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Date : 20090709

Dossier : IMM-133-09

Référence : 2009 CF 716

Toronto (Ontario), le 9 juillet 2009

En présence de madame la juge Heneghan

 

 

ENTRE :

ARAVINTHAN ARIYATHURAI

demandeur

 

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

 ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Aravinthan Ariyathurai (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision de l’agent d’examen des risques avant renvoi L. D’Alessandro (l’agent d’ERAR). Dans cette décision rendue le 26 novembre 2008, l’agent d’ERAR a conclu que le demandeur ne risquerait pas d’être persécuté, d’être soumis à la torture, de mourir ou de subir des traitements ou peines cruels et inusités s’il devait retourner dans son pays d’origine, le Sri Lanka.  

 

[2]               Le demandeur, un citoyen sri lankais âgé de 34 ans, vivait à Jaffna, dans le Nord du pays. Il a été forcé de quitter Jaffna en 1995, après que l’armée du Sri Lanka (l’ASL) ait pris contrôle de la région. Il a ensuite été contraint d’y retourner par les autorités en juillet 1997. Il a par la suite été arrêté et torturé par l’ASL.

 

[3]               Le demandeur a quitté Jaffna en décembre 2004 et est allé à Colombo, après avoir fait l’objet de tentatives d’extorsion de la part des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (les TLET). En janvier 2005, il a fui Colombo et est allé en Californie. Le 13 mars 2005, il est arrivé au Canada et a demandé l’asile en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

 

[4]               Dans une décision rendue le 13 juin 2008, la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté sa demande. Il a demandé un examen des risques avant renvoi, au motif qu’il était en danger au Sri Lanka en raison de son statut de Tamoul du Sri Lanka, affirmant qu’il craignait l’ASL, les TLET, les forces policières et les autres militants tamouls, ainsi que la possibilité d’être victime d’extorsion. Il a allégué ne pas pouvoir retourner ni au Nord du pays, parce que l’ASL ainsi que les forces paramilitaires se sont enquis à son sujet, ni à l’Est, parce que la région est débordée de Tamouls qui y ont été déplacés. Le demandeur a présenté de nouveaux éléments de preuve avec sa demande d’ERAR : le certificat de décès de son frère, divers documents attestant sa résidence et son emploi au Sri Lanka, une déclaration de sa femme qui témoignait de son arrestation au Sri Lanka, ainsi que différents articles de journaux variés et documents émanant du Sri Lanka qui faisaient état de la situation dans ce pays.

 

[5]               L’agent d’ERAR a conclu que les risques avancés par le demandeur étaient en bonne partie identiques à ceux qu’il avait présentés devant la Commission. Il a conclu que le demandeur n’avait pas établi un lien entre sa situation et celles décrites dans la preuve documentaire de façon à démontrer un risque personnalisé dans l’éventualité où il serait renvoyé au Sri Lanka.

 

[6]               La première question dont il faut traiter en l’espèce est celle de la norme de contrôle applicable. Les conclusions quant à l’existence d’un lien avec un motif prévu à la Convention sont des questions mixtes de fait et de droit révisables selon la norme de la décision raisonnable simpliciter : voir Jayesekara c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 211 F.T.R. 100. À la suite de l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, de la Cour suprême du Canada, cette norme est maintenant assimilée à la norme de la raisonnabilité.

 

[7]               Je suis convaincue, en me fondant sur le dossier dont je dispose, que l’agent d’ERAR a commis une erreur révisable en rejetant la demande de protection du demandeur, parce qu’il a tranché ainsi sans égard à la preuve qui lui était présentée. Cela signifie que la décision ne satisfait pas à la norme de la raisonnabilité.

 

[8]               Je conclus que l’agent d’ERAR a commis une erreur en ne reconnaissant pas que le demandeur fait partie d’un groupe social, soit celui des Tamouls qui vivaient dans le Nord du Sri Lanka. L’agent d’ERAR a pris note des observations du demandeur qu’il serait en danger au Sri Lanka en raison de ce statut, mais n’a pas traité de ces observations dans son analyse. Puisque l’agent n’a pas exprimé de doute au sujet de la crédibilité du demandeur, sa conclusion que le demandeur ne fait pas partie d’un groupe précis et identifiable d’individus qui risqueraient d’être persécutés en raison de leur appartenance à un groupe social ne satisfait pas à la norme de la raisonnabilité.

 

[9]               Une évaluation correcte de la preuve aurait conduit à la conclusion que le demandeur avait établi un fondement objectif à sa demande d’asile. L’agent d’ERAR a soit fait fi de la preuve, soit mal évalué celle-ci. Il s’ensuit que la décision doit faire l’objet d’une intervention judiciaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent d’ERAR est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. Il n’y a pas de question à certifier.

 

« E. Heneghan »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-133-09

 

INTITULÉ :                                       ARAVINTHAN ARIYATHURAI c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 juillet 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              La juge Heneghan

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 9 juillet 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Krassina Kostadinov

 

POUR LE DEMANDEUR

Nina Chandy

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Krassina Kostadinov

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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