Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Cour fédérale

Federal Court

 

Date : 20090818

Dossier : T-737-08

Référence : 2009 CF 836

Montréal (Québec), le 18 août 2009

En présence de Me Richard Morneau, protonotaire

 

ENTRE :

EUROCOPTER

(société par actions simplifiée)

Plaintiff/Defendant
by Counterclaim

and

 

BELL HELICOPTER TEXTRON CANADA LIMITÉE

Defendant/Plaintiff
by Counterclaim

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               La Cour est saisie en l’espèce d’une requête par la demanderesse Eurocopter (ci-après Eurocopter) pour faire trancher des objections.

Contexte

[2]               Le contexte général dans lequel s’inscrit cette requête est essentiellement le suivant.

[3]               Le 9 mai 2008, Eurocopter a intenté une action en contrefaçon de son brevet canadien numéro 2,205,787 (ci-après le « brevet ‘787 ») contre la défenderesse Bell Helicopter Textron Canada Limitée (ci-après Bell Helicopter).

[4]               Le brevet ‘787 porte sur un train d’atterrissage pour hélicoptères et s’intitule « Train d’atterrissage à patins pour hélicoptères ».

[5]               Dans sa déclaration d’action, Eurocopter allègue, entre autres, que Bell Helicopter fabrique, distribue, utilise, importe, offre à la vente ou vend au Canada un hélicoptère appelé le Bell 429 (ci-après le Bell 429) muni d’un train d’atterrissage qui contrefait le brevet ‘787.

[6]               Par la suite, Bell Helicopter a déposé le ou vers le 28 juillet 2008 sa défense et demande reconventionnelle dans laquelle elle nie toute contrefaçon et soutient que le brevet ‘787 est invalide.

Analyse

I ‑        Questions à répondre et documents à produire lors d’un interrogatoire au           préalable :  Principes généraux applicables

[7]               Dans l'arrêt Reading & Bates Construction Co. and al v. Baker Energy Resources Corp. and al (1988), 24 C.P.R. (3rd) 66, le juge McNair, dans un rappel général en six points, définit dans un premier temps aux points 1 à 3 les paramètres qui font qu'une question ou un document est pertinent pour ensuite énoncer aux points 4 à 6 une série de circonstances ou d'exceptions qui font qu'à tout hasard, qu'en bout de course, une question n'a pas à être répondue ou un document n'a pas à être produit.

[8]               La Cour s'exprime comme suit en pages 70 à 72 :

1.   The test as to what documents are required to be produced is simply relevance. The test of relevance is not a matter for the exercise of the discretion. What documents parties are entitled to is a matter of law, not a matter of discretion. The principle for determining what document properly relates to the matters in issue is that it must be one which might reasonably be supposed to contain information which may directly or indirectly enable the party requiring production to advance his own case or to damage the case of his adversary, or which might fairly lead him to a train of inquiry that could have either of these consequences: Trigg v. MI Movers Int'l Transport Services Ltd. (1986), 13 C.P.C. (2d) 150 (Ont. H.C.); Canex Placer Ltd. v. A.-G. B.C. (1975), 63 D.L.R. (3d) 282, [1976] 1 W.W.R. 644 (B.C.S.C.); and Compagnie Financiere et Commerciale du Pacifique v. Peruvian Guano Co. (1882), 11 Q.B.D. 55 (C.A.).

2.   On an examination for discovery prior to the commencement of a reference that has been directed, the party being examined need only answer questions directed to the actual issues raised by the reference. Conversely, questions relating to information which has already been produced and questions which are too general or ask for an opinion or are outside the scope of the reference need not be answered by a witness: Algonquin Mercantile Corp. v. Dart Industries Canada Ltd. (1984), 82 C.P.R. (2d) 36 (F.C.T.D.); affirmed 1 C.P.R. (3d) 242 (F.C.A.).

3.   The propriety of any question on discovery must be determined on the basis of its relevance to the facts pleaded in the statement of claim as constituting the cause of action (...)

4.   The court should not compel answers to questions which, although they might be considered relevant, are not at all likely to advance in any way the questioning party's legal position: Canex Placer Ltd. v. A.-G. B.C., supra; and Smith, Kline & French Laboratories Ltd. v. A.-G. Can. (1982), 67 C.P.R. (2d) 103 at p. 108, 29 C.P.C. 117 (F.C.T.D.).

5.   Before compelling an answer to any question on an examination for discovery, the court must weigh the probability of the usefulness of the answer to the party seeking the information, with the time, trouble, expense and difficulty involved in obtaining it. Where on the one hand both the probative value and the usefulness of the answer to the examining party would appear to be, at the most, minimal and where, on the other hand, obtaining the answer would involve great difficulty and a considerable expenditure of time and effort to the party being examined, the court should not compel an answer. One must look at what is reasonable and fair under the circumstances: Smith, Kline & French Ltd. v. A.-G. Can., per Addy J. at p. 109.

6.   The ambit of questions on discovery must be restricted to unadmitted allegations of fact in the pleadings, and fishing expeditions by way of a vague, far-reaching or an irrelevant line of questioning are to be discouraged: Carnation Foods Co. Ltd. v. Amfac Foods Inc. (1982), 63 C.P.R. (2d) 203 (F.C.A.); and Beloit Canada Ltee/Ltd. v. Valmet Oy (1981), 60 C.P.R. (2d) 145 (F.C.T.D.).

[Je souligne.]

[9]               De plus, la liste d'exceptions aux points 2 et 4 à 6 de l'arrêt Reading & Bates ne se veut pas strictement, à mon avis, exhaustive.

[10]           Dans bien des situations, l'équilibrage auquel réfère la Cour dans Reading & Bates au point 5 s'imposera.

[11]           En effet, tel que mentionné dans l'arrêt Faulding Canada Inc. v. Pharmacia S.p.A. (1999), 3 C.P.R. (4th) 126, page 128 :

[...] the general tendency of the courts to grant broad discovery must be balanced against the tendency, particularly in industrial property cases, of parties to attempt to engage in fishing expeditions which should not be encouraged.

[12]           La règle 242 des Règles des Cours fédérales (les règles) contient un avertissement à cet effet. En effet, les alinéas 242(1)b) à d) des règles se lisent :

242. (1) A person may object to a question asked in an examination for discovery on the ground that


(…)

(b) the question is not relevant to any unadmitted allegation of fact in a pleading filed by the party being examined or by the examining party;


(c) the question is unreasonable or unnecessary; or

(d) it would be unduly onerous to require the person to make the inquiries referred to in rule 241.

242. (1) Une personne peut soulever une objection au sujet de toute question posée lors d’un interrogatoire préalable au motif que, selon le cas :

(…)

b) la question ne se rapporte pas à un fait allégué et non admis dans un acte de procédure déposé par la partie soumise à l’interrogatoire ou par la partie qui l’interroge;

c) la question est déraisonnable ou inutile;

d) il serait trop onéreux de se renseigner auprès d’une personne visée à la règle 241.

[13]           D'autre part, une partie ne peut être requise dans le cadre d'un interrogatoire au préalable de répondre à une question qui la force à exprimer une opinion, que ce soit une opinion d'expert, son interprétation d'un brevet ou ses croyances. Dans l'arrêt Philips Export B.V. v. Windmere Consumer Products Inc. (1986), 8 C.P.R. (3d) 505, il est dit ce qui suit à la page 508 :

Question 467, which must be read with Q. 466, asks for the belief of the plaintiff. In both the Smith, Kline & French case and in Sperry Corp. v. John Deere Ltd. et al. (1984), 82 C.P.R. (2d) 1, it is stated that opinion cannot be asked, as a rule, of a person being examined who is not an expert and that a party cannot be asked to express its position in terms of mental attitudes.

[Non souligné dans l'original.]

(Voir également l'arrêt Rivtow Straits Ltd. c. B.C. Marine Shipbuilders Ltd., [1977] 1 C.F. 735, page 736.)

[14]           Il demeure sous la requête à l’étude un nombre appréciable d’objections ou questions à trancher. Tel que requis par cette Cour, les parties ont produit un tableau conjoint qui reflète aux yeux de la Cour l’essentiel des motifs favorisant ou non une réponse à toute question à être adjugée.

[15]           Ainsi, la Cour a repris ce tableau et l’a intitulé le « Tableau relatif à la requête de la demanderesse ».

[16]           Après avoir considéré les dossiers de requêtes des parties et avoir écouté leurs procureurs et ayant en tête les principes jurisprudentiels pertinents, dont ceux cités plus avant ainsi que ceux soulevés par les parties, la Cour a noté au Tableau relatif à la requête de la demanderesse par un trait double («  ») dans la marge à l’égard de tout ou partie du raisonnement d’une partie pour chaque question à être adjugée si, en bout de course, cette question devait ou non être répondue. Le trait dans la marge se retrouve ainsi dans l’une ou l’autre des deux dernières colonnes du Tableau relatif à la requête de la demanderesse.

[17]           Ainsi la requête d’Eurocopter est accueillie en partie comme suit et Bell Helicopter devra donc répondre – le ou avant le 22 août 2009 – aux dix engagements pour lesquels Bell Helicopter s’est déjà engagée à répondre ainsi qu’aux questions listées au Tableau relatif à la requête de la demanderesse, sauf les questions retirées et sauf les questions suivantes :  3 à 6, 9, 10, 22, 25 à 29, 37 à 39, 44, 46, 53, 56, 57, 61, 64 à 67, 70 à 78, 80, 81, 97, 155 à 157.

[18]           La Cour considère ici qu’elle n’a pas à se prononcer en soi quant au deuxième remède prévu par Eurocopter à son avis de requête vu que la poursuite de l’interrogatoire de M. Gardner est déjà prévue et que son objectif est en principe ce qui est recherché par ce remède.

[19]           Par ailleurs, quant à la demande de Bell Helicopter contenue à son dossier de requête en réponse à l’effet que la Cour évite de se prononcer ici sur certaines questions, vu l’annonce d’une requête pour scission, la Cour a décidé de ne pas retenir cette possibilité et son succès possible dans le cadre de la détermination des questions ici à répondre.

[20]           Par ailleurs, quant à la demande de Bell Helicopter contenue à une lettre datée du 14 août 2009 et visant à restreindre le nombre de personnes par ailleurs présentes à l’interrogatoire de M. Gardner qui s’est tenu du 10 au 12 juin 2009, la Cour après avoir considéré cette lettre et les représentations orales des parties à cet égard n’entend pas réduire le nombre de telles personnes en vue de l’interrogatoire de M. Gardner qui doit se poursuivre les 25 et 26 août 2009, et ce, vu que la Cour n’est pas convaincue qu’un tel nombre de personnes a préjudicié l’exercice du 10 au 12 juin 2009 où qu’il va préjudicier l’exercice devant se tenir les 25 et 26 août 2009. De plus il ne s’agit pas ici de permettre à des tierces parties, comme ce fut le cas dans l’arrêt S & M Brands, Inc. c. Paul, 2003 C.F. 1035, de représenter une des parties à l’instance.

[21]           Enfin, vu qu’un nombre certain des questions recherchées par Eurocopter n’ont pas à être répondues et puisque l’on ne peut écarter que Bell Helicopter aurait possiblement déjà entrepris ses recherches pour les documents recherchés par Eurocopter, la Cour considère que Bell Helicopter peut répondre, le ou avant le 22 août 2009, aux questions ici ordonnées, et ce, malgré l’affidavit de M. Gardner daté du 13 août 2009 où il est indiqué qu’un nombre considérable d’heures serait requis pour retrouver les informations recherchées par les questions posées par Eurocopter.

[22]           Vu la longueur du Tableau relatif à la requête de la demanderesse, ce Tableau relatif à la requête de la demanderesse est réputé faire partie des présents motifs de l’ordonnance et ordonnance mais sera transmis sous pli séparé par le greffe aux procureurs des parties par courriel classé confidentiel.

[23]           Quant aux dépens sur la requête d’Eurocopter, après avoir révisé les représentations écrites et orales des parties sur le sujet, et après avoir pris en considération les règles 400(3)a), g) et i), et 400(4), je suis d’avis d’accorder à Eurocopter ses dépens sur sa requête, et ce, suivant le milieu de la colonne III du tarif B.

 

« Richard Morneau »

Protonotaire

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-737-08

 

INTITULÉ :                                       EUROCOPTER (société par actions simplifiée)

                                                            and

                                                            BELL HELICOPTER TEXTRON
                                                            CANADA LIMITÉE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               17 août 2009

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :  LE PROTONOTAIRE MORNEAU

 

DATE DES MOTIFS :                      18 août 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Julie Desrosiers

Chloé Latulippe

 

 

POUR LA DEMANDERESSE/

DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

Judith Robinson

Louis Gratton

 

POUR LA DÉFENDERESSE/

DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Fasken Martineau DuMoulin LLP

Montréal (Québec)

 

 

POUR LA DEMANDERESSE/

DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

Ogilvy Renault LLP

Montréal (Québec)

 

POUR LA DÉFENDERESSE/

DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.