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Cour fédérale

 

Federal Court


Date : 20090626

Dossier : T-1298-07

Référence : 2009 CF 669

Ottawa (Ontario), le 26 juin 2009

En présence de madame la juge Simpson

 

 

ENTRE :

MIRANDA ALUMINUM INC.

demanderesse

 

et

 

MIRANDA WINDOWS & DOORS INC.

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La présente affaire a trait à un différend entre Antonio Miranda (le père) et l’un de ses fils, Tony Miranda (le fils) relativement à l’utilisation de leur nom de famille en tant que marque de commerce. L’entreprise du père présente une demande pour que les inscriptions au registre de deux marques de commerce déposées de l’entreprise de son fils soient biffées, en application de l’article 57 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi).

 

LES PARTIES ET LEURS MARQUES DE COMMERCE

            La demanderesse

 

[2]               Miranda Aluminum Inc. (la demanderesse) est l’entreprise actuelle du père. Elle a été constituée en personne morale le 23 mars 2000, et le père allègue que depuis lors, elle a pour activités la vente et l’installation de produits en aluminium telles les fenêtres et les portes. Elle utilise à la fois la dénomination sociale et le nom commercial Miranda Direct. Ce dernier a été inscrit en tant que nom commercial le 5 janvier 2006. Il n’y a aucune preuve établissant quand le nom commercial a été utilisé pour la première fois.

 

[3]               La demanderesse n’a pas de marque de commerce déposée.

 

La défenderesse

 

[4]               Miranda Windows & Doors Inc. (la défenderesse) est l’entreprise actuelle du fils. Elle a été constituée en personne morale le 2 mars 2005 et, depuis lors, elle a pour activités la vente et l’installation de produits en aluminium.

 

[5]               Le 20 février 2006, la défenderesse a présenté des demandes pour l’enregistrement de deux marques de commerce. La première avait trait au nom Miranda (le mot servant de marque) et la seconde était un dessin‑marque qui montre le nom Miranda entouré d’une bordure représentant une maison avec un toit et une cheminée (le dessin‑marque). Les deux demandes d’enregistrement déclarent que la première utilisation des deux marques remonte au moins aussi loin qu’au 31 août 1991.

 

LA MARQUE DE COMMERCE 683,429

 

[6]               La marque de commerce ‘429 a trait au mot servant de marque. Elle a été enregistrée par Miranda Windows & Doors le 13 mars 2007, pour être utilisée en liaison avec des services décrits comme étant [traduction] « La conception et l’installation sur mesure de fenêtres, portes, vérandas jointes, solariums, bardages, soffites, bordures de toit, gouttières, terrasses, portes de jardin, rampes et rampes en aluminium; rénovations résidentielles. » La marque a été annoncée par voie de publicité le 11 octobre 2006.

 

LA MARQUE DE COMMERCE 683,558

 

[7]               La marque de commerce ‘558 a trait au dessin‑marque. Elle a été enregistrée par Miranda Windows & Doors le 14 mars 2007 pour être utilisée en liaison avec les services décrits ci‑dessus. Cette marque a été annoncée par voie de publicité le 15 novembre 2006.

 

[8]               L’identité du concepteur du dessin‑marque est en litige. Le père déclare qu’il l’a créé en 1995 avec son fils, qui à l’époque travaillait pour lui. Toutefois, il n’y a pas de preuve documentaire établissant que le fils était l’employé du père en 1995. En fait, l’inverse est vrai. Le père a travaillé pour le fils pendant plusieurs mois cette année‑là. Le fils de son côté déclare qu’en 1990, il a créé le dessin‑marque tout seul. Il a fourni des ébauches et des formulaires de commande d’impression étayant son allégation. Par conséquent, j’ai admis la preuve du fils et j’ai conclu qu’il a créé le dessin‑marque en 1990 sans l’aide de son père.

 

ANTÉCÉDENTS

 

[9]               Tant le père que le fils exploitaient des entreprises de vente et d’installation de produits en aluminium avant la constitution en personne morale de leurs entreprises actuelles. Les deux entreprises étaient des commerces de détail et leurs clients étaient principalement des membres de la communauté portugaise dans la région de Toronto.

 

[10]           Bien qu’aux yeux de la loi le nom du père soit Antonio Miranda, la preuve donne à penser que son fils fait souvent référence à lui comme étant « Tony ». Le père déclare que dans les affaires, on s’adressait à lui à la fois comme étant « Tony » et « Antonio ».

 

Le père

 

[11]           En 1976, le père a constitué en société l’entreprise 339231 Ontario Limited (l’entreprise à dénomination numérique). Selon le père, cette entreprise utilisait le nom commercial non déposé « Miranda Aluminum » dans ses activités. L’entreprise à dénomination numérique est devenue inactive lorsque le père a été emprisonné relativement à une déclaration de culpabilité pour trafic de cocaïne. Selon la preuve produite par le fils, le père a été déclaré coupable en novembre 1989 et son entreprise est devenue inactive en 1988. S’étant engagé lors de son contre‑interrogatoire à fournir les dates de son emprisonnement, le père s’y est refusé par la suite. En l’absence de sa collaboration, je tire l’inférence selon laquelle il était en détention préventive vers 1988 et que l’entreprise à dénomination numérique est devenue inactive à ce moment‑là.

 

[12]           Il ressort du rapport sur le profil de l’entreprise du ministère des Services gouvernementaux et des Services aux consommateurs de l’Ontario que le statut de société de l’entreprise à dénomination numérique a été annulé le 26 février 1990. À cette date, le père était encore en prison.

 

[13]           Après avoir obtenu la semi‑liberté en juillet ou septembre 1990, le père a travaillé pour le fils jusqu’en 1994 comme vendeur à commission, à temps plein. De 1994 jusqu’en 2000, le père a travaillé pour le fils, seulement de façon épisodique, en partie parce qu’il s’occupait aussi de l’exploitation de sa nouvelle entreprise. Il s’agissait de Miranda Home Improvements Ltd. et cette entreprise a été constituée en personne morale en 1994.

 

[14]           Trois ou quatre années plus tard (en 1997 ou 1998), le père a cédé l’entreprise Miranda Home Improvements Ltd. à son fils Edward. Edward l’a exploitée jusqu’en 2000. Par la suite, en 2007, l’entreprise a été dissoute en raison de son omission de produire des déclarations de revenus.

 

[15]           La démarche suivante du père a été de constituer en personne morale, le 23 mars 2000, son entreprise actuelle, Miranda Aluminum Inc. Il s’agit de la demanderesse décrite ci‑dessus dans les présents motifs.

 

[16]           Pendant une courte période en 2005 (de mars à novembre), le père a de nouveau travaillé comme vendeur pour le fils. Toutefois, la preuve ne permet pas d’établir s’il s’agissait d’un emploi à temps plein.

 

Le fils

 

[17]           La première entreprise du fils était dénommée T.M. Renovations Inc. (TMR). Il l’a constituée en personne morale le 11 mai 1989, à l’âge de seize ans. Le 2 novembre 1990, il a enregistré le nom commercial Miranda Aluminum and Vinyl Products comme étant une filiale de TMR.

 

[18]           Quinze années plus tard, le 17 juin 2004, TMR a été dissoute en application de l’article 240 de la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario, L.R.O. 1990, chap. B. 16 (LSAO). Toutefois, le fils n’était pas au courant de la dissolution de l’entreprise et la preuve relative à l’assurance de cette entreprise établit que le fils a continué à exploiter TMR et qu’il a continué à utiliser son nom commercial enregistré jusqu’à ce qu’il constitue son entreprise actuelle en personne morale, le 2 mars 2005. C’est la défenderesse dans la présente instance.

 

John Miranda

 

[19]           John Miranda est le frère du père et l’oncle du fils. Du début des années 1970 jusqu’en 1995, il a exploité des sociétés de vente en gros, et il utilisait deux dénominations sociales qui comprenaient son nom de famille. Il s’agissait de Miranda Aluminum Products Limited et de Miranda Aluminum Products Inc.

 

[20]           En 1995, John Miranda a changé la dénomination de sa première société pour une dénomination numérique, et, en 1999, il a changé le nom de sa deuxième société pour Miranda Vinyl Products Inc. Ces sociétés sont actuellement en exploitation.

 

[21]           Le 3 janvier 2008, John Miranda a cédé à TMR [traduction] « tout droit le nom MIRANDA qu’il pourrait avoir au titre d’une marque de commerce », pour son propre compte, et pour le compte de ses sociétés. La date de prise d’effet de la cession est le 21 novembre 1990.

 

Les QUESTIONS EN LITIGE ET ANALYSE

 

[22]           Dans ce contexte, les questions sont les suivantes :

1.      Les enregistrements de la défenderesse sont‑ils invalides parce qu’ils étaient constitués d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui était décédé dans les trente années précédentes?

2.      Les enregistrements sont‑ils invalides parce que la défenderesse n’était pas la personne admise à l’enregistrement étant donné l’utilisation antérieure des marques par le père en liaison avec la vente et l’installation de produits en aluminium?

3.      Les enregistrements de la défenderesse sont‑ils invalides parce qu’ils peuvent faussement suggérer un rapport avec un particulier vivant, en l’occurence le père?

4.      Les enregistrements de la défenderesse sont‑ils invalides parce qu’ils représentent faussement la date de la première utilisation du mot servant de marque et du dessin‑marque?

5.      Les enregistrements de la défenderesse sont‑ils invalides parce que le mot servant de marque et le dessin‑marque ne distinguent pas les marchandises de la défenderesse de celles du père et de John Miranda?

 

La première question :          L’alinéa 12(1)a) de la Loi – Mot n’étant principalement que le nom de famille

 

[23]           La demanderesse déclare que les enregistrements des marques de commerce de la défenderesse sont contraires à l’alinéa 12(1)a) de la Loi parce que Miranda n’est principalement que le nom de famille d’un particulier.

 

[24]           L’alinéa 12(1)a) est libellé de la façon suivante :

 

12. (1) Sous réserve de l’article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l’un ou l’autre des cas suivants :

 

12. (1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not

 

a) elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes;

(a) a word that is primarily merely the name or the surname of an individual who is living or has died within the preceding thirty years;

 

            Le mot servant de marque

 

[25]           En ce qui a trait au mot servant de marque, il n’est pas contesté que Miranda est un nom de famille. La question est de savoir s’il ne s’agit principalement que d’un nom de famille. Bien que Miranda soit un terme utilisé aux États‑Unis pour décrire les droits d’un accusé lorsqu’il est arrêté, je ne crois pas que cette acception soit très connue au Canada. Selon moi, le mot servant de marque ne serait pas enregistrable en application de l’alinéa 12(1)a). Toutefois, le paragraphe 12(2) traite du caractère distinctif acquis et il est libellé de la façon suivante :

 

12. (2) Une marque de commerce qui n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa (1)a) ou b) peut être enregistrée si elle a été employée au Canada par le requérant ou son prédécesseur en titre de façon à être devenue distinctive à la date de la production d’une demande d’enregistrement la concernant.

12. (2) A trade-mark that is not registrable by reason of paragraph (1)(a) or (b) is registrable if it has been so used in Canada by the applicant or his predecessor in title as to have become distinctive at the date of filing an application for its registration.

 

[26]           Le père soutient que la preuve de l’utilisation présentée par le fils n’est pas significative parce qu’une grande partie de cette preuve fait référence au fils en personne, et non pas à l’entreprise défenderesse qui est la propriétaire inscrite des marques de commerce. Le père déclare que, au 20 février 2006, lorsque les demandes d’enregistrement des marques de commerce ont été produites, les publicités de la défenderesse, les témoignages des consommateurs et la preuve de l’utilisation établissaient que les consommateurs associaient le mot servant de marque et le dessin‑marque seulement à [traduction] « Tony E. Miranda, en personne ». Le fils de son côté déclare que, si les consommateurs associent ses marchandises et ses services à sa personne, cela établit que les marques ont acquis une signification et un caractère distinctif et le fait que ces mêmes consommateurs font une réelle distinction entre les marchandises et les services de son entreprise et ceux des autres. Je suis d’accord avec la défenderesse, et j’ai donc conclu que le mot servant de marque avait acquis un caractère distinctif au 20 février 2006.

 

[27]           J’ai basé une telle conclusion sur : (i) la preuve établissant que la défenderesse a reçu le prix d’excellence 2006/2007 pour [traduction] « L’entreprise de rénovation résidentielle de l’année »; (ii) les photographies établissant l’utilisation prédominante du mot servant de marque et du dessin‑marque de la défenderesse dans sa salle d’exposition mobile, pour sa flotte de camions et de remorques, ses stands, ses bannières et son matériel de promotion lors d’activités communautaires; (iii) les deux publicités télévisées de la défenderesse diffusées en anglais qui font le lien entre le fils et la défenderesse. Je me suis aussi fondée sur trente témoignages de clients et d’autres personnes, qui établissent que le public fait un lien entre le mot servant de marque et le dessin‑marque et les produits et les services du fils et de son entreprise, Miranda Windows & Doors Inc.

 

Le dessin‑marque

 

[28]           Le dessin‑marque n’est pas exclu en application de l’alinéa 12(1)a) de la Loi parce que, selon moi, la bordure de la maison avec la cheminée sur le toit suffit pour étayer la conclusion selon laquelle le dessin‑marque n’est pas principalement qu’un nom de famille. Quoi qu’il en soit, les éléments de preuve cités ci‑dessus étayent aussi une conclusion de [traduction] « caractère distinctif acquis » pour le dessin‑marque à la date de production des demandes d’enregistrement des marques de commerce.

 

La deuxième question :         Le père était‑il le premier utilisateur d’une marque créant de la confusion?

 

[29]           Le père déclare que la première entreprise du fils, TMR, a perdu son droit de propriété sur le mot servant de marque et le dessin‑marque en 2004 lorsqu’elle a été dissoute. Je suis d’accord que conformément à l’article 244 de la LSAO, le mot servant de marque et le dessin‑marque reconnus en common law ont été confisqués au profit de la Couronne et dévolus à celle‑ci lors de la dissolution de TMR en juin 2004. Le père déclare qu’à cette date, il est devenu le premier utilisateur en vertu de la Loi, sur la base de son utilisation depuis 1976.

 

[30]           Le paragraphe 17(1) de la Loi est libellé de la façon suivante :

17. (1) Aucune demande d’enregistrement d’une marque de commerce qui a été annoncée selon l’article 37 ne peut être refusée, et aucun enregistrement d’une marque de commerce ne peut être radié, modifié ou tenu pour invalide, du fait qu’une personne autre que l’auteur de la demande d’enregistrement ou son prédécesseur en titre a antérieurement employé ou révélé une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion, sauf à la demande de cette autre personne ou de son successeur en titre, et il incombe à cette autre personne ou à son successeur d’établir qu’il n’avait pas abandonné cette marque de commerce ou ce nom commercial créant de la confusion, à la date de l’annonce de la demande du requérant.

 

17. (1) No application for registration of a trade-mark that has been advertised in accordance with section 37 shall be refused and no registration of a trade-mark shall be expunged or amended or held invalid on the ground of any previous use or making known of a confusing trade-mark or trade-name by a person other than the applicant for that registration or his predecessor in title, except at the instance of that other person or his successor in title, and the burden lies on that other person or his successor to establish that he had not abandoned the confusing trade-mark or trade-name at the date of advertisement of the applicant’s application.

 

 

[31]           En ce qui concerne la première utilisation, il est utile de commencer par un résumé de l’utilisation du nom Miranda par le père :

(a)                1976-1988 – Le père déclare que le nom Miranda était utilisé par son entreprise à dénomination numérique dans son nom commercial non déposé, Miranda Aluminum. Toutefois, il n’y a pas de preuve documentaire corroborante. Il n’y a ni dossier d’entreprise ni dossier financier ni publicité ni inscription aux pages jaunes. La seule preuve prétendue est une photo d’un camion avec une enseigne sur laquelle il était écrit « Miranda Aluminum ». Selon le père, le camion était utilisé dans les années 1970. Toutefois, la plaque d’immatriculation est datée de mars 1973, soit avant la constitution en personne morale de l’entreprise à dénomination numérique. Cela donne à penser qu’il s’agit du camion de John Miranda. Il était le seul membre de la famille Miranda à exercer des activités commerciales liées à l’aluminium en 1973, et, à l’époque, ses deux dénominations sociales commençaient par les mots Miranda Aluminum. J’ai donc conclu que la preuve présentée par le père selon laquelle le camion établissait son utilisation n’est pas crédible.

(b)               1988-1994 – Le nom Miranda a été abandonné par le père. Il était en prison et l’entreprise à dénomination numérique a été dissoute. Il a aussi travaillé pour son fils pendant cette période.

(c)                1994-1997/1998 – Le nom Miranda aurait été utilisé par le père relativement à l’entreprise Miranda Home Improvements Ltd., mais selon moi, il a abandonné ce nom lorsqu’il a cédé l’entreprise à son fils Edward. Quoi qu’il en soit, la seule soi‑disant preuve de l’utilisation avant la cession est basée sur une photo datée de 1996 sur laquelle on voit le père à côté d’un camion portant une enseigne sur laquelle, bien que partiellement cachée par des plantes, il est clairement écrit « Miranda Windows and Doors », et montre les chiffres 974 comme étant les trois derniers chiffres d’un numéro de téléphone. Il s’agit de la dénomination sociale du fils, et le numéro de téléphone du fils se termine par les chiffres 974. Par conséquent, j’admets la preuve du fils selon laquelle le camion qui apparaît sur la photo lui appartient, et encore une fois, je conclus que la preuve présentée par le père n’est pas crédible.

(d)               2000 à présent – La preuve présentée par le père de son utilisation du nom Miranda pendant cette période établit qu’il l’a utilisé d’une façon qui semble avoir eu pour but de faire croire aux consommateurs potentiels que l’entreprise de son fils était en réalité la sienne. La preuve est la suivante :

(i)      Sept bons de commande datés entre mai 2000 et septembre 2004, qui montent le dessin‑marque du fils modifié par le père pour inclure les mots Miranda Aluminum.

(ii)    Un écriteau de pelouse qui montre le dessin‑marque du fils, sans modification, suivi des mots « windows and doors » (fenêtres et portes) de telle sorte que l’ensemble paraît être le nom commercial du fils. Une centaine de ces écriteaux auraient été utilisés pendant la période allant de 1999 à aujourd’hui. Le numéro de téléphone du père apparaît au bas de l’enseigne.

(iii)    Le père déclare qu’il a distribué des milliers de dépliants publicitaires annuellement pendant cette période. Les dépliants publicitaires étaient apparemment imprimés avec différents en‑têtes : Miranda Aluminum Inc., Miranda Direct et le dessin‑marque. Le dépliant publicitaire « représentatif » dans la preuve présentée par le père porte l’en‑tête Miranda Direct Ltd. et il y est écrit en grosses lettres [traduction] « appelez Tony Miranda ». Il porte le numéro de téléphone du père. Comme Miranda Direct est seulement devenu le nom commercial déposé de la demanderesse le 5 janvier 2006, je suppose qu’en l’absence de preuve quant à son utilisation réelle, ce dépliant publicitaire n’a pas été utilisé avant 2006. Il vaut la peine de mentionner que les photos des fenêtres et des portes installées apparaissant dans le dépliant publicitaire sont identiques aux photos apparaissant dans le dépliant publicitaire du fils.

(iv)   Une autre version du dépliant publicitaire du père a été produite par le fils. Elle porte le dessin‑marque modifié en haut pour dire « Aluminum and Vinyl Products » (produits en aluminium et en vinyle), sous le nom Miranda. Il s’agit du nom commercial déposé par le fils pour TMR. Le dépliant porte aussi la mention [traduction] « appelez Tony Miranda », et il montre des photos de portes et de fenêtres installées apparaissant sur le dépliant publicitaire du fils. Le dépliant publicitaire porte bien le numéro de téléphone du père.

(v)    Le père a produit un DVD qui montre une publicité en portugais à la télévision. Aucune traduction n’a été fournie. La publicité avait été diffusée pendant la programmation portugaise, sur la chaîne de télévision OMNI à Toronto en 2006. Cette publicité montrait le père et un écriteau sur une pelouse où il était écrit Miranda Direct, Vinyl Windows and Doors. Elle comprenait aussi son numéro de téléphone et disait [traduction] « appelez Tony Miranda ». Le fils déclare que deux des fenêtres apparaissant dans la publicité étaient en fait les fruits de son travail, et j’accepte cette allégation. Selon le rapport de M. Julio Peters, le détective privé du fils, lorsque la publicité a été diffusée, il a appelé au numéro de téléphone indiqué, ce qui l’a conduit par la suite à une rencontre au cours de laquelle il a été avisé par le père que l’entreprise Miranda Windows du fils et l’entreprise Miranda Direct du père étaient en fait la même entreprise.

 

[32]           Selon moi, la preuve produite par le père n’établit pas l’utilisation antérieure du nom Miranda. La preuve de l’utilisation avant l’an 2000 n’est pas crédible et même si le nom Miranda était utilisé, il a été abandonné deux fois. En outre, entre 2000 et 2004, lorsque l’entreprise TMR a été dissoute, l’utilisation du nom Miranda par le père dans le dessin‑marque a été faite pour entraîner de la confusion chez les consommateurs. Il ne s’agit pas d’une utilisation antérieure qui donne le droit à la demanderesse au bénéfice du paragraphe 17(1) de la Loi.

 

La troisième question :          L’alinéa 9(1)k) de la Loi – Faussement suggérer un rapport avec le père

 

[33]           L’alinéa 9(1)k) est libellé de la façon suivante :

 

9. (1) Nul ne peut adopter à l’égard d’une entreprise, comme marque de commerce ou autrement, une marque composée de ce qui suit, ou dont la ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec ce qui

suit :

[…]

k) toute matière qui peut faussement suggérer un rapport avec un particulier vivant;

 

9. (1) No person shall adopt in connection with a business, as a trade-mark or otherwise, any mark consisting of, or so nearly resembling as to be likely to be mistaken for,

[…]

(k) any matter that may falsely suggest a connection with any living individual;

 

[34]           Le fils a adopté le nom Miranda en novembre 1990, lorsqu’il a obtenu l’enregistrement de Miranda Aluminum and Vinyl Products comme étant le nom commercial de TMR. À cette époque, le père travaillait pour le fils comme vendeur; le père n’avait plus d’activités commerciales depuis 1988; l’enregistrement de son entreprise à dénomination numérique avait été annulé. En outre, l’arrestation et l’emprisonnement du père avaient été rendus publics. Vu la situation, on ne peut pas dire que le fils a adopté le nom Miranda à un moment où le public aurait faussement fait un lien avec le père en liaison avec la vente et à l’installation de produits en aluminium.

 

La quatrième question :         Y‑a‑t‑il une fausse déclaration de première utilisation?

 

[35]           La défenderesse allègue que la première utilisation remonte au moins au 31 août 1991. Toutefois, la preuve documentaire la plus ancienne de l’utilisation est un bon de commande daté du 5 octobre 1991 à Mississauga.

 

[36]           La défenderesse se fonde sur la décision du juge Fred Gibson dans Unitel Communications Inc. c. Bell Canada, 61 C.P.R. (3d) 12, dans laquelle le juge a déclaré que deux marques de commerce étaient et avaient toujours été nulles et invalides parce que les déclarations relatives à l’utilisation étaient fausses. Dans cette affaire, les demandes d’enregistrement pour l’utilisation projetée des marques de commerce Carte d’appel et Calling Card avaient été présentées et les déclarations d’utilisation avaient par la suite été déposées. Toutefois, l’avocat de l’intimée avait admis que les déclarations étaient fausses et qu’en réalité les marques n’avaient jamais été utilisées.

 

[37]           Selon moi, cette décision ne s’applique pas en l’espèce. Dans la présente affaire, il n’y a pas de preuve donnant à penser que la déclaration de la défenderesse relative à la première utilisation est fausse. Selon l’affidavit du fils, TMR a utilisé la marque avant août 1991. Dans de telles circonstances, le fait que la preuve documentaire de première utilisation est datée de deux mois après la première utilisation déclarée dans les demandes d’enregistrement des marques de commerce n’est pas suffisant pour justifier la radiation des marques de commerce de la défenderesse.

 

La cinquième question :         Le caractère distinctif

 

[38]           L’alinéa 18(1)b) de la Loi dispose que l’enregistrement d’une marque de commerce est invalide si la marque n’est pas distinctive à l’époque où est entamée la procédure visant à contester la validité de l’enregistrement.

 

[39]           Le père a introduit sa demande de radiation du mot servant de marque et du dessin‑marque le 16 juillet 2007. À cette date, le père avait constitué Miranda Aluminum Inc. en personne morale (le 23 mars 2000), et, selon ses dires, il vendait des produits en aluminium en utilisant les noms Miranda Aluminum Inc. et Miranda Direct.

 

[40]           Le père doit me convaincre, selon la prépondérance de la preuve, que son utilisation ou l’utilisation par John Miranda, au 16 juillet 2007, était telle que le mot servant de marque et le dessin‑marque de la défenderesse avaient perdu le caractère distinctif qu’ils avaient eu jusqu’à cette date.

 

[41]           Pour ce qui est premièrement du père, la preuve de son utilisation est exposée ci‑dessus. Pour la plus grande partie, elle révèle que le père exploitait ses activités par l’utilisation de versions modifiées du dessin‑marque du fils. Dans de telles circonstances, il ne peut pas se fonder sur sa preuve de l’utilisation pour établir le manque de caractère distinctif.

 

[42]           Toutefois, en date de juillet 2007, le père avait aussi utilisé le dépliant publicitaire de Miranda Direct et avait diffusé une publicité sur la chaîne de télévision OMNI. Selon moi, (i) tant la preuve produite par le détective privé du fils relativement à avril 2000 (ii) que la preuve de Maria Valente, qui a présenté un affidavit dans lequel elle déclare que le père lui a dit en avril 2006 que Miranda Direct était la même entreprise que Miranda Windows and Doors, établissent que l’utilisation par le père du nom Miranda dès 2006 n’avait pas pour intention de présenter la demanderesse comme étant une entreprise distincte. Considérant ces faits, ainsi que la preuve claire du caractère distinctif du mot servant de marque et du dessin‑marque de la défenderesse, je ne suis pas convaincue que l’alinéa 18(1)b) de la Loi s’applique.

 

[43]           En outre, la preuve établit clairement que le mot servant de marque et le dessin‑marque de la défenderesse étaient couramment utilisés et bien connus quand la présente demande a été introduite.

 

[44]           L’allégation de la demanderesse quant au manque de caractère distinctif repose aussi sur la société de John Miranda. Toutefois, la société de John Miranda a toujours été productrice et vendeuse de produits en aluminium dans le commerce en gros. Par conséquent, j’ai conclu que son utilisation du nom Miranda est sans incidence sur le caractère distinctif du mot servant de marque et du dessin‑marque de la défenderesse, qui sont uniquement utilisés dans le commerce de détail.

 


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que, pour les motifs exposés ci‑dessus, la demande est rejetée avec dépens.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale, LL.M., M.A. Trad.jur.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                T‑1298‑07

 

INTITULÉ :                                               MIRANDA ALUMINUM INC.

                                                                    c.

MIRANDA WINDOWS & DOORS INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :                    les 24 et 25 NOVEMBRE 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                     LA JUGE SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :                             LE 26 JUIN 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jonathan Colombo

David Kozman

 

POUR LA DEMANDERESSE

Brian Isaac

Cheryl Ng

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Jonathan Colombo

Bereskin & Parr

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Brian Isaac

Smart & Biggar

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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