considérait que [traduction] « rien ne corrobor[ait] les allégations de Mme Davis au sujet du comportement répréhensible des agents », bien qu’il eut été noté qu’aucun des agents masculins n’avait tenté de diffuser la situation. Cette conclusion est inexacte quant aux faits. Il existe des preuves corroborant les allégations de Mme Davis. Cette preuve est fondée dans ses paroles : les allégations qu’elle a immédiatement répétées à l’agente des douanes et aux membres de sa communauté. En revanche, il existe aussi des preuves corroborant le fait qu’il n’y a pas eu de comportement répréhensible de la part des agents, preuves qui sont aussi fondées dans leurs paroles.

 

[28]           Il s’agit d’une question de crédibilité.

 


Le rapport de l’enquêteur de la Commission

[29]           L’enquêteur a débuté son rapport en notant que les motifs de distinction illicite allégués sont la race, l’âge et le sexe. Il a conclu son rapport en recommandant, conformément à l’alinéa 44(3)a) de la LCDP, que la Commission demande au président du Tribunal de désigner un membre pour instruire la plainte parce que, compte tenu des circonstances de la plainte, l’examen de celle-ci est justifié. L’enquêteur a déclaré que la plainte concerne l’intérêt public dans la mesure où les voyageurs ne devraient pas être victimes de discrimination fondée sur leur race de la part des agents de l’ASFC.

 

[30]           L’enquête ne portait que sur la race parce que Mme Davis n’avait pas fourni de précisions au sujet de la discrimination fondée sur l’âge ou le sexe.

 

[31]           L’enquêteur a résumé les événements qui se sont déroulés lors de l’inspection secondaire du véhicule, tels que décrits tant par Mme Davis que par les agents concernés.

 

[32]           Il a noté le point de vue de l’ASFC selon lequel le travail au poste frontalier de l’île de Cornwall est complexe parce que de nombreux voyageurs sont des résidents d’Akwesasne. En effet, il semble que les déplacements des Mohawks constituent près de 80 p. 100 des entrées à partir de l’État de New York. L’ASFC soutenait aussi que la situation avait été envenimée par l’agent de sécurité mohawk en devoir, qui devait aider si un incident survenait au niveau de la sécurité, mais qui n’avait rien fait. Un des témoins interrogés était arrivé sur place après l’un des appels téléphoniques de Mme Davis. Il semble qu’il ait dit à l’enquêteur qu’il avait vu les agents intimider Mme Davis et lui crier après. Mme Davis était très bouleversée et elle pleurait. Le témoin était d’avis que le comportement des agents était incroyable et inacceptable, bien qu’il ne savait pas s’il était fondé sur la race, l’âge ou le sexe de Mme Davis.

 

[33]           Le rapport mentionne une entrevue avec l’agente des douanes, qui a par la suite quitté son emploi à l’ASFC parce qu’elle se disait dégoûtée par la façon dont les [traduction] « autochtones » étaient traités. Dans un courriel qu’elle a envoyé trois jours après l’incident, elle a mentionné à l’ASFC que Mme Davis lui avait dit qu’un agent avait déclaré [traduction] « vous savez ce que nous pensons de votre peuple; nous trouverons quelque chose, nous savons que vous êtes coupable simplement par la façon dont vous agissez ». Elle était d’avis que l’agent avait complètement manqué de coopération, de respect, d’intégrité et de professionnalisme et que Mme Davis aurait dû être avisée de ce qui se passait, plutôt que d’être terrorisée. Elle a ajouté que les agents de l’ASFC supposent que les [traduction] « Indiens » sont coupables jusqu’à preuve du contraire et que la façon dont les Mohawks étaient traités à la frontière était absolument atroce.

 

[34]           L’enquêteur s’est fondé sur la version des événements de Mme Davis, qui avait immédiatement été répétée à l’agente des douanes, pour soutenir que [traduction] « La preuve semble montrer [...] que les agents ont fait des commentaires racistes, qu’ils ont complètement manqué aux valeurs essentielles dans leur traitement de la plaignante en raison de sa race ».

 

[35]           Il était d’avis que la preuve n’était pas claire quant à la question de savoir si d’autres VUS avaient été radiographiés ou, le cas échéant, s’ils avaient été envoyés au même endroit que Mme Davis. Selon lui, les véhicules visés étaient sélectionnés dans la voie réservée aux résidents d’Akwesasne. Il a ajouté que Mme Davis avait pu être impolie et avoir utilisé un langage grossier envers les agents [traduction] « [...] parce qu’ils lui avaient crié après et avaient été impolis envers elle ».

 

La réponse de l’ASFC

[36]           La Commission a envoyé le rapport de son enquêteur à l’ASFC et à Mme Davis pour qu’elles présentent des commentaires, avant qu’elle rende une décision. Le rapport fait environ 12 pages et contient 109 paragraphes. Un certain nombre de questions ont été soulevées en réponse. L’ASFC conteste le fait que l’enquêteur a accordé une grande crédibilité à l’ancienne employée de l’ASFC qui n’était pas présente lors de l’incident principal et dont la compréhension de ce qui a été dit ou fait était fondée sur la conversation subséquente qu’elle avait eue avec Mme Davis. L’ASFC a ensuite lancé la remarque acerbe suivante :

 

[traduction]

De plus, il convient de noter que l’ASFC a des raisons de croire que les antécédents de Mme _____________ avec l’ASFC mineraient clairement la fiabilité de son témoignage. Cependant, dans le contexte de la présente plainte, l’ASFC ne peut pas divulguer de renseignements personnels au sujet de l’emploi de Mme _______________ ou de ses antécédents médicaux, conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Par conséquent, l’ASFC se trouve dans une situation où elle ne peut pas entièrement expliquer les raisons pour lesquelles le témoignage de Mme _________________ n’est pas fiable.

 

[Nom de la personne omis.]

 

C’est une belle façon de demander à la Commission d’apprécier à nouveau la preuve!

 

[37]           L’ASFC a aussi soutenu que l’enquêteur avait complètement mal compris l’objet de l’examen interne de l’ASFC. Cette plainte est peut-être correcte, mais elle n’est pas particulièrement pertinente.

 

[38]           L’ASFC s’est aussi plainte du fait que l’enquêteur n’a pas tenu compte de toute la preuve présentée et a souvent écrit [traduction] « la preuve semble montrer [...] » sans préciser qui était le témoin ou pourquoi la preuve des témoins de l’ASFC avait été écartée.

 

[39]           La déclaration selon laquelle l’ASFC avait refusé la médiation a été contestée. Cette dernière soutient qu’elle n’a jamais eu l’occasion de se prononcer, puisque Mme Davis avait refusé la médiation. Bien que le rapport de l’enquêteur précise que ce dernier a examiné les coupures de journaux, [traduction] « l’ASFC craint que les articles aient pu être dérivés de publications mohawk qui sont clairement partiales envers l’ASFC ». La Commission avait l’obligation, en vertu des Règles des Cours fédérales, de produire son dossier. En effet, les coupures de journaux provenaient de publications mohawk.

 

[40]           L’ASFC a soutenu que Mme Davis n’était pas crédible. Il s’agit sans doute d’une conclusion découlant du fait que l’ASFC croit ses agents.

 

[41]           La litanie de plaintes s’est poursuivie.

 

[42]           Mme Davis a aussi présenté des commentaires détaillés.

 

[43]           De toute façon, après avoir reçu les commentaires, la Commission a simplement écrit une lettre type dans laquelle elle précisait qu’elle avait examiné le rapport de l’enquêteur et qu’elle avait décidé de demander au président du Tribunal d’instruire la plainte, conformément à l’alinéa 44(3)a) de la LCDP parce qu’elle était « convaincue [...] que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci est justifié ».

 

[44]           L’ASFC soutient que, selon les principes de justice naturelle, elle avait droit à une réponse à ses objections détaillées au rapport de l’enquêteur et qu’autrement, l’enquête n’aurait pas été complète. Par exemple, elle a fait valoir qu’après avoir soutenu que l’enquêteur avait complètement mal compris l’objet de son rapport interne, l’auteur de ce rapport aurait dû être interrogé.

 

[45]           L’article 317 des Règles des Cours fédérales exige d’un office fédéral, la Commission en l’espèce, qu’il produise son dossier sur demande, comme l’ASFC l’a demandé. Le dossier produit montrait qu’il y avait eu des ébauches précédentes du rapport de l’enquêteur, qui n’ont pas été produites. L’ASFC a demandé une ordonnance de production. La Commission était d’abord d’avis que les ébauches étaient protégées par privilège, parce qu’une ébauche est examinée par une équipe qui comprend un avocat, mais elle a ensuite produit les ébauches volontairement, sans qu’une ordonnance de la Cour ne soit rendue. On ne me demande pas de déterminer si les ébauches auraient été protégées par privilège. Si c’est le cas, on a renoncé au privilège en produisant volontairement les ébauches. L’ébauche pertinente porte la note suivante : [traduction] « Ébauche pour examen par l’équipe X ». On y relève un certain nombre de commentaires manuscrits qui sont les [traduction] « commentaires de John, 23 septembre 2008 ». « John » n’est pas identifié. La recommandation finale était [traduction] « Il est recommandé, en application de l’alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, que la Commission rejette la plainte parce que la preuve n’appuie pas les allégations de traitement différentiel fondé sur la race. » Immédiatement en dessous de ce paragraphe, « John » a écrit [traduction] « Bonnie, je crois que l’affaire pourrait aller dans les deux sens. »

 

[46]           L’avocat de l’ASFC a effectué une comparaison détaillée de l’ébauche et du rapport final. Pendant l’audience, j’ai exprimé d’importantes préoccupations au sujet de cette approche, parce que les ébauches des motifs que j’écris, y compris les présents motifs, ne sont jamais publiées. Souvent, des révisions importantes sont apportées. En l’espèce, l’agente des douanes, qui soutient Mme Davis, n’a été interrogée par l’enquêteur de la Commission qu’après que l’ébauche du rapport eut été préparée. Certaines questions ont été éliminées de la première ébauche parce qu’elles n’étaient clairement pas pertinentes. Cependant, certaines autres questions ont été interprétées de façon souple et leur orientation a été modifiée. Dans la première ébauche, il est écrit que la preuve donnait à penser que Mme Davis a été la première à utiliser un langage grossier et que même si les agents ont réagi, ils n’ont pas utilisé de termes racistes. Dans l’ébauche finale, la preuve montre que c’est leur comportement qui a pu pousser Mme Davis à utiliser un langage inapproprié. Dans la version finale, l’enquêteur croit que la preuve peut donner à penser qu’il y a eu profilage racial dès le départ du fait que les résidents d’Akwesasne ont été visés alors qu’ils se rendaient dans leur voie réservée. Ces changements peuvent avoir été apportés après une relecture des notes d’entrevue ou l’entrevue avec l’ancienne agente des douanes peut avoir permis de voir l’affaire d’un nouveau point de vue. Il ne s’agit pas d’un cas où la Commission a publié sa décision et a ensuite changé d’idée. Dans un tel cas, il se peut très bien que la Commission soit tenue de fournir des explications. (Canada (Procureur général) c. Grover, 2004 CF 704, 252 F.T.R. 244)

 

L’AFFAIRE DE MME DAVIS

[47]           Mme Davis, qui se représentait elle-même et qui n’est pas avocate, n’a pas eu grand chose à dire lors de l’audience. Elle appuie évidemment la décision de la Commission de renvoyer l’affaire au Tribunal. Elle a eu de la difficulté à se concentrer sur les événements du 18 novembre 2005, il est clair qu’elle a de la rancœur au sujet de l’autoroute 138 et du poste frontalier qui traverse la réserve d’Akwesasne et qu’elle est d’avis que l’événement a pu être un prétexte pour la campagne des agents de l’ASFC visant à obtenir la permission de porter des armes. Elle a mentionné la fermeture du pont l’été dernier après que l’ASFC eut fermé le poste frontalier de l’île de Cornwall jusqu’à ce qu’elle puisse installer un poste frontalier sur la terre ferme à Cornwall. Lorsqu’elle revient de New York, elle doit maintenant traverser l’île de Cornwall et se rendre sur la rive pour déclarer ses achats et doit ensuite faire demi-tour. Si elle ne le faisait pas, on lui imposerait une amende sévère.

 

LA POSITION DE LA COMMISSION

[48]           La Commission a demandé l’autorisation d’intervenir afin d’expliquer sa façon de procéder à Mme Davis, qui se représente elle-même. La protonotaire Aronovitch a accueilli cette requête. L’ASFC a demandé que certains paragraphes du mémoire des faits et du droit subséquent de la Commission soient radiés du dossier au motif qu’ils n’expliquent pas la procédure, mais qu’ils visent à justifier sa décision en renvoyant la Cour à diverses parties du dossier. Qu’il y ait un fondement à la position de l’ASFC ou non, sa requête est inutile parce que, de toute façon, je dois examiner le dossier en entier. La requête est rejetée en raison de son caractère théorique.

 

LE DROIT

[49]           Je commence avec les motifs de Monsieur le juge LeDain pour la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Latif c. Commission canadienne des droits de la personne, [1980] 1 R.C.F. 687, où il a exprimé à la page 697 :

Nul doute que la Loi canadienne sur les droits de la personne crée de nouveaux droits, sur le plan du droit positif comme sur le plan de la procédure. De fait, elle consacre le droit d’être traité sans certaines formes de discrimination dans certains domaines qui relèvent de la compétence législative fédérale, et elle prévoit une procédure spéciale de recours contre les actes discriminatoires. Se fonder sur l’article 33 pour déclarer une plainte irrecevable revient en fait à refuser ce recours au requérant. C’est à proprement parler une décision qui touche aux droits subjectifs.

 

[50]           Dans Syndicat des employés de production du Québec et de l’Acadie c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879, la Cour suprême a sondé l’intention du législateur dans le cas où la preuve serait insuffisante pour justifier le renvoi de la plainte au Tribunal par la Commission. Le juge Sopinka a affirmé à la page 899 : « Le but n’est pas d’en faire une décision aux fins de laquelle la preuve est soupesée de la même manière que dans des procédures judiciaires; la Commission doit plutôt déterminer si la preuve fournit une justification raisonnable pour passer à l’étape suivante. » Il a adopté la déclaration suivante de Lord Denning dans l’arrêt Selvarajan c. Race Relations Board, [1976] 1 All E.R. 12 (C.A.), à la page 19 :

[TRADUCTION]

Ces dernières années, nous avons examiné la procédure de nombreux organismes chargés de faire enquête et de se faire une opinion [...] Dans tous ces cas, on a jugé que l’organisme chargé d’enquêter a le devoir d’agir équitablement; mais les exigences de l’équité dépendent de la nature de l’enquête et de ses conséquences pour les personnes en cause. La règle fondamentale est que, dès qu’on peut infliger des peines ou sanctions à une personne ou qu’on peut la poursuivre ou la priver de recours, de redressement ou lui faire subir de toute autre manière un préjudice en raison de l’enquête et du rapport, il faut l’informer de la nature de la plainte et lui permettre d’y répondre. Cependant, l’organisme enquêteur est maître de sa propre procédure. Il n’est pas nécessaire qu’il tienne une audition. Tout peut se faire par écrit. Il n’est pas tenu de permettre la présence d’avocats. Il n’est pas tenu de révéler tous les détails de la plainte et peut s’en tenir à l’essentiel. Il n’a pas à révéler sa source de renseignements. Il peut se limiter au fond seulement. De plus, il n’est pas nécessaire qu’il fasse tout lui-même. Il peut faire appel à des secrétaires et des adjoints pour le travail préliminaire et plus. Mais en définitive, l’organisme enquêteur doit arrêter sa propre décision et faire son propre rapport.

 

[51]           Cette citation règle la plainte quant au fait que l’enquêteur de la Commission n’a pas nommé les témoins.

 

[52]           Il est bien établi dans la jurisprudence que lorsque la Commission adopte simplement le rapport de l’enquêteur, ce rapport constitue ses motifs : Sketchley c. Canada (P.G.), 2005 CAF 404, [2006] 3 R.C.F. 392, au paragraphe 37. Il est aussi bien établi que l’enquêteur fait partie de la Commission, il n’est pas indépendant (Selvarajan, précité). Il n’y a rien d’importun au fait que des membres de la Commission ont révisé l’ébauche et ont fait des commentaires. Ces commentaires ont pu entraîner l’interrogation de l’agente de l’ASFC, qui a permis à l’enquêteur de voir la preuve sous un autre angle.

 

[53]           Comme Monsieur le juge La Forest l’a noté dans l’arrêt Bell c .Canada (Commission canadienne des droits de la personne); Cooper c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854, au paragraphe 53 :

La Commission n’est pas un organisme décisionnel; cette fonction est remplie par les tribunaux constitués en vertu de la Loi. Lorsqu’elle détermine si une plainte devrait être déférée à un tribunal, la Commission procède à un examen préalable assez semblable à celui qu’un juge effectue à une enquête préliminaire. Il ne lui appartient pas de juger si la plainte est fondée. Son rôle consiste plutôt à déterminer si, aux termes des dispositions de la Loi et eu égard à l’ensemble des faits, il est justifié de tenir une enquête. L’aspect principal de ce rôle est alors de vérifier s’il existe une preuve suffisante. Le juge Sopinka a souligné ce point dans Syndicat des employés de production du Québec et de L’Acadie c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879, à la p. 899 :

 

 L’autre possibilité est le rejet de la plainte. À mon avis, telle est l’intention sous-jacente à l’al. 36(3)b) pour les cas où la preuve ne suffit pas pour justifier la constitution d’un tribunal en application de l’art. 39. Le but n’est pas d’en faire une décision aux fins de laquelle la preuve est soupesée de la même manière que dans des procédures judiciaires; la Commission doit plutôt déterminer si la preuve fournit une justification raisonnable pour passer à l’étape suivante.

 

 

[54]           La Cour suprême a résumé l’obligation d’examiner d’un juge à l’enquête préliminaire en droit pénal dans l’arrêt R. c. Arcuri, [2001] 2 R.C.S. 828, 2001 CSC 54, aux paragraphes 21 à 23. La question qu’il faut se poser est celle de savoir s’il y a une preuve sur laquelle un jury raisonnable, ayant reçu des directives appropriées, pourrait rendre un verdict de culpabilité. Le juge doit renvoyer à procès l’accusé s’il existe des éléments de preuve admissibles qui pourraient, si on leur ajoute foi, entraîner un verdict de culpabilité. Il faut ensuite examiner si la preuve est directe ou circonstancielle; si elle est circonstancielle, alors une appréciation limitée est permise. Appliquant ces principes à l’affaire en l’espèce, il existe une preuve directe, celle de Mme Davis, qui pourrait, si on lui ajoute foi, porter le Tribunal à conclure qu’il y a eu discrimination de la part de l’ASFC.

 

[55]           L’ASFC a accepté qu’il revient à la Commission de renvoyer au Tribunal la totalité de la plainte, ou aucune partie de celle-ci. Si la plainte s’était limitée au sexe et à l’âge, compte tenu du rapport de l’enquêteur, il est peu probable que l’affaire aurait été renvoyée au Tribunal. Dans un même ordre d’idées, même s’il peut être conclu qu’aucune preuve n’appuie la proposition selon laquelle l’ASFC visait la voie réservée aux résidents d’Akwesasne, il ne s’ensuit pas que la décision de la Commission est automatiquement déraisonnable. La question clé porte sur ce qui a été dit, ou non, par les agents de l’ASFC à Mme Davis lors de l’inspection secondaire. Je m’empresse d’ajouter que si l’ASFC avait été avisée que des articles de contrebande étaient transportés sur l’île de Cornwall dans des véhicules qui appartenaient à des résidents d’Akwesasne, il aurait été parfaitement naturel que les radiographies des véhicules soient principalement faites sur les véhicules qui se trouvaient dans la voie réservée aux résidents d’Akwesasne. Autrement, les agents auraient renoncé aux responsabilités que le législateur leur a imposées.

 

[56]           Quant à l’argument que le procureur général a présenté pour l’ASFC selon lequel la Commission devait, par équité procédurale, répondre aux commentaires détaillés de l’ASFC, cette situation est plus probable dans un cas où l’enquêteur a recommandé le rejet de la plainte (Herbert c. Canada (Procureur général), 2008 CF 969, et Sanderson c. Canada (Procureur général) 2006 CF 447), parce que le rejet clôt l’affaire. Un renvoi au Tribunal n’est absolument pas une décision au sujet de la véracité de l’allégation de discrimination. L’équité procédurale est contextuelle (Baker c. Canada (M.C.I.), [1999] 2 R.C.S. 817). De toute façon, la plupart des commentaires étaient argumentatifs et insistaient pour que l’enquêteur préfère un ensemble de preuves à l’autre. Ce n’est pas le rôle de l’enquêteur, ni de la Commission, de rendre une décision sur la crédibilité, mais plutôt de simplement déterminer s’il existe des preuves qui, si on leur ajoute foi, justifient la plainte. Monsieur le juge Joyal, au sujet de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, a déclaré dans la décision Miranda c. Canada (M.E.I.) (1993), 63 F.T.R. 81 :

[4]        […] Bien qu’il soit possible d’isoler un commentaire dans la décision de la Commission et de conclure que celle‑ci s’est trompée, l’erreur doit néanmoins être pertinente à la décision rendue. Et, à mon avis, aucune erreur de ce genre n’a été commise.

 

[5]        S’il est vrai que des plaideurs habiles peuvent découvrir quantité d’erreurs lorsqu’ils examinent des décisions de tribunaux administratifs, nous devons toujours nous rappeler ce qu’a dit la Cour suprême du Canada lorsqu’elle a été saisie d’un pourvoi en matière criminelle où les motifs invoqués étaient quelque douze erreurs commises par le juge dans ses directives au jury. En rendant son jugement, la Cour a déclaré qu’elle avait trouvé dix‑huit erreurs dans les directives du juge mais que, en l’absence de tout déni de justice, elle ne pouvait accueillir le pourvoi.

 

 

[57]           Le procureur général me demande d’isoler divers aspects de la décision de la Commission, dans lesquels son [traduction] « plaideur habile » a relevé des erreurs. Pourtant, comme Monsieur le juge Joyal l’a précisé, il ne faut pas perdre de vue le mandat de la Commission.

 

[58]           Je conclus que le procureur général n’a pas réussi à prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la décision de la Commission de renvoyer la plainte au Tribunal était entachée de partialité, qui constitue un manquement à l’équité procédurale, parce que l’enquête était inadéquate, ou que la décision était déraisonnable.

 

[59]           Je m’empresse de mentionner que la question en litige porte sur les événements du 18 novembre 2005 à la frontière sur l’île Cornwall et non les antécédents de l’établissement européen en Amérique du Nord.

 

[60]           Mme Davis n’a pas demandé de dépens, et aucuns ne seront adjugés. Les paramètres de l’intervention de la Commission l’empêchent de demander les dépens.

 


ORDONNANCE

 

            POUR LES MOTIFS PRÉCITÉS :

 

LA COUR ORDONNE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission canadienne des droits de la personne de renvoyer la plainte de Fallan Davis au Tribunal canadien des droits de la personne est rejetée;
  2. La requête du procureur général en radiation de certaines parties de l’exposé des arguments de l’intervenante, la Commission canadienne des droits de la personne, est rejetée parce qu’elle est théorique;
  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-157-09

 

INTITULÉ :                                       PG c. Fallan Davis et la Commission canadienne des droits de la personne

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 14 OCTOBRE 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 18 OCTOBRE 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Sean Gaudet

Susan Keenan

 

POUR LE DEMANDEUR

Fallan Davis, pour son propre compte

 

POUR LA DÉFENDERESSE

Brian Smith

POUR L’INTERVENANTE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR

Fallan Davis, pour son propre compte

 

POUR LA DÉFENDERESSE

Commission canadienne des droits de la personne

POUR L’INTERVENANTE

 

 

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