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Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court

 

Date : 20090611

Dossier : IMM‑5197‑08

Référence : 2009 CF 615

Ottawa (Ontario), le 11 juin 2009

En présence de monsieur le juge Shore

 

 

ENTRE :

CHERYL‑ANN ARLETTE LYNCH

alias ARLETTE LYNCH

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.  Introduction

[1]               L’agente d’immigration a examiné l’allégation de la demanderesse selon laquelle le refus de sa demande de permis de travail était inéquitable en ce qu’elle a été induite en erreur par le fait que les autorités du Québec avaient des critères différents de ceux énoncés dans l’article 112 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement) à l’égard des aides familiaux résidants.

 

[2]               L’agente d’immigration a indiqué qu’il était très clairement énoncé sur le « certificat d’acceptation du Québec à titre de travailleur temporaire » (CAQ) ce qui suit : « Le présent certificat n’est pas un document d’admission et ne saurait en aucun cas dispenser son titulaire des autorisations requises par le Gouvernement du Canada. »

 

II.  La procédure judiciaire

[3]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 4 novembre 2008 d’une agente d’immigration, laquelle a rejeté la demande de la demanderesse visant à déposer une demande de résidence permanente depuis le Canada pour des motifs d’ordre humanitaire.

 

III.  Les faits

[4]               La demanderesse, Mme Cheryl‑Ann Arlette Lynch (alias Arlette Lynch), est une citoyenne de Saint‑Vincent‑et‑les Grenadines. Elle est arrivée au Canada le 15 avril 2003, à titre de visiteuse. Elle avait le droit de demeurer au Canada jusqu’au 14 octobre 2003.

 

[5]               Mme Lynch a été autorisée à prolonger son statut de visiteuse à quelques reprises, jusqu’au 31 décembre 2006. À chaque fois que son statut de visiteuse était prolongé, on rappelait à Mme Lynch qu’il lui était interdit d’occuper un emploi au Canada.

 

[6]               Mme Lynch a obtenu un CAQ en avril 2004, en mars 2005 et en février 2006. La lettre envoyée à Mme Lynch qui accompagnait les certificats déclarait ce qui suit : « Nous vous signalons que notre Certificat d’acceptation du Québec (CAQ) ne vous autorise pas à travailler tant que vous n’aurez pas obtenu un permis de travail de Citoyenneté et Immigration Canada. »

 

[7]               Le 9 juillet 2004, la demande de permis de travail de Mme Lynch déposée depuis le Canada a été rejetée à Vegreville, parce qu’elle était inadmissible.

 

[8]               Le 5 juin 2006, la demande de permis de travail à titre d’aide familiale résidante de Mme Lynch a été rejetée au bureau des visas de Port of Spain à Trinité‑et‑Tobago, car elle ne respectait pas les exigences de l’article 112 du Règlement. Plus précisément, l’agente d’immigration désignée a conclu que Mme Lynch n’avait pas terminé avec succès un programme d’études d’un niveau équivalent à des études secondaires au Canada et qu’elle n’avait pas un an d’expérience dans un travail à temps plein au cours des trois années précédant la date de présentation de la demande de permis de travail.

 

[9]               Mme Lynch n’a pas présenté de demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision lui refusant un permis de travail. Elle a plutôt continué à travailler illégalement.

 

[10]           Le 31 janvier 2007, la demande de prolongation de la fiche de visiteuse de Mme Lynch a été rejetée.

 

[11]           Le 27 mars 2007, la demande de permis de séjour temporaire et de permis de travail de Mme Lynch a été rejetée.

 

[12]           Le 13 novembre 2007, Mme Lynch a présenté une demande de résidence permanente depuis le Canada pour des motifs d’ordre humanitaire.

 

IV.  Analyse

[13]           Mme Lynch a présenté à titre de pièce B jointe à son affidavit [traduction] « une copie des parties pertinentes du site Web du MICC et du Guide des procédures d’immigration portant sur les exigences du Programme concernant les aides familiaux résidants ».

 

[14]           Ces documents ne devraient pas être pris en compte, car ils n’ont pas été présentés à l’agente d’immigration qui a rendu la décision faisant l’objet du présent contrôle (Asafov c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1994), 48 A.C.W.S. (3d) 623, [1994] A.C.F. no 713 (QL); Wazid c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1415, 153 A.C.W.S. (3d) 687; Sidhu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 260, 324 F.T.R. 83).

 

[15]           Bien qu’il soit de toute évidence possible de s’appuyer sur les politiques de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) à l’occasion du contrôle judiciaire de la décision d’un agent d’immigration, on ne peut dire la même chose des politiques et des autres documents publiés par une province sur son site Web, à moins qu’ils n’aient été présentés au décideur.

 

La norme de contrôle

[16]           Contrairement à ce que fait valoir Mme Lynch aux paragraphes 19 à 21 de son mémoire, la norme de contrôle applicable en l’espèce est la décision raisonnable. En effet, les arguments de Mme Lynch ne soulèvent pas une erreur de droit, mais constituent plutôt une tentative de montrer que l’agente d’immigration n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière appropriée en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).

 

[17]           En conséquence, la Cour n’interviendra pour annuler la décision de l’agente d’immigration que si elle est déraisonnable en ce qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] R.C.S. 190; Doroshenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1139, [2008] A.C.F. no 1422 (QL)).

 

Les principes généraux

[18]           Un des principes fondamentaux de la LIPR veut que ceux qui souhaitent obtenir le statut de résident permanent au Canada doivent en faire la demande depuis l’étranger (article 11 de la LIPR; article 6 du Règlement; Espino c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 74, 308 F.T.R. 92; Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 11, [2009] A.C.F. no 4 (QL)).

 

[19]           L’article 25 de la LIPR confère au ministre le pouvoir d’autoriser des personnes à présenter leur demande de résidence permanente depuis le Canada. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle et discrétionnaire (Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, [2002] 4 C.F. 358 (C.A.), aux paragraphes 15 et 16).

 

[20]           Le critère que doit appliquer un agent d’immigration pour rendre une décision en vertu de l’article 25 de la LIPR est de déterminer si la personne qui demande une dispense subirait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si elle devait répondre aux exigences normales de la Loi. Dans la décision Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 10 Imm. L.R. (3d) 206, [2000] A.C.F. no 1906 (QL), le juge déclare ce qui suit :

[26]      Je reviens à l’observation que j’ai faite, à savoir que la preuve donne à entendre que les demandeurs s’intégreraient avec succès dans la collectivité canadienne. Malheureusement, tel n’est pas le critère. Si l’on appliquait ce critère, la procédure d’examen des demandes fondées sur des raisons d’ordre humanitaire deviendrait un mécanisme d’examen ex post facto l’emportant sur la procédure d’examen préalable prévue par la Loi sur l’immigration et par son règlement d’application. Cela encouragerait les gens à tenter leur chance et à revendiquer le statut de réfugié en croyant que s’ils peuvent rester au Canada suffisamment longtemps pour démontrer qu’ils sont le genre de gens que le Canada recherche, ils seront autorisés à rester. La procédure applicable aux demandes fondées sur des raisons d’ordre humanitaire n’est pas destinée à éliminer les difficultés; elle est destinée à accorder une réparation en cas de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives. […]

 

[21]           L’agente d’immigration a appliqué le bon critère et son appréciation de la preuve était raisonnable.

 

La décision de l’agente d’immigration était raisonnable

[22]           La décision de l’agente d’immigration était raisonnable. Elle a traité tous les motifs soulevés par Mme Lynch à l’appui de sa demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Qu’elle n’ait pas tiré la conclusion que Mme Lynch souhaitait ne signifie pas qu’elle n’a pas tenu compte de ses allégations.

 

L’information « trompeuse »

[23]           L’agente d’immigration a tenu compte de l’allégation de Mme Lynch selon laquelle le rejet de sa demande de permis de travail était inéquitable en ce qu’elle avait été induite en erreur par le fait que les autorités du Québec avaient des critères différents de ceux énoncés à l’article 112 du Règlement en ce qui a trait aux aides familiaux résidants.

 

[24]           L’agente d’immigration a indiqué qu’il était clairement énoncé sur le CAQ ce qui suit : « Le présent certificat n’est pas un document d’admission et ne saurait en aucun cas dispenser son titulaire des autorisations requises par le Gouvernement du Canada. »

 

[25]           L’agente d’immigration a conclu que Mme Lynch avait omis d’expliquer les raisons pour lesquelles il serait inhabituel, injustifié ou excessif de présenter une demande de résidence permanente depuis l’étranger.

 

[26]           Mme Lynch montre son désaccord avec la décision rendue par l’agente d’immigration. Elle répète que l’information fournie par les autorités du Québec était trompeuse, que son employeur et elle ont raisonnablement suivi les directives qu’ils ont reçues pendant trois ans, et qu’être mal informée par un organisme gouvernemental compétent constitue des difficultés inhabituelles et injustifiées lorsque cette conduite incite une personne à investir plusieurs années de sa vie et des sommes d’argent pour suivre une démarche qui est vouée à l’échec.

 

[27]           Aucun des arguments de Mme Lynch ne montre que l’agente d’immigration a commis une erreur qui justifierait l’intervention de la Cour.

 

[28]           Les arguments de Mme Lynch éloignent la Cour de la véritable question que devait examiner l’agente d’immigration.

 

[29]           La question n’était pas de savoir si être mal informé par les autorités du Québec constituait des difficultés inhabituelles et injustifiées. La question était plutôt de savoir si l’exigence de présenter une demande de résidence permanente depuis l’étranger causerait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives à Mme Lynch.

 

[30]           Quoi qu’il en soit, en supposant que Mme Lynch et son employeur aient été induits en erreur par les autorités du Québec, et qu’ils n’ont pas fait simplement preuve d’aveuglement volontaire, il s’agit d’une question entre la province et eux, et cela ne confère pas à Mme Lynch le droit au traitement de sa demande de résidence permanente depuis le Canada.

 

[31]           Mme Lynch et son employeur pourraient peut‑être se prévaloir de recours juridiques contre la province pour leurs pertes. Les autorités du Québec ont cependant prévenu Mme Lynch et son employeur qu’un permis de travail devait être obtenu auprès de CIC. Ceci aurait dû les inciter à prendre connaissance des exigences fédérales.

 

[32]           Si Mme Lynch et son employeur avaient accordé plus d’intérêt aux exigences fédérales, ils auraient aisément trouvé les exigences de l’article 112 du Règlement. Ils auraient également trouvé que les guides opérationnels publiés sur le site Web de CIC contiennent deux chapitres sur les aides familiaux (le chapitre OP 14 vise le traitement de la demande initiale de permis de travail dans la catégorie des aides familiaux et le chapitre IP 4 décrit le traitement du renouvellement ultérieur et de la délivrance des nouveaux permis de travail et de la demande de résidence permanente au Canada après avoir terminé deux années à titre d’aide familial). Le chapitre OP 14 indique clairement ce qui suit :

8.6 Requérants qui entendent se rendre au Québec

 

Aux termes de l’Accord Canada‑Québec, le Québec doit donner son consentement en vue de l’admission d’aides familiaux en qualité de travailleurs temporaires. Il faut donc obtenir un Certificat d’acceptation du Québec (CAQ) avant de délivrer un permis de travail. Le Ministère des Relations avec les citoyens et de l’Immigration (MRCI) exige, avant de délivrer un tel certificat, que l’employeur et l’employé signent un contrat de travail d’aide familiale.

 

8.6 Quebec‑bound applicants

 

 

Under the Canada‑Quebec Accord, Quebec’s consent is required in order to admit aides familiaux as temporary workers. Therefore a Certificat d’acceptation du Québec (CAQ) is required before issuing a work permit. The Ministère des Relations avec les citoyens et de l’Immigration (MRCI) issues a CAQ only after both the employer and employee have signed the aide familiale work contract.

 

Si un requérant obtient un CAQ, mais ne satisfait pas aux exigences du gouvernement fédéral, ce sont les dispositions réglementaires fédérales qui priment. Il faut refuser les demandes de ces requérants. La délivrance d’un CAQ aux termes du Programme des aides familiaux du gouvernement fédéral ne garantit pas automatiquement la délivrance d’un permis de travail.

 

When an applicant has obtained a CAQ but does not meet federal requirements, the federal Regulations take precedence. These applicants should be refused. Issuance of a CAQ under the federal Live‑in Caregiver Program does not automatically guarantee a work permit. (Emphasis added).

 

 

[33]           Mme Lynch n’a jamais été induite en erreur par les autorités canadiennes, mais, même si c’était le cas, cela ne lui accorde pas le droit au traitement de sa demande de résidence permanente depuis le Canada.

 

[34]           En ce qui a trait à l’allégation de Mme Lynch selon laquelle son employeur et elle ont raisonnablement suivi les directives qu’ils ont reçues pendant trois ans, elle est inexacte. Mme Lynch et son employeur ont tous deux été informés qu’un permis de travail était nécessaire et ils ont ignoré cette exigence.

 

L’allégation de violence conjugale

[35]           L’agente d’immigration a également tenu compte de l’allégation de Mme Lynch selon laquelle elle avait subi dans le passé de la violence de la part de son ancien ami de cœur. Dans deux paragraphes de ses observations à l’appui de sa demande de résidence permanente au Canada, Mme Lynch a déclaré qu’elle avait une relation avec un homme qui était violent. Elle a écrit que cette relation avait pris fin en 2002.

 

[36]           L’agente d’immigration a conclu que Mme Lynch n’avait pas expliqué comment cette situation l’empêcherait de présenter sa demande de résidence permanente à l’étranger.

 

[37]           Étant donné que Mme Lynch a elle‑même avoué avoir quitté son ami violent en 2002, et en l’absence d’allégation selon laquelle elle serait encore exposée à un risque, la décision de l’agente d’immigration était raisonnable.

 

[38]           On peut en dire autant concernant les allégations de Mme Lynch selon lesquelles son bébé est décédé le lendemain de sa naissance. De plus, comme l’a indiqué l’agente d’immigration, Mme Lynch n’a fourni aucun document pour prouver ses allégations.

 

[39]           Il ressort clairement de la jurisprudence qu’il incombait à Mme Lynch d’établir les faits sur lesquels sa demande de dispense était fondée (Owusu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, [2004] 2 R.C.F. 635, au paragraphe 8; Williams c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1474, 154 A.C.W.S. (3d) 689; Doroshenko, précitée; Samaroo c. Canada, 2007 CF 292, 156 A.C.W.S. (3d) 440; Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1292, 152 A.C.W.S. (3d) 699; Wazid, précitée).

 

L’incidence du départ de la demanderesse sur son employeur et les enfants de son employeur, les liens attachant la demanderesse à ses parents au Canada, l’incidence du départ de la demanderesse sur les membres de sa famille à Saint‑Vincent et l’établissement de la demanderesse au Canada du point de vue social et économique

 

[40]           Au paragraphe 27 de son mémoire, Mme Lynch soutient que l’agente d’immigration a minimisé les difficultés auxquelles elle serait exposée si elle devait présenter sa demande de l’extérieur du Canada.

 

[41]           Mme Lynch invite la Cour à remplacer l’appréciation de la preuve de l’agente d’immigration par la sienne et à tirer une conclusion différente. Ce n’est pas le rôle de la cour à l’occasion d’un contrôle judiciaire (Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1292, 152 A.C.W.S. (3d) 699, au paragraphe 25; Choudhary c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 412, 166 A.C.W.S. (3d) 1124, au paragraphe 23; Samaroo, précitée, au paragraphe 17; Williams, précitée, au paragraphe 12).

 

[42]           La lecture des notes de l’agente d’immigration indique qu’elle a tenu compte de tous les motifs présentés par Mme Lynch à l’appui de la présentation de sa demande de résidence permanente depuis le Canada. Elle n’a pas fait abstraction de l’incidence que pourrait avoir le départ du Canada sur Mme Lynch et d’autres personnes. Toutefois, elle a conclu que cela ne constituait pas des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives.

 

[43]           Selon la jurisprudence, le niveau d’établissement au Canada n’est pas déterminant à l’égard d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. De même, les difficultés inhérentes à l’obligation de partir après avoir passé plusieurs années au Canada ne sont habituellement pas suffisantes pour justifier une dispense. Encore une fois, l’article 25 de la LIPR est destiné à offrir une dispense exceptionnelle en présence de difficultés inhabituelles, injustifiées et excessives (Singh, précitée, aux paragraphes 51 et 52; Wazid, précitée, aux paragraphes 14 et 16; Monteiro c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1322, 166 A.C.W.S. (3d) 556, aux paragraphes 18 à 20; Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 368, 167 A.C.W.S. (3d) 161, au paragraphe 2; Souici c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 66, 308 F.T.R. 111, aux paragraphes 9 et 10 et 36 à 40).

 

[44]           Comme l’énonce le juge James Russell dans Pashulya c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1275, 275 F.T.R. 143 :

[43]      Un demandeur doit satisfaire à un critère élevé lorsqu’il demande d’être exempté de l’application du paragraphe 11(1) de la LIPR. La Cour a à maintes reprises affirmé que la raison d’être du processus CH était non pas d’éliminer les difficultés inhérentes au départ d’une personne qui a séjourné pendant un certain temps au pays, mais de dispenser de cette exigence le demandeur qui subirait des difficultés « inhabituelles, injustes ou excessives » s’il devait quitter le Canada pour présenter sa demande de l’étranger de la façon habituelle. Le fait que le demandeur doive vendre une maison ou une voiture ou quitter un emploi ou sa famille n’entraîne pas nécessairement des difficultés indues ou excessives; il s’agit plutôt d’une conséquence du risque pris par le demandeur en restant au Canada sans avoir un droit d’établissement (Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 10 Imm. LR. (3d) 206, aux paragraphes 12, 17, 26 (C.F. 1re inst.); Mayburov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 183 F.T.R. 280, au paragraphe 7; Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 7, au paragraphe 14).

 

[45]           Mme Lynch a choisi de travailler illégalement au Canada. En conséquence, l’agente d’immigration avait le droit de conclure que son emploi et les liens l’attachant aux enfants de son employeur n’étaient pas hors de son contrôle. Comme l’énonce le juge Marc Nadon dans Tartchinska c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 185 F.T.R. 161, 96 A.C.W.S. (3d) 112 :

[21]      Chose plus importante, les directives ne laissent certainement pas entendre qu’un demandeur doit devenir autonome à tout prix et sans égard aux moyens. Par conséquent, je ne partage pas l’avis des demandeurs selon lequel [TRADUCTION] « il n’est pas pertinent de savoir si l’autonomie a été atteinte avec ou sans permis de travail ». À mon avis, la provenance de l’autonomie de l’intéressé est très pertinente; autrement, n’importe qui pourrait demander une dispense en se fondant sur l’autonomie, même si celle‑ci découle d’activités illégales. Je comprends qu’en l’espèce, les demandeurs ont travaillé honnêtement, quoique illégalement. Pourtant, les demandeurs ont sciemment tenté de contourner le système lorsqu’ils ont décidé de continuer à travailler sans autorisation. En effet, malgré le fait que les demandeurs ont été avisés à leur première entrevue qu’ils n’étaient pas autorisés à travailler et qu’ils devraient cesser de le faire, rien n’indiquait que les demandeurs avaient cessé de travailler au moment de la deuxième entrevue. En outre, leur avocat les avait prévenus des risques qu’ils couraient à travailler sans permis de travail ainsi que du prétendu avantage de démontrer l’autonomie (sans se soucier de sa provenance), et ils ont choisi de rester au Canada et d’y travailler illégalement.

 

[22]      Je crois comprendre que les demandeurs espéraient que le temps qu’ils passaient au Canada malgré la mesure d’interdiction de séjour contre eux pourrait leur être avantageux dans la mesure où ils pourraient démontrer qu’ils se sont bien adaptés à ce pays. Toutefois, à mon avis, les demandeurs ne peuvent ni ne doivent être « récompensés » pour avoir passé du temps au Canada alors qu’en fait, ils n’avait [sic] pas le droit de le faire. Dans le même ordre d’idée, on doit légalement chercher à être autonome, et un demandeur ne doit pas pouvoir invoquer ses actes illégaux pour revendiquer par la suite un avantage comme une dispense ministérielle. Enfin, je souligne l’évidence même : le but de la dispense, en l’espèce, était de soustraire les demandeurs à l’exigence de devoir présenter leur demande de statut depuis l’étranger, et non de les dispenser d’autres dispositions législatives, comme l’exigence d’un permis de travail valide.

[Non souligné dans l’original.]

 

(Voir aussi Rai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1338, [2008] A.C.F. no 1674 (QL)).

 

[46]           Mme Lynch a omis de démontrer que l’agente d’immigration avait fait abstraction de la preuve ou que son appréciation des faits était déraisonnable.

 

V.  Conclusion

[47]           Pour tous les motifs qui précèdent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, LL.B.

Réviseur

 


cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑5197‑08

 

Intitulé :                                       CHERYL‑ANN ARLETTE LYNCH

                                                            alias ARLETTE LYNCH c.

                                                            Le ministre de la citoyenneté

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 MontrÉal (Québec)

 

Date de l’audience :               le 3 juin 2009

 

Motifs du jugement

et jugements :                           le juge SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 11 juin 2009

 

 

 

Comparutions :

 

David Chalk

 

Pour la demanderesse

Sébastien Dasylva

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Blanshay Chalk

Avocats

Montréal (Québec)

 

Pour la demanderesse

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

Pour le défendeur

 

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