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Date :  20090514

Dossier :  IMM-2182-09

Référence :  2009 CF 500

Ottawa (Ontario), le 14 mai 2009

En présence de monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

ALLEN ROBIN FOINDING

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

ET

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.  Au préalable

[1]               [8]        [...] La jurisprudence de la Cour établit que lorsque le récit d'un demandeur est jugé non crédible, ce récit ne peut servir de base à une allégation de préjudice irréparable dans le cadre d'une demande de sursis [...] (La Cour souligne).

 

(Akyol c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 931, 124 A.C.W.S. (3d) 1119; également, Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 145, 137 A.C.W.S. (3d) 156 au par. 14).

 

[2]               Or, dans sa demande d’ERAR, le demandeur a soumis les mêmes soumissions que celles déposées devant la SPR.

 

[3]               Il est reconnu qu’un demandeur ne peut, suite à une décision négative de la SPR pour cause de crédibilité, comme en l’espèce, simplement tenter de fournir des éléments de preuve supplémentaire afin de corroborer des allégations déjà jugées non crédibles. Le demandeur ne peut ainsi tenter de « réparer » le mal avec de la preuve supplémentaire qui aurait dû être présentée avant, soit devant la SPR (Bhallu c. Canada (Solliciteur général), 2004 CF 1324, 134 A.C.W.S. (3d) 471).

 

II.  Introduction

[4]               Il s’agit d’une requête demandant le sursis de l’exécution du renvoi du demandeur, prévu le 15 mai 2009, vers le Cameroun. Cette requête en sursis est greffée à une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire (DACJ) attaquant la décision refusant sa demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR).

 

III.  Remarque préliminaire

[5]               Dans la présente requête, les allégations du demandeur, tant au niveau de la question sérieuse qu’au soutien de son préjudice irréparable, reposent sur un seul document, soit un avis de recherche. En effet, selon le paragraphe 11 de l’affidavit du demandeur, cet avis de recherche est l’unique élément au sein de son préjudice irréparable. Or, nous constatons que le demandeur a omis de déposer cet avis de recherche.

 

[6]               Donc, pour ce seul motif, la requête en sursis devrait être rejetée, car sans ce document, il ne peut aucunement démontrer le bien-fondé de ses allégations.

 

[7]               Par contre, par mesure de transparence et du bon déroulement de cette requête, le défendeur a décidé de déposer cet avis de recherche (pièce B de l’affidavit de Dominique Toillon).

 

IV.  Faits

            Visa d’étudiant et statut illégal

[8]               Le demandeur, monsieur Allen Robin Foinding, est un Camerounais âgé de 20 ans.

 

[9]               Il est arrivé au Canada le 3 septembre 2004, muni d’un permis d’étudiant valide jusqu’au 5 septembre 2005 lui permettant d’étudier au Collège Lasalle.

 

[10]           Monsieur Foinding est demeuré au Canada sans statut légal du 5 septembre 2005 au 11 décembre 2006, date à laquelle il a fait une demande d’asile.

 

 

 

Demande d’asile

[11]           Ainsi, monsieur Foinding a fait sa demande d’asile plus de deux ans après son arrivée au Canada.

 

[12]           Le 21 décembre 2007, la Section de la protection des réfugiés (SPR) refusait la demande d’asile de monsieur Foinding pour absence de crédibilité. La décision de la SPR est basée sur de nombreuses contradictions, incohérences et omissions, ainsi que sur son comportement inconciliable avec celui d’une personne qui se dit persécutée ou menacée dans son pays.

 

[13]           La SPR a considéré le délai à quitter son pays après les événements allégués au soutien de sa demande et, une fois au Canada, le délai de plus de deux ans pour y solliciter la protection (décision de la SPR).

 

[14]           Le 3 avril 2008, la Cour fédérale a rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision de la SPR.

 

Demande d’ERAR

[15]           Le 25 juillet 2008, monsieur Foinding soumettait une demande d’ERAR en présentant les mêmes soumissions que celles présentées devant la SPR (Dossier du demandeur (DD) aux pp. 36-49).

 

[16]           Le 28 janvier 2009, la demande d’ERAR de monsieur Foinding était refusée.

Avis de départ

[17]           Lors de l’entrevue avec l’agent d’exécution le 31 mars dernier, monsieur Foinding a demandé un délai jusqu’au 15 mai 2009 pour quitter le pays, afin de procéder à la vente de ses effets personnels et terminer sa session d’études au Collège Lasalle, ce qui lui a été accordé. Ainsi, monsieur Foinding s’est entendu avec l’agent pour quitter le Canada, le 15 mai 2009 (pièce « C » de l’affidavit de Dominique Toillon, page 17 du dossier des défendeurs).

 

[18]           Ainsi, le 31 mars 2009, un avis de départ pour le 15 mai 2009 était remis en mains propres à monsieur Foinding (Pièce P-4 de l’affidavit du demandeur, page 51 de son dossier).

 

V.  Analyse

[19]           Afin d’obtenir un sursis à son renvoi, le demandeur doit démontrer qu’il satisfait aux critères jurisprudentiels émis par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration(1988), 86 N.R. 302, 11 A.C.W.S. (3d) 440 (C.A.F.)

a.       l’existence d’une question sérieuse;

b.      l’existence d’un préjudice irréparable; et

c.       la balance des inconvénients favorise l’octroi du sursis.

 

[20]           Les trois critères doivent être satisfaits pour que cette Cour accorde le sursis demandé. Si un seul d’entre eux n’est pas rencontré, cette Cour ne peut pas accorder le sursis demandé.

 

 

            A.  Question sérieuse

[21]           L’agent d’ERAR devait évaluer que les faits nouveaux survenus depuis le rejet de la demande d’asile par la SPR (alinéa 113a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, S.C. 2001, c. 27 (LIPR)

 

[22]           Or, dans sa demande d’ERAR, monsieur Foinding a soumis les mêmes soumissions que celles déposées devant la SPR.

 

[23]           Il est reconnu qu’ un demandeur ne peut, suite à une décision négative de la SPR pour cause de crédibilité, comme en l’espèce, simplement tenter de fournir des éléments de preuve supplémentaire afin de corroborer des allégations déjà jugées non crédibles. Monsieur Foinding ne peut ainsi tenter de « réparer » le mal avec de la preuve supplémentaire qui aurait dû être présentée avant, soit devant la SPR (Bhallu, ci-dessus).

 

[24]           Comme l’indique l’agent d’ERAR dans ses motifs, le seul élément qui n’était pas devant la SPR est un avis de recherche de Douala au Cameroun, daté du 26 janvier 2006, soit antérieurement à la décision de la SPR du 21 décembre 2007.

 

[25]           La Cour se réfère à l’arrêt Raza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 385, 162 A.C.W.S. (3d) 1013, de la Cour d’appel fédérale confirmant que l’agent d’ERAR doit considérer toute la « nouvelle » preuve présentée, à moins qu’elle ne soit exclue pour l’un des motifs suivants : (1) crédibilité (2) pertinence (3) nouveauté (4) caractère substantiel (5) conditions légales explicites :

[12]      A PRRA application by a failed refugee claimant is not an appeal or reconsideration of the decision of the RPD to reject a claim for refugee protection. Nevertheless, it may require consideration of some or all of the same factual and legal issues as a claim for refugee protection. In such cases there is an obvious risk of wasteful and potentially abusive relitigation. The IRPA mitigates that risk by limiting the evidence that may be presented to the PRRA officer. The limitation is found in paragraph 113(a) of the IRPA, which reads as follows:

 

113. Il est disposé de la demande comme il suit :

 

 

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;

 

[…]

113. Consideration of an application for protection shall be as follows:

 

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;

 

 

[13]      As I read paragraph 113(a), it is based on the premise that a negative refugee determination by the RPD must be respected by the PRRA officer, unless there is new evidence of facts that might have affected the outcome of the RPD hearing if the evidence had been presented to the RPD. Paragraph 113(a) asks a number of questions, some expressly and some by necessary implication, about the proposed new evidence. I summarize those questions as follows:

 

1.         Credibility: Is the evidence credible, considering its source and the circumstances in which it came into existence? If not, the evidence need not be considered.

 

2.         Relevance: Is the evidence relevant to the PRRA application, in the sense that it is capable of proving or disproving a fact that is relevant to the claim for protection? If not, the evidence need not be considered.

 

3.         Newness: Is the evidence new in the sense that it is capable of:

 

(a)        proving the current state of affairs in the country of removal or an event that occurred or a circumstance that arose after the hearing in the RPD, or

 

(b)        proving a fact that was unknown to the refugee claimant at the time of the RPD hearing, or

 

(c)        contradicting a finding of fact by the RPD (including a credibility finding)?

 

If not, the evidence need not be considered.

 

4.         Materiality: Is the evidence material, in the sense that the refugee claim probably would have succeeded if the evidence had been made available to the RPD? If not, the evidence need not be considered.

 

5.         Express statutory conditions:

 

(a)      If the evidence is capable of proving only an event that occurred or circumstances that arose prior to the RPD hearing, then has the applicant established either that the evidence was not reasonably available to him or her for presentation at the RPD hearing, or that he or she could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented the evidence at the RPD hearing? If not, the evidence need not be considered.

 

(b)        If the evidence is capable of proving an event that occurred or circumstances that arose after the RPD hearing, then the evidence must be considered (unless it is rejected because it is not credible, not relevant, not new or not material).

 

[14]      The first four questions, relating to credibility, relevance, newness and materiality, are necessarily implied from the purpose of paragraph 113(a) within the statutory scheme of the IRPA relating to refugee claims and pre removal risk assessments. The remaining questions are asked expressly by paragraph 113(a).

[15]      I do not suggest that the questions listed above must be asked in any particular order, or that in every case the PRRA officer must ask each question. What is important is that the PRRA officer must consider all evidence that is presented, unless it is excluded on one of the grounds stated in paragraph [13] above.

 

[16]      One of the arguments considered by Justice Mosley in this case is whether a document that came into existence after the RPD hearing is, for that reason alone, “new evidence”. He concluded that the newness of documentary evidence cannot be tested solely by the date on which the document was created. I agree. What is important is the event or circumstance sought to be proved by the documentary evidence.

 

[17]      Counsel for Mr. Raza and his family argued that the evidence sought to be presented in support of a PRRA application cannot be rejected solely on the basis that it “addresses the same risk issue” considered by the RPD. I agree. However, a PRRA officer may properly reject such evidence if it cannot prove that the relevant facts as of the date of the PRRA application are materially different from the facts as found by the RPD.

 

(Également, Mujib c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1027, 169 A.C.W.S. (3d) 850).

 

[26]           Il est clair que selon l’arrêt Raza, le peu d’importance accordée à la date du document en cause vise plutôt les éléments de preuve datés postérieurement à la décision de la SPR. Évidemment, lorsque le document porte une date antérieure à la décision de la SPR, il vise nécessairement un événement ou une circonstance précédant l’audition de la demande d’asile. Dans ce cas, des explications de la part de monsieur Foinding s’imposent.

 

[27]           En l’espèce, l’agent d’ERAR a considéré cet avis de recherche, daté antérieurement à la décision de la SPR, mais il l’a exclu à titre de nouvelle preuve au sens de l’article 113a) en vertu du point 5 a) établi dans l’arrêt Raza, c’est-à-dire que monsieur Foinding n’a pas expliqué pourquoi cette preuve n’était pas accessible pour être présentée devant la SPR ou pourquoi il n’était pas raisonnable de s’attendre à ce que cette preuve soit présentée devant la SPR. Ce qui est tout à fait conforme à la jurisprudence.

 

[28]           À cet égard, la Cour se réfère à un arrêt postérieur à l’arrêt Raza de la Cour d’appel fédérale. Dans l’affaire Abdollahzadeh Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 1310, 325 F.T.R. 226 aux paragraphes 16 et 26 à 28, l’agent d’ERAR a, comme en l’espèce, exclu certains éléments de preuve antérieurs à la décision de la SPR, du fait que la demanderesse n’avait pas démontré que les documents en question n’étaient pas alors normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’elle les ait présentés devant la SPR.

 

[29]           Dans la décision Bengabo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 186 à cet égard et directement applicable en l’espèce :

[22]      Quant à l’Avis d’évasion, il était raisonnable pour l’agent de ne lui donner aucune valeur probante. Dans l’arrêt Elezi, ci-dessus, le juge Yves de Montigny a énoncé que les éléments de preuve qui existaient avant une décision négative de la CISR requièrent une explication avant de pouvoir être admis dans une demande d'ERAR :

 

[26]      Je suis disposé à admettre que l’alinéa 113a) mentionne trois possibilités distinctes et que ces trois volets doivent être lus en tant que propositions disjonctives. Si l’emploi de la conjonction « ou » doit avoir un sens, alors les trois volets de l’alinéa 113a) doivent manifestement être considérés comme trois éventualités distinctes. Le premier volet concerne les éléments de preuve qui sont postérieures à la décision de la Commission, mais les deuxième et troisième volets concernent de toute évidence les éléments de preuve qui sont antérieures à sa décision. Seules les éléments de preuve qui existaient avant la décision défavorable de la Commission requièrent une explication avant de pouvoir être admises dans une demande d’ERAR. Quant aux éléments de preuve dont l’existence est postérieure à la décision de la Commission, elles ne requièrent aucune explication. Le simple fait qu’elles n’existaient pas à l’époque où la décision a été rendue suffit à établir qu’elles n’auraient pas pu être présentées plus tôt à la Commission.

 

[23]      L’agent a identifié « l'un d'entre [les deux documents soumis] » comme portant une date antérieure de la décision de la CISR (Décision à la p. 4). Si monsieur Bengabo estime que l’Avis d’évasion satisfit à la deuxième ou troisième catégorie d'éléments de preuve visés à l'alinéa 113a) de la LIPR, il lui appartient de fournir les explications. Il appartient à l’agent d'apprécier les explications à la lumière des circonstances du dossier. En l’espèce, il n’a aucune explication offerte par monsieur Bengabo. Il était donc loisible à l’agent de conclure que monsieur Bengabo n’a pas rempli son fardeau d’expliquer pourquoi l’Avis d’évasion n’était pas soumis à la CISR.

 

[30]           Dans l’affaire Selduz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 FC 361 aux paragraphes 15 à 17 et 21 à 24, il a été statué que lorsqu’une preuve antérieure à la décision de la SPR n’a pas été produite devant la SPR, et que l’agent d’ERAR n’est pas satisfait des explications du demandeur à cet égard, il doit en faire mention dans ses motifs.

 

[31]           En l’espèce, l’agent d’ERAR explique clairement dans ses motifs que monsieur Foinding n’a soumis aucune explication à savoir d’où provenait cette preuve et pourquoi elle n’avait pas été produite devant la SPR. Ainsi, l’agent d’ERAR a conclu que monsieur Foinding n’avait pas rencontré son fardeau de démontrer la raison pour laquelle cette preuve n’était pas disponible auparavant, conformément à l’article 113 de la LIPR et au point 5a) énoncé dans Raza (décision d’ERAR à la p. 32 du dossier du demandeur).

[32]           Aux fins du présent sursis, monsieur Foinding explique, au paragraphe 9 de son affidavit, les circonstances entourant le fait qu’il n’aurait pas produit cet élément de preuve devant la SPR. Toutefois, il n’allègue aucunement qu’il aurait fourni ces mêmes explications à l’agent d’ERAR. Au contraire, monsieur Foinding ne fait que prétendre ceci : « J’ai cru que l’agent d’ERAR avait compris que je fournissais ce document en ce moment parce que c’était impossible pour moi de l’obtenir plutôt ». Mais pourquoi???? (Affidavit du demandeur au par. 9). Par ailleurs, les soumissions au sein de l’ERAR sont une copie conforme du récit produit au sein de la SPR et il n’y appert aucune explication pour justifier la non-production de cet avis de recherche devant la SPR, et ce, malgré le fait que monsieur Foinding était déjà représenté par l’avocat au dossier.

 

[33]           Ainsi, tant selon les motifs de l’agent d’ERAR, l’affidavit de monsieur Foinding et les soumissions au sein de l’ERAR, il ressort clairement que monsieur Foinding n’a jamais soumis aucune explication à l’agent expliquant pourquoi il n’avait pas produit cet élément de preuve devant la SPR.

 

[34]           Concernant l’arrêt Elezi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 240, [2008] 1 R.C.F. 365, sur lequel monsieur Foinding fonde toute son argumentation au niveau de la question sérieuse, le juge Yves de Montigny précise que lorsqu’un élément de preuve est daté antérieurement à la décision de la SPR, comme en l’espèce, des explications du demandeur sont requises pour pouvoir admettre cet élément en preuve au sein de l’ERAR. Ce qui distingue l’arrêt Elezi du présent cas, c’est qu’il a été jugé, dans les circonstances particulières de ce cas, qu’il y avait des motifs excusant le fait que ces documents n’avaient pas été produits devant la SPR. De plus, on doit considérer que l’arrêt Elezi est antérieur à l’arrêt Raza, ci-dessus, de la Cour d’appel.

 

[35]           Ainsi, il est clair qu’en l’espèce, l’agent d’ERAR n’a pas ignoré cet élément de preuve au sein de l’ERAR mais il l’a valablement exclu en vertu des conditions légales explicites de l’alinéa 113a) et conformément au point 5a) établi par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Raza, ci-dessus. Considérant que cet élément de preuve était antérieur à la décision de la SPR et qu’aucune explication n’avait été fournie pour expliquer son absence devant la SPR, l’agent a raisonnablement conclu que cet élément ne constituait pas de la nouvelle preuve au sens de l’alinéa 113a) de la LIPR. Ainsi, l’agent d’ERAR n’avait pas à tenir compte de cet élément de preuve lors de l’évaluation ERAR de monsieur Foinding.

 

[36]           Selon le paragraphe 15 de l’arrêt Raza, il appert que tous les éléments de preuve présentés doivent être considérés, à moins qu’ils ne soient exclus pour l’un des motifs énoncés au paragraphe 13 de l’arrêt Raza. Ainsi, il est clair qu’un seul motif sur les cinq suffit pour exclure un élément, à titre de nouvelle preuve au sens de l’alinéa 113a).

 

[37]           Donc, en l’espèce, l’agent d’ERAR ayant exclu l’avis de recherche en vertu du motif 5a), il n’avait pas le devoir de se prononcer sur les quatre autres motifs.

[38]           Par ailleurs, il n’est pas exact de prétendre, comme le fait monsieur Foinding, que si cet avis de recherche avait été considéré par la SPR, la décision aurait probablement été différente. À cet égard, la Cour se réfère à l’argumentation du défendeur au paragraphe 21 de ses prétentions quant à la crédibilité, la valeur probante et la pertinence de ce document au sein du récit soumis devant la SPR et l’ERAR. Ainsi, bien que l’agent d’ERAR n’avait pas l’obligation d’évaluer les autres motifs permettant d’exclure cet élément de preuve, il appert qu’il aurait également pu rejeter cet élément en vertu du motif 1 établi dans Raza, soit la crédibilité, ou en vertu du motif 3, soit le caractère substantiel de cet élément.

 

[39]           Comme mentionné au sein du préjudice irréparable, ce seul document ne peut certainement pas anéantir les nombreux éléments précis de crédibilité notés par la SPR dans ses motifs.

 

[40]           En effet, la SPR a jugé monsieur Foinding non crédible en raison de contradictions, incohérences et omissions à l’égard des deux événements cruciaux au sein de son histoire, soit la visite des militaires à son école et son enlèvement par les services secrets. De plus, la SPR n’a pas accordé foi à l’implication politique de monsieur Foinding au sein du Cercle réuni puisqu’il était incapable de fournir le moindre détail à cet égard. De plus, la SPR a considéré le comportement de monsieur Foinding, qui a tardé à revendiquer pendant 27 mois après son arrivée au Canada, incompatible avec une crainte de persécution ou de menaces à la vie. Ainsi, il n’est aucunement démontré que ce document aurait pu changer l’issue de la décision de la SPR.

[41]           Pour toutes ces raisons, l’appréciation de l’agent vis-à-vis de cet avis de recherche est raisonnable et conforme à la jurisprudence de cette Cour.

 

[42]           Concernant la situation générale au Cameroun :

  • monsieur Foinding a omis de produire la preuve documentaire à laquelle il réfère au paragraphe 9 de ses prétentions écrites;
  • l’avis de recherche étant exclu de la preuve et son risque ayant été jugé non crédible par la SPR, monsieur Foinding n’établit aucunement le lien entre cette preuve générale sur le Cameroun et sa situation personnelle.

 

[43]           En l’espèce, monsieur Foinding n’a pas établi qu’il était permis de croire que la décision d’ERAR était déraisonnable. En conséquence, aucune question sérieuse n’a été soulevée.

 

B.  Préjudice irréparable

[44]           Au niveau du préjudice irréparable, la seule prétention de monsieur Foinding se situe au paragraphe 11 de son affidavit, alors qu’il allègue que l’avis de recherche démontre qu’il est recherché par la police dans son pays, et que de ce fait, il sera torturé et victime de traitement inhumain et dégradant.

 

[45]           À cet égard, monsieur Foinding n’a pas jugé bon de déposer cet avis de recherche pour soutenir son préjudice irréparable dans le cadre de la présente requête en sursis.

[46]           D’ailleurs, cette Cour doute de la pertinence et de la fiabilité de ce document soumis à l’appui de son argumentation soumise au sein du préjudice irréparable :

  • le nom de la mère sur l’avis de recherche ne correspond aucunement au nom de la mère de monsieur Foinding déclaré dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP) (page 10 du dossier du demandeur);
  • monsieur Foinding allègue que les événements à la base de cet avis de recherche se seraient déroulés en 2002-2003. Il est donc curieux que l’avis de recherche n’aurait été émis qu’en 2006;
  • ce document indique un numéro d’événement (CNI No 105 667 148) référant spécifiquement à la date du 8 décembre 2004 à Douala alors que monsieur Foinding était déjà au Canada depuis le 3 septembre 2004;
  • les infractions reprochées sont « incitation à la révolte, trouble à l’ordre public et destruction des biens », ce qui ne correspond aucunement aux soumissions devant la SPR et l’ERAR relativement au prétendu vol de documents dans le bureau de son père donnant suite à ses problèmes avec les services secrets de son pays;
  • ce document en soi ne permet aucunement d’établir que monsieur Foinding subira des traitements inhumains correspondant à un préjudice irréparable.

 

[47]           Ces différents points démontrent que ce document ne peut pas établir de préjudice irréparable, tel que tente de le faire monsieur Foinding.

 

[48]           Par ailleurs, le préjudice allégué par monsieur Foinding est constitué des mêmes faits présentés à la SPR, lesquels ont été jugés non crédibles. Ces mêmes faits ont également été révisés par la Cour fédérale, laquelle a rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision de la SPR.

 

[49]           Monsieur Foinding a aussi présenté ces mêmes faits à l’appui de sa demande d’ERAR. L'agent d’ERAR a aussi conclu, après avoir considéré l'analyse faite par la SPR, et après avoir procédé à sa propre analyse de la preuve soumise devant lui que monsieur Foinding n'avait pas démontré qu'il serait personnellement à risque au Cameroun.

 

[50]           Il est bien établi que les risques allégués tant devant la SPR que devant l’agent d’ERAR, tout jugés non crédibles et insatisfaisants, ne peuvent constituer un préjudice irréparable. À cet égard, la Cour se réfère aux arrêts suivants :

[18]      Le fait d'alléguer simplement que les personnes en cause subiront le préjudice allégué dans leurs demandes d'ERAR ne suffit pas pour les besoins du critère. Je tiens d'abord à faire remarquer que la grande majorité des personnes touchées ont bénéficié d'un certain nombre d'examens des risques. Avant les décisions relatives aux ERAR, les personnes touchées ont dans tous les cas été parties à des procédures antérieures en vertu de la LIPR [...] (La Cour souligne).

 

(Nalliah c. Canada (Solliciteur général), 2004 CF 1649, [2005] 3 R.C.F. 210).

[8]        [...] La jurisprudence de la Cour établit que lorsque le récit d'un demandeur est jugé non crédible, ce récit ne peut servir de base à une allégation de préjudice irréparable dans le cadre d'une demande de sursis [...] (La Cour souligne).

 

(Akyol, ci-dessus; également, Singh, ci-dessus).

 

[51]           Il est clair que les faits à la base de cet avis de recherche n’ont aucunement été crus par la SPR; donc, si l’on n’a pas accordé foi à l’implication politique de monsieur Foinding, à la visite des militaires, à son enlèvement et à toute son histoire, comment peut-on maintenant accorder foi au fait qu’il serait recherché pour des événements que l’on n’a pas crus?

 

[52]           Par conséquent, monsieur Foinding n’a pas réussi à démontrer l’existence d’un préjudice irréparable. Il incombe au demandeur d’asile dont la demande a été rejetée par la SPR de prouver que les conditions dans son pays ou ses circonstances ont changé depuis la décision de la SPR au point que ce demandeur, dont la SPR a conclu qu’il n’était pas exposé à un risque, y est maintenant exposé. Monsieur Foinding ne s’est pas acquitté de ce fardeau aux fins de la demande d’ERAR et il ne satisfait pas non plus au critère du préjudice irréparable (Cupid c.  Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 176, 155 A.C.W.S. (3d) 396 au par. 4).

 

[53]           Pour ce qui est de l’argumentation fondée sur la preuve documentaire générale sur le Cameroun:

  • cette preuve documentaire n’est pas produite au sein de la présente requête;
  • l’allégation de préjudice est directement basée sur cet avis de recherche que l’on ne peut pas considérer comme crédible; donc, monsieur Foinding ne démontre aucunement qu’il sera réellement arrêté à son arrivée dans son pays, et encore moins qu’il sera détenu par les autorités. Ainsi, monsieur Foinding n’a pas réussi à établir un lien entre la preuve générale sur le Cameroun et sa situation personnelle;
  • Au surplus, un avis de recherche n’équivaut pas en soi à une atteinte à la vie ou à la sécurité.

 

[54]           Pour toutes ces raisons, monsieur Foinding ne satisfait pas au critère du préjudice irréparable.

 

C.  Balance des inconvénients

[55]           La balance des inconvénients penche en faveur des défendeurs dans la mesure où monsieur Foinding n’a pas établi ni l’existence d’une question sérieuse, dans aucun des trois recours intentés, ni celle d’un préjudice irréparable (Morris c. M.C.I., IMM-301-97, 24 janvier 1997 (C.F.)

 

[56]           En outre, le paragraphe 48(2) de la LIPR impose aux défendeurs l’obligation d’exécuter une mesure de renvoi dès que les circonstances le permettent.

 

[57]           La Cour d’appel fédérale a confirmé que lors de l’étude de la balance des inconvénients, la notion d’intérêt public doit être prise en considération. Plus encore, elle a confirmé que le fait qu’un demandeur ait pu bénéficier de plusieurs recours qui lui sont tous défavorables depuis son arrivée au Canada pouvait être pris en considération dans l’appréciation de la balance des inconvénients (Selliah c.  Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 261, 132 A.C.W.S. (3d) 547 aux par. 21 et 22).

[58]           Par conséquent, la balance des inconvénients penche en faveur de l’intérêt public à ce que le processus d’immigration prévu à la LIPR suive son cours.

 

VI.  Conclusion

[59]           Compte tenu de tout ce qui précède, monsieur Foinding ne satisfait pas aux critères de la jurisprudence pour l’obtention d’un sursis judiciaire. La requête en sursis d’exécution est donc rejetée.

 


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE le rejet de la requête en sursis d’exécution.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2182-09

 

INTITULÉ :                                       ALLEN ROBIN GOINDING

                                                            c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

                                                            et LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa, Ontario

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 14 mai 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 14 mai 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Olivier Chi Nouako

Me Amir Kafshdaran

 

POUR LE DEMANDEUR

Me Patricia Deslauriers

(par téléconférence)

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

OLIVIER CHI NOUAKO, avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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