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Cour fédérale

 

 

 

Federal Court

 


Date : 20090612

Dossier : IMM-1639-07

Référence : 2009 CF 629

Ottawa (Ontario), le 12 juin 2009

En présence de Monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

MOHAMMED BEN AR ZRIG

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (la Loi), à la suite d’une décision de l’agente d’immigration Nicole Léveillé (l’agente Léveillé), rendue le 29 mars 2007. L’agente a refusé d’octroyer le statut de résident permanent au demandeur à la suite de sa demande de résidence permanente (DRP) pour considérations humanitaires.

 

[2]               Le 24 juillet 2008, le défendeur a présenté une requête en rétractation d’un aveu visant à obtenir l’autorisation de la Cour pour rétracter un aveu contenu dans son mémoire du 21 juin 2007  au paragraphe 20b) de même que l’intertitre entre les paragraphes 29 et 30 selon lequel « le demandeur ne fut pas informé par CIC [Citoyenneté et Immigration Canada] de la décision positive de Mme Dostie, avant que Mme Léveillé rende sa décision ». Le défendeur désire aussi rétracter l’aveu dans son mémoire supplémentaire du 17 décembre 2007 au paragraphe 15b) et à l’intertitre entre les paragraphes 25 et 26 selon lequel « le demandeur ne fut pas formellement informé par CIC de la décision positive de Mme Dostie, avant que Mme Léveillé ne prenne sa décision ». Il veut aussi rétracter son aveu oral dans le même sens lors de l'audience devant la Cour le 29 avril  2008.

 

CONTEXTE FACTUEL

[3]               Le demandeur est un citoyen de la Tunisie, il était membre du MTI/Ennahda, un mouvement visant des fins limitées et brutales. Il a été condamné in absentia à une peine de 21 ans de prison en Tunisie pour son implication. Arrivé au Canada le 2 octobre 1992, il revendique le statut de réfugié. Son épouse ainsi que ses trois enfants viennent six mois plus tard et revendiquent avec succès.

 

[4]               Sa réclamation devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la CISR) est rejetée le 30 juin 1994 au motif qu’il est exclu de la définition de réfugié en vertu de la Section F de l’article 1 de la Convention relative au statut des réfugiés (la Convention). Le 6 juillet 1995, le juge Pinard de notre Cour accueille la demande de contrôle judiciaire et renvoie l’affaire à la CISR pour une nouvelle audition.

 

[5]               Le 27 janvier 2000, la CISR rejette à nouveau la demande et conclut que la crainte de persécution est bien fondée, mais le demandeur est exclu en vertu des alinéas 1Fb) et 1Fc) car il a commis, à titre de complice, des crimes graves de droit commun : utilisation de cocktails Molotov; acide projeté aux visages d’individus; agressions physiques; incendies de voitures; lettres de menaces; complot en vue d’assassiner des personnalités du gouvernement tunisien; tentatives d’incendies; attentat à la bombe de Sousse et Monastir le 2 août 1987; incendies criminelles de Bab Souika en février 1991 causant la mort; attentat à la bombe en France en 1986; trafic d’armes en 1987 et complot en vue de renverser le régime de l’ancien président Habib Bourguiba.

 

[6]               Le demandeur dépose une demande de contrôle judiciaire à l'encontre de cette décision négative et celle-ci est rejetée le 24 septembre 2001. La Cour certifie certaines questions et le demandeur porte la décision en appel.

 

[7]               Le 7 avril 2003, la Cour d’appel fédérale rejette l’appel du demandeur (Zrig c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CAF 178, [2003] 3 C.F. 761).

 

[8]                Le 29 novembre 2001, le demandeur soumet une demande de dispense de visa pour motifs humanitaires en vertu du paragraphe 114(2) de l’ancienne Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. 1-2 dans laquelle des risques de retour sont invoqués.

 

[9]               Le 23 juin 2004, le demandeur reçoit une lettre l’informant que sa demande de résidence permanente à titre de personne à charge de son épouse est refusée car il existe des motifs raisonnables de croire qu’il est une personne visée à l’alinéa 34(1)f) de la Loi, à savoir qu’il est interdit de territoire pour des raisons de sécurité, parce qu’il est membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’il se livre, s’est livré ou se livrera au terrorisme, soit un acte visé à l’alinéa 34(1)c) de la Loi.

 

[10]           Le 29 juillet 2005, la demande de dispense d’obtention de visa de résidence permanente est approuvée à la première étape (motifs humanitaires) par l’agente d’immigration Hélène Dostie (l’agente Dostie).

 

[11]           Le demandeur contacte Jamel Jani, l’adjoint à la députée fédérale Meili Faille, porte-parole du Bloc Québécois en matière d’immigration et de citoyenneté, pour obtenir plus d’information concernant son dossier. Suite à une demande d’accès à l’information soumise en septembre 2006, des documents sont transmis au demandeur le 20 décembre 2006, dont les notes au dossier de l’agente Dostie qui explique que la demande du demandeur est acceptée à la première étape du processus.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[12]           La décision contestée qui fait l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire est celle rendue le 29 mars 2007 par l’agente Léveillé. Il s’agit de la deuxième étape du processus décisionnel de l’article 25 de la Loi, qui cherche à déterminer si le demandeur respecte toutes les stipulations de la Loi.

 

[13]           L’agente indique que le processus décisionnel d’une demande de résidence permanente présentée au Canada en raison de considérations humanitaires (demande CH) comporte deux étapes. Elle mentionne que les facteurs d’ordre humanitaire sont examinés dans un premier temps afin de déterminer s’il y a lieu de dispenser le demandeur de l’obligation d’obtenir un visa de résidence permanente avant de venir au Canada. Selon la lettre de l’agente Léveillé, le demandeur aurait été informé que sa demande de dispense avait été approuvée le 29 juillet 2005.

 

[14]           Toutefois, l’agente Léveillé souligne l'importance de la deuxième étape du processus, c'est-à-dire l'obligation pour le demandeur de respecter toutes les autres exigences statutaires de la Loi. Elle détermine alors que le demandeur ne satisfait pas à ces exigences car il est interdit de territoire pour grande criminalité selon l’alinéa 36(1)c) et pour raisons de sécurité selon l’alinéa 34(1)f). L’agente indique que sa décision est basée sur les conclusions et constatations de la Cour d’appel fédérale qui confirme les conclusions de la CISR selon lesquelles le demandeur a commis une série de crimes en Tunisie alors qu’il était membre du MTI/Ennahda.

 

[15]            Elle refuse donc la demande de résidence permanente.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[16]           La présente demande de contrôle judiciaire présente les questions suivantes :

 

a)         Est-ce que l’agente Léveillé avait compétence pour rendre la décision contestée en l’espèce?

 

b)         Est-ce que l’agente Nicole Léveillé était en droit d’invoquer le paragraphe 36(1)c) de la Loi sans que la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR) ait préalablement conclu à l’application de cette disposition dans le cas du demandeur?

 

c)         Est-ce qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale parce que le demandeur n’a pas eu l’occasion de faire des représentations concernant l’application de l’alinéa 36(1)c) de la Loi et ceci en vertu de l’alinéa 36(3)c)?

 

LÉGISLATION PERTINENTE

[17]           Les dispositions applicables en l’espèce se retrouvent à l’Annexe A à la fin du présent document.

 

ANALYSE

[18]           Lors de l'audition du présent dossier le 7 avril 2009, le demandeur a consenti à la requête en rétractation après avoir pris connaissance de l’aveu du procureur du défendeur séance tenante à l'effet que Mme Dostie n'a jamais envoyé la décision du 29 juillet 2005 au demandeur. En conséquence la Cour accorde la requête du défendeur.

 

a)         Est-ce que l’agente Nicole Léveillé avait compétence pour rendre la décision contestée en l’espèce?

[19]           Les décisions discrétionnaires doivent respecter les limites de la compétence conférée par la Loi et les tribunaux doivent exercer une grande retenue à l’égard des décideurs lorsqu’ils contrôlent ce pouvoir discrétionnaire et déterminent l’étendue de la compétence du décideur (Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] 2 C.F. 646 (C.A.). En présence d’une question d’interprétation de la loi, la norme de la décision correcte s’impose.

 

[20]           Le demandeur invoque le Bulletin opérationnel 021 (voir dossier et mémoire additionnels en conséquence de l’ordonnance du 26 août 2008, page 214) qui indique :

Si le demandeur est interdit de territoire pour un motif visé au L34, L35, L37, L36(1) ou L38, et, dans l’évaluation initiale de l’agent, les CH peuvent justifier une dispense, le cas doit être transmis au directeur de l’Examen des cas à l’AC. L’agent ne doit pas fournir d’évaluation ou d’opinion officielle, mais doit plutôt indiquer dans le SSOBL que le cas est transmis au décideur délégué à l’AC.

 

 

[21]           Le défendeur cite l’extrait plus loin dans le même Bulletin et argumente que les agents ont le pouvoir de rendre une décision défavorable :

Les agents ont le pouvoir délégué de rejeter toute demande, sans égard à l’interdiction de territoire, s’ils sont d’avis que les CH sont insuffisantes. Par conséquent, lorsque l’agent a des motifs de croire qu’il existe une interdiction de territoire sérieuse, notamment pour raison de sécurité (L34), pour atteinte aux droits humains ou internationaux (L35) ou criminalité organisée (L37), il doit refuser la demande s’il est d’avis que les CH sont insuffisantes.

 

 

[22]           Le défendeur note que, selon l’agente Léveillé, le cas du demandeur était visé par ce dernier paragraphe, donc elle avait compétence pour rendre la décision attaquée. Toutefois, le demandeur remarque que la décision ne fait pas mention du fait qu’elle est d’avis que les CH sont insuffisantes, ce qui va à l’encontre de la décision de l’agente Dostie qui déterminait qu’il y avait des motifs humanitaires. D’ailleurs, cette décision de l’agente Dostie n’a pas été contestée devant cette Cour.

 

[23]           Le demandeur prétend que l’agente Léveillé n’avait pas le pouvoir de refuser la demande du demandeur et il cite le Bulletin opérationnel 021 qui prévoit que : « Si l’agent est d’avis que des motifs d’ordre humanitaires justifient une dispense, mais il ne détient pas le pouvoir délégué de l’accorder, le cas sera transmis au directeur de l’Examen des cas à l’administration centrale (AC) pour examen ». La décision attaquée relevait de la compétence du directeur de l’Examen des cas à l’AC et les motifs de l’agente Léveillé ne mentionnent nullement qu’elle était d’avis que les CH étaient insuffisantes.

 

[24]           Le Bulletin opérationnel 021 est un ensemble de lignes directrices, soit une directive procédurale qui découle du pouvoir de délégation. Puisque le défendeur admet que la décision s’est effectuée dans le cadre du Bulletin opérationnel 021, la Cour devrait réviser la décision en tenant compte des pouvoirs délégués en vertu de cet instrument et des décisions précédentes.

 

[25]           Selon le demandeur, la Cour doit considérer l’article 6 de la Loi, qui donne la portée du pouvoir de délégation dévolu au Ministre. Le demandeur soutient qu’il a argumenté le paragraphe 34(2) de la Loi en expliquant que sa présence ne serait préjudiciable à l’intérêt national et que l’argument avait été consigné dans la décision de l’agente Dostie (voir page 12, volume 1, dossier du tribunal), qui a noté que le demandeur a invoqué comme motifs, entre autres, que : « Ni lui ni sa famille n’ont abusé de la protection du Canada et de la liberté qu’ils ont trouvées et ils ont toujours  manifesté un profond respect des institutions canadiennes ». L’agente Léveillé n’avait donc pas la compétence de rendre une décision à ce sujet car ces allégations devaient être évaluées par le ministre lui-même, tel que stipulé au paragraphe 34(2) de la Loi.

 

[26]           Ainsi, lorsque le Ministre délègue son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 25 de la Loi, il ne peut le segmenter comme bon lui semble et il ne peut limiter le pouvoir de son délégué, notamment en lui dictant un devoir : « Il doit refuser la demande s’il est d’avis que les CH sont insuffisantes ». La directive du défendeur ne fait que nier au demandeur le bénéfice de la Loi, notamment du paragraphe 34(2) de la Loi.

 

[27]           Le demandeur prétend que l’affaire Moiseev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 88, (2007) 323 F.T.R. 164, citée par le défendeur, ne s’applique pas à la situation présente, où une demande humanitaire est faite ou présumée faite en vertu de l’article 25 de la Loi, puisque cette demande est adressée directement au ministre. Évidemment, le ministre peut déléguer certains pouvoirs en vertu de l’article 25, mais il ne peut pas encadrer le pouvoir discrétionnaire ou le sectionner jusqu’à ce que le pouvoir discrétionnaire devienne un pouvoir lié.

 

[28]           En reprenant à son compte le dossier et en ne le transmettant pas au directeur de l’Examen des cas, l’agente Léveillé procédait à une réévaluation de l’existence de motifs humanitaires, puisque selon le Bulletin opérationnel, l’agent « doit refuser la demande s’il est d’avis que les CH sont insuffisantes ». La décision de l’agente Léveillé ne pouvait donc être prise que si la décision de l’agente Dostie relativement à l’existence de motifs humanitaires pour octroyer une dispense était revisitée.

 

[29]           À la lecture de l’article 25 de la Loi, le défendeur soumet qu’il est évident que le ministre peut octroyer la résidence permanente à une personne interdite de territoire, mais il peut aussi, dans sa discrétion, refuser de le faire, et c’est ce qu’il a fait en l’espèce. Dans sa demande en vertu du paragraphe 25(1), le demandeur n’a jamais spécifiquement demandé au ministre de lui accorder le statut de résident permanent, malgré les interdictions de territoire en cause et de fait, il n’a jamais admis être visé par les alinéas 34(1)f) et 36(1)c) de la Loi.

 

[30]           En l’espèce, l’agente Léveillé a conclu que « malgré le poids des motifs humanitaires », elle devait conclure à la non-admissibilité du demandeur au Canada, en raison de l’application des alinéas 36(1)c) et 34(1)f) de la Loi. Selon l’agente Léveillé, les considérations humanitaires invoquées par le demandeur n’étaient pas suffisantes pour justifier néanmoins l’octroi du statut de résident permanent, donc son cas n’avait pas à être transmis au directeur de l’Examen des cas à l’AC.

 

[31]           Le défendeur rappelle que les bulletins opérationnels ou lignes directrices de CIC ne sont pas des règlements. Ils n’ont pas force de loi et ils ne créent aucune attente légitime et aucun droit substantif (Legault c. Canada, 2002 CAF 125, [2002] 4 C.F. 358 à la p. 372; Association canadienne des importateurs réglementés c. Canada (Procureur général), [1994] 2 C.F. 247 (C.A.) aux pp. 256-257; Sahota c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 123, 164 A.C.W.S. (3d) 682 au para. 20). Même si l’agente Léveillé n’avait pas suivi la directive en cause, cette Cour ne pourrait invalider sa décision pour ce motif. La décision doit toutefois être conforme à la Loi et au Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), ce qui est le cas en l’espèce.

 

[32]           Le défendeur soutient que le demandeur confond les motifs humanitaires qui ont suffi à l’exempter de devoir retourner à l’étranger pour demander un visa d’immigrant au Canada et les motifs humanitaires qui étaient insuffisants pour lui octroyer un statut de résident permanent au Canada, étant donné les interdictions de territoire qui le concernent. L’agente Léveillé devait considérer les motifs humanitaires invoqués par le demandeur dans un contexte différent. La décision de l’agente Dostie ne constitue chose jugée que relativement à l’existence de motifs humanitaires, justifiant la dispense accordée au demandeur l’exemptant de l’obligation d’obtenir un visa d’immigrant à l’étranger, exemption qui a permis le traitement de sa demande de résidence permanente au Canada. La décision de l’agente Dostie concernant les motifs humanitaires allégués par le demandeur ne constituait donc pas chose jugée pour l’agente Léveillé quant à la décision contestée. Des motifs humanitaires qui peuvent suffire pour exempter un étranger de devoir aller à l’extérieur du Canada pour déposer sa demande de résidence permanente ne suffiront pas nécessairement pour qu’il obtienne le statut de résident permanent au Canada, malgré des interdictions de territoire le concernant (Mpula c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 456, 160 A.C.W.S. (3d) 334 aux paras. 31 et 36).

 

[33]           Le défendeur estime que le demandeur a raison de prétendre que l’agente Léveillé n’avait pas compétence pour lever l’interdiction de territoire du demandeur en vertu de l’alinéa 34(1)f) de la Loi, mais le demandeur n’a jamais demandé au ministre de la Sécurité publique et de la protection civile (voir l’alinéa 4(2)d) de la Loi) de lever cette interdiction en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi (car en vertu du paragraphe 6(3), la décision en vertu du paragraphe 34(2) doit être prise par le ministre lui-même).

 

[34]           De plus, le demandeur n’a pas demandé au ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, en vertu de sa demande selon le paragraphe 25(1) de la Loi, de lui octroyer le statut de résident permanent au Canada, après lui avoir fait bénéficié d’une levée de l’interdiction de territoire, prévue à l’alinéa 36(1)c) de la Loi, en vertu de l’alinéa 36(3)c) de la même Loi. De même, le demandeur n’a pas demandé au ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration de transmettre, en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi, au ministre de la Sécurité publique et de la protection civile, une demande pour obtenir une levée de l’interdiction de territoire dont il fait l’objet en vertu de l’alinéa 34(1)f) de la Loi. Il revenait donc au demandeur de présenter sa demande au ministre compétent pour obtenir la levée des interdictions de territoire dont il est frappé. Le défaut de ce faire lui est imputable.

 

[35]           La Cour croit que l’agente Léveillé n’a pas excédé sa compétence en rendant la décision à la deuxième étape. Tel qu’indiqué par le défendeur, le Bulletin opérationnel 021 ne lie pas l’agent décideur en l’espèce car il s’agit du pouvoir délégué du ministre. La jurisprudence établit clairement que les lignes directrices ne sont que des documents administratifs d’où ne découle aucun droit ou attente substantive (Oberlander c. Canada (Procureur général), 2004 CAF 213, [2005] 1 R.C.F. 3 au para. 30; Byer c. Canada, 2002 CFPI 518, 114 A.C.W.S. (3d) 417).

 

[36]           D’ailleurs, un délégué du ministre doit évaluer une demande CH à la lumière de tous les facteurs pertinents et la Cour qui agit en contrôle judiciaire doit confirmer la décision d’un délégué, même si l’évaluation des facteurs pertinents aurait pu être faite différemment (Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817 aux paras. 54-56, 68, 73-75; Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, [2002] 1 R.C.S. 3, aux paras. 34-38).

 

[37]           Ici, l’agente Léveillé a considéré et analysé tous les motifs humanitaires invoqués par le demandeur avant de conclure qu’aucun ne justifiait une dispense de l’application de la Loi. Dans la mesure où l’article 25 de la Loi confère au ministre un pouvoir discrétionnaire, la Cour ne voit pas comment la décision de l’agente Léveillé pourrait être considérée déraisonnable du simple fait qu’il peut être accordé un poids différent aux motifs alléguées pour justifier une demande CH. L’agente Léveillé a considéré la décision de la Cour d’appel fédérale concluant à la légalité de l’exclusion du demandeur et a rendu sa décision malgré le poids des considérations humanitaires (voir page 6, volume 1, dossier du tribunal).

 

b)         Est-ce que l’agente Nicole Léveillé était en droit d’invoquer le paragraphe 36(1)(c) de la Loi sans que la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR) ait préalablement conclu à l’application de cette disposition dans le cas du demandeur?

 

[38]           Il s’agit d’une question mixte portant sur l’application de la Loi aux faits, donc cette question est sujette à la norme de la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 aux paras. 164 et 166).

 

[39]           Le demandeur rappelle que dans sa décision, l’agente Léveillé n’a pas indiqué qu’à son avis, les motifs humanitaires étaient insuffisants et il note que contrairement au paragraphe 34(1)f) de la Loi, il n’est pas visé par un rapport de l’article 44 fondé sur l’article 36. Le rapport d’interdiction de territoire concernant le demandeur, établi le 15 juin 2004 en vertu de l’article 44 de la Loi, ne mentionne pas qu’il est interdit de territoire en vertu de l’alinéa 36(1)c) de la Loi, donc l’agent décideur en l’espèce ne pouvait invoquer cette disposition pour refuser d’octroyer la résidence permanente au demandeur en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi.

 

[40]           L’agente ne pouvait pas déterminer que les faits étudiés par la CISR ou la Cour d’appel fédérale constituaient une complicité au sens des articles 21 et 22 du Code criminel, L.R., 1985, ch. C-46, à l’effet que le demandeur était partie aux infractions commises par le mouvement Enhahda. D’ailleurs, la Cour d’appel fédérale a noté dans ses motifs que cette question requiert un débat. Ce faisant, l’agente commettait une erreur de droit.

 

[41]           Le demandeur invoque l’article 14 du Règlement qui porte sur l’alinéa 34(1)c) et prétend que le Règlement ne prévoit pas, dans sa Partie 3 relative aux Interdictions de territoire, une disposition similaire pour les fins de l’application de l’alinéa 36(1)c) de la Loi. Le demandeur prétend que l’agente ne pouvait se substituer au Règlement pour tirer sa conclusion et affirmer que le demandeur a commis en Tunisie « une série de crimes » et que « ceux-ci constituent de la grande criminalité au sens de l’art. 36(1)c) de la LIPR ». L’agente Léveillé ne pouvait donc pas se fonder sur le jugement de la Cour d’appel fédérale qui a maintenu la décision de la CISR, selon laquelle le demandeur est visé par l’alinéa 1Fb) de la Convention, parce qu’il a commis des crimes graves de droit commun.

 

[42]           Le demandeur se réfère aux mesures transitoires à la partie 20 du Règlement et note qu’aucune disposition ne prévoit une équivalence pour les clauses d’exclusion sous l’ancienne Loi qui pourrait être transférée sous la nouvelle Loi. L’article 339 du Règlement s’en rapproche le plus, mais rien n’est spécifié quant aux cas d’exclusion. La distinction énoncée par l’agente Dostie dans ses notes prend alors plus de sens : « … la LIPR n’a pas prévu d’exception pour les personnes sollicitant une dispense de visa de résident permanent si ce n’est des exigences statutaires, incluant celles relatives à l’examen sécuritaire et à la criminalité, à la deuxième étape du processus. »

 

[43]           Le défendeur soumet que si la prétention du demandeur était retenue par la Cour, les agents canadiens des visas à l’étranger ne pourraient pas refuser des demandes de résidence permanente en vertu de l’alinéa 36(1)c) de la Loi puisqu’un rapport sous l’article 44, selon son libellé, ne peut être rédigé que concernant un résident permanent ou un étranger qui se trouve au Canada. Bref, un agent d’immigration ne pourrait refuser un visa d’immigrant à une personne qui se trouve à l’extérieur du pays, en vertu de l’alinéa 36(1)c), se fondant sur son pouvoir prévu au paragraphe 11(1) de la Loi.

 

[44]           L’établissement du rapport prévu à l’article 44 constitue la première étape d’un processus pouvant mener à l’émission d’une mesure de renvoi à l’encontre de la personne en cause. Or, la décision attaquée en l’espèce, rendue en vertu du paragraphe 25(1), porte sur une demande de statut de résident permanent et ne constitue pas une mesure de renvoi. L’agente Léveillé n’a pas conclu à l’interdiction de territoire du demandeur en vertu de l’alinéa 36(1)c) en vue de son renvoi du Canada. Le pouvoir décisionnel accordé au ministre sous le paragraphe 25(1) de la Loi est explicite et ce n’est pas l’intention du Parlement d’impliquer la Section de l’immigration avant que le ministre puisse invoquer une interdiction de territoire. Le ministre, et non exclusivement la Section de l’immigration, est donc autorisé par la Loi à décider si le demandeur peut être une personne non admissible (Figueroa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 181 F.T.R. 242, 96 A.C.W.S. (3d) 844 au para. 10, conf. 2001 CAF 112, 212 F.T.R. 318 au para. 8; Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1995), 93 F.T.R. 297, 53 A.C.W.S. (3d) 834 au para. 11).

 

[45]           Sur la base des motifs de la CISR et de la Cour d’appel fédérale, l’agente Léveillé pouvait avoir des motifs raisonnables de croire que le demandeur a commis, « à l’extérieur du Canada », au moins « une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ». Le défendeur rappelle qu’il s’agit de la même norme de preuve que celle exigée pour l’application des alinéas 1Fb) et 1Fc) de la Convention. Par ailleurs, l’agente pouvait présumer avec certitude que comploter pour assassiner des gens ou causer un incendie criminel constituait une infraction en Tunisie et d’ailleurs, le demandeur n’a pas contesté ceci.

 

[46]           Le défendeur cite l’alinéa 465(1)a) du Code criminel et rappelle que la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il n’était pas déraisonnable pour la CISR d’avoir des raisons sérieuses de penser que le demandeur avait, entre autres, commis le crime d’avoir comploté en vue d’assassiner des personnalités du gouvernement tunisien en 1990, 1991 et 1992. Le défendeur cite ensuite les articles 433 et 434 du Code criminel et remarque que la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il n’était pas déraisonnable pour la CISR d’avoir des raisons sérieuses de penser que le demandeur avait, entre autres, commis le crime d’incendie de voitures en 1987 et 1990, ainsi que l’incendie criminel de Bab Souika (Tunisie) en février 1991, qui a causé un décès. En vertu du Code criminel, ces crimes sont passibles d’un emprisonnement de quatorze ans dans le cas des incendies de voitures et de l’emprisonnement à perpétuité dans le cas de l’incendie à Bab Souika.

 

[47]           L’argument du demandeur à l’effet que le Règlement ne contient pas, quant à l’application de l’alinéa 36(1)c), une disposition similaire à l’article 14 du Règlement n’est pas pertinent, puisque l’agente Léveillé n’a pas écrit qu’elle était liée par les motifs de la décision de la Cour d’appel fédérale. Elle s’est tout simplement basée sur cette décision. Or, dans le cadre d’une décision en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi, le ministre peut se fonder sur des conclusions de fait de la CISR, a fortiori lorsque, comme en l’espèce, elles ont été maintenues par la Cour d’appel fédérale (Yassin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 1029, 117 A.C.W.S. (3d) 605 au para. 24; Figueroa, décision de la Cour d’appel fédérale ci-dessus aux paras. 10 à 13).

 

[48]           Le défendeur fait un parallèle en expliquant que cette Cour a décidé, concernant l’alinéa 15b) du Règlement, qui porte sur l’application de l’alinéa 35(1)a) de la Loi et qui est rédigé comme l’article 14 du même Règlement, qu’un décideur en vertu de la Loi, que ce soit la CISR ou un agent d’immigration, était tenu d’accepter comme concluantes les conclusions antérieures de la CISR relativement à l’application de l’alinéa 1Fa) de la Convention (Syed c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 1163, 300 F.T.R. 132 aux paras. 24 à 26).

 

[49]           De même, dans l’affaire Legault c. Canada (Secrétaire d’État) (1997), 219 N.R. 376, 74 A.C.W.S. (3d) 649, cité avec approbation dans Kiani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 233 N.R. 170, 83 A.C.W.S. (3d) 822, la Cour d’appel fédérale a décidé qu’en se fondant uniquement sur une inculpation (indictment) par un tribunal des États-Unis et un mandat d’arrestation émis par ce tribunal, un arbitre pouvait conclure à l’existence de motifs raisonnables de croire que le demandeur avait commis des crimes graves à l’étranger et qu’il était donc visé par l’alinéa 19(1)c.1)(ii) de la Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (devenu l’alinéa 36(1)c) de la Loi). En l’espèce, l’agente Léveillé pouvait se fonder sur la décision finale d’un tribunal canadien, en l’occurrence la Cour d’appel fédérale, selon laquelle il n’était pas déraisonnable pour la Section du statut d’avoir des raisons sérieuses de penser que le demandeur a commis à l’étranger des crimes graves de droit commun au sens de l’alinéa 1Fb) de la Convention.

 

[50]           Le défendeur rappelle finalement que le demandeur n’a apporté aucune nouvelle preuve qui n’était pas devant la Cour d’appel fédérale et il n’a pas tenté de démontrer qu’il n’avait pas commis les crimes retenus par l’agente Léveillé sur la base de la décision de la Cour d’appel fédérale du 7 avril 2003. L’agente Léveillé a estimé que la décision et les motifs de la Cour d’appel fédérale étaient une preuve crédible et sa décision de se fonder sur cet arrêt, qui relevait parfaitement de son pouvoir discrétionnaire en la matière, est tout à fait légale (Legault, ci-dessus au para. 10).

 

[51]           Tel que mentionné précédemment, un délégué du ministre doit évaluer une demande CH à la lumière de tous les facteurs pertinents, et un tribunal qui agit en contrôle judiciaire doit confirmer la décision d’un délégué, même si l’évaluation des facteurs pertinents aurait pu être faite différemment (Baker, ci-dessus, aux paras. 54-56, 68, 73-75; Suresh, ci-dessus, aux paras. 34-38).

 

[52]           Tel qu’indiqué par le défendeur, il ne s’agit pas en l’espèce d’une question de mesure de renvoi, mais d’une demande de résidence permanente qui repose sur une décision discrétionnaire quant aux considérations humanitaires. En l’espèce, l’agente Léveillé a considéré et analysé tous les motifs humanitaires invoqués par le demandeur avant de conclure qu’aucun ne justifiait une dispense de l’application de la Loi.

 

[53]           Dans la mesure où l’article 25 de la Loi confère au ministre un pouvoir discrétionnaire, il était raisonnable pour l’agente Léveillé de tenir compte de la décision de la Cour d’appel fédérale car il s’agit du même demandeur et du même contexte factuel. Il était aussi raisonnable pour le demandeur de s’attendre à ce que l’agente Léveillé mentionne ces mêmes motifs de la Cour d’appel fédérale. Le poids considérable que l’agente a donné aux motifs de la décision de la Cour d’appel justifie sa conclusion.

 

c)         Est-ce qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale parce que le demandeur n’a pas eu l’occasion de faire des représentations concernant l’application de l’alinéa 36(1)(c) et ceci en vertu de l’alinéa 36(3)c) de la Loi?

 

[54]           Tel qu’indiqué ci-dessus, les questions d’équité procédurale devraient toujours être examinées selon la norme de la décision correcte (Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, [2006] 3 R.C.F. 392 au para. 46).

 

[55]           Le demandeur soutient qu’il ne pouvait pas soupçonner que l’agente tirerait la conclusion selon laquelle les actes commis par MTI/Enhahda pourraient lui être reprochés comme crimes au sens de l’article 36(1) de la Loi et il soumet qu’il n’a pas pu faire de représentations à cet égard. Le demandeur cite la décision Moiseev, ci-dessus au para. 28, à l’appui (disponible en anglais seulement):

… The jurisprudence is quite clear that the duty of fairness is not breached if the applicant had an opportunity to respond to the concerns raised in the visa officer’s mind: see, for example, Au, above; Zheng v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [1999] F.C.J. No. 1397 (F.C.) (QL).

 

[56]           Selon le demandeur, le défendeur tente de faire ce qu’il n’avait pas fait devant la Cour d’appel fédérale car selon la décision de la Cour d’appel fédérale, la question de l’applicabilité de l’alinéa 36(1)c) requiert un débat. En conséquence, l’agente ne pouvait pas alléguer les dispositions de l’alinéa 36(1)c) sans qu’il y ait tout au moins des arguments sur cette question avant qu’une décision ne soit prise.

 

[57]           Le demandeur prétend qu’il aurait dû être averti avant que la décision soit rendue que l'application de l’alinéa 36(1)c) de la Loi allait être soulevée par l’agente Léveillé. L’agente n’a pas respecté son devoir d’agir équitablement en ne lui donnant pas un préavis de son intention de considérer l’application de l’alinéa 36(1)c) et elle a privé le demandeur du bénéfice de la Loi.

 

[58]           Le défendeur soutient que le ministre a respecté l’équité procédurale quant à l’application de l’alinéa 36(1)c). CIC a averti le demandeur, bien que cela n’était pas obligatoire, qu’une autre décision serait ou pourrait être prise, compte tenu des dispositions de la Loi concernant la sécurité et la criminalité. Dans les motifs de l’agente Dostie divulgués au demandeur le 20 décembre 2006, celle-ci précisait non seulement que sa décision faisait suite à la première étape du processus décisionnel en vertu de l’article 25 de la Loi, mais aussi que la question des exigences statutaires « relatives à l’examen sécuritaire et à la criminalité » serait traitée « à la deuxième étape du processus », ce qui indiquait clairement que la demande de résidence permanente du demandeur pourrait être refusée pour des motifs de grande criminalité en vertu de l’alinéa 36(1)c) de la Loi.

 

[59]           De toute façon, ni le ministre, ni l’agente Dostie ou l’agente Léveillé n’avait à avertir le demandeur de l’application possible de l’alinéa 36(1)c) (Suleyman v. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 780, 330 F.T.R. 205 aux paras. 38 à 42).

 

[60]           Dans  Johnson c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 2, [2008] A.C.F. no 10 (QL), cette Cour a établi qu’un agent « n’est pas tenu de donner avis de ses préoccupations lorsqu’elles sont directement liées à la Loi et aux Règlements que l’agent est tenu de suivre scrupuleusement dans son évaluation du dossier d’un requérant » (Parmar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 139 F.T.R. 203, 75 A.C.W.S. (3d) 923 (C.F. 1ère inst.) au para. 36).

 

[61]           Dans la cause sous étude, le 7 avril 2003, la Cour d'appel, à la majorité, a maintenu l’exclusion du demandeur en vertu de l'alinéa 1Fb) et a indiqué qu'il n'y avait pas lieu de disposer des questions relatives à l'application de l'alinéa 1Fc). Cette décision n'a pas été portée en appel devant la Cour suprême du Canada.

 

[62]           Le demandeur savait donc à compter de cette date que la Cour d'appel avait conclu qu'il n'était pas déraisonnable pour la CISR d'avoir des raisons sérieuses de penser qu'il avait commis des crimes graves de droit commun avant son arrivée au Canada en 1992.

 

[63]            Le 20 décembre 2006, la preuve démontre que le demandeur était au courant de la décision de Mme Dostie (29 juillet 2005) dans laquelle elle lui indiquait que son dossier ferait l'objet d'une étude à une seconde étape soit un examen relatif à la sécurité et la criminalité.

 

[64]           Il aurait pu faire une demande d'exception en vertu de l’alinéa 36(3)c). La décision de Mme Léveillé a été rendue le 29 mars 2007. Le demandeur n'a rien fait durant ce délai et ne peut pas aujourd'hui plaider ignorance au sujet de son exclusion.

 

[65]           La Cour considère que la décision de l'agente Léveillé ne peut pas être caractérisée comme étant déraisonnable étant donné les circonstances particulières de ce dossier.

 

[66]           Le demandeur propose les questions suivantes afin que la Cour les certifie :

Q1. Lorsqu'une évaluation CH a été acceptée par un premier agent lequel considérait qu'il y a des risques qui constituent pour le demandeur des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives dans les circonstances, et que le demandeur est sous le coup d'une interdiction de territoire sous l'article 34(1) de la LIPR, le ministre peut-il déléguer valablement à un second agent le soin d'examiner et de rendre une décision en regard des raisons qui feraient que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national compte tenu de l'article 69(3) de la LIPR?

 

Q2. Compte tenu de la délégation de pouvoir contenue au « Bulletin opérationnel 021 » daté du 22 juin 2006 ou de toute autre délégation qui stipulerait que « les agents n'ont pas le pouvoir délégué d'accorder une dispense lorsque le demandeur est interdit de territoire pour l'un des motifs suivants notamment - Grande criminalité -L36(1) » un agent peut-il statuer sur le cas d’un demandeur visé sous L36(1) et le rejeter sans avoir de délégation spécifique lorsqu'un autre agent a déterminé positivement une demande CH lequel considérait qu'il y avait des risques qui constituent pour le demandeur des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives dans les circonstances ?

 

Q3. Compte tenu des mesures d'équité prévues au « guide opérationnel 021 » ou à une autre directive au guide applicable, - notamment en regard du IP-5 section 11.1 dans le présent cas -, stipulant que l'agent doit prendre ses décisions dans le respect de l'équité procédurale, lorsqu'un agent décide qu'il faudrait tenir compte d’un motif d'interdiction de territoire qui n'a pas fait l'objet d’une mesure spécifique d'interdiction de territoire et que ce motif pourrait amener le rejet de la demande de résidence pouvant être faite au Canada suite à une décision CH positive, l'agent peut-il décider du cas sans que le demandeur en ait été expressément avisé ou au contraire, le demandeur est-il en droit d'être informé de ce fait et doit-il avoir la possibilité de présenter ses observations avant qu'une décision ne soit rendue ?

                                                                        [soulignés dans la version originale]

 

[67]           Le défendeur s'oppose à ces questions pour les raisons suivantes :

 

[68]           Question no 1 : le défendeur fait remarquer que le  demandeur fait référence à l'article 69(3) à la fin de sa première question. La Cour constate qu'il s'agit d'une erreur et que le demandeur veut faire référence à l'article 34(2). Étant donné que Mme Léveillé n'a pas rendu de décision en vertu de l'article 34(2), la Cour considère qu'il n'est pas pertinent de certifier la première question.

 

[69]           Question no 2 : la Cour est d'accord avec la proposition du défendeur à l'effet que Mme Léveillé n'avait pas besoin d'une délégation spécifique pour rendre la décision attaquée.

 

[70]           Question no 3 : compte tenu des paragraphes 61 à 64 des présents motifs, la Cour est d'avis qu’il n'est pas nécessaire de certifier cette question.

 

[71]           Dans l'évaluation des questions proposées par le demandeur, la Cour s'est inspirée aussi des remarques de la Cour fédérale d'appel dans la récente décision de Valera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 145, [2009] A.C.F. no 549 (QL) concernant le rôle du juge lorsqu'il a à décider si une question doit être certifiée ou non.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que :

1.         La requête du défendeur en rétractation d'un aveu soit accordée suivant les termes du projet d'ordonnance réréamendé annexé à la nouvelle réplique du défendeur, datée du 25 novembre 2008 (document numéro 34);

2.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n'est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 


ANNEXE A

 

Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés, 2001, ch. 27

 

 

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

 

(2) Ils ne peuvent être délivrés à l’étranger dont le répondant ne se conforme pas aux exigences applicables au parrainage.

 

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

(2) The officer may not issue a visa or other document to a foreign national whose sponsor does not meet the sponsorship requirements of this Act.

 

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

 

 

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

33. Les faits — actes ou omissions — mentionnés aux articles 34 à 37 sont, sauf disposition contraire, appréciés sur la base de motifs raisonnables de croire qu’ils sont survenus, surviennent ou peuvent survenir.

 

 

33. The facts that constitute inadmissibility under sections 34 to 37 include facts arising from omissions and, unless otherwise provided, include facts for which there are reasonable grounds to believe that they have occurred, are occurring or may occur.

 

34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

 

a) être l’auteur d’actes d’espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s’entend au Canada;

 

b) être l’instigateur ou l’auteur d’actes visant au renversement d’un gouvernement par la force;

 

c) se livrer au terrorisme;

 

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

 

e) être l’auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d’autrui au Canada;

 

f) être membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’elle est, a été ou sera l’auteur d’un acte visé aux alinéas a), b) ou c).

 

 

(2) Ces faits n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national.

 

34. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

 

(a) engaging in an act of espionage or an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

 

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

 

(c) engaging in terrorism;

 

(d) being a danger to the security of Canada;

 

 

(e) engaging in acts of violence that would or might endanger the lives or safety of persons in Canada; or

 

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b) or (c).

 

 

(2) The matters referred to in subsection (1) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

 

35. (1) Emportent interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux les faits suivants:

 

a) commettre, hors du Canada, une des infractions visées aux articles 4 à 7 de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

 

b) occuper un poste de rang supérieur — au sens du règlement — au sein d’un gouvernement qui, de l’avis du ministre, se livre ou s’est livré au terrorisme, à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou commet ou a commis un génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à (5) de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

 

c) être, sauf s’agissant du résident permanent, une personne dont l’entrée ou le séjour au Canada est limité au titre d’une décision, d’une résolution ou d’une mesure d’une organisation internationale d’États ou une association d’États dont le Canada est membre et qui impose des sanctions à l’égard d’un pays contre lequel le Canada a imposé — ou s’est engagé à imposer — des sanctions de concert avec cette organisation ou association.

 

(2) Les faits visés aux alinéas (1)b) et c) n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national.

 

35. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of violating human or international rights for

 

(a) committing an act outside Canada that constitutes an offence referred to in sections 4 to 7 of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act;

 

(b) being a prescribed senior official in the service of a government that, in the opinion of the Minister, engages or has engaged in terrorism, systematic or gross human rights violations, or genocide, a war crime or a crime against humanity within the meaning of subsections 6(3) to (5) of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act; or

 

 

(c) being a person, other than a permanent resident, whose entry into or stay in Canada is restricted pursuant to a decision, resolution or measure of an international organization of states or association of states, of which Canada is a member, that imposes sanctions on a country against which Canada has imposed or has agreed to impose sanctions in concert with that organization or association.

 

 

(2) Paragraphs (1)(b) and (c) do not apply in the case of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

 

36. (1) Emportent interdiction de territoire pour grande criminalité les faits suivants :

 

 

a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé;

 

b) être déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans.

 

 

(2) Emportent, sauf pour le résident permanent, interdiction de territoire pour criminalité les faits suivants :

 

a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou de deux infractions à toute loi fédérale qui ne découlent pas des mêmes faits;

 

 

b) être déclaré coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation ou de deux infractions qui ne découlent pas des mêmes faits et qui, commises au Canada, constitueraient des infractions à des lois fédérales;

 

c) commettre, à l’extérieur du Canada, une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation;

 

 

d) commettre, à son entrée au Canada, une infraction qui constitue une infraction à une loi fédérale précisée par règlement.

 

(3) Les dispositions suivantes régissent l’application des paragraphes (1) et (2) :

 

a) l’infraction punissable par mise en accusation ou par procédure sommaire est assimilée à l’infraction punissable par mise en accusation, indépendamment du mode de poursuite effectivement retenu;

 

b) la déclaration de culpabilité n’emporte pas interdiction de territoire en cas de verdict d’acquittement rendu en dernier ressort ou de réhabilitation — sauf cas de révocation ou de nullité — au titre de la Loi sur le casier judiciaire;

 

 

c) les faits visés aux alinéas (1)b) ou c) et (2)b) ou c) n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui, à l’expiration du délai réglementaire, convainc le ministre de sa réadaptation ou qui appartient à une catégorie réglementaire de personnes présumées réadaptées;

 

 

d) la preuve du fait visé à l’alinéa (1)c) est, s’agissant du résident permanent, fondée sur la prépondérance des probabilités;

 

 

e) l’interdiction de territoire ne peut être fondée sur une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ni sur une infraction à la Loi sur les jeunes contrevenants.

 

36. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of serious criminality for

 

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, or of an offence under an Act of Parliament for which a term of imprisonment of more than six months has been imposed;

 

(b) having been convicted of an offence outside Canada that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years; or

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years.

(2) A foreign national is inadmissible on grounds of criminality for

 

 

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by way of indictment, or of two offences under any Act of Parliament not arising out of a single occurrence;

 

(b) having been convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament, or of two offences not arising out of a single occurrence that, if committed in Canada, would constitute offences under an Act of Parliament;

 

(c) committing an act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament; or

 

(d) committing, on entering Canada, an offence under an Act of Parliament prescribed by regulations.

 

(3) The following provisions govern subsections (1) and (2):

 

(a) an offence that may be prosecuted either summarily or by way of indictment is deemed to be an indictable offence, even if it has been prosecuted summarily;

 

 

(b) inadmissibility under subsections (1) and (2) may not be based on a conviction in respect of which a pardon has been granted and has not ceased to have effect or been revoked under the Criminal Records Act, or in respect of which there has been a final determination of an acquittal;

 

(c) the matters referred to in paragraphs (1)(b) and (c) and (2)(b) and (c) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or foreign national who, after the prescribed period, satisfies the Minister that they have been rehabilitated or who is a member of a prescribed class that is deemed to have been rehabilitated;

 

(d) a determination of whether a permanent resident has committed an act described in paragraph (1)(c) must be based on a balance of probabilities; and

 

(e) inadmissibility under subsections (1) and (2) may not be based on an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Young Offenders Act.

 

44. (1) S’il estime que le résident permanent ou l’étranger qui se trouve au Canada est interdit de territoire, l’agent peut établir un rapport circonstancié, qu’il transmet au ministre.

 

 

(2) S’il estime le rapport bien fondé, le ministre peut déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête, sauf s’il s’agit d’un résident permanent interdit de territoire pour le seul motif qu’il n’a pas respecté l’obligation de résidence ou, dans les circonstances visées par les règlements, d’un étranger; il peut alors prendre une mesure de renvoi.

 

 

 

 

(3) L’agent ou la Section de l’immigration peut imposer les conditions qu’il estime nécessaires, notamment la remise d’une garantie d’exécution, au résident permanent ou à l’étranger qui fait l’objet d’un rapport ou d’une enquête ou, étant au Canada, d’une mesure de renvoi.

 

44. (1) An officer who is of the opinion that a permanent resident or a foreign national who is in Canada is inadmissible may prepare a report setting out the relevant facts, which report shall be transmitted to the Minister.

 

(2) If the Minister is of the opinion that the report is well-founded, the Minister may refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing, except in the case of a permanent resident who is inadmissible solely on the grounds that they have failed to comply with the residency obligation under section 28 and except, in the circumstances prescribed by the regulations, in the case of a foreign national. In those cases, the Minister may make a removal order.

 

(3) An officer or the Immigration Division may impose any conditions, including the payment of a deposit or the posting of a guarantee for compliance with the conditions, that the officer or the Division considers necessary on a permanent resident or a foreign national who is the subject of a report, an admissibility hearing or, being in Canada, a removal order.

 

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

 

14. Les décisions ci-après ont, quant aux faits, force de chose jugée pour le constat de l’interdiction de territoire d’un étranger ou d’un résident permanent au titre de l’alinéa 34(1)c) de la Loi :

 

 

 

a) toute décision de la Commission, fondée sur les conclusions que l’intéressé a participé à des actes terroristes, qu’il est visé par la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés;

 

 

b) toute décision rendue en vertu du Code criminel par un tribunal canadien à l’égard de l’intéressé concernant une infraction de terrorisme.

14. For the purpose of determining whether a foreign national or permanent resident is inadmissible under paragraph 34(1)(c) of the Act, if either the following determination or decision has been rendered, the findings of fact set out in that determination or decision shall be considered as conclusive findings of fact:

 

(a) a determination by the Board, based on findings that the foreign national or permanent resident has engaged in terrorism, that the foreign national or permanent resident is a person referred to in section F of Article 1 of the Refugee Convention; or

 

(b) a decision by a Canadian court under the Criminal Code concerning the foreign national or permanent resident and the commission of a terrorism offence.

 

15. Les décisions ci-après ont, quant aux faits, force de chose jugée pour le constat de l’interdiction de territoire d’un étranger ou d’un résident permanent au titre de l’alinéa 35(1)a) de la Loi :

 

 

 

 

a) toute décision rendue à l’égard de l’intéressé par tout tribunal pénal international établi par résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies ou par la Cour pénale internationale au sens de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

 

 

b) toute décision de la Commission, fondée sur les conclusions que l’intéressé a commis un crime de guerre ou un crime contre l’humanité, qu’il est visé par la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés;

 

 

 

c) toute décision rendue en vertu du Code criminelou de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre par un tribunal canadien à l’égard de l’intéressé concernant un crime de guerre ou un crime contre l’humanité commis à l’extérieur du Canada.

 

15. For the purpose of determining whether a foreign national or permanent resident is inadmissible under paragraph 35(1)(a) of the Act, if any of the following decisions or the following determination has been rendered, the findings of fact set out in that decision or determination shall be considered as conclusive findings of fact:

 

(a) a decision concerning the foreign national or permanent resident that is made by any international criminal tribunal that is established by resolution of the Security Council of the United Nations, or the International Criminal Court as defined in the Crimes Against Humanity and War Crimes Act;

 

(b) a determination by the Board, based on findings that the foreign national or permanent resident has committed a war crime or a crime against humanity, that the foreign national or permanent resident is a person referred to in section F of Article 1 of the Refugee Convention; or

 

(c) a decision by a Canadian court under the Criminal Code or the Crimes Against Humanity and War Crimes Act concerning the foreign national or permanent resident and a war crime or crime against humanity committed outside Canada.

 

 

17. Pour l’application de l’alinéa 36(3)c) de la Loi, le délai réglementaire est de cinq ans à compter :

 

a) dans le cas des faits visés aux alinéas 36(1)b) ou (2)b) de la Loi, du moment où la peine imposée a été purgée, pourvu que la personne n’ait pas été déclarée coupable d’une infraction subséquente autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur les jeunes contrevenants;

 

b) dans le cas des faits visés aux alinéas 36(1)c) ou (2)c) de la Loi, du moment de la commission de l’infraction, pourvu que la personne n’ait pas été déclarée coupable d’une infraction subséquente autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur les jeunes contrevenants.

 

17. For the purposes of paragraph 36(3)(c) of the Act, the prescribed period is five years

 

 

(a) after the completion of an imposed sentence, in the case of matters referred to in paragraphs 36(1)(b) and (2)(b) of the Act, if the person has not been convicted of a subsequent offence other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Young Offenders Act; and

 

 

(b) after committing an offence, in the case of matters referred to in paragraphs 36(1)(c) and (2)(c) of the Act, if the person has not been convicted of a subsequent offence other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Young Offenders Act.

 

18. (1) Pour l’application de l’alinéa 36(3)c) de la Loi, la catégorie des personnes présumées réadaptées est une catégorie réglementaire.

 

(2) Font partie de la catégorie des personnes présumées réadaptées les personnes suivantes :

 

 

a) la personne déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’au plus une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation si les conditions suivantes sont réunies :

 

(i) l’infraction est punissable au Canada d’un emprisonnement maximal de moins de dix ans,

 

 

(ii) au moins dix ans se sont écoulés depuis le moment où la peine imposée a été purgée,

 

(iii) la personne n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation,

 

(iv) elle n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire dans les dix dernières années ou de plus d’une telle infraction avant les dix dernières années, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(v) elle n’a pas, dans les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(vi) elle n’a pas, avant les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, de plus d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire,

 

(vii) elle n’a pas commis l’infraction visée à l’alinéa 36(2)c) de la Loi;

 

b) la personne déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, de deux infractions ou plus qui, commises au Canada, constitueraient des infractions à une loi fédérale punissables par procédure sommaire si les conditions suivantes sont réunies :

 

(i) au moins cinq ans se sont écoulés depuis le moment où les peines imposées ont été purgées,

 

(ii) la personne n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation,

 

(iii) elle n’a pas, dans les cinq dernières années, été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(iv) elle n’a pas, dans les cinq dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(v) elle n’a pas, avant les cinq dernières années, été déclarée coupable au Canada de plus d’une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(vi) elle n’a pas été déclarée coupable d’une infraction visée à l’alinéa 36(2)b) de la Loi qui, commise au Canada, constituerait une infraction punissable par mise en accusation,

 

(vii) elle n’a pas commis l’infraction visée à l’alinéa 36(2)c) de la Loi;

 

c) la personne qui a commis, à l’extérieur du Canada, au plus une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation si les conditions suivantes sont réunies :

 

 

(i) l’infraction est punissable au Canada d’un emprisonnement maximal de moins de dix ans,

 

 

(ii) au moins dix ans se sont écoulés depuis le moment de la commission de l’infraction,

 

(iii) la personne n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation,

 

(iv) elle n’a pas été déclarée coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire dans les dix dernières années ou de plus d’une telle infraction avant les dix dernières années, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(v) elle n’a pas, dans les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale, autre qu’une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions ou une infraction à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents,

 

(vi) elle n’a pas, avant les dix dernières années, été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, de plus d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par procédure sommaire,

 

(vii) elle n’a pas été déclarée coupable, à l’extérieur du Canada, d’une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation.

 

18. (1) For the purposes of paragraph 36(3)(c) of the Act, the class of persons deemed to have been rehabilitated is a prescribed class.

 

(2) The following persons are members of the class of persons deemed to have been rehabilitated:

 

(a) persons who have been convicted outside Canada of no more than one offence that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament, if all of the following conditions apply, namely,

 

(i) the offence is punishable in Canada by a maximum term of imprisonment of less than 10 years,

 

(ii) at least 10 years have elapsed since the day after the completion of the imposed sentence,

 

(iii) the person has not been convicted in Canada of an indictable offence under an Act of Parliament,

 

(iv) the person has not been convicted in Canada of any summary conviction offence within the last 10 years under an Act of Parliament or of more than one summary conviction offence before the last 10 years, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

(v) the person has not within the last 10 years been convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

(vi) the person has not before the last 10 years been convicted outside Canada of more than one offence that, if committed in Canada, would constitute a summary conviction offence under an Act of Parliament, and

 

(vii) the person has not committed an act described in paragraph 36(2)(c) of the Act;

 

(b) persons convicted outside Canada of two or more offences that, if committed in Canada, would constitute summary conviction offences under any Act of Parliament, if all of the following conditions apply, namely,

 

 

(i) at least five years have elapsed since the day after the completion of the imposed sentences,

 

(ii) the person has not been convicted in Canada of an indictable offence under an Act of Parliament,

 

(iii) the person has not within the last five years been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

(iv) the person has not within the last five years been convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

(v) the person has not before the last five years been convicted in Canada of more than one summary conviction offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

(vi) the person has not been convicted of an offence referred to in paragraph 36(2)(b) of the Act that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence, and

 

(vii) the person has not committed an act described in paragraph 36(2)(c) of the Act; and

 

(c) persons who have committed no more than one act outside Canada that is an offence in the place where it was committed and that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament, if all of the following conditions apply, namely,

 

(i) the offence is punishable in Canada by a maximum term of imprisonment of less than 10 years,

 

(ii) at least 10 years have elapsed since the day after the commission of the offence,

 

(iii) the person has not been convicted in Canada of an indictable offence under an Act of Parliament,

 

(iv) the person has not been convicted in Canada of any summary conviction offence within the last 10 years under an Act of Parliament or of more than one summary conviction offence before the last 10 years, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

(v) the person has not within the last 10 years been convicted outside of Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act or an offence under the Youth Criminal Justice Act,

 

 

(vi) the person has not before the last 10 years been convicted outside Canada of more than one offence that, if committed in Canada, would constitute a summary conviction offence under an Act of Parliament, and

 

(vii) the person has not been convicted outside of Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an indictable offence under an Act of Parliament.

339. Est assimilée au rejet d’une demande d’asile par la Commission la décision rendue au Canada avant l’entrée en vigueur du présent article selon laquelle une personne n’est pas un réfugié au sens de la Convention.

 

339. A determination made in Canada before the coming into force of this section that a person is not a Convention refugee is deemed to be a claim for refugee protection rejected by the Board.

 

 

Code criminel, L.R., 1985, ch. C-46

 

21. (1) Participent à une infraction :

 

a) quiconque la commet réellement;

 

b) quiconque accomplit ou omet d’accomplir quelque chose en vue d’aider quelqu’un à la commettre;

 

c) quiconque encourage quelqu’un à la commettre.

 

(2) Quand deux ou plusieurs personnes forment ensemble le projet de poursuivre une fin illégale et de s’y entraider et que l’une d’entre elles commet une infraction en réalisant cette fin commune, chacune d’elles qui savait ou devait savoir que la réalisation de l’intention commune aurait pour conséquence probable la perpétration de l’infraction, participe à cette infraction.

 

21. (1) Every one is a party to an offence who

 

(a) actually commits it;

 

(b) does or omits to do anything for the purpose of aiding any person to commit it; or

 

 

(c) abets any person in committing it.

 

 

(2) Where two or more persons form an intention in common to carry out an unlawful purpose and to assist each other therein and any one of them, in carrying out the common purpose, commits an offence, each of them who knew or ought to have known that the commission of the offence would be a probable consequence of carrying out the common purpose is a party to that offence.

 

22. (1) Lorsqu’une personne conseille à une autre personne de participer à une infraction et que cette dernière y participe subséquemment, la personne qui a conseillé participe à cette infraction, même si l’infraction a été commise d’une manière différente de celle qui avait été conseillée.

 

(2) Quiconque conseille à une autre personne de participer à une infraction participe à chaque infraction que l’autre commet en conséquence du conseil et qui, d’après ce que savait ou aurait dû savoir celui qui a conseillé, était susceptible d’être commise en conséquence du conseil.

 

(3) Pour l’application de la présente loi, « conseiller » s’entend d’amener et d’inciter, et « conseil » s’entend de l’encouragement visant à amener ou à inciter.

22. (1) Where a person counsels another person to be a party to an offence and that other person is afterwards a party to that offence, the person who counselled is a party to that offence, notwithstanding that the offence was committed in a way different from that which was counselled.

 

(2) Every one who counsels another person to be a party to an offence is a party to every offence that the other commits in consequence of the counselling that the person who counselled knew or ought to have known was likely to be committed in consequence of the counselling.

 

(3) For the purposes of this Act, "counsel" includes procure, solicit or incite.

 

 

433. Est coupable d’un acte criminel et passible de l’emprisonnement à perpétuité toute personne qui, intentionnellement ou sans se soucier des conséquences de son acte, cause par le feu ou par une explosion un dommage à un bien, que ce bien lui appartienne ou non, dans les cas suivants :

 

a) elle sait que celui-ci est habité ou occupé, ou ne s’en soucie pas;

 

 

b) le feu ou l’explosion cause des lésions corporelles à autrui.

 

433. Every person who intentionally or recklessly causes damage by fire or explosion to property, whether or not that person owns the property, is guilty of an indictable offence and liable to imprisonment for life where

 

 

 

(a) the person knows that or is reckless with respect to whether the property is inhabited or occupied; or

 

(b) the fire or explosion causes bodily harm to another person.

 

 

434. Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, intentionnellement ou sans se soucier des conséquences de son acte, cause par le feu ou par une explosion un dommage à un bien qui ne lui appartient pas en entier.

 

434. Every person who intentionally or recklessly causes damage by fire or explosion to property that is not wholly owned by that person is guilty of an indictable offence and liable to imprisonment for a term not exceeding fourteen years.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1639-07

 

INTITULÉ :                                       MOHAMMED BEN AR ZRIG ET

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                           L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 7 avril 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 12 juin 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :                       

 

Michel Le Brun                                                             POUR LE DEMANDEUR

 

 

Normand Lemyre                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Zoé Richard

                                                                                   

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Michel Le Brun                                                             POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR       

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

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