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Cour fédérale

Federal Court


 

 

Date : 20091016

Dossier : IMM-1804-09

Référence : 2009 CF 1055

Toronto (Ontario), le 16 octobre 2009

En présence de madame la juge Mactavish

 

 

ENTRE :

SUGANJA SOTHIRATNAM

demanderesse

 

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Suganja Sothiratnam est une citoyenne du Sri Lanka âgée de 28 ans dont la demande d’asile a été jugée irrecevable par la Section de la protection des réfugiés au motif que la qualité de réfugiée au sens de la Convention lui avait déjà été reconnue aux États-Unis.

 

[2]               Mme Sothiratnam affirme qu’elle a été privée de son droit à l’équité procédurale du fait de cette décision. Elle soutient que l’agente d’immigration qui a examiné la question de la recevabilité de sa demande d’asile au Canada a refusé d’accepter ou d’examiner une lettre que les autorités américaines avaient adressée à Mme Sothiratnam au sujet de son statut aux États‑Unis. Elle ajoute que, pour le cas où il serait jugé qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale, la question de la recevabilité de sa demande d’asile au Canada n’est pas à ce point à l’abri de tout doute pour qu’on puisse considérer qu’il serait futile de renvoyer l’affaire à la Commission pour qu’elle rende une nouvelle décision.

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas convaincue que Mme Sothiratnam a été privée de son droit à l’équité procédurale en l’espèce. Sa demande sera donc rejetée.

 

 

Analyse

 

[4]               Mme Sothiratnam et l’agente d’immigration ont toutes les deux soumis des affidavits dans lesquels elles relatent ce qui s’est produit lors des rencontres qui se sont soldées par la déclaration d’inadmissibilité. Ni l’une ni l’autre des parties n’a décidé de contre-interroger l’auteur de l’affidavit déposé par la partie adverse.

 

[5]               Dans son bref affidavit, Mme Sothiratnam mentionne une unique entrevue qu’elle a eue avec les autorités canadiennes de l’immigration au sujet de son admissibilité. Elle ne précise pas la date de cette entrevue. Les éléments de preuve qu’elle a présentés au sujet de la question de la lettre que les autorités américaines lui ont envoyée se résument à son affirmation suivant laquelle elle avait en mains la lettre en question lors de son entrevue et a [traduction] « tenté de la remettre à l’agente, qui a refusé de la prendre ».

 

[6]               En revanche, l’affidavit de l’agente d’immigration est long et détaillé. Il y est relaté les échanges que Mme Sothiratnam aurait eus à trois occasions différentes avec les autorités canadiennes de l’immigration.

 

[7]               Le premier contact a eu lieu le 11 mars 2009, lorsque Mme Sothiratnam a remis un certain nombre de documents provenant du Sri Lanka à la réception du bureau de l’agente d’immigration.  Ces documents ont été copiés, puis versés à son dossier.

 

[8]               Le 18 mars 2009, l’agente d’immigration a rencontré Mme Sothiratnam.  Une vérification de routine dans le SSOBL avait révélé que les autorités américaines avaient délivré un titre de voyage à Mme Sothiratnam et que les parents de celle-ci avaient demandé l’asile aux États-Unis.  En réponse à une demande de renseignement de l’agente d’immigration, Mme Sothiratnam a déclaré qu’elle ignorait quel statut elle avait aux États-Unis. Elle a également affirmé qu’elle n’avait pas demandé l’asile dans d’autres pays.

 

[9]               L’agente déclare dans son affidavit qu’elle n’avait pas été en mesure ce jour-là de prendre une décision au sujet de l’admissibilité de Mme Sothiratnam, à qui elle avait demandé de revenir une semaine plus tard avec ses titres de voyage.

 

[10]           L’agente poursuit en expliquant que les renseignements fournis par les autorités américaines confirmaient que Mme Sothiratnam était entrée aux États-Unis en 1999 et qu’elle avait par la suite obtenu l’asile dans ce pays.

 

[11]           Suivant l’affidavit de l’agente, lorsqu’elle est revenue la rencontrer le 25 mars 2009, Mme Sothiratnam lui a remis un titre de voyage pour réfugiés en cours de validité délivré par les autorités américaines, dans lequel elle était désignée comme [traduction] « personne ayant obtenu le droit d’asile ». L’agente a alors expliqué à Mme Sothiratnam que sa demande d’asile au Canada était irrecevable et ne pouvait être soumise à la Section de la protection des réfugiés, étant donné qu’elle avait déjà obtenu le droit d’asile aux États-Unis et qu’elle pouvait retourner dans ce pays.

 

[12]           Dans son affidavit, l’agente affirme catégoriquement que Mme Sothiratnam n’a à aucun moment tenté de lui remettre une copie de la lettre en question.

 

[13]           J’ai plusieurs raisons de préférer la preuve présentée par l’agente d’immigration à celle de Mme Sothiratnam.

 

[14]           Premièrement, les faits que relate l’agente sont clairs, précis et détaillés, et sont appuyés par des notes qui ont été prises au moment où ils ont eu lieu. En revanche, l’affidavit de Mme Sothiratnam est vague et ne renferme aucun détail permettant de savoir quand elle aurait tenté de remettre la lettre en question à l’agente.

[15]           Deuxièmement, la raison pour laquelle l’agente aurait refusé d’examiner la lettre en question, en supposant que Mme Sothiratnam la lui ait effectivement présentée, demeure obscure. L’agente d’immigration n’avait aucun intérêt personnel en ce qui concerne l’issue de l’affaire, alors que Mme Sothiratnam avait manifestement fortement intérêt à ce que sa demande d’asile soit examinée.

 

[16]           Troisièmement, le dossier révèle, de la part de Mme Sothiratnam, une certaine confusion sur certains points ainsi qu’un manque de franchise en ce qui concerne les échanges qu’elle a eus avec les autorités canadiennes de l’immigration. Ainsi, Mme Sothiratnam a dit à l’agente d’immigration qu’elle ignorait son statut aux États-Unis. En lui accordant le bénéfice du doute, j’accepte qu’elle ait pu l’ignorer et qu’elle ait pu ne pas avoir cherché à tromper les autorités. Cependant, même si elle ne cherchait pas à les induire en erreur sur ce point, force est de constater que le dossier laisse penser qu’elle était pour le moins confuse.

 

[17]           Mais, ce qui est plus important, c’est qu’il est tout à fait clair que Mme Sothiratnam a, du moins à certains égards, tenté d’induire en erreur les autorités canadiennes. Par exemple, elle a déclaré dans sa formule de demande d’asile au Canada qu’elle avait vécu au Sri Lanka jusqu’en 2006, année où elle avait quitté ce pays pour venir au Canada. Or, Mme Sothiratnam vivait aux États‑Unis depuis 1999.

 

[18]           La formule de demande d’asile au Canada que Mme Sothiratnam a remplie est détaillée; elle précise à la fois les dates et les lieux où elle a habité au Sri Lanka au cours des années qui ont précédé 2006, et elle est également très précise au sujet de l’itinéraire qu’elle a suivi pour se rendre au Canada, en provenance, selon l’information donnée, du Sri Lanka. Il est impossible qu’il y ait eu confusion sur ces éléments, et les fausses déclarations qu’elle a faites à ces égards permettent de mettre sérieusement en doute sa crédibilité.

 

[19]           Il incombe à Mme Sothiratnam de démontrer qu’il y a eu un manquement à l’équité procédurale en l’espèce. Vu ce qui précède, force m’est de conclure qu’elle ne m’a pas convaincue qu’elle avait tenté de remettre la lettre en question à l’agente d’immigration. En conséquence, je ne suis pas convaincue qu’elle n’a pas été traitée équitablement en l’espèce.

 

[20]           Compte tenu de la conclusion de fait que j’ai tirée à cet égard, il n’est pas nécessaire d’examiner quel effet, s’il en est, la lettre en question aurait pu avoir en ce qui concerne la possibilité pour Mme Sothiratnam de faire examiner sa demande d’asile au Canada.

 

 

Dispositif

 

[21]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

Certification

 

[22]           Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification et l’affaire n’en soulève aucune.

 

 

JUGEMENT

 

            LA COUR STATUE :

 

            1.         La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

            2.         Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

« Anne Mactavish »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                               IMM-1804-09

 

 

INTITULÉ :                                                               SUGANJA SOTHIRATNAM c. MCI

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                       Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                      Le 15 octobre 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                    La juge Mactavish

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                                              Le 16 octobre 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Micheal Crane

 

POUR LA DEMANDERESSE

Me Laoura Christodoulides

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Micheal Crane

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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