Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20090909

Dossier : T‑1529‑07

Référence : 2009 CF 878

Ottawa (Ontario), le 9 septembre 2009

En présence de monsieur le juge Campbell

 

ENTRE :

ENVIRONMENTAL DEFENCE CANADA

GEORGIA STRAIT ALLIANCE

WESTERN CANADA WILDERNESS COMMITTEE

et DAVID SUZUKI FOUNDATION

 

demandeurs

et

 

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

défendeur

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Dans le cadre des présents motifs, le naseux de Nooksack, un méné ayant pour habitat quatre ruisseaux d’eau douce dans les basses‑terres continentales de la Colombie‑Britannique, se distingue par le fait qu’elle est la première espèce en voie de disparition au Canada à tirer parti d’une interprétation approfondie par la Cour des éléments clés de la loi visant à le protéger, soit la Loi sur les espèces en péril, 2002, ch. 29 (la LEP).

 

Une décision du ministre des Pêches et des Océans (le ministre) prise en application de la LEP a incité les demandeurs à soumettre la présente demande à titre de « cause type » quant à l’interprétation de la LEP par le ministre dont il est fait état dans la décision examinée. Les demandeurs soutiennent que le ministre a sciemment omis de respecter les dispositions obligatoires des alinéas 41(1)c) et (c.1) de la LEP dans la versions définitive du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack. Toutefois, pendant l’audience, les avocats des demandeurs ont souligné qu’aucune allégation de mauvaise foi n’était avancée relativement à la conduite contestée.

 

[2]               Il est néanmoins important à mon avis de rappeler les événements qui ont mené à la présente procédure ainsi que le déroulement de la procédure elle‑même. Ce rappel est important parce qu’un examen du processus décisionnel du ministre dans le cadre de la LEP mis en application pour le naseux de Nooksack démontre amplement qu’il était absolument nécessaire de saisir la Cour de la présente demande. En l’espèce, il est question de l’élaboration et de la mise en application d’une politique par le ministre en contravention manifeste de la loi et de la réticence à être tenu responsable de cette omission de respecter la loi. Par conséquent, il s’agit d’une cause se rapportant à la primauté du droit décrite par les juges Bastarache et LeBel au paragraphe 28 de l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 :

La primauté du droit veut que tout exercice de l’autorité publique procède de la loi. Tout pouvoir décisionnel est légalement circonscrit par la loi habilitante, la common law, le droit civil ou la Constitution. Le contrôle judiciaire permet aux cours de justice de s’assurer que les pouvoirs légaux sont exercés dans les limites fixées par le législateur. Il vise à assurer la légalité, la rationalité et l’équité du processus administratif et de la décision rendue.

 

[3]               En fin de compte, l’argument avancé par les demandeurs concernant l’omission reprochée au ministre dans son processus décisionnel se limite à une question d’interprétation de la loi. Pour les motifs exposés ci‑après, je conclus que le ministre a agi en contravention de la loi adoptée par le Parlement pour protéger le naseux de Nooksack.

 

I.          Aperçu du présent litige

[4]               La raison pour laquelle les demandeurs ont soumis la présente demande est exposée dans les paragraphes suivants de leur avis de demande :

[traduction]

15.        Les demandeurs sont des « groupes de défense de l’intérêt public » dans la mesure où ils sont des organisations caritatives qui militent pour la protection de l’environnement et où aucun intérêt personnel, propriétal ou pécuniaire n’est rattaché à l’issue de la demande.

 

16.        De l’avis des demandeurs, il est nécessaire de saisir la Cour de la présente demande pour remédier à l’omission du gouvernement fédéral de mettre en application la LEP, cette omission ayant pour effet de menacer davantage les espèces en péril au Canada. Les demandeurs estiment qu’une ordonnance exigeant le respect de la LEP serait dans l’intérêt public parce que la viabilité des populations d’espèces sauvages est une question qui touche tous les Canadiens.

 

17.        Les demandeurs estiment également qu’ils n’ont malheureusement d’autre choix que de porter l’affaire en justice. Chacun des demandeurs est connu pour ses efforts en vue de protéger les espèces en péril et de veiller, par des moyens autres que des procédures judiciaires, à ce que le gouvernement fédéral, y compris le ministre défendeur, mette en application la LEP. Ils présentent la présente demande uniquement après avoir pris connaissance d’une preuve accablante démontrant que : a) le gouvernement canadien tente d’échapper à son obligation de mettre en application la LEP de manière à protéger les espèces en péril au Canada; et b) des moyens autres qu’une procédure judiciaire se sont avérés inefficaces, tandis que les procédures judiciaires, ou la menace de telles procédures, ont porté fruit.

 

 

Les demandeurs ont exposé leur position de manière détaillée dans un précis rattaché à l’avis de demande; les faits énoncés ne sont pas contestés :

Les motifs qui fondent la demande sont les suivants :

 

La Loi sur les espèces en péril et le naseux de Nooksack

 

1.   La Loi sur les espèces en péril (LEP) a reçu la sanction royale le 12 décembre 2002 et est entrée en vigueur en trois phases. Le 24 mars 2003, les articles 134 à 136 et 138 à 141, prévoyant des modifications à d’autres lois nationales se rapportant aux espèces sauvages, sont entrés en vigueur. Le 5 juin 2003, les articles 2 à 31, 37 à 56, 62, 65 à 76, 78 à 84, 120 à 133 et 137 sont entrés en vigueur. Le 1er juin 2004, le reste des articles de la LEP sont entrés en vigueur : les articles 32 à 36, 57 à 61, 63, 64, 77 et 85 à 119.

 

2.   La LEP vise :

 

[…] à prévenir la disparition — de la planète ou du Canada seulement — des espèces sauvages, à permettre le rétablissement de celles qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et à favoriser la gestion des espèces préoccupantes pour éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées (article 6).

 

3.   Le naseux de Nooksack est un petit poisson de moins de 15 cm, de la famille des ménés. Au Canada, on le trouve dans quatre ruisseaux de la vallée du fleuve Fraser en Colombie‑Britannique. Son aire globale de répartition inclut environ 20 ruisseaux additionnels dans le nord‑ouest de l’État de Washington.

 

4.   Le naseux de Nooksack est « inscrit » conformément à la LEP parmi les espèces « en voie de disparition », ce qui signifie qu’il figure sur la Liste des espèces en péril dressée à l’annexe 1 de la LEP. Le statut du naseux à titre d’espèce « en voie de disparition » signifie qu’elle est une « espèce sauvage qui, de façon imminente, risque de disparaître [...] ». « Espèce disparue du pays » signifie qu’il s’agit d’une espèce sauvage qu’on ne trouve plus à l’état sauvage au Canada, mais qu’on trouve ailleurs à l’état sauvage (article 2). Le naseux de Nooksack est disparu de certains affluents des bassins hydrologiques du Canada où on le retrouvait en abondance dans les années 1960.

 

5.   L’inscription sur la liste déclenche les dispositions de la LEP visant à prévenir la disparition de l’espèce et à prendre des mesures pour assurer son rétablissement. Les mesures de protection comprennent l’interdiction de nuire (article 32), la protection de la résidence (article 33) ainsi que l’obligation qu’a le ministre de planifier le rétablissement de l’espèce (articles 37 à 46) et de mettre en œuvre le plan de rétablissement (« plan d’action » (articles 47 à 64).

 

6.   Un élément essentiel de la planification du rétablissement est l’élaboration par le ministre de « programmes de rétablissement » qui doivent « traiter des menaces à la survie de l’espèce » (article 41). Les programmes de rétablissement doivent comporter, entre autres :

 

•     une description de l’espèce et de ses besoins;

 

•     une désignation des menaces à sa survie et à son habitat;

 

•     la désignation de « l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible », notamment des exemples d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de cet habitat (alinéas 41 (1) a), b) et c).

 

7.   La protection de l’habitat essentiel est souvent nécessaire à la survie et au rétablissement d’une espèce. Le préambule de la LEP le signale : « l’habitat des espèces en péril est important pour leur conservation ». Ce principe est également reconnu dans la définition de l’habitat essentiel : « L’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce » (article 2).

 

8.   À la lumière de cette définition, la protection de l’habitat essentiel survient seulement si cet habitat est désigné dans un programme de rétablissement ou un plan d’action, ce qui déclenche l’interdiction de le détruire (article 58). Toutefois, contrairement aux programmes de rétablissement qui doivent être élaborés à l’intérieur de délais obligatoires (article 42), le LEP ne fixe aucun délai pour l’élaboration des plans d’action. Ainsi, l’omission de désigner l’habitat essentiel à l’étape du programme de rétablissement peut avoir pour effet de reporter indéfiniment sa désignation et sa protection.

 

Le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack et l’intention du gouvernement fédéral de ne pas observer la LEP

 

9.   Le naseux de Nooksack était une espèce inscrite à l’annexe 1 de la LEP lorsque la Loi est entrée en vigueur, si bien que le programme de rétablissement devait être déposé au plus tard le 5 juin 2006 (paragraphe 42(2)).

 

10.  En vertu de la LEP, le ministre doit mettre un projet de programme de rétablissement dans le registre de la LEP et, dans les soixante jours qui suivent, le public peut déposer par écrit auprès du ministre des observations relativement au projet (paragraphe 43(1)). Trente jours plus tard, le ministre est tenu de mettre le texte définitif du programme de rétablissement dans le registre (paragraphe 43(2)).

 

11.  La version préliminaire [le projet] du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack a été placée dans le registre le ou vers le 25 septembre 2006. Des observations soumises au nom des demandeurs ont entre autres fait état de l’omission du programme de rétablissement de désigner l’habitat essentiel malgré le fait que son emplacement était connu. Le 23 juillet 2007, soit un an après l’échéance, le texte définitif du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack a été placé dans le registre.

 

12.  Le programme de rétablissement ne désigne pas l’habitat essentiel, mais signale que la perte de son habitat est une des principales menaces à la survie du naseux de Nooksack et recommande la protection de l’habitat pour assurer la survie et le rétablissement de l’espèce.

 

13.  L’équipe de rétablissement, mise sur pied pour conseiller le ministre au sujet du programme de rétablissement et constituée de spécialistes du naseux de Nooksack, était en mesure de désigner l’habitat essentiel, a en fait désigné l’habitat essentiel, et souhaitait inclure cette désignation de l’habitat essentiel dans le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack.

 

14.  Toutefois, se pliant à la directive du ministre et/ou de son délégué, l’équipe de rétablissement a retiré la désignation de l’habitat essentiel du programme de rétablissement et l’a insérée dans un autre document qui n’a pas été placé dans le registre.

 

            [Souligné dans l’original.]

 

[5]               Ainsi, la présente demande vise principalement les dispositions de la LEP concernant les programmes de rétablissement, telles qu’elles ont été appliquées au naseux de Nooksack, et plus précisément l’interprétation correcte des alinéas 41(1)c) et c.1.) :

41. (1) Si le ministre compétent conclut que le rétablissement de l’espèce sauvage inscrite est réalisable, le programme de rétablissement doit traiter des menaces à la survie de l’espèce — notamment de toute perte de son habitat — précisées par le COSEPAC et doit comporter notamment :

a) une description de l’espèce et de ses besoins qui soit compatible avec les renseignements fournis par le COSEPAC;

b) une désignation des menaces à la survie de l’espèce et des menaces à son habitat qui soit compatible avec les renseignements fournis par le COSEPAC, et des grandes lignes du plan à suivre pour y faire face;

c) la désignation de l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible, notamment les informations fournies par le COSEPAC, et des exemples d’activités susceptibles d’entraîner sa destruction;

c.1) un calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel lorsque l’information accessible est insuffisante;

d) un énoncé des objectifs en matière de population et de dissémination visant à favoriser la survie et le rétablissement de l’espèce, ainsi qu’une description générale des activités de recherche et de gestion nécessaires à l’atteinte de ces objectifs;

e) tout autre élément prévu par règlement;

f) un énoncé sur l’opportunité de fournir des renseignements supplémentaires concernant l’espèce;

g) un exposé de l’échéancier prévu pour l’élaboration d’un ou de plusieurs plans d’action relatifs au programme de rétablissement.

[Non souligné dans l’original.]

 

 

41. (1) If the competent minister determines that the recovery of the listed wildlife species is feasible, the recovery strategy must address the threats to the survival of the species identified by COSEWIC, including any loss of habitat, and must include


(a) a description of the species and its needs that is consistent with information provided by COSEWIC;

 

(b) an identification of the threats to the survival of the species and threats to its habitat that is consistent with information provided by COSEWIC and a description of the broad strategy to be taken to address those threats;

(c) an identification of the species’ critical habitat, to the extent possible, based on the best available information, including the information provided by COSEWIC, and examples of activities that are likely to result in its destruction;


(c.1) a schedule of studies to identify critical habitat, where available information is inadequate;

 

(d) a statement of the population and distribution objectives that will assist the recovery and survival of the species, and a general description of the research and management activities needed to meet those objectives;


(e) any other matters that are prescribed by the regulations;

(f) a statement about whether additional information is required about the species; and

(g) a statement of when one or more action plans in relation to the recovery strategy will be completed.



[Emphasis added]

 

[Le COSEPAC auquel renvoie la disposition est le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, constitué par l’article 14.]

 

Les définitions de l’« habitat » d’une espèce aquatique et de l’« habitat essentiel » établies à l’article 2 de la LEP sont de « première importance pour l’interprétation des alinéas 41(1)c) et c.1) :

« habitat »

a) S’agissant d’une espèce aquatique, les frayères, aires d’alevinage, de croissance et d’alimentation et routes migratoires dont sa survie dépend, directement ou indirectement, ou aires où elle s’est déjà trouvée et où il est possible de la réintroduire;

 

 

 

 

 

[…]

 

« habitat essentiel » L’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce.

"habitat" means

(a)   in respect of aquatic species, spawning grounds and nursery, rearing, food supply, migration and any other areas on which aquatic species depend directly or indirectly in order to carry out their life processes, or areas where aquatic species formerly occurred and have the potential to be reintroduced; and



"critical habitat" means the habitat that is necessary for the survival or recovery of a listed wildlife species and that is identified as the species’ critical habitat in the recovery strategy or in an action plan for the species.

 

Il s’agit ici de trancher si le terme « habitat » comporte deux facettes : une aire géographique délimitée qu’on peut situer sur une carte et les caractéristiques physiques et biologiques de cette aire dont la survie des espèces dépend.

 

[6]               Les dispositions de la LEP visant l’élaboration d’un programme de rétablissement sont une des composantes d’un programme de protection global. Une fois que les exigences du programme de rétablissement prévues à l’article 41 sont satisfaites, on passe au volet du plan d’action conformément aux articles 47 à 55. Il est admis que ces deux volets sont ainsi structurés parce qu’on veut d’abord se doter de renseignements fondamentaux sur la biologie et l’écologie d’une espèce et d’un programme général pour contrer la menace. De leur côté, les plans d’action visent à décrire des mesures [traduction] « d’intervention » plus détaillées devant assurer la survie et le rétablissement de l’espèce, y compris l’évaluation des répercussions socioéconomiques de ces mesures.

 

[7]               Pour clarifier le contexte, les volets de la LEP se rapportant aux programmes de rétablissement et aux plans d’action sont inclus à l’annexe A des présents motifs.

 

II.        La décision du ministre concernant la version définitive du programme de rétablissement

[8]               Le processus menant à la publication de la version définitive du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack comportait les étapes suivantes : l’élaboration d’une version préliminaire du projet de programme de rétablissement, la publication du projet de programme de rétablissement, une consultation publique, puis la publication de la version définitive du programme de rétablissement.

 

[9]               Ainsi, le présent contrôle judiciaire ciblera cinq mesures successives : l’élaboration de la version préliminaire du projet de programme de rétablissement en juin 2005; la directive en date du 21 juin 2006 de Mme Allison Webb, directrice régionale des politiques au ministère des Pêches et des Océans (MPO) dans la région du Pacifique, concernant le contenu du projet de programme de rétablissement qui devait être publié et qui a été publié pour que les intéressés puissent présenter des observations le 25 septembre 2006; la recommandation ministérielle du 18 juillet 2007 de M. Pardeep Ahluwalia, directeur général du secrétariat de la LEP, à l’intention de M. Larry Murray, sous‑ministre des Pêches et des Océans, visant l’approbation de la décision de Mme Webb; l’approbation de cette recommandation par M. Murray au nom du ministre le 18 juillet 2007; la publication de la version définitive du programme de rétablissement le 23 juillet 2007. Il est admis que M. Murray était habilité à approuver la recommandation au nom du ministre et que, par conséquent, cette approbation est la décision du ministre.

 

[10]           Bien que l’avis de demande signale que la décision faisant l’objet du contrôle est la publication de la version définitive du programme de rétablissement par le ministre le 23 juillet 2007, il est admis que la décision faisant l’objet du contrôle englobe les mesures prises par Mme Webb, M. Ahluwalia et M. Murray, ainsi que le contenu de la version définitive du programme de rétablissement, examinés conjointement.

 

A.  La version préliminaire du projet de programme de rétablissement, préparée par l’équipe de rétablissement

[11]           En Colombie‑Britannique, les programmes de rétablissement visant les poissons d’eau douce sont élaborés par une équipe de rétablissement composée d’un groupe central de spécialistes, auquel s’ajoutent des spécialistes d’espèces individuelles, au besoin. En ce qui a trait au naseux de Nooksack, on a mis sur pied en décembre 2003 un sous‑comité d’une telle équipe chargé d’amorcer l’évaluation du naseux de Nooksack et de poursuivre l’évaluation du meunier de Salish; un des membres de ce sous‑comité était Mike Pearson, biologiste professionnel autonome qui est la principale autorité au Canada en matière d’écologie, de conservation et de l’habitat des poissons d’eau douce en général, et du naseux de Nooksack et du meunier de Salish en particulier. Le MPO a recours à l’expertise de M. Pearson depuis 2003.

 

[12]           M. Pearson a reçu le mandat d’élaborer la version préliminaire d’un programme de rétablissement pour le naseux de Nooksack et le meunier de Salish, laquelle sera examinée par l’équipe de rétablissement avant que la version définitive ne soit présentée au ministre à titre de projet de programme de rétablissement devant être publié en vertu de l’alinéa 42(1) de la LEP. L’affidavit de M. Pearson déposé dans le cadre de la présente demande renferme des renseignements contextuels sur la réalisation de ce mandat (voir l’affidavit de Mike Pearson, dossier du demandeur, volume 1, onglet 6).

 

[13]           Au paragraphe 15, M. Pearson présente le compte rendu de la réunion du 10 décembre 2003 de l’équipe de rétablissement, qui renferme la description suivante du défi que constituait la définition de l’habitat essentiel :

[traduction]

[…] les principales mesures de protection de la LEP n’entrent en vigueur qu’après la définition de l’habitat essentiel. Bien qu’il y ait beaucoup de discussions au sein des organismes – et entre ceux‑ci – au sujet de la façon de définir un habitat essentiel, il n’y a pas pour le moment de directives claires de leur part à cet égard. La formulation de la LEP laisse entendre que les législateurs s’en remettent à l’expertise des groupes pertinents pour la définition de l’habitat essentiel.

 

Aux paragraphes 17 et 18, M. Pearson formule l’observation suivante au sujet du défi à relever :

[traduction]

À mon avis, il était très important de désigner l’habitat essentiel. Le naseux de Nooksack est surtout menacé par la perte et la dégradation de son habitat dans chacun des quatre bassins hydrologiques où on le retrouve au Canada. Diverses formes de perte et de dégradation de l’habitat – notamment l’eau tirée de puits et de ruisseaux, la toxicité associée à l’écoulement des eaux pluviales urbaines, le dragage de canaux pour le drainage et la perte de végétation rivulaire (sur le bord des ruisseaux) – constituent des préoccupations majeures dans un ou plusieurs de ces bassins hydrologiques. Ainsi, la protection des habitats essentiels est importante pour faire face aux principales menaces à la survie du naseux de Nooksack. En fait, il s’agit du facteur clé pour assurer la survie de cette espèce.

 

Aux termes de la LEP, « l’habitat essentiel » signifie « l’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce ». En termes biologiques, j’ai relevé deux seuils dans cette définition : la survie et le rétablissement. En termes biologiques, j’ai interprété le seuil de la survie comme étant l’habitat nécessaire au soutien de la taille de la population viable minimale (PVM) de l’espèce dans chacun des bassins hydrologiques qu’elle occupe présentement. Le seuil du rétablissement correspond à l’objectif de rétablissement fixé dans le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack : « Garantir la viabilité à long terme des populations du naseux de Nooksack par leur répartition naturelle à travers le Canada ». Ce seuil nécessite un habitat un peu plus grand, mais reflète la reconnaissance qu’il n’est pas possible de rétablir complètement les populations du naseux de Nooksack aux niveaux antérieurs, compte tenu de l’ampleur et de la permanence de la perte et de la dégradation de l’habitat dans ses bassins hydrologiques originaux.

 

[14]           Aux paragraphes 19 à 24, M. Pearson décrit le processus ayant servi à la désignation de l’habitat essentiel du naseux de Nooksack :

[traduction]

Quand j’ai commencé à élaborer le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack, je me suis servi, pour la désignation de l’habitat essentiel, d’un modèle de programme de rétablissement exposé dans un guide de planification du rétablissement des espèces en péril, en date d’octobre 2004, produit par le Service canadien de la faune, un organisme d’Environnement Canada. Le modèle m’a été acheminé par M. Todd Hatfield, le coordonnateur de l’équipe de rétablissement. D’après ce modèle :

 

L’habitat essentiel est défini dans la LEP comme étant « L’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite,… ». L’habitat essentiel devrait être lié au but du rétablissement : si le but est la survie (maintien de la taille de la population et de sa répartition actuelles), alors l’habitat essentiel serait l’habitat actuellement occupé par l’espèce. Si le but du rétablissement est le plein rétablissement, alors l’habitat essentiel serait l’habitat dont l’espèce a besoin afin de maintenir une population autosuffisante et viable. Dans la plupart des cas, le but du rétablissement et l’habitat essentiel désigné se situeront quelque part dans le continuum entre la survie et le plein rétablissement.

 

* Il est à noter que l’habitat essentiel n’est pas officiellement désigné avant que le programme de rétablissement ou le plan d’action pour l’espèce qui contient la désignation de l’habitat essentiel n’ait été versé comme version définitive au Registre public de la LEP. Jusqu’à ce moment, la désignation de l’habitat essentiel devrait être précisée dans la mesure du possible, tout en étant considérée seulement comme une proposition (comme conseil au ministre compétent).

 

La proposition de désignation de l’habitat essentiel devrait être élaborée en tenant compte des objectifs de population et de répartition, particulièrement en ce qui a trait au nombre, à la répartition et à la connectivité des parcelles d’habitat. Lorsque les données sont incomplètes, la désignation de l’habitat essentiel devrait être faite en plusieurs étapes. Trouver toute l’information possible dans les secteurs qui ont été étudiés à fond et préparer un calendrier des études (voir ci‑après) pour les aires moins connues.

 

Je savais également que la LEP exige la désignation de l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible. Prenant cette exigence au pied de la lettre, j’ai tâché de désigner l’habitat essentiel à la fois en décrivant les qualités de l’habitat essentiel et en décrivant de mon mieux où il se situait; autrement dit, définir son emplacement et son envergure exacts sur une carte.

 

Pour illustrer le processus de désignation de l’habitat essentiel du naseux de Nooksack, j’ai exposé brièvement ci‑dessous la méthode choisie par l’équipe de rétablissement. Cette méthode était fondée sur :

 

1.       une estimation de la taille de la population viable minimale (PVM) de l’espèce, soit le nombre minimal d’adultes reproducteurs nécessaires pour qu’une population survive probablement dans la nature;

2.       une définition permettant la désignation d’un habitat convenable (l’habitat essentiel potentiel) sur le terrain;

3.       une estimation de l’aire de l’habitat convenable;

4.       une estimation de la densité de population moyenne du naseux de Nooksack dans l’habitat convenable.

 

1.       Estimation de la taille de la population viable minimale (PVM)

 

Il existe des méthodes statistiques pour l’évaluation de la PVM, mais elles misent sur des données démographiques détaillées dont on ne dispose pas relativement au naseux de Nooksack et à de nombreuses autres espèces en péril. Toutefois, il y a des estimations de haute qualité visant plus d’une centaine d’espèces dans les ouvrages scientifiques. Elles varient de 2 000 à 10 000 individus reproducteurs. L’équipe de rétablissement a conclu, en ce qui concerne le naseux de Nooksack, que la PVM se situe probablement entre 2 000 et 10 000 individus. L’équipe a également conclu qu’il fallait évaluer séparément la population du naseux de Nooksack dans chaque bassin hydrologique (ruisseau), puisque ces bassins sont géographiquement isolés les uns des autres. Cet isolement géographique signifie que les naseux de Nooksack ne peuvent pas se déplacer d’un bassin hydrologique à un autre, si bien que la population d’un bassin ne peut pas contribuer à la survie de la population dans un autre bassin. En fait, la population de chaque bassin doit être gérée comme si les autres populations n’existaient pas afin de maximiser les chances de survie du naseux de Nooksack au Canada. Par conséquent, il faut maintenir la population de chaque bassin à un niveau au moins aussi important que la PVM. Par conséquent, l’habitat essentiel de l’espèce dans son ensemble doit inclure tout l’habitat essentiel de chacune des populations.

 

2. Une définition permettant la désignation d’un habitat convenable (l’habitat essentiel potentiel).

Le naseux de Nooksack est associé à un habitat spécifique et sa répartition géographique est restreinte. On le retrouve à l’intérieur et près d’habitats des rapides (zones de courant peu profond et turbulent, sur un substrat rocheux). Cela est bien documenté par tous les chercheurs qui l’ont étudié. Le naseux de Nooksack est considéré comme une sous‑espèce du naseux de rapides (R. cataractae), lui aussi bien connu comme étant associé aux habitats des rapides. Le naseux de Nooksack fraie, se repose, fouille et hiberne dans les rapides; bon nombre d’entre eux semblent demeurer à l’intérieur de domaines vitaux très restreints, soit moins de 50 m de ruisseau. Dans le cadre de ma recherche, j’ai parcouru à pied ou en canot toute la longueur de tous les ruisseaux où on retrouve le naseux de Nooksack au Canada, et j’ai cartographié l’étendue de l’habitat des rapides pendant le régime en basses eaux. Suivant la coutume pour les relevés de ruisseau, j’ai divisé chaque ruisseau en plusieurs aires de répartition (segments de ruisseau comportant des habitats relativement homogènes). Pour les 72 aires de répartition relevées dans les affluents de la Nooksack (la population de la rivière Brunette n’était pas incluse puisqu’elle n’a été découverte qu’en 2005, après l’achèvement de la présente étude), j’ai mesuré la longueur des principaux types d’habitat (fosses, rapides, descentes), j’ai catégorisé les tailles des particules du substrat, la couverture disponible à l’intérieur du ruisseau et l’utilisation des terres dans une zone de 200 m du cours d’eau, et j’ai échantillonné la présence du naseux de Nooksack à l’aide de pièges à ménés. J’ai utilisé un modèle statistique (régression logistique) pour démontrer que l’étendue de l’habitat des rapides dans une aire de répartition est, de loin, le paramètre de prévision le plus précis de la présence du naseux de Nooksack. On le trouve dans moins de la moitié de toutes les aires de répartition contenant moins de 10 pour cent de rapides par longueur. Dans leur ensemble, ces données établissent un fondement scientifique solide pour la désignation d’un habitat convenable (ou un habitat essentiel potentiel).

 

3. Une estimation de l’aire de l’habitat convenable.

 

J’ai multiplié la longueur de l’habitat des rapides dans chaque aire de répartition par la largeur moyenne du cours d’eau dans cette aire de répartition afin d’estimer l’aire des rapides totale dans le bassin hydrologique.

 

4. Une estimation de la densité de population moyenne du naseux de Nooksack dans l’habitat convenable.

 

J’ai utilisé une estimation, fondée sur des données de terrain, de la densité du naseux de Nooksack dans un habitat de haute qualité de 1,9/m2.

 

En multipliant l’aire des rapides dans chaque bassin hydrologique par la densité de population dans l’habitat de haute qualité, on obtient une estimation de la dimension maximale réalisable de la population (capacité du milieu) pour le naseux de Nooksack, en supposant que l’ensemble de l’habitat est dans un état excellent. Nous avons alors comparé ce résultat avec notre estimation de la population viable minimale (PVM) de chaque bassin hydrologique, estimée à quelques milliers, probablement au plus 5 000 naseux de Nooksack.

 

La section rivulaire de l’habitat essentiel potentiel a été évaluée et cartographiée à l’aide d’une version adaptée de la méthodologie d’évaluation exposée dans le Riparian Area Regulation (règlement sur les zones riveraines) de la Colombie‑Britannique, décrite dans la pièce G, qui est compatible avec les besoins en habitat du naseux de Nooksack.

 

Si l’aire d’habitat convenable disponible dans un écopaysage est moins étendue que l’aire nécessaire à maintenir la PVM, il faut soit désigner l’ensemble de l’habitat disponible comme étant essentiel et rétablir des habitats additionnels de façon à disposer d’une superficie suffisante pour maintenir la PVM, soit déclarer que le rétablissement n’est pas réalisable. Il en est ainsi parce qu’on ne peut s’attendre à ce qu’une population de naseux de Nooksack inférieure à la PVM persiste dans la nature. Si l’aire de l’habitat convenable est largement supérieure à l’aire nécessaire au maintien de la PVM, il se peut qu’on n’ait pas besoin de l’ensemble de cette aire pour assurer la survie de l’espèce. Dans les deux cas, il faudra tout de même désigner à titre d’habitat essentiel une aire plus vaste que celle requise pour le maintien de la PVM du naseux de Nooksack, afin d’atteindre l’objectif de rétablissement du naseux de Nooksack en poussant la population vers le seuil de rétablissement, qui est plus élevé.

 

La dimension maximale réalisable de la population du naseux de Nooksack dans les affluents de la Nooksack, en présumant que tout l’habitat est de qualité excellente, variait de 3 000 à 5 700 poissons. Ainsi, l’équipe de rétablissement a conclu dans le programme de rétablissement (aux pages 21 et 22) que « la dimension maximale réalisable de la population est proche de la taille de la population viable minimale et [...] tous les habitats convenables devraient être [désignés comme étant essentiels] ». On croit que les populations réelles sont considérablement inférieures à cette estimation optimiste, en raison de la dégradation de la plupart de l’habitat. Dans le rapport de situation du COSEPAC sur le naseux de Nooksack (auquel j’ai fait renvoi aux paragraphes 8 et 13), j’ai estimé qu’il restait seulement 300 et 800 naseux de Nooksack dans les ruisseaux Fishtrap et Pepin, respectivement. Ces chiffres sont considérablement inférieurs à la PVM estimée pour le naseux de Nooksack.

 

En nous fondant sur ces quatre variables, nous avons été en mesure de déterminer, avec un degré de certitude raisonnable, l’ampleur et l’emplacement de l’habitat essentiel nécessaire à la survie du naseux de Nooksack. Parce que nous avons conclu, tel qu’il est signalé ci‑dessus, que « la dimension maximale réalisable de la population est proche de la taille de la population viable minimale et [...] tous les habitats convenables devraient être [désignés comme étant essentiels] », nous avons constaté qu’il fallait protéger l’habitat essentiel dans chacun des affluents de la Nooksack.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[15]           M. Pearson a remis la version préliminaire du programme de rétablissement à l’équipe de rétablissement en juin 2004, puis une deuxième version en janvier 2005. L’équipe de rétablissement a ensuite soumis le texte définitif de sa [traduction] « version préliminaire de programme de rétablissement » au MPO en juin 2005.

 

B.  La directive de Mme Webb

[16]           En ce qui concerne la version préliminaire du programme de rétablissement soumise par l’équipe de rétablissement, et en ce qui a trait au respect de l’alinéa 41(1)c) de la LEP, Mme Webb a pris la décision cruciale d’exiger la modification de toutes les versions préliminaires de programme de rétablissement en cours à l’époque dans la région du Pacifique du MPO, y compris la version préliminaire du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack; un an plus tard, le document modifié à été proposé à titre de projet de programme de rétablissement. La mesure prise par Mme Webb est décrite dans le courriel ci‑dessus, envoyé en son nom le 21 juin 2006 par Mme Liane O’Grady, une employée du MPO :

 

[traduction]

Objet :             Mise à jour concernant la désignation de l’habitat essentiel et l’élaboration des politiques

 

Bonjour,

 

Je voulais simplement vous faire part de quelques développements récents concernant la désignation de l’habitat essentiel dans les programmes de rétablissement et l’importance accrue accordée à l’élaboration de politiques se rapportant à la LEP à l’AC.

 

Désignation de l’habitat essentiel 

 

Une décision a récemment été prise au sujet de la désignation de l’habitat essentiel dans les programmes de rétablissement. Cette question nous cause des problèmes depuis longtemps déjà dans la région du Pacifique, tout comme dans d’autres régions (il y a des préoccupations similaires dans la région du Centre et de l’Arctique). Par conséquent, après des discussions approfondies au niveau régional, on a décidé de retirer l’habitat essentiel de tous les PR [programmes de rétablissement dans la région du Pacifique] en cours et pour un avenir prévisible, en attendant la mise en place d’une orientation stratégique claire. Voici les motifs de cette décision :

 

•     L’habitat essentiel désigné dans certains programmes de rétablissement n’a pas encore fait l’objet d’une analyse scientifique par des pairs. Mener à bien de telles analyses entraînerait de nouveaux délais (de 2 à 4 mois). De plus, le CEESP se penche encore sur la façon d’aller de l’avant pour ce qui est de l’analyse par des pairs des activités scientifiques liées à l’habitat dans le cadre de la LEP.

 

•     La Loi elle‑même et la politique provisoire actuelle indiquent clairement qu’il faut mener une consultation auprès de toute partie touchée par la désignation de l’habitat essentiel. En ce moment, il n’est pas clair que toutes les parties potentiellement touchées aient été consultées.

 

•     Ni la politique, ni les lignes directrices opérationnelles sur la désignation de l’habitat essentiel n’ont été finalisées, créant la possibilité d’un manque d’uniformité dans la désignation et la protection à l’intérieur de la région et au sein du Ministère.

 

•     Aucun examen juridique de cette politique n’a été réalisé. De plus, la demande d’avis juridique concernant les obligations juridiques du ministre associées aux programmes de rétablissement publiés n’est pas encore achevée.

 

•     Présentement, on prévoit recourir à la Loi sur les pêches et à la Loi sur les océans pour protéger l’habitat essentiel, mais la définition de l’habitat essentiel ne correspond pas à la définition de la LEP.

 

•     Nous aimerions adopter une démarche prudente en ce qui concerne la désignation de l’habitat essentiel, tout en reconnaissant que nous avons une obligation juridique d’effectuer ces désignations, étant donné qu’il se peut que nous soyons en train d’établir un précédent sans être certains des répercussions potentielles.

 

La région est consciente du fait qu’elle a déjà raté l’échéance pour la publication des programmes de rétablissement du naseux de Nooksack, de la physe d’eau chaude et de l’épaulard dans le registre de la LEP et croit qu’il ne serait pas avantageux de provoquer de nouveaux retards importants en attendant la résolution des problèmes signalés ci‑dessus. Je me rends compte que cela entraînera de la frustration chez certains employés qui ont travaillé de manière diligente au sein de nos équipes de rétablissement, mais il est préférable de bien réfléchir aux répercussions de la désignation de l’habitat essentiel et d’aller de l’avant d’une manière uniforme, conformément à l’orientation nationale. Nous continuerons de collaborer activement avec nos homologues à l’ACN pour assurer que les efforts en vue de mettre au point une politique sur l’habitat essentiel comportent une discussion et une orientation adéquate pour le personnel œuvrant au niveau opérationnel.

 

Élaboration d’un cadre stratégique 

 

À la suite de la récente évaluation du programme de la LEP, on a constaté qu’il était urgent que EC/MPO/APC achèvent les politiques et lignes directrices se rapportant à la LEP afin de faciliter la mise en œuvre efficace de Loi sur les espèces en péril. Ainsi, le comité de direction des SM et le comité des SMA de la LEP ont relevé un certain nombre de priorités stratégiques (inscriptions/retraits, analyse socioéconomique, désignation et protection de l’habitat essentiel, protection des espèces en péril, permis et accords, activités autorisées dans les documents de planification du rétablissement, faisabilité du rétablissement et consultations), qui ont maintenant été incorporées dans le cadre stratégique provisoire de la LEP, ci‑joint. Certains aimeraient procéder à des consultations externes au sujet de ce cadre stratégique, mais on n’a pas encore achevé un examen adéquat ni fini de recueillir des observations au niveau régional. J’espère soumettre à l’ACN une réponse régionale pour examen avant que le cadre stratégique ne soit finalisé et que les consultations externes ne soient amorcées. Si vous aimeriez soumettre des observations, veuillez me les transmettre d’ici le mercredi 5 juillet. (Mes excuses à ceux et celles qui ont pu recevoir ces renseignements plus d’une fois).

 

[Non souligné dans l’original.]

 

(Dossier du défendeur, volume 1, onglet 20, p. 16 et 17)

 

[17]           Les renseignements sur « l’habitat essentiel » que Mme Webb a décidé de retirer sont décrits comme suit par M. Pearson :

[traduction]

En septembre 2006, le projet de programme de rétablissement a été publié dans le registre de la LEP, mais certains renseignements sur l’habitat essentiel avaient été supprimés. Plus précisément, notre carte de l’habitat essentiel du naseux de Nooksack (figure 4, page 13 de la pièce D) et un tableau dressant la liste des activités susceptibles de causer la destruction de l’habitat essentiel (page 14) ont été supprimés, et la description de l’habitat essentiel a été modifiée de manière à supprimer les renvois à sa longueur et à sa définition précise. Par exemple, on a retiré la phrase « La longueur combinée de l’habitat essentiel proposé dans les trois bassins hydrologiques où le relevé a été effectué est de 21,3 km (sur les 36,4 km de ruisseaux ayant fait l’objet de relevés) ».

 

(Affidavit de M. Pearson, paragraphe 30)

 

C.  La recommandation à M. Murray

[18]           La note de service ci‑dessous, en date du 18 juillet 2007, a été envoyée par M. Pardeep Ahluwalia, directeur général du secrétariat de la LEP, à M. Larry Murray, pour son approbation à titre de délégué autorisé du ministre des Pêches et des Océans :

 

[traduction]

NOTE DE SERVICE AU SOUS‑MINISTRE

 

PUBLICATION DANS LE REGISTRE DE LA VERSION DÉFINITIVE DES PROGRAMMES DE RÉTABLISSEMENT DE LA LAMPROIE DU RUISSEAU MORRISON, DU NASEUX DE NOOKSACK ET DE SIX ESPÈCES D’ÉPINOCHE CONFORMÉMENT À LA LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL (LEP)

 

(pour votre signature)

 

Résumé

 

•           En vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP), un projet de programme de rétablissement doit d’abord être publié dans le registre de la LEP pour une période de 60 jours pendant laquelle le public peut soumettre des observations. Le ministre compétent dispose ensuite de 30 jours pour apporter des modifications à la lumière de ces observations (s’il y a lieu) et publie la version définitive du programme de rétablissement dans le registre.

 

•           Trois projets de programme de rétablissement – un pour la lamproie du ruisseau Morrison, un pour le naseux de Nooksack et un autre pour six espèces d’épinoche – ont été publiés dans le registre de la LEP le 20 septembre, le 26 septembre et le 10 octobre 2006, respectivement.

 

•           Aucun de ces programmes de rétablissement ne désigne un habitat essentiel. La David Suzuki Foundation et la Sierra Legal Defence ont envoyé des lettres exprimant leurs préoccupations au sujet des délais non respectés pour la publication des programmes de rétablissement, et notamment, au sujet de l’absence de désignation de l’habitat essentiel dans le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack.

 

•           Dans le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack et dans celui des espèces d’épinoche, la section consacrée à l’habitat essentiel a été modifiée de façon à signaler que le MPO procédera à une analyse par des pairs des recommandations sur l’habitat essentiel formulées par l’équipe de rétablissement, avant de désigner l’habitat essentiel dans un plan d’action de la LEP. Aucune modification importante n’a été apportée à la version définitive du programme de rétablissement de la lamproie du ruisseau Morrison.

 

•           Nous vous recommandons d’approuver la publication dans le registre des versions définitives des trois programmes de rétablissement. Les projets de ces programmes de rétablissement ont été approuvés par le SMA Sciences, le SMA Océans et Habitat, le SMA GPA et le SMA Politiques à l’automne de 2006, et aucune modification significative n’a été apportée aux versions définitives.

 

Contexte

 

•           La lamproie du ruisseau Morrison, le naseux de Nooksack et les paires d’espèces d’épinoche de Paxton Lake et du ruisseau Vananda figuraient à titre d’espèces en voie de disparition sur la Liste des espèces en péril (Annexe 1) de la Loi sur les espèces en péril (LEP) lorsque la Loi est entrée en vigueur en juin 2003. En vertu du paragraphe 42(2) de la LEP, le projet de programme de rétablissement pour ces espèces devait être publié dans le registre au plus tard en juin 2006.

 

•           La paire d’espèces d’épinoche de Enos Lake a été inscrite sur la liste à titre d’espèces en voie de disparition au sens de la LEP en janvier 2005, et un projet de programme de rétablissement pour ces espèces devait être publié en janvier 2008. On a préparé un seul programme de rétablissement portant sur les trois paires d’espèces d’épinoche (chaque paire comportant une forme benthique et une forme limnétique, soit un total de six espèces), en raison de la similitude de l’écologie et des menaces.

 

•           La période de 60 jours pendant laquelle le public peut soumettre des observations sur les projets de programme de rétablissement a pris fin le 19 novembre 2006 en ce qui concerne la lamproie du ruisseau Morrison, le 25 novembre en ce qui concerne le naseux de Nooksack, et le 9 décembre en ce qui concerne les paires d’espèces d’épinoche.

 

•           À la suite de cette période de 60 jours, le ministre compétent dispose de 30 jours pour examiner les observations reçues, apporter des modifications s’il y a lieu, et publier la version définitive du programme de rétablissement dans le registre de la LEP. Les programmes de rétablissement finaux de la lamproie du ruisseau Morrison, du naseux de Nooksack et des paires d’espèces d’épinoche devaient être publiés dans le registre le 19 décembre 2006, le 25 décembre 2006 et le 8 janvier 2007, respectivement.

 

Analyse / Observations du MPO

 

•           Aucune modification significative n’a été apportée à la version définitive des programmes de rétablissement de la lamproie du ruisseau Morrison, du naseux de Nooksack et des paires d’espèces d’épinoche. Une observation sur chacun des projets de programme de rétablissement a été acheminée par l’entremise du registre, et l’information a été incorporée au besoin, après des consultations avec la province de la Colombie‑Britannique et l’équipe de rétablissement.

 

•           Dans la version définitive des documents, on a modifié la déclaration de manière à affirmer que le ministère de l’Environnement de la Colombie‑Britannique a examiné les programmes de rétablissement et les considère comme un avis scientifique. Cette formulation exprime de manière plus explicite que les recommandations contenues dans ces documents n’imposent pas d’engagements à la province. La province a participé à l’élaboration des trois programmes de rétablissement conformément aux exigences de la LEP et de l’entente bilatérale.

 

•           L’habitat essentiel n’est désigné dans aucun de ces trois programmes de rétablissement. La David Suzuki Foundation et la Sierra Legal Defence ont fait part de leurs préoccupations au sujet de l’absence de désignation de l’habitat essentiel dans le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack en particulier. Étant donné la possibilité que cette question serait soulevée relativement aux programmes de rétablissement des autres espèces d’eau douce en C.‑B., il y avait lieu de tenir des discussions internes sur la façon de procéder, entraînant le report de la publication des versions définitives de ces programmes de rétablissement.

 

•           Plus précisément, le 15 décembre 2006, la David Suzuki Foundation a envoyé une lettre soulignant l’absence d’habitat essentiel dans le projet de programme de rétablissement pour le naseux de Nooksack. Le Ministère a répondu le 2 mai 2007, clarifiant que l’équipe de rétablissement avait mis de l’avant les caractéristiques clés de l’habitat essentiel de cette espèce et avait proposé une délimitation spatiale de cet habitat, mais que le MPO était d’avis que l’habitat essentiel devait faire l’objet d’un examen scientifique par des pairs avant son inclusion dans un programme de rétablissement de la LEP. Dans cette réponse, on a également indiqué que l’équipe de rétablissement appuie cette approche.

 

•           Ensuite, le 7 juin 2007, la Sierra Legal Defence a écrit au Ministère, signalant encore une fois que le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack était en retard d’un an et demandant au Ministère de confirmer que le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack inclurait la désignation de son habitat essentiel.

 

•           À la suite de discussions entre le MPO (Région du Pacifique), le secrétariat de la LEP et le ministère de la Justice, on a conclu qu’il est justifiable que le MPO fasse réaliser par des pairs un examen scientifique des recommandations formulées par l’équipe de rétablissement concernant la définition de l’habitat essentiel, avant que ce dernier ne soit désigné dans un programme de rétablissement. Il est justifié de recourir à ces examens par des pairs pour confirmer que la désignation de l’habitat essentiel est scientifiquement valable, ainsi que pour assurer la cohérence de ces désignations dans l’ensemble des programmes de rétablissement ministériels. Au MPO, les examens par des pairs sont un processus courant pour confirmer la validité des résultats scientifiques. La province de la C.‑B., qui copréside toutes les activités d’élaboration de programmes de rétablissement pour les espèces d’eau douce, appuie également cette approche.

 

•           Par conséquent, la section sur l’habitat essentiel du naseux de Nooksack et des paires d’espèces d’épinoche expose les caractéristiques générales de l’habitat qui seront prises en considération pour la désignation de l’habitat essentiel, mais ne comporte pas de délimitations géospatiales précises. L’équipe de rétablissement a élaboré des recommandations fondées sur des données biologiques pour la définition de l’habitat essentiel de ces espèces dans un document distinct, que le public peut consulter en soumettant une demande à l’équipe de rétablissement. Les recommandations seront soumises à un examen scientifique par des pairs externes, par l’entremise du Comité d’examen des évaluations scientifiques du Pacifique.

 

•           Il se peut que des groupes voués à la conservation soulèvent cette question auprès des médias lorsque le Programme de rétablissement du naseux de Nooksack sera publié sans désignation de l’habitat essentiel. Nous sommes donc en train de rédiger des infocapsules qui s’appliqueront également au programme de rétablissement des espèces d’épinoche.

 

•           À la demande de la Sierra Legal Defence, des représentants du Ministère vont organiser une réunion pour discuter des processus d’élaboration des programmes de rétablissement. Il faut s’attendre à ce que, dans le cadre de ce dialogue, ils nous fassent part de leurs préoccupations au sujet de l’habitat essentiel du naseux de Nooksack et des espèces d’épinoche. Durant cette discussion, il faudra expliquer de nouveau que nous comptons recourir à un examen par des pairs.

 

Prochaines étapes

 

•           Il est recommandé que vous approuviez la publication dans le registre de la LEP de la version définitive des programmes de rétablissement pour la lamproie du ruisseau Morrison, le naseux de Nooksack et les paires d’espèces d’épinoche de Paxton Lake, d’Enos Lake et du ruisseau Vananda.

 

 

Pardeep Ahluwalia

Directeur général

Secrétariat de la LEP

 

            ________________

J’approuve,

Larry Murray

 

 

Pièces jointes (3) :   1) Programme de rétablissement de la lamproie du ruisseau Morrison au Canada

2) Programme de rétablissement du naseux de Nooksack au Canada

3) Programme de rétablissement des paires d’espèces d’épinoche de Paxton Lake, d’Enos Lake et du ruisseau Vananda au Canada

                        [Non souligné dans l’original.]

                        (Pièce 1, déposée durant l’audition de la présente demande)

 

[19]           Ainsi, on a demandé à M. Murray d’approuver la directive de Mme Webb. Il semble qu’un avis juridique du ministère de la Justice concernant l’interprétation de l’alinéa 41(1)c) de la LEP ait joué un rôle dans l’élaboration de cette recommandation.

 

D. L’approbation de la recommandation par M. Murray

[20]           M. Murray a accepté la recommandation le 18 juillet 2007.

 

E. La version définitive du programme de rétablissement

[21]           M. Murray ayant approuvé la recommandation, la version définitive du programme de rétablissement renferme l’énoncé suivant au sujet de l’habitat essentiel du naseux de Nooksack :

 

L’HABITAT ESSENTIEL

 

Identification de l’habitat essentiel

L’Équipe de rétablissement a mis au point des recommandations fondées sur des données biologiques pour définir l’habitat essentiel du naseux de Nooksack. Ces recommandations ont été préparées et sont contenues dans un document séparé (Pearson 2007), qui est disponible au public sur demande, en s’adressant à l’Équipe de rétablissement. Le document proposé sur l’habitat essentiel sera présenté à une équipe de scientifiques externes pour examen par le biais du Comité d’examen des évaluations scientifiques du Pacifique. Une fois le processus d’examen terminé, une version définitive formera les recommandations biologiques pour la désignation de l’habitat essentiel. Pour se conformer à la politique actuelle sur les espèces en péril et au contenu du programme de rétablissement, les éléments de discussion sur l’habitat essentiel ci‑dessous se veulent des caractéristiques générales dont on devrait tenir compte lors de la désignation de l’habitat essentiel, mais sans faire des recommandations géospatiales précises.

 

Dans la Loi sur les espèces en péril (LEP), on définit l’habitat essentiel de cette façon : « L’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce. » [SARA A. 2(1)]. L’habitat essentiel du naseux de Nooksack a été défini mais non cartographié ou désigné dans le plan de rétablissement. Un certain nombre de propositions d’habitat essentiel suffisant pour assurer la survie et le rétablissement du naseux de Nooksack sera proposé dans le plan d’action, qui comprendra une analyse socio‑économique et une consultation des intervenants. L’Équipe du rétablissement a recueilli des données scientifiques qui serviront de base à une désignation officielle de l’habitat essentiel (Pearson 2007). D’autres études seront nécessaires pour confirmer la présence d’autres populations de naseux de Nooksack et de leurs habitats critiques et pour définir leurs menaces spécifiques. La désignation de l’habitat essentiel contribuera à cerner les objectifs de rétablissement et la gestion des activités qui ont une incidence sur l’espèce.

 

L’habitat essentiel du naseux de Nooksack consisterait vraisemblablement en des aires de répartition qui les ont vus naître et qui contiennent ou qui sont reconnues pour avoir, dans le passé, contenu plus de 10 pour cent de rapides par longueur. Il couvre tout l’habitat aquatique et les réserves rivulaires de la végétation naturelle sur les deux côtés, sur toute la longueur de l’aire de répartition. Les réserves rivulaires devraient être continues ayant des exigences quant aux largeurs fondées sur les évaluations de portée décrites par Pearson (2007 : en révision au CEESP).

 

Caractéristiques de l’habitat essentiel

Fondé sur les données physiques et biologiques disponibles, le possible habitat essentiel du naseux de Nooksack pourrait vraisemblablement inclure des éléments clés suivants :

 

À l’échelle de l’habitat

Les rapides et les points d’eau peu profonds (voir ci‑après) sont les habitats requis du naseux de Nooksack mais l’habitat essentiel devrait être défini à l’échelle de l’aire de répartition, une unité plus grande et plus naturelle au niveau de la morphologie d’une rivière, qui porte sur des centaines de mètres de longueur (Frissell et al. 1986). Il y a trois raisons d’adopter cette échelle. D’abord, l’échelle de l’aire de répartition correspond à la distribution des sous‑populations à l’intérieur des bassins hydrologiques (Pearson 2004a). Ensuite, les « unités du canal » de l’habitat essentiel (les rapides et les bassins peu profonds) forment des éléments dynamiques et se déplacent fréquemment dans les ruisseaux lors d’inondations. Dans le ruisseau Bertrand, cela se produit sur une base annuelle (Pearson pers. obs.). Dans ces circonstances, la protection efficace et la gestion de l’habitat essentiel doivent permettre les processus normaux du canal et, par conséquent, doivent se dérouler à une échelle spatiale plus grande qu’au niveau du canal. L’échelle de l’aire de répartition est le prochain niveau d’espace dans les classifications acceptées de l’habitat des ruisseaux (Frissell et al. 1986; Imhof et al. 1996). Finalement, l’échelle de l’aire de répartition correspond plus clairement à celle des propriétaires terriens dans ces bassins hydrologiques et, conséquemment, à la plupart des actions potentielles de rétablissement.

 

L’habitat des rapides

L’information accessible nous porte fortement à croire que les rapides sont essentiels à la pérennité de l’espèce. Le naseux de Nooksack se retrouve habituellement dans les rapides au‑dessus de substrat formé de gravier et de pavés libres où la vitesse du courant dépasse 0,25 m.s­­‑1. Il fraie près de la pointe supérieure des rapides (McPhail 1997) entre la fin avril et le début de juillet (Pearson 2004a) et il fouille la nuit à la recherche de nourriture que sont les insectes habitant les rapides (McPhail 1997). Le pourcentage de rapides dans une aire de répartition de ruisseaux est une bonne variable explicative de la présence de naseux. Les rapides qui sont isolés par de longs intermèdes d’étangs profonds sont rarement habités (Pearson 2004a). Un seuil de 10 % de rapides par longueur exclurait ces petits rapides isolés qui ont peu de valeur pour le naseux de Nooksack.

 

L’habitat en eau peu profonde

Les petits naseux de moins d’un an habitent les bassins peu profonds (10 à 20 cm) adjacents aux rapides où ils nagent au‑dessus d’un substrat formé de sable, de boue, de morceaux de feuille tout en se nourrissant de pupes chironomies et d’ostracodes (McPhail 1997). La perte de ces habitats se traduira rapidement par des répercussions sur la population.

 

L’habitat rivulaire

La végétation rivulaire devrait être incluse dans l’habitat essentiel dans la mesure où elle est utile pour protéger l’intégrité de l’habitat essentiel dans les ruisseaux. Les largeurs des ruisseaux varieront d’un site à l’autre et devraient être définies dans les évaluations à l’échelle de l’aire de distribution. Les réserves devraient être suffisantes pour contrôler l’apport des sédiments au ruisseau provenant de l’écoulement de surface, pour empêcher l’érosion excessive des bancs et servir de tampon pour les températures du ruisseau. Les zones de réserves déplaceront également des volumes importants de nitrate et de phosphore des eaux souterraines bien que leur efficacité soit entièrement fonction des conditions hydrogéologiques (Martin et al. 1999; Puckett 2004; Wigington et al. 2003). L’efficacité d’une réserve rivulaire pour empêcher des détritus (p. ex. sédiments, nutriants, toxines) d’entrer dans le ruisseau dépend en grande partie de sa continuité en plus de sa largeur (Weller et al. 1998). Par conséquent, les réserves rivulaires, dans les aires d’habitat essentiel, devraient être continues. Dans les espaces au grand vent, notamment les champs agricoles, la végétation des secteurs de réserve recueillera les insectes poussés par le vent (Whitaker et al. 2000). Cesdits insectes, provenant de la végétation rivulaire pour se retrouver dans l’eau, constituent une importante source alimentaire dans le courant principal des ruisseaux (Allan et al. 2003; Schlosser 1991).

 

Il est important de comprendre qu’en certaines circonstances, plus de 30 m de végétation rivulaire puissent être nécessaires pour atténuer complètement l’effet de la chaleur (Brown & Krygier 1970; Castelle et al. 1994; Lynch et al. 1984), de l’envasement (Davies & Nelson 1994; Kiffney et al. 2003; Moring 1982) et pour l’entretien à long terme de la morphologie du canal (Murphy et al. 1986; Murphy & Koski 1989). Au moins 10 m sont nécessaires pour maintenir les niveaux de contribution alimentaire terrestre similaires aux ruisseaux situés dans les forêts (Culp & Davies 1983). Les réserves aussi étroites que 5 m offrent une protection suffisante de l’érosion des bancs et du dépôt des sédiments provenant de l’écoulement de surface (Lee et al. 2003; McKergow et al. 2003).

 

L’omission de maintenir une réserve adéquate rivulaire comme une part de l’habitat essentiel pourrait sans doute avoir des répercussions sur les niveaux de population. Dans les habitats où le débit ou les sources souterraines sont insuffisants, l’absence d’ombre pourrait faire monter la température de l’eau à des niveaux dangereux. L’accroissement de l’érosion en raison d’une faible stabilité des bancs favorisera le dépôt de sédiments dans les rapides, nuisant au frai et à l’incubation, restreignant la disponibilité de la nourriture, et éliminant l’espace intercalaire dans les substrats à grains grossiers que le naseux occupe. L’accroissement de nutriants sera plus élevé dans les aires de répartition sans végétation rivulaire adéquate (Dhondt et al. 2002; Lee et al. 2003; Martin et al. 1999) et contribuera probablement à l’hypoxie par le biais du phénomène de l’eutrophisation. La radiation solaire sera également plus élevée dans les aires de répartition absente d’ombre fournie par la végétation rivulaire (Kiffney et al. 2003) et contribuera à l’eutrophisation. Les réserves de 30 m ou plus devraient être maintenues autour de l’habitat du naseux de Nooksack quand il est pratique de le faire pour fournir un niveau plus élevé de protection des impacts de l’utilisation des terres adjacentes.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

(Dossier de demande des demandeurs, p. 1237 à 1239)

 

III.       Le dépôt de la présente demande

A. La position des demandeurs sur l’interprétation des alinéas 41(1)c) et c.1) de la LEP

[22]           À l’appui de la présente demande, les avocats des demandeurs ont soumis une argumentation détaillée selon laquelle l’énoncé sur l’habitat essentiel du naseux de Nooksack dans le programme de rétablissement, qui découle de la décision de M. Murray, est contraire à la loi. Voici les éléments fondamentaux de cette argumentation :

[traduction]

1. Chacune des exigences exposées aux alinéas 41(1)a) à g) doit être respectée, y compris celles stipulées aux alinéas 41(1)c) et c.1);

 

2. Les alinéas 41(1)c) et c.1) imposent des obligations cumulatives;

 

3. Pour respecter l’exigence impérative établie à l’alinéa 41(1)c), c’est‑à‑dire désigner l’habitat essentiel d’une espèce, il faut énoncer les caractéristiques de l’habitat essentiel et fournir une délimitation géospatiale de son emplacement dans un programme de rétablissement, puisque c’est seulement après une telle désignation de l’habitat essentiel qu’un objectif important de la LEP peut être atteint : accorder une protection juridique à une espèce en péril;

 

4. L’exigence impérative établie à l’alinéa 41(1)c) de désigner l’habitat essentiel d’une espèce « dans la mesure du possible » signifie qu’il faut désigner la plus grande part possible de l’habitat essentiel, et de manière aussi détaillée que possible, même s’il n’est pas possible de désigner toutes les aires de l’habitat essentiel ou toutes ses caractéristiques;

 

5. L’exigence impérative établie à l’alinéa 41(1)c) de désigner l’habitat essentiel d’une espèce dans la mesure du possible « en se fondant sur la meilleure information accessible » signifie que la désignation de l’habitat essentiel d’une espèce dans la mesure du possible doit être fondée sur l’information dont on dispose actuellement, et non sur la meilleure information possible que l’on pourra acquérir à l’avenir.

 

B. La position initiale du ministre, en réponse à celle des demandeurs

[23]           La caractéristique la plus significative de la position initiale adoptée par le ministre dans le cadre de la présente demande est qu’il s’agissait manifestement d’une tentative d’éviter une décision sur l’interprétation correcte des alinéas 41(1)c) et c.1) de la LEP.

 

[24]           Dans des observations écrites soumises trois semaines avant le début de l’audition de la présente demande, le ministre a adopté la position que la décision visée par le contrôle judiciaire était erronée en droit, mais seulement sur la base de deux questions présentées comme suit :

[traduction]

Les questions de fond soulevées par la présente affaire sont les suivantes :

 

1. Le ministre avait‑il l’autorité, en vertu du paragraphe 41(1) de la LEP, de reporter la prise d’une décision sur le caractère adéquat de l’information accessible pour la désignation de l’habitat essentiel dans la mesure du possible en attendant l’achèvement de l’examen scientifique par des pairs du CEESP visant l’évaluation de l’habitat essentiel potentiel effectuée par M. Pearson?

 

2. A‑t‑on entravé l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre quant à la désignation de l’habitat essentiel en vertu du paragraphe 41(1)?

 

(Mémoire des faits et du droit du défendeur, paragraphe 28)

 

En ce qui touche ces deux questions, le ministre était prêt à convenir que les réponses sont « oui » et « non », respectivement. À la lumière de ces aveux de la part du ministre, les avocats de ce dernier ont soutenu qu’aucune des questions se rapportant à l’interprétation de la loi soulevées par les demandeurs dans leur argumentation ne découlait des faits de la présente affaire, si bien qu’elles sont dépourvues de pertinence et qu’il n’est pas nécessaire de les traiter pour rendre une décision sur la présente demande. Néanmoins, bien qu’ils aient mis de l’avant cet argument, les avocats du ministre ont présenté la déclaration ci‑dessous pour soutenir la position adoptée, dans les paragraphes qui suivent de leurs observations écrites :

[traduction]

31. La position du ministre à l’égard des questions soulevées dans la présente affaire est la suivante :

 

a. Le ministre compétent doit, dans un programme de rétablissement, désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible, dans les délais prévus aux articles 42 et 43 de la LEP. Lorsque l’information accessible est adéquate, le ministre compétent doit désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible. Dans la mesure où l’information accessible est inadéquate, le ministre compétent doit inclure dans le programme de rétablissement un calendrier des études en vue de la désignation de l’habitat essentiel;

 

b. En approuvant la publication du programme de rétablissement de 2007, le ministre était tenu de décider, en se fondant sur l’information accessible, dans quelle mesure il était possible de désigner l’habitat essentiel du naseux de Nooksack;

 

c. Étant donné qu’un examen scientifique par des pairs est un processus normal au MPO pour évaluer la validité de l’information scientifique et des conclusions présentées, le ministre a reporté la prise d’une décision sur le caractère adéquat de l’information accessible devant servir à désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible, en attendant les résultats d’un examen scientifique par des pairs des recommandations formulées par l’équipe de rétablissement du naseux de Nooksack;

 

d. Dans la mesure où un examen scientifique par des pairs était requis pour permettre au ministre de décider si l’information accessible était adéquate pour désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible, il aurait fallu que cet examen soit achevé avant l’expiration des délais prévus aux articles 42 et 43 de la LEP afin que le ministre puisse décider si l’information accessible était adéquate en vue de la désignation de l’habitat essentiel dans la mesure du possible;

 

e. Le ministre n’avait pas, dans les circonstances de l’affaire du naseux de Nooksack, l’autorité de reporter la désignation de l’habitat essentiel en attendant un examen scientifique par des pairs après l’expiration des délais prévus aux articles 42 et 43 de la LEP;

 

f. La directive de juin 2006 visant le retrait de l’habitat essentiel de tous les programmes de rétablissement était injustifié et entravait l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre.

 

32. Les positions exposées ci‑dessus constituent une réponse exhaustive aux questions découlant de la présente affaire, notamment aux observations des demandeurs au sujet de la nature impérative de l’alinéa 41(1)c) et de l’interaction entre les alinéas 41(1)c) et c.1).

 

33. Aucune question, parmi les autres questions se rapportant à l’interprétation de la loi mises de l’avant par les demandeurs, ne découle des faits de la présente affaire. Par conséquent, elles sont dépourvues de pertinence et il n’est pas nécessaire que la Cour les examine pour rendre une décision sur la présente demande de contrôle judiciaire.

 

34. Plus précisément, la question de savoir si, en vertu de l’alinéa 41(1)c), le ministre compétent est tenu ou non de définir les limites géospatiales de l’habitat essentiel n’est pas en cause dans la présente affaire. Ce qui est en cause, c’est simplement la décision du ministre de reporter la décision sur le caractère adéquat de l’information accessible, y compris les cartes décrivant l’habitat essentiel potentiel, jusqu’à ce que cette information ait fait l’objet d’un examen scientifique par des pairs. Tel qu’il est indiqué dans le programme de rétablissement de 2007 :

 

L’Équipe de rétablissement a mis au point des recommandations fondées sur des données biologiques pour définir l’habitat essentiel du naseux de Nooksack. Ces recommandations ont été préparées et sont contenues dans un document séparé (Pearson 2007), qui est disponible au public sur demande, en s’adressant à l’Équipe de rétablissement. Le document proposé sur l’habitat essentiel sera présenté à une équipe de scientifiques externes pour examen par le biais du Comité d’examen des évaluations scientifiques du Pacifique. Une fois le processus d’examen terminé, une version définitive formera les recommandations biologiques pour la désignation de l’habitat essentiel.

 

(Affidavit de Mme Webb, pièce J, p. 12, dossier du défendeur, onglet 1, volume 1, p. 142)

 

35. Le ministre ne prétend pas que la description des caractéristiques générales de l’habitat dans la version définitive du programme de rétablissement correspondait à une désignation de l’habitat essentiel. Par conséquent, contrairement aux observations des demandeurs, il n’y a pas eu d’ « interprétation erronée » de l’alinéa 41(1)c) de la part du MPO concernant la manière dont il faut désigner l’habitat essentiel dans un programme de rétablissement. Plus exactement, il n’y a pas de désignation de l’habitat essentiel du tout parce qu’aucune décision n’avait été prise concernant la possibilité de désigner une partie de l’habitat essentiel.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

(Mémoire des faits et du droit du défendeur, paragraphes 31 à 35)

 

 

La déclaration au paragraphe 31 est manifestement une interprétation des alinéas 41(1)c) et c.1). Toutefois, au contraire, durant la présentation des observations orales, les avocats du ministre ont expliqué le but de cette déclaration comme suit :

[traduction]

Nous l’avons faite vraiment dans le but d’illustrer ou d’admettre la possibilité qu’il faut respecter les deux obligations dans la même décision. C’est tout ce dont il s’agit, et c’est l’unique but pour lequel cet aveu particulier est présenté au paragraphe a). Ce n’est pas dans le but de tenter en fait d’avancer une certaine interprétation de la portée de l’obligation. Ce n’est pas ce que nous cherchons à faire avec cette déclaration.

 

(Transcription, volume 3, p. 149)

 

[25]           En ce qui a trait à l’observation faite au paragraphe 35, au cours des plaidoiries, les avocats du ministre ont avancé sans corroboration que M. Murray avait approuvé la recommandation sans porter son attention sur l’interprétation des alinéas 41(1)c) et c.1). Je conclus qu’il n’y a pas de motif d’accepter cette observation. Il n’y a aucun élément de preuve au dossier se rapportant à l’état d’esprit de M. Murray au moment où il a approuvé la recommandation présentée; M. Murray n’a pas déposé d’affidavit. Par conséquent, la recommandation, ainsi que son approbation, dont fait état le dossier, se passe fort bien de commentaire.

 

C. Occasion accordée au ministre de présenter des observations sur l’interprétation

[26]           Étant donné que les alinéas 41(1)c) et c.1) ne renferment aucun élément qui appuie de manière évidente la position juridique du ministre selon laquelle [traduction] « lorsque l’information accessible est adéquate, le ministre compétent doit désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible », et compte tenu de la nature et du contenu des autres caractéristiques de l’argumentation mises de l’avant par les avocats du ministre, j’ai formulé la directive suivante à l’audience :

[traduction]

Relativement à la décision du ministre du 18 juillet 2007, faisant présentement l’objet d’un contrôle judiciaire, les avocats des demandeurs ont présenté une analyse, contextuelle et téléologique très détaillée de la Loi sur les espèces en péril (LEP), afin de faire valoir que, pour plusieurs motifs, la décision est contraire à la loi. Cette démarche est considérée comme étant nécessaire parce que la Cour n’a pas encore interprété cette loi.

 

Sans donner de réponse aux arguments de droit mis de l’avant par les demandeurs, les avocats du défendeur admettent qu’il y a eu une erreur de droit dans la prise de la décision, mais restreignent la nature de l’erreur. Les demandeurs n’admettent pas que cette argumentation limitée soit fondée en droit ou qu’elle puisse constituer une conclusion équitable à leur demande, et par conséquent ils ne consentent pas à la clôture de la présente demande sur la base du consentement du défendeur.

 

Les avocats du défendeur soutiennent que, compte tenu de l’aveu de l’erreur, il n’est pas pertinent de rendre une décision contextuelle et téléologique sur l’interprétation correcte de la LEP. Cet argument est étayé par la position du ministre, telle qu’exposée au paragraphe 31 du mémoire des faits et du droit du défendeur. Il s’agit d’une déclaration qui est une interprétation des articles 41(1)c) et c.1) de la LEP – ce qui, de l’avis des avocats des demandeurs, soulève un litige concernant l’interprétation correcte de la loi.

 

Je conviens qu’un litige concernant l’interprétation correcte de la loi est au cœur de la décision faisant l’objet du contrôle judiciaire. Je rejette l’argument des avocats du défendeur selon lequel il n’est pas pertinent de donner une interprétation contextuelle et téléologique de la LEP. À mon avis, il n’est pas possible de rendre une décision sur la présente demande en se fondant uniquement sur le consentement, particulièrement à la lumière de l’objection des avocats des demandeurs, parce que seule une interprétation appropriée et correcte de la LEP peut fonder la conclusion qu’il y a eu erreur de droit. L’aveu des défendeurs n’est qu’une position adoptée; il ne s’agit pas d’une conclusion de droit. Seule la Cour peut rendre une conclusion, et il est juste et équitable que cela s’accomplisse de la manière habituelle, qui consiste à interpréter la loi d’abord, puis à examiner la conduite du ministre pour déterminer si elle est contraire à la loi et, le cas échéant, de quelle(s) manière(s).

 

Par conséquent, je conclus qu’il faut accorder aux avocats du défendeur la chance de présenter une argumentation détaillée concernant l’interprétation correcte de la LEP en réponse à l’argumentation soumise par les avocats des demandeurs.

 

(Transcription, volume 3, p. 152 à 154)

 

D. La réponse du ministre

[27]           Le ministre a décidé d’accepter l’invitation de soumettre une argumentation d’interprétation de la loi, dont je traiterai dans l’analyse qui suit.

 

[28]           Cependant, tout en faisant valoir cette argumentation, le ministre continue de faire valoir la position selon laquelle M. Murray n’a pas pris de décision en vertu des alinéas 41(1)c) ou c.1) de la LEP. Bien qu’il soit clair à la lumière du dossier que le ministre n’a pas pris les décisions requises par les dispositions, ce dernier a bel et bien décidé de ne pas prendre ces décisions. Cette décision reflétait la conviction qu’il était justifiable de reporter la prise des décisions requises pour des motifs fondés sur la politique ministérielle. La position des demandeurs à l’égard de cette manière de procéder est qu’elle est non seulement injustifiée, mais aussi contraire à la loi. Je souscris à cet argument.

 

[29]           Je conviens avec les demandeurs que le processus décisionnel mis en application par Mme Webb et M. Murray rend nécessaire une interprétation définitive de l’article 41 de la LEP afin de réfuter toute prétention que la politique ministérielle puisse avoir préséance sur l’intention du Parlement telle qu’exprimée dans la LEP. À vrai dire, la présente demande met clairement en lumière l’impératif constitutionnel de la primauté du droit.

 

[30]           À la suite des présentes pressions exercées par les demandeurs en vue de contraindre le ministre et ses représentants au MPO à reconnaître et à respecter leur responsabilité aux termes de la LEP, pressions qui ont initialement été accueillies avec de la résistance, puis en fin de compte avec de la bonne volonté, l’interprétation des alinéas 41(1)c) et c.1) s’avère un peu plus facile. Il y a entente concernant des éléments clés, mais il existe des divergences d’avis sur d’autres. L’analyse qui suit met en lumière ces points d’entente et de désaccord.

 

IV.       L’interprétation correcte des alinéas 41 (1)c) et c.1)

            A. Points d’entente

                        1. La norme de l’examen est celle de la décision correcte

[31]           Dans le cadre de la présente demande, les demandeurs contestent le pouvoir du ministre de modifier les modalités de la LEP sur la base d’une politique gouvernementale. Étant donné que le pouvoir est une question de droit, il est convenu que la norme devant servir à examiner la décision du ministre est celle de la décision correcte (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190).

 

2. L’interprétation de la LEP exige une analyse textuelle, contextuelle et téléologique

[32]           L’interprétation correcte de la LEP doit faire appel à la méthode moderne d’interprétation des lois. Il est convenu que le critère à mettre en application est celui exposé par la Cour suprême dans l’arrêt Hypothèques Trustco Canada. c. Canada, [2005] 2 R.C.S. 601, au paragraphe 10 :

Il est depuis longtemps établi en matière d’interprétation des lois qu’» il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. L’interprétation d’une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s’harmonise avec la Loi dans son ensemble. Lorsque le libellé d’une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation. Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d’un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L’incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l’objet sur le processus d’interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d’une loi comme formant un tout harmonieux.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

3.  L’article 38 est une codification du principe de précaution

[33]           Les objectifs de la LEP sont exposés dans son préambule :

Attendu :

que le patrimoine naturel du Canada fait partie intégrante de notre identité nationale et de notre histoire;

que les espèces sauvages, sous toutes leurs formes, ont leur valeur intrinsèque et sont appréciées des Canadiens pour des raisons esthétiques, culturelles, spirituelles, récréatives, éducatives, historiques, économiques, médicales, écologiques et scientifiques;

que les espèces sauvages et les écosystèmes du Canada font aussi partie du patrimoine mondial et que le gouvernement du Canada a ratifié la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique;

que l’attribution d’une protection juridique aux espèces en péril complétera les textes législatifs existants et permettra au Canada de respecter une partie des engagements qu’il a pris aux termes de cette convention;

que le gouvernement du Canada s’est engagé à conserver la diversité biologique et à respecter le principe voulant que, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à une espèce sauvage, le manque de certitude scientifique ne soit pas prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance;

que la conservation des espèces sauvages au Canada est une responsabilité partagée par les gouvernements du pays et que la collaboration entre eux est importante en vue d’établir des lois et des programmes complémentaires pouvant assurer la protection et le rétablissement des espèces en péril au Canada;

que la coopération entre les gouvernements du pays pour le maintien et le renforcement des normes nationales de conservation de l’environnement est importante et que le gouvernement du Canada est attaché aux principes énoncés dans les accords intergouvernementaux en matière de conservation de l’environnement;

que le Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril a la responsabilité d’établir les orientations pour l’ensemble du pays en matière de protection des espèces en péril, notamment en ce qui concerne les activités du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada et l’élaboration et la coordination des mesures de protection et de rétablissement de ces espèces;

qu’est essentiel le rôle que peuvent jouer les peuples autochtones du Canada et les conseils de gestion des ressources fauniques établis en application d’accords sur des revendications territoriales dans la conservation des espèces sauvages dans ce pays;

que tous les Canadiens ont un rôle à jouer dans la conservation des espèces sauvages, notamment en ce qui a trait à la prévention de leur disparition du pays ou de la planète;

que, dans certains cas, les frais de la conservation des espèces en péril devraient être partagés;

que les efforts de conservation des Canadiens et des collectivités devraient être encouragés et appuyés;

que les activités d’intendance visant la conservation des espèces sauvages et de leur habitat devraient bénéficier de l’appui voulu pour éviter que celles‑ci deviennent des espèces en péril;

que la connaissance et les intérêts — notamment socioéconomiques — des collectivités devraient être pris en compte lors de l’élaboration et de la mise en oeuvre des mesures de rétablissement;

que les connaissances traditionnelles des peuples autochtones du Canada devraient être prises en compte pour découvrir quelles espèces sauvages peuvent être en péril et pour l’élaboration et la mise en oeuvre des mesures de rétablissement;

que la connaissance des espèces sauvages et des écosystèmes est essentielle à leur conservation;

que l’habitat des espèces en péril est important pour leur conservation;

que les aires protégées au Canada, plus particulièrement les parcs nationaux, sont importants pour la protection et le rétablissement des espèces en péril.

[Non souligné dans l’original.]

Recognizing that

Canada’s natural heritage is an integral part of our national identity and history,

wildlife, in all its forms, has value in and of itself and is valued by Canadians for aesthetic, cultural, spiritual, recreational, educational, historical, economic, medical, ecological and scientific reasons,


Canadian wildlife species and ecosystems are also part of the world’s heritage and the Government of Canada has ratified the United Nations Convention on the Conservation of Biological Diversity,

providing legal protection for species at risk will complement existing legislation and will, in part, meet Canada’s commitments under that Convention,


the Government of Canada is committed to conserving biological diversity and to the principle that, if there are threats of serious or irreversible damage to a wildlife species, cost‑effective measures to prevent the reduction or loss of the species should not be postponed for a lack of full scientific certainty,

responsibility for the conservation of wildlife in Canada is shared among the governments in this country and that it is important for them to work cooperatively to pursue the establishment of complementary legislation and programs for the protection and recovery of species at risk in Canada,

it is important that there be cooperation between the governments in this country to maintain and strengthen national standards of environmental conservation and that the Government of Canada is committed to the principles set out in intergovernmental agreements respecting environmental conservation,

the Canadian Endangered Species Conservation Council is to provide national leadership for the protection of species at risk, including the provision of general direction to the Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada in respect of that Committee’s activities and general directions in respect of the development, coordination and implementation of recovery efforts,

the roles of the aboriginal peoples of Canada and of wildlife management boards established under land claims agreements in the conservation of wildlife in this country are essential,



all Canadians have a role to play in the conservation of wildlife in this country, including the prevention of wildlife species from becoming extirpated or extinct,

there will be circumstances under which the cost of conserving species at risk should be shared,

the conservation efforts of individual Canadians and communities should be encouraged and supported,

stewardship activities contributing to the conservation of wildlife species and their habitat should be supported to prevent species from becoming at risk,

community knowledge and interests, including socio‑economic interests, should be considered in developing and implementing recovery measures,


the traditional knowledge of the aboriginal peoples of Canada should be considered in the assessment of which species may be at risk and in developing and implementing recovery measures,


knowledge of wildlife species and ecosystems is critical to their conservation,

the habitat of species at risk is key to their conservation, and

Canada’s protected areas, especially national parks, are vital to the protection and recovery of species at risk,


[Emphasis added]

 

[34]           Le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique ( la Convention) et, par conséquent, s’est engagé à mettre en application ses principes. Une caractéristique importante de la Convention est le « principe de précaution », que la Cour suprême du Canada énonce comme suit :

Un développement durable implique des politiques fondées sur le principe de précaution. Les mesures adoptées doivent anticiper, prévenir et combattre les causes de la détérioration de l’environnement. Lorsque des dommages graves ou irréversibles risquent d’être infligés, l’absence d’une totale certitude scientifique ne devrait pas servir de prétexte pour ajourner l’adoption de mesures destinées à prévenir la détérioration de l’environnement.

 

(114957 Canada Ltée (Spraytech, Société d’arrosage) c. Hudson (Ville), [2001] 2 R.C.S. 241, au paragraphe 31)

 

 

Il est convenu que l’article 38 de la LEP est une codification du principe de précaution qui, tel qu’il est déclaré dans le préambule, en partie, permet au Canada de respecter ses engagements aux termes de la Convention :

 

Engagements applicables

 38. Pour l’élaboration d’un programme de rétablissement, d’un plan d’action ou d’un plan de gestion, le ministre compétent tient compte de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe selon lequel, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce sauvage inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance.

[Non souligné dans l’original.]

Commitments to be considered

 

38. In preparing a recovery strategy, action plan or management plan, the competent minister must consider the commitment of the Government of Canada to conserving biological diversity and to the principle that, if there are threats of serious or irreversible damage to the listed wildlife species, cost‑effective measures to prevent the reduction or loss of the species should not be postponed for a lack of full scientific certainty.



[Emphasis added]

 

[35]           Par conséquent, l’article 38 est un principe d’interprétation obligatoire qui s’applique durant la préparation des programmes de rétablissement. Toutefois, à cet égard, les avocats du ministre soulignent deux facteurs : la codification de l’article 38 met en place, relativement à l’engagement du Canada, le facteur de la prise de mesures « efficientes »; et, comme il est signalé dans le préambule, la connaissance et les intérêts – notamment « socioéconomiques » – des   collectivités devraient être pris en compte « lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des mesures de rétablissement ». Il est important de clarifier le rôle précis que joue chacun de ces facteurs dans le processus des programmes de rétablissement qui consiste, premièrement, à préparer un programme de rétablissement et, deuxièmement, à le mettre en œuvre.

 

[36]           Le recours à des « mesures efficientes » est compréhensible dans une situation où les ressources économiques sont limitées, mais, toutefois, la formulation de la disposition est précise et sans équivoque : s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce sauvage inscrite, « le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance ».

 

[37]           La formulation du préambule est elle aussi précise et sans équivoque : « l’élaboration et la mise en œuvre des mesures de rétablissement » est une action se rapportant à un programme de rétablissement. Une fois qu’on a préparé le programme de rétablissement, il faut élaborer et mettre en œuvre un plan d’action comportant des mesures de rétablissement;  l’alinéa 49(1)e) de la LEP stipule clairement que c’est seulement à cette étape du processus que les « répercussions socioéconomiques » sont prises en considération.

 

[38]           En vue de clarifier leur position concernant l’application de la Convention, les demandeurs ont avancé l’argument suivant :

[traduction]

La Convention est un traité ayant force obligatoire et l’adoption de la LEP visait, en partie, à donner suite aux engagements du Canada aux termes de ce traité. De plus, la Convention fait partie du « contexte global » qu’il faut prendre en considération dans l’interprétation de la LEP. Par conséquent, il faut non seulement interpréter la LEP de manière à se conformer aux valeurs et aux principes de la Convention, mais la Cour doit aussi éviter toute interprétation qui pourrait faire en sorte que le Canada manque à ses obligations aux termes de la Convention.

 

(Réponse additionnelle des demandeurs, paragraphe 25)

 

[39]           Étant donné que le ministre ne conteste pas cet argument, je conclus qu’il est fondé en droit.

 

4.  Les dispositions de l’article 41 de la LEP sont obligatoires

[40]           Il est convenu que les dispositions de l’article 41 de la LEP sont obligatoires. Récemment, le juge Zinn l’a affirmé très clairement dans la décision Alberta Wilderness Association c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2009 CF 710, [2009] A.C.F. no 876, au paragraphe 25 :

Le ministre ne dispose pas du pouvoir discrétionnaire de désigner l’habitat essentiel en vertu de la LEP. Selon l’alinéa 41(1)c), le ministre doit désigner, dans un programme de rétablissement, tout l’habitat essentiel qu’il peut désigner à ce moment‑là, même s’il ne peut pas désigner l’ensemble de cet habitat, et il est tenu de le faire en se fondant sur la meilleure information alors accessible. Je fais remarquer que cette exigence traduit le principe de prudence selon lequel, « [l]orsque des dommages graves ou irréversibles risquent d’être infligés, l’absence d’une totale certitude scientifique ne devrait pas servir de prétexte pour ajourner l’adoption de mesures destinées à prévenir la détérioration de l’environnement », tel que l’a dit la Cour suprême du Canada, citant la Déclaration ministérielle de Bergen sur le développement durable dans 114957 Canada Ltée (Spraytech, Société d’arrosage) c. Hudson (Ville), 2001 CSC 40.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Par conséquent, souscrivant à l’argumentation des demandeurs, je conclus que la directive de Mme Webb et l’approbation de sa directive par M. Murray sont des actions contraires à la loi. Le résultat de ces actions est que le ministre a omis de respecter les exigences impératives de l’alinéa 41(1)c) dans la version définitive du le programme de rétablissement. Leur conduite dans son ensemble est fondamentalement incompatible avec le principe de précaution codifié dans la LEP.

 

[41]           Mme Webb a donné six raisons pour ordonner la suppression de l’information concernant l’emplacement de l’habitat essentiel désigné par M. Pearson. Comme il a été susmentionné, outre les prétextes liés à l’examen par les pairs et aux politiques évoqués pour justifier le non‑respect de l’échéance ou des exigences en matière de contenu, il importe de souligner la déclaration suivante :

Nous aimerions adopter une démarche prudente en ce qui concerne la désignation de l’habitat essentiel, tout en reconnaissant que nous avons l’obligation juridique d’effectuer ces désignations, étant donné qu’il se peut que nous soyons en train d’établir un précédent sans être certains des répercussions potentielles.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Une question qu’il convient de poser quant à cette déclaration est : les « répercussions potentielles » sur quoi ou sur qui? Manifestement, il n’est pas question ici des répercussions sur le naseux de Nooksack. Les demandeurs ont donné à entendre que la directive de Mme Webb et la décision de M. Murray ont été influencées par des considérations politiques et socioéconomiques. Bien que j’estime que cette prétention n’est pas directement pertinente en ce qui concerne la question à trancher, il est clair qu’un ministre compétent ne peut faire valoir aucune considération politique ou socioéconomique lorsqu’il s’agit de se conformer à l’intention exprimée par le législateur dans les dispositions obligatoires énoncées au paragraphe 41(1) de la LEP.

 

[42]           En ce qui a trait à l’obligation imposée au ministre de désigner l’habitat essentiel dans la mesure du possible en se fondant sur la meilleure information accessible, à l’étape du programme de rétablissement, sans l’ingérence de considérations politiques ou socioéconomiques, comme l’ont soutenu les demandeurs, j’estime que la déclaration suivante, précitée, qui figure dans la version définitive du programme de rétablissement, est erronée en droit :

L’habitat essentiel du naseux de Nooksack a été défini mais non cartographié ou désigné dans le plan de rétablissement. Un certain nombre de propositions d’habitat essentiel suffisant pour assurer la survie et le rétablissement du naseux de Nooksack sera proposé dans le plan d’action, qui comprendra une analyse socio‑économique et une consultation des intervenants.

 

 

5. Les alinéas 41(1)c) et c.1) imposent des obligations cumulatives fondées sur la meilleure information possible

[43]           En ce qui concerne le devoir du ministre compétent de tirer des conclusions en vertu de l’alinéa 41(1)c), il est entendu que l’expression « meilleure information accessible » comprend toutes les connaissances scientifiques, communautaires et traditionnelles autochtones pertinentes et suppose une obligation de la part du ministre compétent de recueillir, d’examiner et d’évaluer l’information accessible lors de la préparation d’un programme de rétablissement et de ne pas rejeter, omettre de tenir compte ou supprimer de l’information digne de foi sur l’habitat essentiel d’une espèce. Par ailleurs, si le ministre compétent estime que l’information ainsi évaluée est insuffisante, il est entendu que le programme de rétablissement doit comprendre un calendrier d’études.

 

[44]           Il est aussi entendu que les conclusions tirées par un ministre compétent en vertu des alinéas 41(1)c) et c.1) peuvent faire l’objet d’un contrôle judiciaire selon la norme de la décision raisonnable. Ce principe est d’ailleurs confirmé par la décision Alberta Wilderness Assn., précitée, rendue par le juge Zinn.

 

B.  Le principal point de désaccord : la définition d’« habitat » et d’« habitat essentiel »

[45]           En définitive, après examen du processus décisionnel et de la contestation qui font l’objet de la présente demande, la principale question en litige est la suivante : quels sont les éléments constitutifs que doit nécessairement comporter la désignation de l’habitat essentiel d’une espèce? La réponse à cette question réside dans une interprétation juste de la définition d’ « habitat », puisque la définition d’ « habitat essentiel » en dépend. Les définitions énoncées à l’article 2 de la LEP valent la peine d’être reproduites :

« habitat »

a) S’agissant d’une espèce aquatique, les frayères, aires d’alevinage, de croissance et d’alimentation et routes migratoires dont sa survie dépend, directement ou indirectement, ou aires où elle s’est déjà trouvée et où il est possible de la réintroduire;

 

 

 

 

 

[…]

 

« habitat essentiel » L’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce.

"habitat" means

(b)   in respect of aquatic species, spawning grounds and nursery, rearing, food supply, migration and any other areas on which aquatic species depend directly or indirectly in order to carry out their life processes, or areas where aquatic species formerly occurred and have the potential to be reintroduced; and



"critical habitat" means the habitat that is necessary for the survival or recovery of a listed wildlife species and that is identified as the species’ critical habitat in the recovery strategy or in an action plan for the species.

 

[46]           Les demandeurs soutiennent que les éléments constitutifs de l’habitat d’une espèce et, par conséquent, de son habitat essentiel, sont un emplacement qu’il est possible de déterminer et les caractéristiques de cet emplacement qui respectent les critères de la définition dans la loi de ces deux expressions. Au moment du dépôt de la présente demande, il ne semblait pas y avoir de différend quant à l’emplacement et aux caractéristiques en tant qu’éléments constitutifs. Dans la version définitive du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack, il est clairement précisé qu’en ce qui concerne la désignation de l’habitat essentiel, l’emplacement et les caractéristiques sont inextricablement liés. La suppression, par le ministre, de l’élément constitutif « emplacement » de la version définitive du programme de rétablissement constitue la pomme de discorde dans la présente demande.

 

[47]           Il importe de souligner qu’en ce qui concerne la préparation de la version préliminaire du programme de rétablissement, la pratique consistant à désigner d’une part l’emplacement et d’autre part les caractéristiques était conforme aux énoncés de politiques du gouvernement canadien et que, de fait, les énoncés de politiques ont également été respectés dans la version définitive du programme de rétablissement, si ce n’est de la suppression de l’emplacement au motif qu’un examen par les pairs des constatations de M. Pearson était nécessaire. Une source principale d’énoncés de politiques figurant au dossier de la présente demande est un document daté du 10 mars 2005 intitulé Directives sur la mise en œuvre de la Loi sur les espèces en péril : Ébauche : Lignes directrices techniques pour désigner l’habitat essentiel (les Lignes directrices), qui a pour objet de fournir des directives aux praticiens, tels que M. Pearson, sur la désignation de l’habitat essentiel. Il se trouve que la diffusion de ce document a coïncidé avec la présentation de la version préliminaire du programme de rétablissement.

 

[48]           Dans les Lignes directrices, sous l’intitulé « Énoncé d’intention et de but », on retrouve l’explication suivante :

Les présentes lignes directrices constituent un résumé des directives techniques pour la désignation de l’habitat essentiel au titre de la LEP. Elles visent à favoriser : i) une compréhension partagée des exigences stratégiques pour la désignation; ii) un cadre méthodologique cohérent pour la désignation et iii) la préparation de propositions sur l’habitat essentiel défendables biologiquement et légalement.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

Sous l’intitulé « Les résultats attendus », des attentes sont formulées comme suit :

Les conseils sur la désignation de l’habitat essentiel doivent être composés de plusieurs éléments fondamentaux et les spécialistes du rétablissement doivent les connaître avant de commencer le processus de désignation. Le Document de discussion : l’habitat essentiel décrit les normes minimales pour communiquer l’habitat essentiel proposé comme suit :

 

1.          LA DESCRIPTION de l’habitat ou des habitats essentiels de l’espèce qui peut comprendre des éléments tels que : la description des communautés naturelles appropriées; les genres d’habitats; les caractéristiques de l’habitat; les quantités nécessaires et suffisantes (p. ex. hectares) (voir la section 5.0 Quelle superficie d’habitat essentiel suffit? Pour obtenir de plus amples renseignements); la composition et tout processus écologique essentiel (p. ex. pollinisation, parasitisme, dispersion, feu, inondation). Essentiellement, cette section décrit l’habitat essentiel proposé en répondant à la question : QU’EST‑IL?

 

2.          COORDONNÉES DE L’AIRE (p. ex. zone MTU, MTU vers l’est, MTU vers le nord, données des coordonnées) afin de situer géospatialement au Canada l’habitat essentiel proposé. Dans la ou les zones délimitées par les coordonnées de l’aire, seul l’habitat conforme à la description est considéré comme habitat essentiel réel. Essentiellement, cette section contribue à la désignation de l’habitat essentiel proposé en répondant à la question : OÙ EST‑IL

 

(Dossier du défendeur, vol. 1, p. 370(a) à 371)

 

 

1. L’argument du ministre quant à l’interprétation

[49]           Il semble que, dans la présente demande, le ministre privilégie une interprétation de la Loi qui est contraire à la politique qui a été acceptée, mais qui n’a pas été suivie. Par conséquent, dans le cadre du présent processus d’interprétation, le ministre est le proposant et les demandeurs sont le défendeur.

 

[50]            Une obligation principale imposée au ministre dans la version définitive du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack, en vertu de l’alinéa 41(1)c), était la « désignation de l’habitat essentiel de l’espèce ». Respectant la norme d’interprétation établie dans l’arrêt Trustco Mortgage Co., ci‑dessus, l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique du ministre attribue une grande importance à la formulation de la définition d’» habitat » pour étayer l’argument selon lequel le libellé de la disposition est précis et sans équivoque et que, par conséquent, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation. L’argument est donc que, eu égard à l’utilisation du mot « aires » dans la définition de l’habitat d’une espèce aquatique, l’habitat essentiel d’une espèce aquatique est un emplacement géographique et, bien que les caractéristiques qui font en sorte que l’emplacement constitue l’habitat d’une espèce puissent servir à établir une définition précise, les caractéristiques en soi ne représentent pas un élément constitutif de cet habitat essentiel au sens des alinéas 41(1)c) et c.1) de la LEP. En ce qui a trait à une analyse contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s’harmonise avec la LEP dans son ensemble, le ministre développe son argument comme suit :

[traduction]

L’interprétation de la « désignation de l’habitat essentiel » en fonction d’un endroit ou d’un emplacement est également conforme au régime et au contexte de la LEP, qui définit de façon constante l’« habitat essentiel » et l’ « habitat » à l’aide du mot « aire ». Par exemple, le paragraphe 49(1) prévoit que le plan d’action « comporte notamment, en ce qui concerne l’aire à laquelle il s’applique a) la désignation de l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible et d’une façon compatible avec le programme de rétablissement ». [Non souligné dans l’original.]

 

Dans le même ordre d’idées, le paragraphe 80(4) définit le contenu d’un décret d’urgence, qui a pour objet de protéger l’habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce avant qu’un tel habitat ne soit désigné habitat essentiel par un programme de rétablissement ou un plan d’action. Il ressort du paragraphe 80(4) que la désignation de l’ « habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce » renvoie à la notion d’aire. La disposition prévoit en effet ce qui suit :

(4) Le décret peut :

a) dans le cas d’une espèce aquatique :

(i) désigner l’habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce dans l’aire visée par le décret […]

Une formulation identique figure à l’égard des oiseaux migrateurs et de toute autre espèce.

 

De surcroît, les articles 58 à 62 de la LEP, consacrés à la protection de l’habitat essentiel, établissent divers processus qui donnent lieu à l’interdiction de la destruction de l’habitat essentiel. Le processus applicable est déterminé en fonction de l’endroit ou de l’emplacement de l’habitat essentiel si bien que, par exemple, lorsque l’habitat essentiel désigné se trouve dans un parc national ou dans une autre zone décrite au paragraphe 58(2), la publication dans la Gazette du Canada est requise pour protéger l’habitat essentiel. En revanche, lorsque l’habitat essentiel ou une partie de celui‑ci ne se « trouve pas dans un lieu visé au paragraphe 58(2) », un arrêté peut être requis en vertu du paragraphe 58(4).

 

Enfin, on souligne dans le préambule « que les aires protégées au Canada, plus particulièrement les parcs nationaux, sont importants pour la protection et le rétablissement des espèces en péril. »

 

L’emploi uniforme, constant et exclusif, dans la LEP, de mots qui renvoient à un lieu, à un endroit ou à une aire géographiquement définissable contredit directement la position des demandeurs, à savoir que la désignation de l’habitat essentiel doit inclure une description des caractéristiques de cet habitat pour qu’il soit possible de faire respecter les interdictions relatives à sa destruction.

 

Le ministre soutient que retenir une interprétation qui impose de telles conditions supplémentaires pourrait être contraire au sens ordinaire de l’expression « désignation de l’habitat essentiel » comme le reflètent le libellé et le régime de la LEP et l’intention du législateur, comme il a été précédemment expliqué.

 

La Cour suprême du Canada a expressément reconnu qu’une démarche générale est parfaitement acceptable dans le domaine de la protection environnementale « étant donné que la nature de l’environnement (sa complexité et la vaste gamme des activités qui peuvent en causer la dégradation) ne se prête pas à une codification précise » (Ontario c. Canadien Pacifique Ltée., [1995] 2 R.C.S. 1031, [1995] A.C.F. no 62 (Q.L.) paragraphe 43). Par conséquent, il est légitimement possible de conclure que l’obligation de signaler les menaces à l’égard de l’habitat ainsi que la mention d’exemples d’activités susceptibles de causer la destruction de l’habitat essentiel dans un programme de rétablissement, comme le prévoient les alinéas 41(1)b) et c) de la LEP, suffiront à satisfaire les conditions d’application et de notification.

 

Il n’est donc ni nécessaire ni justifié de retenir une interprétation de la « désignation de l’habitat essentiel » qui impose des conditions qui ne sont pas prescrites par la Loi.

 

[Souligné dans l’original.]

 

(Réponse additionnelle du défendeur, paragraphes 49 à 55)

 

2. La réplique des demandeurs quant à l’interprétation

[51]           Les demandeurs rejettent l’argument de l’importance du texte qu’évoque le ministre pour le motif suivant :

[traduction]

Même lorsqu’elle est lue sans renvoi à l’objectif recherché par le législateur, tel qu’il est défini à l’article 6, ou au contexte global de la LEP, il est impossible de circonscrire la définition d’» habitat » pour les espèces aquatiques à l’interprétation restrictive et sélective que fait le ministre…

 

Premièrement, cette définition renvoie clairement non pas à de simples aires, mais plutôt à des aires qui procurent aux espèces des milieux physiques et biologiques dont leur survie dépend. Pour constituer un « habitat » au sens de la définition de la LEP, une aire doit présenter des caractéristiques avantageuses pour l’espèce. Ces caractéristiques seraient propices à la reproduction, à l’élevage, à l’alimentation, à la migration et à d’autres activités essentielles à la survie. Quant au naseux de Nooksack, bien qu’il ne vive pas parmi les arbres de la zone tampon rivulaire, sa survie et son rétablissement dépendent de cet élément constitutif biologique de l’habitat.

 

Deuxièmement, la définition de l’habitat de la LEP comprend des lieux où des espèces se sont déjà trouvées mais d’où elles sont aujourd’hui absentes. La seule façon de définir s’» il est possible de les réintroduire » dans des aires où elles se sont déjà trouvées consiste à déterminer si ces aires ont les caractéristiques biologiques et physiques permettant d’assurer la survie des espèces en question. En effet, il serait absurde de définir les coordonnées géospatiales d’un lit de rivière où une espèce de poisson en voie de disparition pourrait être réintroduite si le lit est aujourd’hui sec.

 

(Réponse additionnelle des demandeurs, paragraphes 57 à 59)

 

En ce qui a trait à l’argument des avocats des demandeurs fondé sur l’article 6 de la LEP, la disposition, qui se trouve sous la rubrique « Objet », est formulée comme suit :

La présente loi vise à prévenir la disparition — de la planète ou du Canada seulement — des espèces sauvages, à permettre le rétablissement de celles qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et à favoriser la gestion des espèces préoccupantes pour éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées.

The purposes of this Act are to prevent wildlife species from being extirpated or becoming extinct, to provide for the recovery of wildlife species that are extirpated, endangered or threatened as a result of human activity and to manage species of special concern to prevent them from becoming endangered or threatened.

 

[52]           Dans leur analyse contextuelle et téléologique, les demandeurs présentent deux aspects qui devraient élargir la définition de l’ « habitat » : il doit être nécessaire à la protection de l’espèce et il doit être compatible avec les valeurs et principes de la Convention.

 

[53]           Dans le préambule de la LEP, on fait valoir que « l’habitat des espèces en péril est important pour leur conservation ». En ce qui concerne la conservation et la définition de l’« habitat », l’argumentation des demandeurs est la suivante :

[traduction]

Les demandeurs répondent que l’interprétation du ministre selon laquelle l’habitat essentiel se borne à un emplacement, sans qu’y soit associée quelque caractéristique physique ou biologique dont une espèce dépend, directement ou indirectement, pour sa survie ou son rétablissement, rend l’alinéa 41(1)c) absurde et est contraire à l’esprit de la Loi.

 

Par exemple, il serait carrément impossible, à l’état de la planification de l’action, d’établir des « mesures envisagées pour protéger l’habitat essentiel de l’espèce » si les caractéristiques particulières de l’habitat essentiel nécessitant des mesures de protection n’étaient pas définies [alinéa 49(1)b)]. De même, il serait impossible d’interdire la destruction d’un élément de l’habitat essentiel ‑ par exemple les arbres, l’eau ou les aliments ‑ si ces éléments n’étaient pas précisés [paragraphe 58(1)]. C’est donc dire que l’interprétation du ministre mine l’application des dispositions de la LEP qui ont expressément pour objet de favoriser le rétablissement des espèces en voie de disparition.

 

Si ce n’est peut‑être d’un cataclysme nucléaire, il est impossible de détruire un lieu dans son entièreté. Tout comme il est impossible de détruire un ensemble de coordonnées géospatiales. La destruction d’un habitat essentiel est plutôt le résultat de la destruction de ses éléments constitutifs. Ainsi, la destruction de l’habitat de la chouette tachetée implique la coupe rase de la forêt ancienne dont elle dépend pour son alimentation et pour la protection contre les prédateurs. La destruction de l’habitat d’une grenouille peut être causée par l’assèchement et le remblayage d’une zone humide afin d’y ériger un centre commercial. Dans le même ordre d’idées, une façon de détruire l’habitat du naseux de Nooksack consisterait à éliminer la végétation rivulaire qui régule la température et prévient l’érosion et la pollution du milieu dont le naseux dépend ou encore à assécher le lit de ses ruisseaux. La coupe rase d’arbres, le remblayage des zones humides et l’assèchement des ruisseaux ne détruisent pas le lieu : ces pratiques détruisent plutôt les caractéristiques et les éléments constitutifs dont dépendait une espèce en voie de disparition.

 

L’habitat essentiel doit être une aire qui présente les caractéristiques biologiques et physiques nécessaires à la survie d’une espèce. Faute de telles caractéristiques, les aires ne pourraient pas respecter la définition de l’« habitat essentiel » que prévoit la Loi. Autrement dit, en l’absence de telles caractéristiques, les aires ne seraient plus nécessaires à la survie ou au rétablissement d’une espèce.

 

La seconde moitié de l’alinéa 41(1)c) mentionne la nécessité de fournir des exemples d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de l’habitat essentiel. Si ce n’est d’un cataclysme nucléaire, il est difficile d’imaginer une activité susceptible de détruire un emplacement dans son entièreté. Considéré globalement, l’alinéa 41(1)c) exige clairement la description des caractéristiques de l’habitat essentiel et des exemples d’activités susceptibles de détruire ces caractéristiques.

 

[Souligné dans l’original.]

 

(Réponse additionnelle des demandeurs, paragraphes 40 à 44)

 

[54]           Par conséquent, les demandeurs soutiennent que les sections portant sur la définition de l’« habitat » et de l’« habitat essentiel » de la LEP doivent être interprétées dans le contexte des dispositions de protection de cette loi, c’est‑à‑dire que la définition de l’« habitat » doit être interprétée comme comportant les caractéristiques pour que la définition de l’« habitat essentiel » comporte également les caractéristiques de sorte que les dispositions de protection s’appliquent à l’emplacement et aux caractéristiques de l’habitat essentiel d’une espèce. Au soutien de cet argument, les avocats des demandeurs estiment qu’à une importante exception près, la protection des caractéristiques de l’habitat essentiel ne s’applique que lorsque certains éléments de preuve indiquent qu’une certaine espèce a bel et bien son habitat dans une certaine aire. L’exception figure dans la définition de l’habitat des espèces aquatiques, qui mentionne une aire dont la survie de l’espèce dépend, directement ou indirectement, « ou aires où elle s’est déjà trouvée et où il est possible de la réintroduire ».

 

[55]           En ce qui concerne l’interprétation téléologique, les demandeurs soulignent que le préambule de la LEP fait valoir les engagements pris par le Canada aux termes de la Convention. En ce qui a trait à la Convention et à la définition de l’ « habitat essentiel », l’argument des demandeurs est le suivant :

[traduction]

En réponse à la prétention du ministre selon laquelle la désignation de l’habitat essentiel devrait se limiter à son emplacement, sans mention de ses caractéristiques physiques ou biologiques, les demandeurs affirment que cette interprétation est incompatible avec les valeurs et principes de la Convention sur la diversité biologique et qu’elle risque de donner lieu à une violation du traité dont le Canada est un signataire.

 

Le contexte du droit international démontre que l’alinéa 41(1)c) doit être interprété de manière à satisfaire l’engagement pris par le Canada, en vertu de l’alinéa 8b) de la Convention, de favoriser la protection des écosystèmes et des habitats naturels, ainsi que le maintien de populations viables d’espèces dans leur milieu naturel. La définition d’» écosystème » s’articule sur des éléments constitutifs physiques et biologiques :

 

Écosystème : le complexe dynamique formé de communautés de plantes, d’animaux et de micro‑organismes et de leur environnement non vivant qui, par leur interaction, forment une unité fonctionnelle.

 

De surcroît, l’article 7 impose les obligations qui suivent à chaque partie contractante, aux fins de la conservation in situ des écosystèmes, des habitats naturels et des espèces, ainsi qu’aux fins de l’article 8 :

a) Précise les éléments constitutifs de la diversité biologique importants pour sa conservation et son utilisation durable en tenant compte de la liste indicative de catégories figurant à l’annexe I;

 

b) Surveille par prélèvement d’échantillons et d’autres techniques, les éléments constitutifs de la diversité biologique précisés en application de l’alinéa a) ci‑dessus, et prête une attention particulière à ceux qui doivent d’urgence faire l’objet de mesures de conservation ainsi qu’à ceux qui offrent le plus de possibilités en matière d’utilisation durable; [...]

 

Selon les demandeurs, la Cour devrait interpréter l’alinéa 41(1)c) à la lumière de l’article 7 de la Convention, qui vise à réaliser la conservation des espèces et des habitats conformément à l’article 8. Pour réaliser la conservation de l’habitat naturel conformément à l’article 8, les parties contractantes ont convenu que tous les éléments constitutifs de la diversité biologique, et non pas seulement l’emplacement, doivent être précisés.

 

[Souligné dans l’original.]

 

(Réponse additionnelle des demandeurs, paragraphes 45 à 48)

 

[56]           Toujours à l’appui de l’argumentation fondée sur les éléments constitutifs de l’habitat essentiel, les avocats des demandeurs mentionnent la jurisprudence américaine, laquelle conclut clairement que les caractéristiques forment un élément constitutif de l’habitat essentiel. Les avocats du ministre s’opposent à cette mention, faisant valoir que la façon dont la loi américaine traite la détermination de l’« habitat » et de l’« habitat essentiel » diffère considérablement de la démarche de la LEP. C’est là un point admis par les avocats des demandeurs mais, néanmoins, le droit américain est invoqué pour prouver la logique d’interpréter la LEP dans une optique semblable à celle de la jurisprudence américaine. Toutefois, eu égard à la différence admise du contexte législatif, j’estime que le contexte américain ne constitue pas un outil utile au présent exercice d’interprétation de la Loi.

 

3. Conclusion

[57]           Je juge faible l’argument textuel, contextuel et téléologique du ministre.

 

[58]           Premièrement, je conviens que la définition de l’« habitat » met l’accent sur un certain emplacement, mais il est implicite que cet emplacement ne peut être désigné que parce qu’il comporte des caractéristiques spécifiques dont l’espèce dépend pour sa survie. Par conséquent, dans la définition de l’« habitat », l’emplacement est inextricablement lié à ses caractéristiques particulières pouvant être précisées et l’emplacement comprend ses caractéristiques particulières pouvant être précisées. Par conséquent, en ce qui concerne l’emploi du mot « aires » dans la définition d’« habitat », j’estime que le mot peut avoir plus d’une signification raisonnable : il ne s’agit pas seulement d’un emplacement, mais d’un emplacement qui comporte ses caractéristiques pouvant être précisées. Je conclus donc que le sens ordinaire de « aires » joue un rôle moins important dans l’exercice d’interprétation.

 

[59]           Deuxièmement, le simple fait que le mot « aire » figure dans plusieurs dispositions de la LEP ne renforce pas l’argument du ministre fondé sur l’analyse textuelle dans la mesure où, comme je le conclus, une analyse primaire des considérations contextuelles et téléologiques de l’emploi du mot n’a pas été réalisée.

 

[60]           Troisièmement, en ce qui a trait au renvoi du ministre aux dispositions relatives au décret d’urgence pour justifier une interprétation à la lettre de la LEP, les avocats des demandeurs ont fourni l’explication qui suit dans leur plaidoirie :

[traduction]

Les demandeurs ne croient pas que cette disposition soit véritablement pertinente pour l’interprétation de l’article 41, mais ils sont en mesure d’expliquer comment cette disposition est généralement appliquée. Le sous‑alinéa 80 (4)a)(i), mentionne qu’un décret d’urgence peut désigner l’habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce. Selon les observations des demandeurs, la raison pour laquelle on ne dit pas simplement « désigner l’habitat essentiel » est que l’habitat essentiel, tel qu’il est défini dans la Loi, est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action. Or, un décret d’urgence peut être pris avant que ne soit pleinement mis sur pied un programme de rétablissement ou un plan d’action. C’est pourquoi, dans cette section de la Loi, contrairement à ce qu’on trouve ailleurs, on parle de l’« habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement », ce qui, au fond, revient à la même chose que l’« habitat essentiel », si ce n’est que l’habitat essentiel est défini dans la Loi comme ayant été désigné comme tel dans un des deux documents de rétablissement. Cela explique la légère différence de terminologie.

 

On s’est aussi interrogé sur le fait qu’il semble s’agir d’une « aire dans une aire ». Je souhaite simplement préciser que le ministre de l’Environnement peut prendre des décrets d’urgence s’il craint que l’espèce ne fasse pas l’objet ou coure un risque imminent de ne pas faire l’objet des mesures de protection voulues. La raison pour laquelle on parle de « désigner l’habitat qui est nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce dans l’aire visée par le décret » est que certaines espèces végétales ou animales, comme nous le mentionnons dans nos observations, peuvent occuper plus d’un territoire où se trouver dans plus d’une aire.

 

Voici un exemple qui, nous l’espérons, clarifiera les choses. Une espèce végétale en voie de disparition pourrait se trouver simultanément sur le territoire de l’Ontario et sur le territoire du Québec. Le Québec pourrait avoir adopté des textes législatifs énergiques pour la protection de cette espèce, interdisant tout obstacle à sa survie et à son rétablissement. L’Ontario – et je vous rappelle qu’il ne s’agit que d’une mise en situation théorique ‑ pourrait avoir adopté des mesures plus laxistes et insuffisantes pour protéger la plante, augmentant de ce fait le risque imminent pour la plante ou encore ne contribuant aucunement à sa protection. Le décret d’urgence permet alors au ministre d’appliquer le décret à cette seule aire, par opposition à l’ensemble de l’aire occupée par l’espèce. Que ce soit en raison de divergences dans les textes législatifs provinciaux ou du fait que les espèces sont réparties sur plus d’un territoire, le décret peut donc être appliqué à une seule partie d’une aire et pas à une autre.

 

Je souhaite simplement… encore une fois, je ne sais pas comment être plus précis... Mais je souhaite simplement expliquer que la raison pour laquelle il semble s’agir d’une « aire dans une aire » est que, en fait, le décret d’urgence peut s’appliquer à une seule partie de l’habitat, selon les circonstances législatives, politiques ou géographiques. Je ne sais pas dans quelle mesure cela est utile, mais, quoi qu’il en soit, les demandeurs affirment que cela est sans conséquence pour l’interprétation de l’alinéa 41(1)c).

 

(Transcription, vol. 6, p. 48 à 51)

 

Les avocats du ministre n’ont pas contesté cette explication fournie dans la réponse. Par conséquent, je conclus que l’argument textuel concernant les mesures d’urgence n’a rien à voir avec le principal point de la présente analyse interprétative et qu’il n’est donc pas pertinent.

 

[61]           Quatrièmement, l’argument textuel du ministre ne réfute pas adéquatement ce que j’estime être un argument logique convaincant en faveur d’une interprétation de l’« habitat » qui incorpore les caractéristiques essentielles. L’argument du ministre ne tient aucunement compte de cette importante question. Comme l’a indiqué M. Pearson, l’habitat du naseux de Nooksack est constitué de « courants ». Concrètement, la désignation de l’habitat du naseux de Nooksack doit donc comprendre la désignation des caractéristiques des courants qui forment son habitat essentiel. Cette désignation constitue, selon moi, une question de droit.

 

[62]           Cinquièmement, comme je l’ai dit, l’argument des demandeurs relatif à la Convention fait partie des observations écrites présentées en réponse à l’argument du ministre relativement à l’interprétation. Étant donné que les avocats du ministre n’ont pas traité expressément de cet argument, je conclus que ce dernier n’est pas contesté. Par conséquent, je lui accorde beaucoup de poids à l’appui de l’analyse contextuelle et téléologique des demandeurs.

 

[63]           Enfin, sixièmement, les demandeurs plaident efficacement qu’il convient d’accorder peu de poids à l’interprétation textuelle du ministre de la signification de l’« habitat » et de l’« habitat essentiel » puisqu’elle est contraire aux attentes du gouvernement du Canada en matière d’élaboration de programmes de rétablissement dont il est fait état dans les documents publiés. La réponse des avocats du ministre est ni plus ni moins que les Lignes directrices ne sont pas pertinentes étant donné que l’interprétation de la LEP doit se faire conformément à la loi. Selon moi, cette position ne tient pas compte du point critique, à savoir qu’une analyse contextuelle et téléologique nécessite une perspective large. Dans une large perspective de désignation des éléments constitutifs de l’habitat essentiel, les Lignes directrices susmentionnées favorisent la compréhension de l’objectif de la désignation de l’habitat essentiel comme le prévoit l’alinéa 41(1)c) de la LEP et des éléments que doit comprendre la désignation pour atteindre cet objectif. Il est donc justifié qu’on invoque les Lignes directrices pour étayer le risque d’irrégularité dans la préparation de la version définitive du programme de rétablissement. Selon moi, le fait pour le ministre de ne pas adopter maintenant de cette position réduit considérablement le poids à accorder à l’argument textuel présenté. Je ne peux simplement pas le prendre au sérieux.

 

[64]           Par conséquent, je conclus que les demandeurs interprètent correctement la définition de l’« habitat » et de l’« habitat essentiel ».

 

C. La signification de « dans la mesure du possible »

[65]           Tout différend en ce qui concerne la signification de cette expression est dissipé par le juge Zinn, dans la décision Alberta Wilderness, précitée, où il accepte, aux paragraphes 24 et 25, un accord entre l’avocat du ministre de l’Environnement et les demandeurs suivant lequel « [s]elon l’alinéa 41(1)c), le ministre doit désigner, dans un programme de rétablissement, tout l’habitat essentiel qu’il peut désigner à ce moment‑là, même s’il ne peut pas désigner l’ensemble de cet habitat, et il est tenu de le faire en se fondant sur la meilleure information alors accessible ». Il ne fait aucun doute que cette décision s’applique au ministre en l’espèce.

 

IV.       Conclusion

[66]           Pour les motifs qui précèdent, je conclus que, par entente ou par contestation, les demandeurs ont entièrement gain de cause dans la présente demande.


 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  Pour les motifs présentés en conclusion de la présente demande, conformément au paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, je déclare que le ministre a agi en contravention de la loi en omettant de respecter les dispositions impératives de l’alinéa 41(1)c) de la LEP dans la version définitive du Programme de rétablissement du naseux de Nooksack.

2.             Les parties ont convenu d’assumer leurs propres dépens.

 

 

 

« Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 

 

 


ANNEXE A

 

Loi sur les espèces en péril, 2002, ch. 29

Rétablissement des espèces en voie de disparition, menacées et disparues du pays

Programme de rétablissement

 

Élaboration

37. (1) Si une espèce sauvage est inscrite comme espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, le ministre compétent est tenu d’élaborer un programme de rétablissement à son égard.

Élaboration conjointe

(2) Si plusieurs ministres compétents sont responsables de l’espèce sauvage, le programme de rétablissement est élaboré conjointement par eux. Le cas échéant, la mention du ministre compétent aux articles 38 à 46 vaut mention des ministres compétents.

Engagements applicables

38. Pour l’élaboration d’un programme de rétablissement, d’un plan d’action ou d’un plan de gestion, le ministre compétent tient compte de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe selon lequel, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce sauvage inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance.



Collaboration

39. (1) Dans la mesure du possible, le ministre compétent élabore le programme de rétablissement en collaboration avec :

a) le ministre provincial ou territorial compétent dans la province ou le territoire où se trouve l’espèce sauvage inscrite;

b) tout ministre fédéral dont relèvent le territoire domanial ou les autres aires où se trouve l’espèce;

c) si l’espèce se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le conseil;

d) toute organisation autochtone qu’il croit directement touchée par le programme de rétablissement;

e) toute autre personne ou organisation qu’il estime compétente.

Accord sur des revendications territoriales

(2) Si l’espèce sauvage inscrite se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le programme de rétablissement est élaboré, dans la mesure où il s’applique à cette aire, en conformité avec les dispositions de cet accord.

Consultation

(3) Le programme de rétablissement est élaboré, dans la mesure du possible, en consultation avec les propriétaires fonciers et les autres personnes que le ministre compétent croit directement touchés par le programme, notamment le gouvernement de tout autre pays où se trouve l’espèce.

Caractère réalisable du rétablissement

40. Pour l’élaboration du programme de rétablissement, le ministre compétent vérifie si le rétablissement de l’espèce sauvage inscrite est réalisable au point de vue technique et biologique. Il fonde sa conclusion sur la meilleure information accessible, notamment les renseignements fournis par le COSEPAC.

Rétablissement réalisable

41. (1) Si le ministre compétent conclut que le rétablissement de l’espèce sauvage inscrite est réalisable, le programme de rétablissement doit traiter des menaces à la survie de l’espèce — notamment de toute perte de son habitat — précisées par le COSEPAC et doit comporter notamment :

a) une description de l’espèce et de ses besoins qui soit compatible avec les renseignements fournis par le COSEPAC;

b) une désignation des menaces à la survie de l’espèce et des menaces à son habitat qui soit compatible avec les renseignements fournis par le COSEPAC, et des grandes lignes du plan à suivre pour y faire face;

c) la désignation de l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible, notamment les informations fournies par le COSEPAC, et des exemples d’activités susceptibles d’entraîner sa destruction;

c.1) un calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel lorsque l’information accessible est insuffisante;

d) un énoncé des objectifs en matière de population et de dissémination visant à favoriser la survie et le rétablissement de l’espèce, ainsi qu’une description générale des activités de recherche et de gestion nécessaires à l’atteinte de ces objectifs;

e) tout autre élément prévu par règlement;

f) un énoncé sur l’opportunité de fournir des renseignements supplémentaires concernant l’espèce;

g) un exposé de l’échéancier prévu pour l’élaboration d’un ou de plusieurs plans d’action relatifs au programme de rétablissement.

Rétablissement irréalisable

(2) Si le ministre compétent conclut que le rétablissement de l’espèce sauvage inscrite est irréalisable, le programme de rétablissement doit comporter une description de l’espèce et de ses besoins, dans la mesure du possible, et la désignation de son habitat essentiel, ainsi que les motifs de la conclusion.

Plusieurs espèces ou écosystème

(3) Pour l’élaboration du programme de rétablissement, le ministre compétent peut, s’il l’estime indiqué, traiter de plusieurs espèces simultanément ou de tout un écosystème.

Règlement

(4) Sur recommandation faite par le ministre après consultation du ministre responsable de l’Agence Parcs Canada et du ministre des Pêches et des Océans, le gouverneur en conseil peut prévoir par règlement, pour l’application de l’alinéa (1)e), les éléments additionnels à inclure dans un programme de rétablissement.

2002, ch. 29, art. 41; 2005, ch. 2, art. 21.

Projet de programme de rétablissement

42. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le ministre compétent met le projet de programme de rétablissement dans le registre dans l’année suivant l’inscription de l’espèce sauvage comme espèce en voie de disparition ou dans les deux ans suivant l’inscription de telle espèce comme espèce menacée ou disparue du pays.

Liste des espèces en péril originale

(2) En ce qui concerne les espèces sauvages inscrites à l’annexe 1 à l’entrée en vigueur de l’article 27, le ministre compétent met le projet de programme de rétablissement dans le registre dans les trois ans suivant cette date dans le cas de l’espèce sauvage inscrite comme espèce en voie de disparition ou dans les quatre ans suivant cette date dans le cas de l’espèce sauvage inscrite comme espèce menacée ou disparue du pays.

Observations

43. (1) Dans les soixante jours suivant la mise du projet dans le registre, toute personne peut déposer par écrit auprès du ministre compétent des observations relativement au projet.

Texte définitif du programme de rétablissement

(2) Dans les trente jours suivant la fin du délai prévu au paragraphe (1), le ministre compétent étudie les observations qui lui ont été présentées, apporte au projet les modifications qu’il estime indiquées et met le texte définitif du programme de rétablissement dans le registre.

Plans existants

44. (1) Si le ministre compétent estime qu’un plan existant s’applique à l’égard d’une espèce sauvage et est conforme aux exigences des paragraphes 41(1) ou (2), et qu’il l’adopte à titre de projet de programme de rétablissement, il en met une copie dans le registre pour tenir lieu de projet de programme de rétablissement de l’espèce.

Incorporation d’un plan existant

(2) Il peut incorporer toute partie d’un plan existant relatif à une espèce sauvage dans un projet de programme de rétablissement de celle‑ci.

Modifications

45. (1) Le ministre compétent peut modifier le programme de rétablissement. Une copie de la modification est mise dans le registre.

Modification du délai

(2) Si la modification porte sur le délai pour terminer un plan d’action, le ministre compétent est tenu de fournir les motifs de la modification et de mettre une copie de ceux‑ci dans le registre.

Procédure de modification

(3) Les articles 39 et 43 s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, à la modification du programme de rétablissement.

Exception

(4) Le paragraphe (3) ne s’applique pas si le ministre compétent estime que la modification est mineure.

Suivi

46. Il incombe au ministre compétent d’établir un rapport sur la mise en oeuvre du programme de rétablissement et sur les progrès effectués en vue des objectifs qu’il expose, à intervalles de cinq ans à compter de sa mise dans le registre, et ce, jusqu’à ce que ces objectifs soient atteints ou que le rétablissement de l’espèce ne soit plus réalisable. Il met son rapport dans le registre.

Plan d’action

Élaboration

47. Le ministre compétent responsable d’un programme de rétablissement est tenu d’élaborer un ou plusieurs plans d’action sur le fondement de celui‑ci. Si plusieurs ministres compétents sont responsables du programme, les plans d’action peuvent être élaborés conjointement par eux.

Collaboration

48. (1) Dans la mesure du possible, le plan d’action est élaboré en collaboration avec :

a) le ministre provincial ou territorial compétent dans la province ou le territoire où se trouve l’espèce sauvage inscrite;

b) tout ministre fédéral dont relèvent le territoire domanial ou les autres aires où se trouve l’espèce;

c) si l’espèce se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le conseil;

d) toute organisation autochtone que le ministre compétent croit directement touchée par le plan d’action;

e) toute autre personne ou organisation qu’il estime compétente.

Accord sur des revendications territoriales

(2) Si l’espèce sauvage inscrite se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le plan d’action est élaboré, dans la mesure où il s’applique à cette aire, en conformité avec les dispositions de cet accord.

Consultation

(3) Le plan d’action est élaboré, dans la mesure du possible, en consultation avec les propriétaires fonciers, les locataires et les autres personnes que le ministre compétent croit directement touchés ou intéressés, notamment le gouvernement de tout autre pays où se trouve l’espèce.

Contenu du plan d’action

49. (1) Le plan d’action comporte notamment, en ce qui concerne l’aire à laquelle il s’applique :

a) la désignation de l’habitat essentiel de l’espèce dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible et d’une façon compatible avec le programme de rétablissement, et des exemples d’activités susceptibles d’entraîner sa destruction;

b) un exposé des mesures envisagées pour protéger l’habitat essentiel de l’espèce, notamment la conclusion d’accords en application de l’article 11;

c) la désignation de toute partie de l’habitat essentiel de l’espèce qui n’est pas protégée;

d) un exposé des mesures à prendre pour mettre en oeuvre le programme de rétablissement, notamment celles qui traitent des menaces à la survie de l’espèce et celles qui aident à atteindre les objectifs en matière de population et de dissémination, ainsi qu’une indication du moment prévu pour leur exécution;

d.1) les méthodes à utiliser pour surveiller le rétablissement de l’espèce et sa viabilité à long terme;

e) l’évaluation des répercussions socioéconomiques de sa mise en oeuvre et des avantages en découlant;

f) tout autre élément prévu par règlement.

Règlement

(2) Sur recommandation faite par le ministre après consultation du ministre responsable de l’Agence Parcs Canada et du ministre des Pêches et des Océans, le gouverneur en conseil peut prévoir par règlement, pour l’application de l’alinéa (1)f), les éléments additionnels à inclure dans un plan d’action.

2002, ch. 29, art. 49; 2005, ch. 2, art. 22.

Projet de plan d’action

50. (1) Le ministre compétent met le projet de plan d’action dans le registre.

Observations

(2) Dans les soixante jours suivant la mise du projet dans le registre, toute personne peut déposer par écrit auprès du ministre compétent des observations relativement au projet.

Texte définitif du plan d’action

(3) Dans les trente jours suivant la fin du délai prévu au paragraphe (2), le ministre compétent étudie les observations qui lui ont été présentées, apporte au projet les modifications qu’il estime indiquées et met le texte définitif du plan d’action dans le registre.

Sommaire en cas de retard

(4) Si le plan d’action n’est pas terminé dans le délai prévu par le programme de rétablissement, le ministre compétent est tenu de mettre dans le registre un sommaire des éléments du plan qui sont élaborés.

Plans existants

51. (1) Si le ministre compétent estime qu’un plan existant s’applique à l’égard d’une espèce sauvage et est conforme aux exigences de l’article 49, et qu’il l’adopte à titre de projet de plan d’action, il en met une copie dans le registre pour tenir lieu de projet de plan d’action à l’égard de l’espèce.

Incorporation d’un plan existant

(2) Il peut incorporer toute partie d’un plan existant relatif à une espèce sauvage dans un projet de plan d’action portant sur celle‑ci.

Modifications

52. (1) Le ministre compétent peut modifier le plan d’action. Une copie de la modification est mise dans le registre.

Procédure de modification

(2) L’article 48 s’applique, avec les adaptations nécessaires, à la modification du plan d’action.

Exception

(3) Le paragraphe (2) ne s’applique pas si le ministre compétent estime que la modification est mineure.

Règlements

53. (1) Le ministre compétent prend, par règlement, à l’égard des espèces aquatiques, des espèces d’oiseaux migrateurs protégées par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, où qu’elles se trouvent, ou de toute autre espèce sauvage se trouvant sur le territoire domanial, les mesures qu’il estime nécessaires pour la mise en oeuvre d’un plan d’action. Si les mesures concernent la protection de l’habitat essentiel sur le territoire domanial, les règlements sont pris en vertu de l’article 59.

Consultation

(2) Si le ministre compétent estime que le règlement touchera une réserve ou une autre terre qui a été mise de côté à l’usage et au profit d’une bande en application de la Loi sur les Indiens, il est tenu de consulter le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et la bande avant de le prendre.

Consultation

(3) Si le ministre compétent estime que le règlement touchera une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, il est tenu de consulter le conseil avant de le prendre.

Incorporation par renvoi

(4) Les règlements peuvent incorporer par renvoi, dans la mesure où ils s’appliquent à une province ou à un territoire, toute mesure législative de la province ou du territoire, avec ses modifications successives.

Application dans les territoires

(5) Si le ministre compétent estime que le règlement touchera des terres dans un territoire, il est tenu de consulter le ministre territorial avant de le prendre.

Exception

(6) Le paragraphe (5) ne s’applique pas :

a) à l’égard des individus d’une espèce aquatique ou d’une espèce d’oiseau migrateur protégée par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, et de leur habitat;

b) à l’égard des terres relevant du ministre ou de l’Agence Parcs Canada.

Pouvoirs conférés au titre d’autres lois

54. Le ministre compétent peut, en vue de la mise en oeuvre d’un plan d’action, exercer tout pouvoir qui lui est conféré au titre d’une autre loi fédérale.

Suivi et rapport

55. Cinq ans après la mise du plan d’action dans le registre, il incombe au ministre compétent d’assurer le suivi de sa mise en oeuvre et des progrès réalisés en vue de l’atteinte de ses objectifs. Il l’évalue et établit un rapport, notamment sur ses répercussions écologiques et socioéconomiques. Il met une copie de son rapport dans le registre

Species at Risk Act, 2002, c. 29

Recovery of Endangered, Threatened and Extirpated Species

Recovery Strategy

 

Preparation — endangered or threatened species

37. (1) If a wildlife species is listed as an extirpated species, an endangered species or a threatened species, the competent minister must prepare a strategy for its recovery.

More than one competent minister

(2) If there is more than one competent minister with respect to the wildlife species, they must prepare the strategy together and every reference to competent minister in sections 38 to 46 is to be read as a reference to the competent ministers.

Commitments to be considered

38. In preparing a recovery strategy, action plan or management plan, the competent minister must consider the commitment of the Government of Canada to conserving biological diversity and to the principle that, if there are threats of serious or irreversible damage to the listed wildlife species, cost‑effective measures to prevent the reduction or loss of the species should not be postponed for a lack of full scientific certainty.




Cooperation with others

39. (1) To the extent possible, the recovery strategy must be prepared in cooperation with

(a) the appropriate provincial and territorial minister for each province and territory in which the listed wildlife species is found;

(b) every minister of the Government of Canada who has authority over federal land or other areas on which the species is found;

(c) if the species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, the wildlife management board;

(d) every aboriginal organization that the competent minister considers will be directly affected by the recovery strategy; and

(e) any other person or organization that the competent minister considers appropriate.

Land claims agreement

(2) If the listed wildlife species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, the recovery strategy must be prepared, to the extent that it will apply to that area, in accordance with the provisions of the agreement.


Consultation

(3) To the extent possible, the recovery strategy must be prepared in consultation with any landowners and other persons whom the competent minister considers to be directly affected by the strategy, including the government of any other country in which the species is found.

Determination of feasibility

40. In preparing the recovery strategy, the competent minister must determine whether the recovery of the listed wildlife species is technically and biologically feasible. The determination must be based on the best available information, including information provided by COSEWIC.

Contents if recovery feasible

41. (1) If the competent minister determines that the recovery of the listed wildlife species is feasible, the recovery strategy must address the threats to the survival of the species identified by COSEWIC, including any loss of habitat, and must include

(a) a description of the species and its needs that is consistent with information provided by COSEWIC;

(b) an identification of the threats to the survival of the species and threats to its habitat that is consistent with information provided by COSEWIC and a description of the broad strategy to be taken to address those threats;

(c) an identification of the species’ critical habitat, to the extent possible, based on the best available information, including the information provided by COSEWIC, and examples of activities that are likely to result in its destruction;

(c.1) a schedule of studies to identify critical habitat, where available information is inadequate;

(d) a statement of the population and distribution objectives that will assist the recovery and survival of the species, and a general description of the research and management activities needed to meet those objectives;

(e) any other matters that are prescribed by the regulations;

(f) a statement about whether additional information is required about the species; and

(g) a statement of when one or more action plans in relation to the recovery strategy will be completed.

Contents if recovery not feasible

(2) If the competent minister determines that the recovery of the listed wildlife species is not feasible, the recovery strategy must include a description of the species and its needs, an identification of the species’ critical habitat to the extent possible, and the reasons why its recovery is not feasible.

Multi‑species or ecosystem approach permissible

(3) The competent minister may adopt a multi‑species or an ecosystem approach when preparing the recovery strategy if he or she considers it appropriate to do so.

Regulations

(4) The Governor in Council may, on the recommendation of the Minister after consultation with the Minister responsible for the Parks Canada Agency and the Minister of Fisheries and Oceans, make regulations for the purpose of paragraph (1)(e) prescribing matters to be included in a recovery strategy.

2002, c. 29, s. 41; 2005, c. 2, s. 21.

Proposed recovery strategy

42. (1) Subject to subsection (2), the competent minister must include a proposed recovery strategy in the public registry within one year after the wildlife species is listed, in the case of a wildlife species listed as an endangered species, and within two years after the species is listed, in the case of a wildlife species listed as a threatened species or an extirpated species.

First listed wildlife species

(2) With respect to wildlife species that are set out in Schedule 1 on the day section 27 comes into force, the competent minister must include a proposed recovery strategy in the public registry within three years after that day, in the case of a wildlife species listed as an endangered species, and within four years after that day, in the case of a wildlife species listed as a threatened species or an extirpated species.

Comments

43. (1) Within 60 days after the proposed recovery strategy is included in the public registry, any person may file written comments with the competent minister.

Finalization of recovery strategy

(2) Within 30 days after the expiry of the period referred to in subsection (1), the competent minister must consider any comments received, make any changes to the proposed recovery strategy that he or she considers appropriate and finalize the recovery strategy by including a copy of it in the public registry.

Existing plans

44. (1) If the competent minister is of the opinion that an existing plan relating to a wildlife species meets the requirements of subsection 41(1) or (2), and the plan is adopted by the competent minister as the proposed recovery strategy, he or she must include it in the public registry as the proposed recovery strategy in relation to the species.

Incorporation of existing plans

(2) The competent minister may incorporate any part of an existing plan relating to a wildlife species into a proposed recovery strategy for the species.

Amendments

45. (1) The competent minister may at any time amend the recovery strategy. A copy of the amendment must be included in the public registry.

Amendments relating to time for completing action plan

(2) If the amendment relates to the time for completing an action plan, the competent minister must provide reasons for the amendment and include a copy of the reasons in the public registry.

Amendment procedure

(3) Sections 39 and 43 apply to amendments to a recovery strategy, with any modifications that the circumstances require.

Exception

(4) Subsection (3) does not apply if the competent minister considers the amendment to be minor.

Reporting

46. The competent minister must report on the implementation of the recovery strategy, and the progress towards meeting its objectives, within five years after it is included in the public registry and in every subsequent five‑year period, until its objectives have been achieved or the species’ recovery is no longer feasible. The report must be included in the public registry.

Action Plan

Preparation

47. The competent minister in respect of a recovery strategy must prepare one or more action plans based on the recovery strategy. If there is more than one competent minister with respect to the recovery strategy, they may prepare the action plan or plans together.

Cooperation with other ministers and governments

48. (1) To the extent possible, an action plan must be prepared in cooperation with

(a) the appropriate provincial and territorial minister of each province and territory in which the listed wildlife species is found;

(b) every minister of the Government of Canada who has authority over federal land or other areas on which the species is found;

(c) if the species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, the wildlife management board;

(d) every aboriginal organization that the competent minister considers will be directly affected by the action plan; and

(e) any other person or organization that the competent minister considers appropriate.

Land claims agreement

(2) If the listed wildlife species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, an action plan must be prepared, to the extent that it will apply to that area, in accordance with the provisions of the agreement.

Consultation

(3) To the extent possible, an action plan must be prepared in consultation with any landowners, lessees and other persons whom the competent minister considers to be directly affected by, or interested in, the action plan, including the government of any other country in which the species is found.

Contents

49. (1) An action plan must include, with respect to the area to which the action plan relates,

(a) an identification of the species’ critical habitat, to the extent possible, based on the best available information and consistent with the recovery strategy, and examples of activities that are likely to result in its destruction;

(b) a statement of the measures that are proposed to be taken to protect the species’ critical habitat, including the entering into of agreements under section 11;

(c) an identification of any portions of the species’ critical habitat that have not been protected;

(d) a statement of the measures that are to be taken to implement the recovery strategy, including those that address the threats to the species and those that help to achieve the population and distribution objectives, as well as an indication as to when these measures are to take place;

(d.1) the methods to be used to monitor the recovery of the species and its long‑term viability;

(e) an evaluation of the socio‑economic costs of the action plan and the benefits to be derived from its implementation; and

(f) any other matters that are prescribed by the regulations.

Regulations

(2) The Governor in Council may, on the recommendation of the Minister after consultation with the Minister responsible for the Parks Canada Agency and the Minister of Fisheries and Oceans, make regulations for the purpose of paragraph (1)(f) prescribing matters to be included in an action plan.

2002, c. 29, s. 49; 2005, c. 2, s. 22.

Proposed action plan

50. (1) The competent minister must include a proposed action plan in the public registry.

Comments

(2) Within 60 days after the proposed action plan is included in le Registre public, any person may file written comments with the competent minister.

Finalization of action plan

(3) Within 30 days after the expiry of the period referred to in subsection (2), the competent minister must consider any comments received, make any changes to the proposed action plan that he or she considers appropriate and finalize the action plan by including a copy of it in the public registry.

Summary if action plan not completed in time

(4) If an action plan is not finalized in the time set out in the recovery strategy, the competent minister must include in the public registry a summary of what has been prepared with respect to the plan.

Existing plans

51. (1) If the competent minister is of the opinion that an existing plan relating to a wildlife species meets the requirements of section 49, and the plan is adopted by the competent minister as a proposed action plan, he or she must include it in the public registry as a proposed action plan in relation to the species.

Incorporation of existing plans

(2) The competent minister may incorporate any part of an existing plan relating to a wildlife species into a proposed action plan for the species.

Amendments

52. (1) The competent minister may at any time amend an action plan. A copy of the amendment must be included in the public registry.

Amendment procedure

(2) Section 48 applies to amendments to an action plan, with any modifications that the circumstances require.

Exception

(3) Subsection (2) does not apply if the competent minister considers the amendment to be minor.

Regulations

53. (1) The competent minister must, with respect to aquatic species, species of birds that are migratory birds protected by the Migratory Birds Convention Act, 1994, regardless of where they are located, or with respect to any other wildlife species on federal lands, make any regulations that are necessary in the opinion of the competent minister for the purpose of implementing the measures included in an action plan, but, if the measures relate to the protection of critical habitat on federal lands, the regulations must be made under section 59.

Consultation

(2) If the competent minister is of the opinion that a regulation would affect a reserve or any other lands that are set apart for the use and benefit of a band under the Indian Act, he or she must consult the Minister of Indian Affairs and Northern Development and the band before making the regulation.

Consultation

(3) If the competent minister is of the opinion that a regulation would affect an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, he or she must consult the wildlife management board before making the regulation.

Incorporation by reference

(4) The regulations may incorporate by reference any legislation of a province or territory, as amended from time to time, insofar as the regulations apply in that province or territory.

Consultation

(5) If the competent minister is of the opinion that a regulation would affect land in a territory, he or she must consult the territorial minister before making the regulation.

Exception

(6) Subsection (5) does not apply

(a) in respect of individuals of aquatic species and their habitat or species of birds that are migratory birds protected by the Migratory Birds Convention Act, 1994 and their habitat; or

(b) in respect of land under the authority of the Minister or the Parks Canada Agency.

Use of powers under other Acts

54. For the purpose of implementing the measures included in an action plan, the competent minister may use any powers that he or she has under any other Act of Parliament.

Monitoring and reporting

55. The competent minister must monitor the implementation of an action plan and the progress towards meeting its objectives and assess and report on its implementation and its ecological and socio‑economic impacts five years after the plan comes into effect. A copy of the report must be included in the public registry.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T‑1529‑07

 

INTITULÉ :                                       ENVIRONMENTAL DEFENCE CANADA et al c.

                                                            MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LES 4, 5, 6 et 7 MAI 2009

                                                            LES 2 et 3 JUILLET 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS ET DE

L’ORDONNANCE :                         LE 9 SEPTEMBRE 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lara Tessaro

Judah Harrison

 

POUR LES DEMANDEURS

Marja K. Bulmer

Paul F. Partridge

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ecojustice Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.