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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20091022

Dossier : T-1423-08

Référence : 2009 CF 1074

Ottawa (Ontario), le 22 octobre 2009

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

ENTRE :

JAMES MCDONALD

demandeur

 

 

 

et

 

 

 

MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES

ET DU DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES DÉNOMMÉ

MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES ET

DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL

 

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               M. McDonald souffre des douleurs chroniques depuis qu’il s’est blessé au travail en 2001. Il a présenté une demande de pension d’invalidité en 2005, en vertu du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8. Le ministre a initialement rejeté sa demande et après réexamen il l’a de nouveau rejetée. M. McDonald a interjeté appel devant le tribunal de révision, qui, après une nouvelle audience, a accueilli son appel et a statué qu’il était admissible aux prestations d’invalidité conformément au Régime.

 

[2]               L’article 83 du Régime prévoit que la personne qui se croit lésée par une décision du tribunal de révision, en l’espèce le ministre, peut présenter une demande écrite au président ou au vice-président de la Commission d’appel des pensions, afin d’obtenir la permission d’interjeter un appel de la décision du tribunal de révision auprès de la Commission. L’article 7 des Règles de procédure de la Commission d’appel des pensions (prestations) prévoit qu’il soit statué ex parte sur une telle demande, à moins que le président ou le vice-président n’en décide autrement.

 

[3]               L’article 83 du Régime prévoit également que la décision peut être rendue par un membre désigné, comme c’est le cas en l’espèce. Il y est également prévu que la personne qui refuse l’autorisation d’interjeter appel en donne par écrit les motifs. Il n’existe aucune exigence correspondante concernant la décision accordant l’autorisation d’interjeter appel.

 

[4]               En l’espèce, le ministre a obtenu l’autorisation d’interjeter appel sans motifs à l’appui. Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, M. McDonald demande l’annulation de la décision accordant l’autorisation d’interjeter appel.

 

LA NORME DE CONTRÔLE APPLICABLE

[5]               Les parties conviennent que le critère a été énoncé par le juge MacKay dans Callihoo c. Canada (Procureur général) (2000), 190 F.T.R. 114, au paragraphe 15 :

15.  Sur le fondement de cette jurisprudence récente, je suis d’avis que le contrôle d’une décision relative à une demande d’autorisation d’interjeter appel à la CAP donne lieu à deux questions :

 

1. la question de savoir si le décideur a appliqué le bon critère, c’est‑à‑dire la question de savoir si la demande a des chances sérieuses d’être accueillie, sans que le fond de la demande soit examiné;

 

2. la question de savoir si le décideur a commis une erreur de droit ou d’appréciation des faits au moment de déterminer s’il s’agit d’une demande ayant des chances sérieuses d’être accueillie. Dans le cas où une nouvelle preuve est présentée lors de la demande, si la demande soulève une question de droit ou un fait pertinent qui n’a pas été pris en considération de façon appropriée par le tribunal de révision dans sa décision, une question sérieuse est soulevée et elle justifie d’accorder l’autorisation.

 

[6]               Le premier volet de l’analyse, la question de savoir si le décideur a appliqué le bon critère, est une question de caractérisation et doit être examiné selon la norme de la décision correcte. Le deuxième volet, au moins relativement à l’appréciation des faits, est examiné selon la norme de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190).

 

[7]               En l’espèce, aucun nouvel élément de preuve n’a été présenté. Vu que le décideur n’a pas donné de motifs à l’appui, et qu’il n’était pas obligé de le faire, il appartient à la Cour de déterminer si la demande d’autorisation soulève une question sérieuse. Cette norme est peu exigeante, sûrement moins que s’il fallait déterminer selon la prépondérance des inconvénients les chances de succès de l’appel.

 

LA DÉCISION DU TRIBUNAL DE RÉVISION

[8]               Le tribunal de révision a bien énoncé le droit applicable. Les prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada sont payées à la personne ayant versé le montant minimum de cotisations sur une période déterminée, et qui est déclarée atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Le sous-alinéa 42(2)a)(ii) du Régime prévoit qu’une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée devoir durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès. Suivant le sous‑alinéa 42(2)a)(i), une invalidité est grave si elle rend la personne incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

 

[9]               Le tribunal a également affirmé à juste titre que, dans le cas de M. McDonald, la période minimale d’admissibilité a pris fin en décembre 2003, de sorte que la question est de savoir s’il était atteint d’une invalidité au sens du Régime à cette époque. Il a indiqué dans sa demande qu’il n’était atteint d’invalidité que depuis mars 2005. C’est à ce moment que la dernière lettre de son médecin de famille a été envoyée. Toutefois, en se fondant sur les lettres précédentes envoyées par le médecin, le tribunal de révision a déterminé que son invalidité remontait à janvier 2002.

 

[10]            Il y avait également le témoignage du psychiatre de M. McDonald selon lequel ce dernier souffre de dépression et de trouble panique. Tout a commencé environ trois ans après sa blessure, soit en 2004.

 

[11]           Le tribunal de révision a également souligné qu’il avait suivi des cours de recyclage professionnel et que, même s’il semble avoir réussi, c’est grâce à l’aide considérable qu’il a reçue. Il a envoyé plusieurs demandes d’emploi, mais il n’a pas réussi à trouver du travail.  

LA DEMANDE D’AUTORISATION D’APPEL DU MINISTRE

[12]           La Loi exige que le ministre énonce en détail les motifs d’appel invoqués. Cela a été fait.

 

[13]           Selon le ministre, l’analyse des témoignages des médecins a été quelque peu partiale en ce sens que d’autres notes indiquaient que les douleurs dont M. McDonald souffrait étaient mieux contrôlées, mais [traduction] « pas encore à cent pour cent » et que celui-ci se sentait « relativement bien ».

 

[14]           De plus, si M. McDonald a été en mesure d’assister à des cours de 2003 à 2005 (le moment où il a présenté sa demande de prestations d’invalidité coïncidait avec la fin de ses études), selon la jurisprudence, il devait également être en mesure de détenir une occupation rémunératrice.

 

[15]           Enfin, la date de l’invalidité de M. McDonald a une importance cruciale. Même si l’on pouvait affirmer que la dépression dont il souffre constituait une évolution naturelle de ses douleurs chroniques et qu’en conséquence il ne pouvait pas travailler, la dépression en question pouvait ne remonter qu’à 2004. Il ne s’ensuit pas nécessairement que M. McDonald était atteint d’invalidité en décembre 2003, la date de son admissibilité.

 

LA DÉCISION

[16]           Bien que la demande de M. McDonald donne l’impression d’une demande en vue d’annuler une décision interlocutoire, et que la Cour hésite la plupart du temps à traiter de décisions interlocutoires, ce type de demandes présentes en vertu du Régime ont été régulièrement examinées.

 

[17]           Si le ministre visait à obtenir le contrôle judiciaire de la décision du tribunal de révision, il ne devrait pas avoir la tâche facile, étant donné que cela impliquerait une nouvelle appréciation de la preuve. Le tribunal de révision est un tribunal spécialisé et la Cour devrait faire preuve d’une grande retenue à son égard. Les conclusions de fait ne sont pas modifiées à moins qu’elles ne soient déraisonnables.

 

[18]           La question en litige en l’espèce est toutefois très différente. Un appel auprès de la Commission d’appel des pensions entraîne déjà une nouvelle audition de la demande. La Commission d’appel des pensions a le droit de formuler ses propres conclusions de fait en se fondant sur la preuve dont elle est saisie, sans s’en remettre aux conclusions du tribunal de révision.

 

[19]           Compte tenu de ces faits, je suis arrivé à la conclusion que le ministre a soulevé des questions raisonnablement défendables dans sa demande d’autorisation d’appel, et je dois donc rejeter la demande de contrôle judiciaire de M. McDonald. La Commission d’appel pourrait arriver ou non à la conclusion que M. McDonald a droit à une pension. Il s’agit d’une question qui relève de son expertise. Quelle que soit sa décision sur le fond, celle-ci pourra faire l’objet d’une demande de contrôle judiciaire devant la Cour d’appel fédérale, conformément à l’alinéa 28(1)d) de la Loi sur les Cours fédérales.

 

[20]           Le ministre n’a pas demandé de dépens et aucuns ne seront adjugés.


ORDONNANCE

 

POUR LES MOTIFS ÉNONCÉS;

LA COUR ORDONNE que :

1.      La demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

2.      Le tout sans frais.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1423-08

 

INTITULÉ :                                       James McDonald c. Ministre des ressources humaines et du développement des compétences dénommé Ministre des ressources humaines et du développement social

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 WINDSOR (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE:                LE 19 OCTOBRE 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS

ET DE L’ORDONNANCE :             LE 22 OCTOBRE 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Patrick Castagna

 

POUR LE DEMANDEUR

Allan Matte

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Patrick Castagna

Avocat

Windsor (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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