Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Date : 20090513

Dossier : T-773-09

Référence : 2009 CF 499

Ottawa (Ontario), le 13 mai 2009

En présence de monsieur le juge Shore

 

DANS L’AFFAIRE DE la Loi de l’impôt sur le revenu,

 

-et-

 

DANS L’AFFAIRE DES cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu;

 

 

CONTRE :

 

Denise Cormier-Imbeault

509, rue Principale

Beresford (Nouveau-Brunswick)  E8K 1Y1

Intimée

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

I.  Introduction

 

[1]               Le paragraphe 225.2 (2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (ci-après la « LIR ») prévoit que :

Recouvrement compromis

 

 

225.2 (2) Malgré l'article 225.1, sur requête ex parte du ministre, le juge saisi autorise le ministre à prendre immédiatement des mesures visées aux alinéas 225.1(1)a) à g) à l'égard du montant d'une cotisation établie relativement à un contribuable, aux conditions qu'il estime raisonnables dans les circonstances, s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire que l'octroi à ce contribuable d'un délai pour payer le montant compromettrait le recouvrement de tout ou partie de ce montant

Authorization to proceed forthwith

 

225.2(2) Notwithstanding section 225.1, where, on ex parte application by the Minister, a judge is satisfied that there are reasonable grounds to believe that the collection of all or any part of an amount assessed in respect of a taxpayer would be jeopardized by a delay in the collection of that amount, the judge shall, on such terms as the judge considers reasonable in the circumstances, authorize the Minister to take forthwith any of the actions described in paragraphs 225.1(1)(a) to 225.1(1)(g) with respect to the amount

 

(Paragraphe 225.2(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), onglet D du dossier de requête).

 

[2]               Dans l’affaire Danielson c. Canada, la Cour fédérale a défini le critère à respecter lors de l’émission d’une autorisation en vertu du paragraphe 225.2 (2) de la LIR comme suit : 

(…) The test of « whether it may reasonably be   considered » is susceptible of being reasonably translated into the test of whether the evidence on balance of probability is sufficient to lead to the conclusion that it is more likely than not that collection would be jeopardised by delay.

 

(Danielson c. Deputy Attorney General of Canada and Minister of National Revenue, 7 F.T.R. (1986), 42, p. 43, paragraphe 7).

 

 

[3]               La Cour d’appel fédérale a précisé ce critère dans l’affaire Golbeck :

(…) The question was whether, on the basis of the material put before the Court, it appeared that the Minister had reasonable grounds for believing that the taxpayer would waste, liquidate or otherwise transfer his assets so as to become less able to pay the amount assessed and thereby jeopardizing the Minister’s debt. »

 

(The Queen c. Golbeck et al., 90 D.T.C. 6575, p. 6576).

[4]               Les décisions subséquentes de la Cour fédérale ont appliqué le critère élaboré dans les affaires Danielson et Golbeck et ce, malgré la modification apportée en 1988 au paragraphe 225.2(2) de la LIR (Minister of National Revenue c. Services M.L. Marengère, 2000 D.T.C. 6032).

 

[5]               Dans l’affaire 514659 B.C. Ltd., la Cour fédérale a clarifié le fardeau de preuve qui doit être satisfait :

J'interprète les mots « motifs raisonnables de croire » comme établissant une norme de preuve qui « sans être une prépondérance des probabilités, suggère néanmoins la croyance légitime à une possibilité sérieuse en raison de preuves dignes de foi » (voir paragraphe 28 de l'arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Qu, 2001 CAF 399 (CanLII), [2002] 3 C.F. 3 (C.A.)).

 

(Ministre du Revenu national c. 514659 B.C. Ltd., 2003 D.T.C. 5150).

 

[6]               En d’autres termes, la Cour autorise sur la base d’une preuve démontrant une croyance légitime en raison de preuves dignes de foi à une possibilité sérieuse que l’octroi d’un délai  au contribuable compromettra le recouvrement de la créance, soit un fardeau de preuve moindre que celui de la prépondérance de probabilités.

 

[7]               À cet égard, la jurisprudence a établi que la présence d’un ou plusieurs des facteurs suivants peut justifier l’émission d’une autorisation en vertu du paragraphe 225.2(2) de la LIR :

a)      lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire que le contribuable a agi frauduleusement;

b)      le contribuable procède à la liquidation ou au transfert de ses actifs;

c)      le contribuable élude ses obligations fiscales;

d)      le contribuable détient des actifs qui sont susceptibles de diminuer en valeur par l’effet du temps, de se détériorer ou d’être périssables;

e)      l’importance du montant de la créance par rapport aux revenus et aux dépenses.

 

II.  Analyse

[8]               Il est raisonnable de croire en l’instance que le recouvrement de la totalité ou d’une partie du montant total cotisé sera compromis par l’octroi d’un délai à l’intimée pour payer le montant de sa créance découlant des deux avis de cotisation établis le 13 mai 2009 avant l’émission d’une ordonnance, et ce, pour les motifs suivants : 

a)      Madame Denise Cormier-Imbeault (ci-après « Madame Imbeault ») est redevable envers l’Agence d’une dette fiscale de 406 532,70 $;

b)      Les seuls actifs connus de l’Agence de Madame Imbeault ayant une valeur de réalisation connus sont les sommes détenus dans un compte de banque totalisant 580 859,76$ en date du 24 mars 2009 et la moitié de la propriété inidivise de la résidence du 509, rue Principale, évaluée à 54 400,00 $;

c)      La somme de 580 859,76$ semble être un actif réalisable essentiel au paiement de la dette fiscale de Madame Imbeault;

d)      Le 24 mars 2009, Madame Noëlla Cormier, agente à la Caisse populaire de Beresford, a mentionné lors d’un entretien téléphonique que l’argent placé dans le compte bancaire peut faire l’objet de retrait immédiat;

e)      En fait, dans le passé, il y a eu plusieurs retraits d’effectués comme le démontre le tableau suivant :

Retraits effectués au compte 5902 depuis le 01 janvier 1999

Dates

Retraits

9 février 1999

7 200,00 $

31 août 1999

300,00 $

13 décembre 1999

3 200,00 $

17 décembre 1999

1 500,00 $

24 décembre 1999

400,00 $

30 décembre 1999

5 000,00 $

4 janvier 2000

3 300,00 $

31 octobre 2000

15 000,00 $

31 août 2001

20 000,00 $

TOTAL

55 900,00$

 

f)        À l’heure actuelle, à tout moment, selon la Caisse, Madame ou Monsieur Imbeault, peuvent retirer une partie ou la totalité de ces sommes;

g)      En effet, toujours selon la Caisse, même si la somme est constituée de dépôts à terme, Madame ou Monsieur Imbeault sont en mesure de retirer ces sommes en encourant des pénalités sur le revenu des intérêts générés par le capital;

h)      Le comportement antérieur de Monsieur Imbeault fait en sorte qu’il n’est pas digne de confiance :

1) il a plaidé coupable à des infractions d’avoir volontairement éludé ou tenté d’éluder le paiement d’un impôt établi en vertu de la LIR en vertu de l’alinéa 239(1)d) de la LIR et d’avoir volontairement éludé ou tenté d’éluder le paiement ou le versement de la taxe (TVH) qu’il aurait dû effectuer à Sa Majesté  en vertu de l’alinéa 327(1)c) de la LTA,

2) il a transféré la moitié indivise de sa propriété à sa conjointe au moment où il a su que l’Agence était en mesure d’entreprendre des mesures de recouvrement;

3) il a toujours caché l’existence du compte bancaire et de la somme de 580 859,76$ s’y trouvant à l’Agence.

i)        Il est urgent et impératif que l’Agence soit en mesure de saisir le compte bancaire puisque Monsieur Imbeault sait que l’Agence était au courant de l’existence du compte bancaire et de la somme d’argent s’y trouvant;

III.  Conclusion

[9]               Pour ces motifs, l’Agence est autorisée à prendre immédiatement toutes les mesures de recouvrement prévues aux alinéas 225.1(1) a) à g) de la LIR, ou l’une ou plusieurs d’entre elles, afin de percevoir ou de garantir le paiement des sommes dues par l’intimée car il existe des motifs raisonnables de croire que l’intimée dissipera, liquidera ou cédera autrement ses biens de manière à ne plus être en mesure de payer le montant total des cotisations, compromettant ainsi la créance de l’Agence.

 

[10]           Un délai de soixante-douze (72) heures est accordée avant que les fonctionnaires du greffe de cette Cour ne signifie l’ordonnance à être rendue à l’intimée.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE:

1.         la requérante à prendre immédiatement toutes les mesures de recouvrement prévues aux alinéas 225.1(1) a) à g) de la LIR, ou l’une ou plusieurs d’entre elles, afin de percevoir ou de garantir le paiement des sommes dues par l’intimée suite aux deux (2) avis de cotisation établis le 13 mai 2009 s’élevant à un montant total de 406 532,70 $;

2.         la requérante à signifier toute procédure à l’intimée, advenant l’impossibilité de signifier à personne, en lui signifiant dans une enveloppe cachetée, adressée à son attention, à être déposée dans la boîte aux lettres du domicile de l’intimée situé au 509, rue Principale à Beresford, dans la province du Nouveau-Brunswick;

3.         les fonctionnaires du greffe de cette Cour de ne pas signifier la présente ordonnance à l’intimée aux termes de l’obligation prévue à la règle 395 des Règles des Cours fédérales avant l’expiration d’un délai de soixante-douze (72) heures de l’émission de l’ordonnance;

4.         la requérante à signifier à l’intimée l’avis de cotisation établi le 13 mai 2009 en même temps que l’ordonnance à intervenir et de la façon susmentionnée, conformément au paragraphe 225.2(3) de la LIR;

LE TOUT avec dépens.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-773-09

 

INTITULÉ :                                       DANS L’AFFAIRE DE la Loi de l’impôt sur le revenu,

-et-

DANS L’AFFAIRE DES cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu;

c.

Denise Cormier-Imbeault

509, rue Principale

Beresford (Nouveau-Brunswick)  E8K 1Y1

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa, Ontario (par conférence téléphonique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 13 mai 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 13 mai 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Martin Lamoureux

POUR LE DEMANDEUR

Personne pour le demandeur

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR)

Personne pour le demandeur

 

POUR LEDÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.