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Date : 20090612

Dossier : IMM‑4025‑08

Référence : 2009 CF 624

Ottawa (Ontario), le 12 juin 2009

En présence de monsieur le juge Frederick E. Gibson

 

Entre :

LEON GRIFFITHS

demandeur

et

 

Le ministre de la citoyenneté

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

Motifs de l’ordonnance et ordonnance

 

Introduction

[1]               Les présents motifs font suite à l’audition à Toronto, le 14 mai 2009, d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision, en date du 27 août 2008, rendue par un agent d’immigration (l’agent) qui a refusé au demandeur l’occasion, pour des motifs d’ordre humanitaire, de revenir de la Jamaïque au Canada pour présenter une demande de résidence permanente au Canada. Le demandeur a sollicité cette occasion en application du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés[1]. À la fin de l’audience, j’ai informé les avocats que je rejetterais la présente demande de contrôle judiciaire. L’avocat du demandeur a demandé la permission de présenter des observations écrites à l’égard de la certification d’une question afin d’autoriser l’appel de mes conclusion et décision. J’ai accédé à cette demande. Pour l’élaboration des présents motifs, j’ai non seulement tenu compte de la brève explication fournie à la fin de l’audience quant à ma conclusion, mais également des observations écrites détaillées concernant la certification présentées par l’avocat du demandeur, des observations écrites présentées en réponse par l’avocat du défendeur et de la réponse à ces observations écrites.

 

Contexte

[2]               Le demandeur est un citoyen de la Jamaïque, où il est né le 19 novembre 1970. Le demandeur est entré au Canada en novembre 1976, à l’âge de cinq ou six ans. Il a été renvoyé en Jamaïque en septembre 2006, près de 30 ans après son arrivée au Canada. Cela dit, une mesure d’expulsion a été prise contre le demandeur le 15 août 1994 à la suite de sa déclaration de culpabilité au Canada pour activité criminelle. Une décision défavorable relative à l’examen des risques avant renvoi a été rendue à l’encontre du demandeur le 7 février 2005.

 

[3]               La mère du demandeur, ses deux frères et sa sœur vivent au Canada et sont des citoyens canadiens. Le demandeur a trois enfants nés au Canada qui, à la date de la décision en cause, étaient âgés de 13 ans, 12 ans et sept ans, respectivement. Le demandeur n’a pas de parents connus à l’extérieur du Canada. À la date de son renvoi du Canada, le demandeur n’était pas marié.

 

[4]               Le 30 novembre 1992, le demandeur a été reconnu coupable au Canada de vol qualifié, de déguisement dans un dessein criminel et de possession d’une arme dangereuse. Une peine d’emprisonnement de deux ans moins un jour lui a été imposée. Tel qu’il est mentionné plus tôt, une mesure d’expulsion a donc été prononcée à l’encontre du demandeur. Il y a eu sursis de cette mesure d’expulsion sous conditions, notamment bonne conduite, mais le sursis a par la suite été révoqué. Le 18 novembre 1994, le demandeur a été reconnu coupable d’une accusation d’entrave à la justice. Les observations présentées à l’agent pour le compte du demandeur indiquent qu’il était accusé de complot en vue de faire du trafic et d’entrave à la justice en 1996. En janvier 2001, il a été acquitté de l’accusation de complot et a plaidé coupable à l’accusation d’entrave. Le demandeur a également été reconnu coupable d’une accusation de voies de fait en 1996.

 

[5]               Les notes consignées par l’agent au dossier à l’appui de la décision en cause indiquent ce qui suit : [traduction] « Aucune information concernant un pardon n’a été fournie. » Même si ce qui précède peut être jugé techniquement exact puisque l’agent n’était saisi d’aucune information concernant la délivrance ou le refus d’un pardon ou de pardons au demandeur, l’agent était quand même saisi d’une information écrite selon laquelle un pardon ou des pardons avaient été demandés au nom du demandeur.

 

[6]               Selon l’information dont l’agent était saisi, les activités criminelles du demandeur semblent avoir pris fin en 1996. À compter de cette année‑là, le demandeur a travaillé comme mécanicien automobile, membre du personnel de soutien sur les lieux pour une société de sécurité et expéditeur‑réceptionnaire pour une compagnie de déménagement. Entre 1993 et 2004, le demandeur a étudié au Collège Seneca dans les domaines de la comptabilité et de la finance, de la commercialisation de la mode et de la création de la mode.

 

[7]               Une lettre d’un psychiatre en Jamaïque, et dont l’agent était saisi, indique que le demandeur a connu de grandes difficultés à s’adapter à la vie en Jamaïque depuis son retour dans ce pays. La lettre indique que le demandeur souffre de dépression chronique en Jamaïque.

 

La décision faisant l’objet du contrôle et les motifs à l’appui

[8]               L’agent indique ce qui suit au début de sa décision et de ses motifs :

[traduction]

Il incombe à M. Griffiths de convaincre le décideur que sa situation personnelle est telle que, s’il ne se fait pas accorder la dispense demandée, les difficultés seraient inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

[9]               L’agent signale que le sursis à l’exécution de la mesure de renvoi qui a été accordé au demandeur à la suite de sa déclaration de culpabilité de novembre 1994 a été levé en décembre 1998 en raison d’accusations criminelles ultérieures et de la violation des conditions assortissant le sursis.

 

[10]           L’agent indique de plus que le demandeur a vécu au Canada pendant 30 ans, c’est‑à‑dire jusqu’au moment de son renvoi en Jamaïque en 2006 et qu’il n’avait que six ans lorsqu’il est arrivé au Canada. L’agent mentionne les antécédents de travail et le dossier scolaire du demandeur de 1996 jusqu’au moment de son renvoi.

 

[11]           L’agent examine le casier judiciaire du demandeur et réitère ce qui suit : [traduction] « Aucune information concernant un pardon n’a été fournie. » De plus, l’agent fait remarquer que les observations du demandeur indiquent qu’aucune accusation criminelle n’a été déposée contre lui depuis 1996 et conclut ce qui suit relativement à l’établissement du demandeur au Canada :

[traduction]

Je reconnais le temps que le demandeur a passé au Canada et le fait qu’il est arrivé à un jeune âge. Je reconnais également ses antécédents sur le marché du travail canadien et l’amélioration de ses compétences. Cependant, compte tenu de son établissement et de son interdiction de territoire pour grande criminalité et des autres déclarations de culpabilité distinctes pour des infractions criminelles, je ne suis pas convaincu qu’une dispense en vertu du paragraphe 25(1) est justifiée pour faciliter le traitement du demandeur depuis le Canada au motif de difficultés qui sont inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

[12]           L’agent examine ensuite les facteurs d’ordre humanitaire dans les antécédents du demandeur sous les rubriques [traduction] « Intérêt supérieur des enfants », « Facteurs liés à la famille » et « Défis du retour en Jamaïque ».

 

[13]           En ce qui a trait à l’intérêt supérieur des enfants du demandeur nés au Canada, l’agent mentionne leur âge, une lettre de la mère des deux enfants plus âgés indiquant que : [traduction] « […] les enfants ont besoin de leur père au Canada pour qu’il puisse les guider. » Il mentionne aussi une lettre datée de 2002 de la mère du plus jeune enfant qui contient ce qui suit : [traduction] « […] déclarant que l’expulsion du demandeur lui causerait un grand stress, ainsi qu’à sa fille. » L’agent indique qu’aucune [traduction] « lettre de recommandation à jour » de la part de la mère du plus jeune enfant ne lui a été présentée.

 

[14]           En ce qui a trait à l’intérêt supérieur des enfants du demandeur, l’agent conclut comme suit :

[traduction]

[…] Je reconnais que l’absence du demandeur du Canada est une source de tristesse pour ses enfants, bien que je ne sois pas convaincu qu’une dispense en vertu du paragraphe 25(1) soit justifiée pour faciliter le traitement de la demande de résidence permanente du demandeur au Canada en raison de difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

 

[15]           Sous la rubrique [traduction] « Facteurs liés à la famille », l’agent déclare simplement ce qui suit :

[traduction]

Le demandeur a émigré au Canada en 1976 avec sa mère, ses deux frères et sa sœur. Le demandeur a inscrit qu’il vivait avec sa mère jusqu’à son expulsion et utilise toujours l’adresse de celle‑ci comme adresse postale au Canada. Le père du demandeur est décédé lorsqu’il avait 13 ans, ce qui l’a grandement affecté. Des membres canadiens de sa famille ont fourni des lettres de recommandation et je reconnais leur lien de parenté.

 

 

[16]           Enfin, sous la rubrique [traduction] « Défis du retour en Jamaïque », l’agent signale que, la dernière fois que le demandeur a vécu en Jamaïque avant son renvoi dans ce pays, il avait six ans, qu’aucun membre de sa famille immédiate n’est en Jamaïque, qu’il allègue n’avoir aucun avenir en Jamaïque. L’agent fait aussi état de la lettre qui lui a été présentée de la part d’un psychiatre jamaïcain qui fait des observations sur les difficultés du demandeur à s’adapter au style de vie et à la culture de la Jamaïque et qui décrit ce que le psychiatre appelle la [traduction] « dépression chronique » du demandeur. À ce sujet, l’agent tire la conclusion suivante :

[traduction]

[…] Toutefois, le demandeur a trouvé du travail en Jamaïque, fournissant des services de menuiserie immédiatement après son retour là‑bas en septembre 2006.

 

Je reconnais la préoccupation du demandeur à propos de la violence et de la criminalité en Jamaïque et j’ai pris connaissance des articles de journaux qui ont été présentés pour examen. Je reconnais les préoccupations du demandeur concernant la vie en Jamaïque. Il ne m’a cependant pas convaincu que la criminalité et la violence en Jamaïque le toucheraient nécessairement personnellement. Les observations du demandeur présentées en 2006 indiquaient que le gouvernement jamaïcain imposait des restrictions aux ressortissants nationaux qui étaient expulsés dans ce pays et que ces personnes faisaient face à des entraves concernant les débouchés en Jamaïque. Toutefois, les observations du demandeur présentées en 2008 n’ont pas révélé qu’il faisait face à des restrictions et à des entraves imposées par le gouvernement après son retour dans ce pays. Le demandeur ne m’a pas convaincu que les défis du retour en Jamaïque constitueraient des difficultés [in]habituelles et injustifiées ou excessives. Il existe d’autres programmes d’immigration et mécanismes de recours que peut utiliser le demandeur s’il souhaite présenter une demande de retour au Canada.

                                                                                                    [Non souligné dans l’original.]

 

[17]           Dans les deux derniers paragraphes de ses notes, l’agent écrit ce qui suit :

[traduction]

J’ai examiné toute l’information concernant la présente demande dans son ensemble. Après avoir examiné et tenu compte des motifs que M. Griffiths a présentés pour justifier une dispense, je conclus qu’ils ne constituent pas des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives. En conséquence, je ne suis pas convaincu qu’il existe des motifs d’ordre humanitaire suffisants pour accueillir la présente demande de dispense.

 

La demande est rejetée.

 

 

[18]           Bien que les deux paragraphes qui précèdent ne soient pas distincts de la partie des notes de l’agent sous la rubrique [traduction] « Défis du retour en Jamaïque », je suis convaincu qu’ils constituent une conclusion générale et représentent une pondération de la conclusion de l’agent concernant l’interdiction de territoire du demandeur au Canada pour grande criminalité et les motifs d’ordre humanitaire favorables présentés par le demandeur ou en son nom.

 

Les questions en litige

[19]           Dans le mémoire des faits et du droit déposé au nom du demandeur, les questions soulevées dans la présente demande de contrôle judiciaire sont identifiées comme suit : premièrement, la norme de contrôle; deuxièmement, la question de savoir si l’agent a commis une erreur en considérant l’interdiction de territoire pour cause de criminalité comme un obstacle à l’accueil de la présente demande; troisièmement, la question de savoir si l’agent a commis une erreur en omettant d’être réceptif, attentif et sensible à la preuve dont il était saisi concernant l’intérêt supérieur des enfants du demandeur au Canada; quatrièmement, la question de savoir si l’agent a commis une erreur en omettant d’accorder l’importance voulue à la preuve dont il était saisi en ce qui a trait aux difficultés « excessives » que connaissait le demandeur en Jamaïque. Bien que cela ne soit pas expressément indiqué dans le mémoire du demandeur, dont la Cour est saisie, l’avocat a fait valoir avec insistance que l’agent a omis d’accorder l’importance voulue à la preuve dont il était saisi et provenant de la mère du demandeur, de la mère des deux enfants plus âgés du demandeur ainsi que d’une évaluation psychosociale détaillée et d’une opinion fondée sur la culture et l’ethnie présentée par M. Ralph Agard en date du 19 décembre 2003.

 

Analyse

            a) Norme de contrôle

[20]           Sauf en ce qui a trait aux questions de pur droit, il est maintenant bien établi que la norme de contrôle d’une décision comme celle en l’espèce, reflétant comme elle le fait une conclusion selon laquelle une dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire n’est pas justifiée en faveur du demandeur, est la « raisonnabilité »; cette norme commande une grande déférence à l’égard du décideur concernant son appréciation de la preuve dont il est saisi. Il est en outre bien établi que le caractère raisonnable tient à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Récemment, dans l’arrêt Khosa[2], la Cour suprême du Canada a précisé qu’il pouvait exister plus d’une issue raisonnable et que ce qui est important est que le processus et l’issue en cause relèvent de la justification, de la transparence et de

l’intelligibilité et que, si le critère qui précède est respecté, la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable.

 

b) Application de la norme de contrôle pertinente aux faits de la présente demande

[21]           Il est bien établi en droit que les demandes de résidence permanente au Canada doivent être présentées à l’étranger et que la permission de présenter une demande de résidence permanente depuis le Canada est une exception hautement discrétionnaire à la règle générale. Une telle permission peut être accordée uniquement à la suite d’une demande comme celle dont la Cour est saisie, en application du paragraphe 25(1) de la Loi. En général, les demandes fondées sur le paragraphe 25(1) sont présentées par des personnes qui sont au Canada depuis fort longtemps. Ce n’est pas le cas en l’espèce. Bien que le demandeur ait résidé au Canada pendant une très longue période, il a été renvoyé du Canada en raison de sa propre inconduite et il cherche maintenant à revenir, non au moyen d’une demande de visa acceptée, mais plutôt pour solliciter un tel visa depuis le Canada. Pour ce faire, il s’appuie sur sa longue période de résidence au Canada, au cours de la dernière portion de laquelle, insiste‑t‑il, sa conduite était irréprochable, le soutien que lui offre au Canada sa famille, en l’occurrence sa mère et ses frères et sœurs, de même que l’intérêt supérieur de ses trois enfants au Canada. Le soutien de sa famille au Canada ne fait pas de doute, de même que l’intérêt supérieur de ses enfants canadiens, compte tenu de la preuve dont l’agent était saisi et qui est maintenant présentée à la Cour. Cela dit, au moment de la décision faisant l’objet du contrôle, le pardon pour sa conduite criminelle au Canada posait encore problème et la question de savoir si le demandeur devrait obtenir un pardon pour sa conduite criminelle intéresse directement la question de savoir si le demandeur n’a pas eu dans les faits une conduite criminelle depuis sa dernière déclaration de culpabilité au Canada.

 

[22]           L’agent a résumé la conduite du demandeur pendant la longue période durant laquelle il a résidé au Canada, y compris sa conduite criminelle et ce qui pourrait sembler être sa bonne conduite depuis sa dernière déclaration de culpabilité. L’agent a tenu compte des antécédents de travail du demandeur depuis sa dernière activité criminelle connue, de ses études pour améliorer son instruction, de l’appui favorable des membres de sa famille et a évalué [traduction] « l’intérêt supérieur » des trois enfants du demandeur nés au Canada. L’agent a apprécié les aspects défavorables de la conduite du demandeur au Canada et, je suis convaincu, a pondéré ces considérations et les considérations favorables découlant de la conduite récente du demandeur au Canada, s’appuyant sur la preuve dont il était saisi, et en tenant compte de l’intérêt supérieur des enfants du demandeur au Canada. Il a tiré une conclusion fondée sur cette pondération qui, compte tenu des observations de l’avocat du demandeur qui m’ont été présentées, à la fois par écrit et oralement à l’audience, n’était pas les conclusions que l’avocat aurait tirées. Cela n’est pas le critère applicable. En effet, la question de savoir si elles étaient les conclusions que la Cour elle‑même aurait pu tirer n’est pas le critère. Le critère est plutôt de savoir s’il était raisonnablement loisible à l’agent de tirer ces conclusions, eu égard aux directives de la Cour suprême du Canada quant à la « raisonnabilité ».

 

[23]           Dans Ramotar[3], mon collègue le juge Kelen a cité notre collègue le juge Shore dans la décision Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration)[4], dans laquelle ce dernier a écrit ce qui suit :

Essentiellement, les décisions CH favorables sont réservées aux circonstances suffisamment disproportionnées ou injustes, dont la nature est telle qu’il convient d’autoriser les intéressés à solliciter le statut de résident permanent en sol canadien, plutôt que de retourner chez eux et de se joindre à une longue file d’attente dans laquelle attendent de nombreuses autres personnes [...]

 

Ce qui précède s’applique aux faits de la présente affaire sous réserve d’une seule modification. En l’espèce, le demandeur ne sollicite pas la permission de présenter une demande d’établissement en sol canadien plutôt que de retourner chez lui. Il est déjà plutôt [traduction] « chez lui », aussi ténu que soit son lien avec la Jamaïque.

 

[24]           En appliquant la norme de contrôle pertinente, soit celle de la raisonnabilité, je suis convaincu que l’agent n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle en arrivant à la décision faisant l’objet du contrôle.

 

Conclusion

[25]           Pour les motifs qui précèdent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

Certification d’une question

[26]           Tel qu’il est indiqué plus tôt dans les présents motifs, à la fin de l’audience sur la présente demande de contrôle judiciaire, j’ai informé les avocats que la demande serait rejetée et j’ai donné aux avocats l’occasion de présenter des observations écrites à la Cour concernant la certification d’une question.

 

[27]           L’avocat du demandeur a demandé avec insistance, en avançant des arguments écrits exhaustifs à l’appui, la certification des deux questions suivantes :

[traduction]

1.         Le paragraphe 25(1) de la LIPR permet‑il au représentant du ministre de passer outre à la criminalité et, si oui, quel est le processus en vertu duquel cela pourrait être fait?

 

2.         En appliquant le critère établi dans l’arrêt Dunsmuir, le fait que l’erreur de droit commise en l’espèce, c’est‑à‑dire la mauvaise application du paragraphe 25(1) de la LIPR, exige‑t‑il que la Cour n’intervienne pas même si celle‑ci est d’avis qu’il y a mauvaise application du paragraphe? Subsidiairement, quelle est la norme de contrôle applicable dans un cas où le paragraphe 25(1) de la LIPR est mal appliqué?

 

 

[28]           En répondant aux observations, l’avocat du défendeur a soutenu qu’aucune des questions proposées ne répond au critère de la certification. L’avocat du demandeur, sans l’autorisation de la Cour, et en présumant apparemment qu’il pouvait le faire de plein droit, a présenté des observations en réponse.

 

[29]           En règle générale, on s’attend à ce que les avocats qui comparaissent devant la Cour pour une demande de contrôle judiciaire dans une affaire d’immigration où la certification d’une question est une condition préalable à un droit d’appel comparaissent devant la Cour prêts à discuter de la certification d’une question. J’estime que cela est particulièrement pertinent lorsque la Cour, comme en l’espèce, a informé les avocats par de brefs motifs, et à la fin de l’audience, de la conclusion de la Cour quant à l’issue appropriée de la demande de contrôle judiciaire.

 

[30]           Lorsqu’on demande à la Cour, à la fin d’une audience, de fournir l’occasion de présenter des observations écrites, je suis convaincu qu’il relève du pouvoir discrétionnaire exclusif de la Cour d’acquiescer ou non à cette demande. Je suis également convaincu qu’il relève du pouvoir discrétionnaire exclusif de la Cour, lorsqu’elle accorde l’occasion de présenter des observations écrites, de fournir un échéancier pour ces observations. Compte tenu des faits en l’espèce, l’avocat du demandeur et l’avocat du défendeur ont eu plus d’une semaine pour présenter des observations écrites. Il a été clairement indiqué aux avocats que ce délai visait à offrir une occasion raisonnable de présenter des observations pour le compte des deux parties. L’avocat du demandeur a signifié et présenté à la Cour ses observations uniquement l’après‑midi de la dernière journée prévue pour les observations. L’avocat du défendeur a demandé à la Cour une prorogation de délai pour répondre et celle‑ci lui a été accordée. Aucune demande n’a été présentée pour le compte du demandeur afin d’obtenir un délai de réponse.

 

[31]           Nonobstant ce qui précède, comme je l’ai mentionné plus haut, j’ai examiné les observations initiales déposées pour le compte du demandeur concernant la certification, les observations du défendeur présentées en réponse et les observations du demandeur présentées en réponse à ces dernières.

 

[32]           Je souscris aux observations présentées pour le compte du défendeur. Aucune des questions proposées ne répond au critère de la certification d’une question. À cet égard, je renvoie les avocats au récent arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Carrasco Varela c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration)[5] qui contient une analyse détaillée de la certification des questions en matière d’immigration.

 


 

ordonnance

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Frederick E. Gibson »

Juge suppléant

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


Cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑4025‑08

 

 

Intitulé :                                       LEON GRIFFITHS c.

                                                            Le ministre de la citoyenneté

                                                            et de l’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 14 mai 2009

 

 

Motifs de l’ordonnance

et ordonnance :                       le juge suppléant Gibson

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DE L’ORDONNANCE :             le 12 juin 2009

 

 

Comparutions :

 

Osborne G. Barnwell                                                                pour le demandeur

 

Martin Anderson                                                                       pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osborne G. Barnwell

Avocat

Toronto (Ontario)                                                                     pour le demandeur

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada                                           pour le demandeur

 



[1]               L.C. 2001, ch. 27.

[2]               2009 C.S.C. 12, au paragraphe 59.

[3]               2009 CF 362, le 9 avril 2009 (décision non citée devant la Cour).

[4]           [2008] A.C.F. no 470 (décision non citée devant la Cour).

[5]               2009 CAF 145, le 6 mai 2009.

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