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Cour fédérale

Federal Court


Date : 20090921

Dossier : IMM-3006-08

Référence : 2009 CF 923

Ottawa (Ontario), le 21 septembre 2009

En présence de monsieur le juge Beaudry

 

 

Entre :

VIDYABAI CHURAKKUZY RAGHAVAN

demanderesse

et

 

Le ministre de la citoyenneté

et de l’IMMIGRATION

défendeur

 

 

Motifs du jugement et jugement

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), d’une décision d’un agent des visas (l’agent), datée du 30 mai 2008, par laquelle il a conclu que la demanderesse n’est pas admissible à titre de travailleuse qualifiée parce qu’elle n’a pas les fonds nécessaires pour s’établir.

 

La question en litige

[2]               La question suivante est pertinente quant à la décision relative à la présente demande de contrôle judiciaire :

a)         Y a-t-il eu manquement à l’équité procédurale en l’espèce?

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

 

Le contexte factuel

[4]               La demanderesse est une citoyenne de l’Inde qui vit actuellement aux États-Unis. En août 2007, elle a présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral).  

 

[5]               Dans les documents accompagnant la demande, était incluse la copie d’un chèque au montant de 14 000 $ que la demanderesse avait fait à son ordre et qui était tiré sur son compte bancaire américain à titre de preuve de fonds pour s’établir. Quatre fiches de paie étaient également incluses dans les documents concernant l’expérience professionnelle.

 

[6]               Le 22 février 2008, une [traduction] « lettre d’arrêt » a été envoyée à la demanderesse. Cette lettre lui demandait une preuve supplémentaire des fonds pour s’établir, qu’elle devait fournir dans les 60 jours de la date de la lettre. La lettre était adressée au soin du consultant en immigration de la demanderesse à Mumbai, en Inde.

 

[7]               La demanderesse et son consultant en immigration nient tous deux avoir reçu la lettre.

 

[8]               Le 30 mai 2008, la demande de résidence permanente de la demanderesse a été rejetée. Une lettre a été envoyée le même jour indiquant que la demanderesse avait omis de répondre à la lettre d’arrêt et que les renseignements au dossier étaient insuffisants pour démontrer qu’elle possédait les fonds prescrits pour s’établir.

 

[9]               Cette lettre a été retournée à l’expéditeur pour affranchissement insuffisant et a été à nouveau envoyée le 12 juin 2008.

 

La décision contestée

[10]           La demande de résidence permanente a tout d’abord été examinée en février 2008. L’agent a indiqué l’absence d’éléments de preuve concernant les fonds pour s’établir et a exprimé l’inquiétude selon laquelle la demanderesse ne possédait pas de fonds suffisants pour s’établir. Cela figure dans une note inscrite par l’agent dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (le STIDI). 

 

[11]           Les notes du STIDI de l’agent inscrites le 22 mai 2008 indiquent qu’il n’a reçu aucune preuve concernant les fonds pour s’établir et qu’il n’est pas convaincu que la demanderesse a les fonds prescrits pour s’établir. L’agent recommande le rejet de la demande. 

 

[12]           À l’occasion d’un dernier examen, le 30 mai 2008, l’agent souligne que le seul élément de preuve au dossier est le chèque que la demanderesse a fait à son ordre et il n’y a aucune preuve que le chèque est visé ni que les fonds sont réellement disponibles. Il souligne également que la lettre d’arrêt a été envoyée et que rien n’a été reçu. Il conclut qu’il n’est pas convaincu que la demanderesse a les fonds pour s’établir nécessaires pour être admissible à titre de travailleuse qualifiée et il a rejeté la demande.

 

Les dispositions d’initiatives pertinentes

[13]           La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

 

12. (2) La sélection des étrangers de la catégorie « immigration économique » se fait en fonction de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada.

 

 

12. (2) A foreign national may be selected as a member of the economic class on the basis of their ability to become economically established in Canada.

 

 

[14]           Le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227.

76. (1) Les critères ci-après indiquent que le travailleur qualifié peut réussir son établissement économique au Canada à titre de membre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) :

 

 

[…]

 

b) le travailleur qualifié :

 

(i) soit dispose de fonds transférables — non grevés de dettes ou d’autres obligations financières — d’un montant égal à la moitié du revenu vital minimum qui lui permettrait de subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille,

 

76. (1) For the purpose of determining whether a skilled worker, as a member of the federal skilled worker class, will be able to become economically established in Canada, they must be assessed on the basis of the following criteria:

 

(b) the skilled worker must

 

(i) have in the form of transferable and available funds, unencumbered by debts or other obligations, an amount equal to half the minimum necessary income applicable in respect of the group of persons consisting of the skilled worker and their family members, or

 

 

L’analyse

[15]           À l’appui du présent contrôle judiciaire, la demanderesse a déposé plusieurs documents à titre de preuve selon laquelle elle dispose de suffisamment de fonds pour s’établir, notamment une copie d’une traite payable à vue d’un montant de 13 000 $US qu’elle a envoyée après avoir reçu la lettre de refus, ainsi qu’un affidavit souscrit par le consultant en immigration. En effet, la demanderesse a reçu la lettre de refus le 23 juin 2008 (dossier de la demanderesse, à la page 34).

 

[16]           Le lendemain, elle a transmis un courriel à l’agent l’informant que ni elle ni son consultant n’avaient jamais reçu la lettre « d’arrêt » datée du 22 février 2008. Elle a également ajouté que, contrairement à ce que mentionnait la lettre de refus, elle n’a jamais eu d’entrevue avec l’agent.

 

[17]           À l’audience, la demanderesse a déposé un courriel, daté du 24 juin 2008, qu’elle a reçu de l’agent (sans objection de la part du défendeur) et dans lequel il avoue que la mention de la tenue d’une entrevue dans la lettre de refus était erronée.

 

[18]           Également à l’audience, le défendeur a avoué que ni la demanderesse ni son consultant en immigration n’avaient jamais reçu la lettre « d’arrêt » de février 2008.

 

[19]           Le défendeur mentionne la décision Yang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 124, [2008] A.C.F. no 158 (QL), aux paragraphes 6 à 9 et 14 à l’appui de la proposition selon laquelle il s’est acquitté de son fardeau parce que la lettre « d’arrêt » a été envoyée. Je comprends tout à fait et je suis d’accord avec la juge Snider qui déclare ce qui suit au paragraphe 14 de la décision Yang :

[...] S’assurer que chaque avis a été reçu imposerait un fardeau insurmontable à CIC et aurait, sans aucun doute, une incidence négative sur l’aptitude de CIC de traiter rapidement les demandes.

 

[20]           En l’espèce, j’ai un aveu du défendeur selon lequel la demanderesse ou son consultant n’ont jamais reçu la lettre « d’arrêt ».

 

[21]           La lettre de refus est principalement fondée sur le fait que la demanderesse n’avait pas répondu à lettre « d’arrêt » du 22 février 2008. Comment pouvait-elle répondre à une lettre qu’elle n’a jamais reçue?

 

[22]           La Cour est d’avis que l’affaire devrait être renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision.

 

[23]           Les parties ne présentent aucune question à certifier et aucune n’est soulevée.

 

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie. L’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. Aucune question n’est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

Dossier :                                        IMM-3006-08

 

Intitulé :                                       VIDYABAI CHURAKKUZY RAGHAVAN

c. le ministre de la citoyenneté

et de l’IMMIGRATION

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (C.‑B.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 9 septembre 2009

 

Motifs du jugement

et jugement :                              le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 21 septembre 2009

 

 

 

Comparutions :

 

Vidyabai Churakkuzhy Raghavan                                              POUR LA demanderesse

(se représentant elle-même)

                                                                                               

 

Edward Burnet                                                                         pour le défendeur

                                                                                               

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Sans objet                                                                                pour la demanderesse

                                                                                               

John H. Sims, c.r.                                                                     pour le défendeur       

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.‑B.)

 

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